Le RN contre l’école publique, les élèves et les personnels !

Le programme présenté par Jordan Bardella pour les élections législatives ne compte que quelques lignes sur l’école, il reprend des axes développés dans la programme qu’avait produit le RN pour les présidentielles de 2022. Ce programme est du reste complété par les déclarations que Roger Chudeau, le « monsieur école » du RN, réserve aux médias. Le tout brosse le tableau d’une école du tri social, où la sanction l’emporte sur l’éducation, d’une école sexiste, raciste, LGBTIphobe et validiste.

Député sortant, Roger Chudeau est le « monsieur école » du Rassemblement national. Agrégé d’allemand, ancien proviseur puis inspecteur général, Roger Chudeau a servi plusieurs cabinets ministériels de droite et soutenu François Fillon lors de la campagne présidentielle 2017. À partir de 2021, il se rapproche du Rassemblement national et devient membre du collectif « Les Horaces » chargé de concevoir le programme de Marine Le Pen. Roger Chudeau est alors chargé du volet éducatif. Roger Chudeau a également été recruté par Marion Maréchal pour devenir membre du Conseil scientifique de l’ISSEP, l’école privée qu’elle a fondée en 2018. Devenu député RN du Loir et Cher aux élections législatives en 2022, il siège à la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Il s’est illustré par la violence de ses propos et de son attitude à l’égard de l’ensemble des organisations syndicales lors d’une audition en septembre 2023. Devant cette attitude agressive et méprisante, toutes les organisations syndicales avaient quitté la séance.

Une école du tri social : sélection à tous les étages

Roger Chudeau entend abolir la réforme du Choc des savoirs mise en place par Gabriel Attal (entretien donné à Les Echos, 20 juin 2024). Toutefois, le RN ne remet pas en cause le principe de sélection à l’école. Bien au contraire, les mesures annoncées vont toutes dans le sens d’une école élitiste au service d’un tri social assumé :

❌  Jordan Bardella annonce la fin du collège unique au profit d’un collège modulaire, reprenant une mesure présente dans le programme du RN pour les présidentielles 2022.

❌  Ce collège modulaire prévoit des groupes de niveaux étendus à toutes les matières.

❌  La sélection voulue par le RN passe encore par des examens nécessaires pour accéder non seulement au lycée, mais encore au collège. Gabriel Attal a, en effet, emprunté au RN la mesure consistant à faire du brevet un examen conditionnant l’entrée au lycée. Pour le RN, le brevet doit devenir « un examen d’orientation post-3e » (programme du RN pour les présidentielles 2022). Roger Chudeau explique qu’ « en fonction des notes, on va en seconde de telle ou telle catégorie », l’orientation sera désormais totalement subie. Roger Chudeau entend pousser cette logique sélective plus loin encore en instaurant un examen de passage en 6e imposé à l’issue du CM2 (entretien donné au Monde, 24 juin 2024).

❌  Le RN prévoit encore une orientation précoce vers la formation professionnelle, en la mettant en place dès la classe de 4e.

 

Une école punitive : sanctions à tous les niveaux

Le « bing bang de l’autorité » est la formule autour de laquelle s’articule le programme du RN pour l’école. Il s’agit de transformer les missions de l’école en en faisant un lieu de sanctions. Le RN renchérit sur les mesures annoncées par Gabriel Attal pour mettre la jeunesse au pas, la surveiller et la punir.

❌  Le port de l’uniforme est une mesure empruntée au programme du RN qui entend l’appliquer à l’école primaire et au collège. Député RN, Roger Chudeau a porté à l’assemblée nationale un projet de loi allant dans ce sens. Ses interventions et celles de son camp lors du débat parlementaire traduisent les visées islamophobes auxquelles répond la mesure qu’il propose. Le député RN Julien Odoul l’exprime sans ambages : « il s’agit aussi, en promouvant le port d’une tenue uniforme, de lutter contre le communautarisme islamiste » (séance à l’Assemblée du 12/01/ 2023). Dans le programme présenté par Jordan Bardella pour les législatives 2024, le port de l’uniforme est associé à d’autres mesures, le vouvoiement et l’interdiction des téléphones portables. Ces mesures ne sauraient constituer un programme pour l’école, elles évincent les problèmes de fond, le manque de moyens dont souffre l’école publique, les difficultés sociales auxquelles se heurtent les élèves.

Derrière ces mesures sans consistance, le programme du RN développe tout un arsenal punitif, en partie repris par Gabriel Attal. Le programme pour les présidentielles 2022 prévoit ainsi la suspension des allocations familiales et des bourses en cas d’absentéisme avéré et de perturbations graves et répétées ou encore des sanctions-plancher à appliquer lors des conseils de discipline.

