En 1989, les Nations unies ont adopté à l’unanimité la Convention relative aux droits des enfants. Elle encourage les États signataires à la non-discrimination, à la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et au respect de leurs opinions, de leur droit de vivre, de survivre et de se développer. Or, force est de constater qu’aujourd’hui encore l’Éducation nationale est très loin du compte.
Contre les discriminations racistes, sexistes, LGBTIphobes, grossophobes et validistes
L’école est un lieu de construction et de reproduction des discriminations racistes, sexistes, LGBTIphobes, grossophobes et validistes. Tou·tes les enfants ne semblent pas avoir le même droit à la pédagogie, à l’enseignement, à la construction d’une analyse critique, et à l’expression de leur identité et de leurs opinions.
Les filles subissent des discriminations quotidiennes qui s’illustrent notamment dans le temps de parole qui leur est accordé (30 % de moins que les garçons), le partage de l’espace ou encore l’orientation (74 % des femmes déclarent ne jamais avoir envisagé leur carrière professionnelle dans les domaines techniques ou scientifiques).
De même, à l’école les enfants subissent de nombreuses discriminations et des violences racistes de la part du système scolaire, des autres enfants et des adultes. Le racisme dans notre société s’inscrit dans le continuum historique de la colonisation et de l’esclavage. Les élèves racisé·es subissent des stéréotypes racistes et font l’objet d’un contrôle spécifique portant sur leurs tenues (comme le préconisent la loi de 2004 et la circulaire de 2023 sur les abayas, qui instrumentalisent la laïcité à des fins racistes en percevant les filles arabes comme soumises par leur famille), leurs propos, leurs opinions et leurs croyances religieuses. Ils et elles sont fiché·es, dénoncé·es, sanctionné·es plus que les autres et de manière disproportionnée. Les stéréotypes et violences racistes ont également des effets sur l’orientation des élèves racisé·es qui sont surreprésenté·es dans les filières professionnelles. Ils et elles sont dans l’ensemble plus amené·es à être orienté·es de sorte à devenir des “travailleur·euses d'exécution”.
Les enfants LGBTQIA+ sont également surexposé·es à des violences. Le rapport sur les LGBTIphobies de SOS homophobie de 2022 précise notamment que 8 % des actes de transphobie recensés s’exercent en milieu scolaire. SUD éducation appelle aussi à renforcer la prévention et l’accompagnement des élèves trans. Le ministère de l’Éducation nationale a publié le 29 septembre 2021 une circulaire « pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire ». Si ce texte est un appui pour réclamer des campagnes de prévention, ces objectifs ne pourront être atteints sans moyens humains et financiers. Par ailleurs, SUD éducation regrette que le ministère ne fasse pas du choix et du bien-être des élèves trans l'élément central de sa politique : en effet le changement de prénom est toujours conditionné à l’accord des parents.
SUD éducation appelle également le ministère à lutter contre la grossophobie et la stigmatisation des personnes obèses et en surpoids, liées aux injonctions normatives sur les corps, qui pèsent avec d’autant plus de force sur les femmes. Il est urgent que le ministère prenne en compte les variations morphologiques qui existent et qui sont le résultat bien plus de notre responsabilité collective que de responsabilités individuelles.
L’école contribue également au validisme de notre société, en exigeant notamment que les élèves se conforment à des normes de réussite scolaire, de productivité et de bienséance. L’école valorise également la compétitivité et la performance, excluant ainsi un nombre important de ses élèves, dont les élèves handicapé·es.
Dans un contexte où l’extrême droite se renforce de jour en jour, l’école recule sur la défense des personnes minorisées et leur épanouissement dans une école qui devrait être émancipatrice.
C’est aussi dans ce contexte que des groupuscules proches d’Eric Zemmour comme “Mamans Louves” ou “Parents vigilants” exercent une pression sur le ministère de l’Éducation nationale pour que les programmes d'éducation à la vie affective relationnelle et sexuelle (EVARS) ne soient toujours pas publiés depuis les annonces de Pap Ndiaye. SUD éducation exige du ministère la publication et la mise en application effective de ces programmes, pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles et les LGBTIphobies.
Enfin, il est indispensable de protéger les personnes minorisées, bien plus exposées aux situations de harcèlement. En France, 10 % des élèves (soit environ 700 000 élèves) sont victimes de harcèlement. 25 % de l'absentéisme concerne des élèves victimes de harcèlement et un quart d’entre elles envisage le suicide . Si le code de l’éducation prévoit le droit à une scolarité sans harcèlement, sans moyens financiers et humains cela reste du bricolage et de la communication.
