DEVENIR PARENT·ES EN DEHORS DU CADRE DU COUPLE HÉTÉROSEXUEL, UN PARCOURS DE COMBATTANT·ES
Aujourd’hui en France, nombre de femmes et de personnes trans assignées femmes à la naissance sont confronté·es à des obstacles pour devenir parent·es, dès lors que leur projet d’enfant sort du cadre du couple hétérosexuel.
- La PMA n’est autorisée ni aux couples de femmes, ni aux femmes célibataires, et il en va de même pour les personnes trans assignées femmes à la naissance.
Le cas des hommes trans ayant modifié leur état civil est spécifique : s’ils sont en couple avec une femme cis, la PMA est alors autorisée au couple, mais seulement si c’est la femme cis qui porte l’enfant. Par contre, il n’est autorisé aux hommes trans de tomber enceints par PMA dans aucun pays à ce jour.
En dehors de ce cas, les personnes exclues de la PMA en France n’ont pour seule option que de se rendre dans des États européens proches leur ouvrant le droit à la PMA.
La plupart du temps, elles font le voyage vers l’Espagne, la Belgique ou les Pays-Bas, mais le Danemark, la Finlande, la Suède, le Portugal et le Royaume-Uni l’autorisent également. Ce procédé pose de nombreux problèmes, car il est très coûteux en temps et en argent pour les personnes qui entreprennent cette démarche. Les allers-retours fréquents, les journées de congé à poser sans dispositif légal le facilitant, les frais médicaux qui restent à la charge de la personne ou du couple, sont très lourds, d’autant que pour réussir, une PMA nécessite souvent plusieurs tentatives.
- L’adoption est ouverte, depuis le 17 mai 2013, aux couples de même sexe, mais elle nécessite que les parent·es soient marié·es. L’adoption est également possible pour des personnes seules, quel que soit leur genre. Cependant, dans les deux cas, des discriminations importantes à l’adoption existent : quand il s’agit d’adopter un enfant qui n’est pas déjà celui de son ou sa conjoint·e, les couples hétérosexuels sont systématiquement favorisés par rapport aux autres configurations familiales. Le Défenseur des droits a d’ailleurs dénoncé officiellement ces pratiques en 2020, après saisine par plusieurs associations et personnes ayant constaté ces pratiques.
Historique d’un combat et de promesses présidentielles …
LA PMA, DE 1994 À AUJOURD’HUI
La PMA a été mise en place en France en 1994. Elle est régie depuis 2004 par la loi de bioéthique (loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique) et a été révisée en 2011 (Loi de bioéthique n°2011-814 du 7 juillet 2011).
UNE PROMESSE NON TENUE D’HOLLANDE
Alors qu’il était candidat, Hollande s’était engagé pour l’égal accès à la PMA pour tous les couples. Une fois Président, les opposant·es au mariage pour tous l’ont finalement fait reculer : il n’a pas présenté la loi sur la famille et a simplement demandé son avis au Comité national consultatif d’éthique. Ainsi, bien que la promulgation de la loi du 17 mai 2013 ouvre le mariage aux couples de même sexe, ouvre l’adoption aux couples homosexuels et reconnaisse qu’un enfant peut avoir deux parents de même sexe, le recours à la PMA reste impossible pour ces couples.
ET MAINTENANT, MACRON ?
Cinq ans plus tard, Macron affirme, aussi bien sur son site de campagne (chapitre « famille et société »), qu’en interview, être « favorable » à l’extension de la PMA : « Le fait, aujourd’hui, que la PMA ne soit pas ouverte aux femmes seules, aux couples de femmes de même sexe, c’est une discrimination qui ne se justifie pas, ni sur le plan éthique, philosophique, ni sur le plan politique. Je pense que, c’est mon opinion personnelle, c’est en effet de l’ouvrir et de l’étendre aux femmes, aux couples de même sexe » (Causette, 02/17).
En septembre 2018, un premier pas était franchi puisque le Comité national consultatif d’éthique se prononçait pour l’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules. C’est le début d’une navette entre Assemblée nationale et Sénat.