Droit au logement
Aujourd’hui encore, des élèves sans toit ou menacé·es d’expulsion ne bénéficient pas d’une scolarité comme les autres enfants alors qu’il s’agit d’un droit. D’après l’UNICEF France et la Fédération des acteurs de la solidarité, plus de 2043 enfants vivent dans des hébergements d’urgence, des abris de fortune ou dans la rue. L’absence de domicile a un impact sur la santé mentale de l’élève (mal-être, sommeil, estime de soi, alimentation, stress). Cela peut provoquer des troubles de l’anxiété, de la dépression et des troubles de l’humeur.
Pour permettre à ces élèves de suivre leur scolarité dans de meilleures conditions, SUD éducation se mobilise aux côtés d’associations et de collectifs, afin de faire respecter les droits de tou·tes les enfants, et en particulier les enfants immigré·es, et leur obtenir un toit pour vivre décemment en France.
Droit à la protection face aux violences sexuelles contre les mineur·es
En France, un·e enfant est victime d’inceste toutes les trois minutes. 30 000 filles et 30 000 garçons sont victimes de violences sexuelles chaque année. Au primaire c'est en moyenne 1 enfant par classe, au secondaire 2 ou 3. A l'instar des violences sexuelles sur les femmes et les minorités sexuelles, la majorité des enfants victimes de violences connaît son agresseur : c'est un membre de la famille, de la communauté éducative, du centre de loisirs, un adulte de confiance. Il s'agit d'événements quotidiens, dont la dramatique banalité contribue à l’invisibilisation.
Face à ces chiffres alarmants, l'Éducation nationale ne donne toujours pas les moyens nécessaires pour mener des programmes de prévention qui favorisent l'accueil de la parole et abordent la question du consentement, ni pour assurer la protection et l'accompagnement des victimes. Il y a urgence à recruter des personnels médico-sociaux : infirmier·es, médecin·es scolaires, assistant·es de services sociaux et psyEN.
Droit à la scolarité pour les élèves en situation de handicap
470 000 enfants en situation de handicap sont scolarisé·es à l'école, dans le cadre de l'école inclusive ; c'est une augmentation de 47 % depuis 2017. Cependant on constate au quotidien que cette politique d'école inclusive est une vitrine, derrière laquelle les moyens mis en œuvre par le ministère sont très insuffisants : les bâtiments sont globalement inaccessibles ou inadaptés, les personnels ne sont pas formé·es, le temps de concertation est insuffisant voire inexistant, les classes sont surchargées, les personnels AESH sont maintenu·es dans la précarité et en nombre insuffisant, trop souvent, les élèves n'ont pas accès à l'accompagnement médico-social dont ils et elles ont besoin sur tous leurs lieux de vie.
Les annonces du gouvernement nient l’expertise des personnels de l’éducation qui revendiquent des moyens pour accueillir et répondre aux besoins de tou·tes les élèves, la baisse du nombre d’élèves par classe, des créations de postes, une vraie formation initiale et continue, l’adaptation du bâti scolaire... Le ministère entend faire l’école inclusive sans les personnels et contre les intérêts des élèves.
Pour SUD éducation, les élèves en situation de handicap ne doivent pas faire les frais du manque de moyens pour leur scolarisation : celle-ci reste un droit que nous devons défendre pour toutes et tous les élèves présent·es sur le territoire. C'est à nous, personnels de l'Éducation nationale, de nous battre pour gagner les moyens de les accueillir.
Droit à la scolarité pour les élèves allophones
Nous avons de plus en plus d’enfants de famille sans papier et à la rue, mais aussi de Jeunes isolé·es étranger·es, dans nos classes. Par ailleurs, les élèves français⋅es allophones rencontrent les mêmes problématiques et ne bénéficient trop souvent d’aucun dispositif spécifique.
A l’école aussi, les CLIN (classe d’initiation), les CLA (classe d’accueil) et les CLA-ENSA (élèves non scolarisé⋅es antérieurement) ont été remplacées par des dispositifs UPE2A (unité pédagogique pour élèves allophones nouvellement arrivé⋅es) et UPE2A-NSA avec la circulaire d’octobre 2012 signée Jean Michel Blanquer. L’idée principale était d’inclure davantage les élèves dans leur classe d’affectation. En réalité, l’Éducation nationale a fait des économies en supprimant des heures pour récupérer des postes. S’ajoute à cela un parcours des familles très difficile pour intégrer un dispositif, un racisme institutionnel et une orientation déterminée. Le dispositif UPE2A est insuffisant pour une inclusion totale dans une classe. Ces élèves ont besoin de temps, ils·elles ont vu et vécu parfois des événements très lourds et marquants dans leur pays d’origine et vivent souvent encore des situations administratives et matérielles qui ne facilitent pas les apprentissages.
Droit à la scolarité pour les enfants en situation de guerre
Droit à la scolarité, avec des moyens et des personnels
Une condition indispensable pour garantir les bonnes conditions d’apprentissage et un climat scolaire propice aux apprentissages est d’avoir des conditions d’étude sereines pour les élèves. L’annonce de la suppression de 4000 postes d’enseignant·es en 2025, après la suppression de 9000 postes en six ans, s’inscrit dans la continuité de la politique des différents ministres depuis 2017 : détruire le service public d’éducation. La suppression de postes s’accompagnera de l’augmentation des effectifs des élèves par classe. Dans des classes surchargées, les élèves souffrent d’un accompagnement dégradé ; les enfants à besoin particulier ne bénéficient pas du suivi nécessaire pour une inclusion digne ; les situations de harcèlement se développent davantage. De même, ces suppressions de poste vont accentuer les carences en personnels médico-sociaux, nécessaires pour un accompagnement social et médical décent pour les enfants. Le bien-être des élèves ne semble pas être une priorité du gouvernement. SUD éducation réclame un plan d’urgence pour l’éducation, avec des recrutements importants afin de diminuer les effectifs en classe, un accent mis sur la formation continue des personnels, et des moyens matériels permettant une mise à niveau du bâti scolaire.
L’urgence des enfants en situation de guerre
En temps de conflits, les enfants paient le plus lourd tribut. Vulnérables, ils et elles sont exposé·es à des risques de mutilations, d’enlèvement, de violences sexuelles ou à être recruté·es pour combattre dans des groupes armés. Ces actes constituent des violations graves à l’encontre de leurs droits.
Entre 2005 et 2020, plus de 104 100 enfants ont été tué·es ou blessé·es lors de conflits armés. En 2020, les armes explosives ont causé près de 50% des décès et des blessures des enfants.
A titre d’exemple, au Yémen en octobre 2021, on estimait que 10 000 enfants avaient été tué·es ou mutilé·es depuis l’escalade du conflit en mars 2015, soit l’équivalent de quatre enfants chaque jour.
Les attaques contre des écoles ou des hôpitaux constituent une grave violation des droits de l’enfant et atteignent leur droit d’avoir accès à l’éducation et à la santé. Ces attaques mettent non seulement la vie des enfants en danger, mais perturbent également leur apprentissage et limitent leur accès à des soins médicaux, ce qui peut avoir un impact à vie sur leur éducation et leur santé.
Entre 2005 et 2020, plus de 13 900 attaques (directes et indirectes) ont eu lieu contre des établissements scolaires, des centres de santé ainsi que des personnes civiles telles que des élèves, des enfants hospitalisé·es, et du personnel de santé et scolaire.
Cette date d’anniversaire permet aussi de rappeler les positions de SUD éducation contre les guerres coloniales dont les premières victimes sont les enfants, que ce soit en Ukraine, au Liban ou en Palestine où l’armée israélienne commet un génocide. Les enfants sont les premières victimes des conflits armés. Plus de 14 000 enfants ont été tué·es depuis le 7 octobre 2023. On dénombre également 36 000 blessé·es et 10 000 porté·es disparu·es
SUD éducation revendique :
- des moyens pour accueillir et répondre aux besoins de tou·tes les élèves quels que soient leur situation scolaire, sociale, administrative, leur origine et/ou leur handicap… sur tout le territoire ;
- la limitation des effectifs par classe avec au maximum 20 élèves en école ou collège ordinaire, 16 en école ou collège en éducation prioritaire, 12 en SEGPA, 25 en lycée ordinaire, 20 en lycée en éducation prioritaire, 15 élèves en UPE2A et 12 en UPE2A-NSA en ouvrant des dispositifs sur tout le territoire ;
- des créations de postes suffisantes pour que chaque circonscription et chaque établissement soit doté de postes de médecin·es et/ou d’infirmier·es à temps plein et/ou d'assistant·es de services sociaux ;
- l'application des circulaires et lois qui assurent la protection des mineur·es victimes de violences sexuelles ;
- des moyens, du temps, de la formation et des personnels pour une éducation à la vie sexuelle et affective au-delà des 3 séances annuelles, pour l’accueil des élèves allophones, à la détection des violences racistes, sexistes, sexuelles, lgbtphobes, validistes ;
- la publication des programmes d’EVARS et la mise en place des observatoires de lutte contre les discriminations lgbtphobes dans toutes les académies ;
- un toit pour tous et toutes les enfants et la fin des expulsions des personnes immigrées ;
- pour l’arrêt des OQTF et des expulsions, pour la délivrance sans conditions de titres de séjour vie privée et familiale pour toutes et tous les Jeunes isolé·es étranger·es et de tou·tes les élèves dit·es sans papiers.