PREMIÈRE LECTURE
En septembre 2019, l’extension de la PMA est adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture. A ce moment-là, le projet de loi permettait l’accès aux femmes seules et lesbiennes, et assuraient le remboursement par la sécurité sociale. Toutefois, la loi était déjà transphobe, puisqu’elle excluait les hommes trans. Le sénat, lui, en février 2020, modifie les contours de ce projet de loi, puisqu’il en exclut les femmes seules, et recule sur la prise en charge par la sécurité sociale : le remboursement est désormais réservé à des PMA pour critères médicaux, ce qui en exclut les couples de femmes. Composé à 70% d’hommes dont la moyenne d’âge est de 61 ans, le Sénat décide ainsi, à la place des femmes, ce qu’elles peuvent faire de leur corps.
DEUXIÈME LECTURE
En juillet 2020, l’Assemblée nationale approuve à nouveau le projet. Cela pourrait être réjouissant, mais c’est un recul puisque ni les femmes célibataires, ni les hommes trans, ni les lesbiennes précaires ne pourront accéder à la PMA. En février 2021, alors que les campagnes présidentielles approchent et que la droite gagne du terrain, le Sénat adopte le projet de loi de bioéthique, mais sans l’extension de la PMA puisqu’il en exclut les femmes célibataires. Finalement c’est une PMA au rabais qui est proposée.
QUELLE EST LA PROCHAINE ÉTAPE ?
Réunis en commission mixte paritaire le 17 février 2021, les députés et les sénateur-ice-s ne se sont pas mis d’accord sur une version commune du projet de loi de bioéthique. Le projet de loi passera alors en troisième lecture du 19 au 21 mai 2021 au Sénat, puis le 20 juin 2021 à l’Assemblée nationale, qui aura le dernier mot.
QUELLE RIPOSTE ?
Le 31 janvier 2021, alors que la Manif pour tous avait appelé à se réunir devant le ministère de la santé pour manifester contre une « PMA sans père », des associations et groupes politiques LGBTQIA+ ont organisé un contre-rassemblement place de la République à Paris, qui s’est transformé en manifestation jusqu’à l’Hôtel de ville. Les participant-e-s revendiquent une réelle PMA pour toutes, non transphobe, et remboursée. A nouveau, le 21 février 2021 une manifestation devant l’Assemblée nationale contre une PMA « au rabais » est organisée. Le dimanche 25 avril, la veille de la journée de la visibilité lesbienne, la Coordination des collages lesbiens a organisé une marche lesbienne à Paris (la deuxième en France, depuis 1979 !). Ce nouveau rendez-vous, ouvert par un cortège en non-mixité, suivi d’un cortège mixte, a été l’occasion de revendiquer, une fois encore, une PMA pour toutes et tous, sans conditions.
Nos revendications
La PMA pour toutes est un enjeu important pour la lutte contre les discriminations, notamment pour les femmes lesbiennes et les hommes trans. Qu’iels soient seul·es ou en couple, iels doivent avoir accès à la parentalité comme les couples hétérosexuels.
Aujourd’hui, la PMA est un vrai parcours de la combattante qui prend du temps, de l’énergie et qui coûte souvent plusieurs milliers d’euros.
En plus d’exclure les femmes seules et les hommes trans, le projet de loi exclut de nombreuses femmes, ne pouvant se permettre le « luxe » de devenir mères en tant que lesbiennes précaires. La conjointe qui ne porte pas l’enfant se voit confrontée à une immense injustice : celle de ne pas être reconnue comme mère légitime de l’enfant.
Encore aujourd’hui, elle doit se marier avec la mère biologique, se déclarer auprès d’un·e notaire avant d’entreprendre une démarche pour adopter l’enfant qui est déjà le sien !
Au travail, les femmes qui entreprennent une démarche de PMA ponctuée de nombreux rendez-vous médicaux et subissent parfois les conséquences d’échecs qui peuvent survenir, n’ont pas droit à des autorisations d’absence avec traitement, comme c’est de droit pendant une grossesse. Là encore, il s’agit une discrimination au travail pour les femmes lesbiennes.
SUD ÉDUCATION REVENDIQUE :
Pour les agent·es
- la PMA accessible pour toutes : femmes seules, lesbiennes précaires et hommes trans
- le remboursement intégral par la sécurité sociale des frais médicaux
- l’autorisation d’absence accordée de droit pour tous les RDV médicaux
Pour les élèves :
- la prise en charge dans les programmes des questions LGBTQIA+ : déconstruction des stéréotypes et discriminations liées à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre, diversité des modèles familiaux etc