❌  Roger Chudeau va plus loin en promettant la création de centres spécialisés pour les élèves perturbateurs ou harceleurs. Il s’agit de véritables maisons de redressement où l’on enfermerait les élèves après deux exclusions, sans possibilité de retour vers un établissement ordinaire. Là encore, cette mesure avait fait l’objet d’une proposition de loi déposée par Roger Chudeau en avril 2024. Comme pour le port de l’uniforme, les visées islamophobes étaient mentionnées dans l’intitulé du projet de loi : « proposition de loi visant à exclure définitivement des établissements ordinaires les élèves convaincus de menées islamistes ».

Des programmes sous contrôle, au service d’un projet politique identitaire

❌  Le programme défini pour les présidentielles 2022 annonce que c’est le Parlement qui fixera ce qui est attendu des élèves à la fin de chaque cycle. Le contenu des enseignements sera donc défini par une entité politique, avec tous les risques d’instrumentalisation que cela peut comporter. Cette mesure s’accompagne d’une labellisation des manuels par le ministère (programme du RN pour les présidentielles 2022).

❌  Le programme pour les législatives 2024, de manière laconique, entérine un axe fort des idées du RN concernant les enseignements : « recentrer les enseignements sur les savoirs fondamentaux (sciences, français, histoire) ». C’est un appauvrissement des apprentissages, une réduction des missions de l’école.

❌  Ces savoirs sont placés au service d’une idéologie nationaliste et identitaire, particulièrement perceptible dans l’enseignement de l’histoire promu par le RN. Roger Chudeau veut rendre obligatoires dans toutes les classes une carte de France et une frise chronologique « retraçant le récit national, de Clovis ou de Vercingétorix à nos jours (article Les Echos du 20 juin 2024).

Du côté des personnels : contrôle, sanctions et mises au pas

Le RN essaie de gagner à sa cause le monde enseignant en promettant des revalorisations salariales. Pourtant, derrière ces promesses de campagne, le RN couve un projet de mise au pas des fonctionnaires.

❌  Si Roger Chudeau compte abroger le PACTE mis en place par Gabriel Attal c’est pour lui substituer une obligation de remplacement. Les profs devront remplacer au pied levé leurs collègues absent·es sans pouvoir se soustraire à cette mesure.

❌  Le RN entend encore renforcer le « pouvoir de contrôle des corps d’inspection ». Ces derniers seront chargés de traquer tout manquement à l’exigence de neutralité. Les personnels seront dans l’obligation de signaler « des cas problématiques » sous peine de sanctions (programme du RN pour les présidentielles 2022).

❌  L’autoritarisme qu’entend appliquer le RN s’exprime dans les menaces de sanctions proférées par Roger Chudeau à l’encontre de cadres de l’Education nationale signataires d’une tribune contre le RN.

Ces annonces autoritaires lèvent le voile sur le prétendu soutien que le RN annonce vouloir apporter aux fonctionnaires, en présentant comme une mesure d’urgence le renforcement de la protection fonctionnelle. Le RN n’entend pas protéger les fonctionnaires et ne les soutiendra pas face aux difficultés que leur causent leurs conditions de travail. Le soutien qu’il prétend leur apporter est au service de son idéologie sécuritaire et islamophobe.

Une école “assimilationniste” : racisme et LGBTQIphobie à l’œuvre

Le projet de l’école développé par le RN est hanté par son islamophobie : les mesures proposées relèvent d’une chasse aux personnes musulmanes, véritable obsession de ce parti d’extrême droite. Plus largement, le RN traque à l’école tout ce qu’il nomme le wokisme, portant atteinte aux droits des personnes racisées et des minorités de genre.

❌  Qu’il s’agisse du port de l’uniforme, des sanctions, de la conception des programmes ou encore de la prétendue protection des agent·es, le programme du RN est constamment sous-tendu par son idéologie islamophobe. Il ne cesse de diffuser un discours raciste en affirmant que “l’islam radical est en train de prendre le pouvoir” et notamment dans les établissement d’éducation prioritaire. Nos élèves musulmane·s ou supposée·s musulmane·s sont perçu·es comme des ennemis de l’intérieur. Cette islamophobie s’exprime dans une mesure visant à interdire par la loi le port du voile pour les accompagnantes de sorties scolaires (programme du RN pour les présidentielles 2022).

❌  Le RN fait encore porter la responsabilité de la baisse du niveau aux élèves allophones et d’origine étrangère. Il s’intéresse de près à l’éducation prioritaire sur laquelle Roger Chudeau a présidé une mission d’information à l’Assemblée. Il a pu y développer une vision stigmatisante des établissements classés REP+. Selon Roger Chudeau, l’enjeu des REP+ « n’est autre que l’assimilation à la République et à la nation française des enfants qui sont confiés aux écoles et aux collèges publics de ces secteurs »

❌  Le RN prévoit un démantèlement des REP : si le programme du RN était appliqué, 80 % d’établissements classés REP sortiraient de l’éducation prioritaire. Pour le RN, le soutien aux milieux défavorisés coûte trop cher.

❌  Enfin, le RN s’attaque aux minorités de genre. À l’Assemblée, Roger Chudeau a créé une association de parlementaires antiwokes, hostile notamment aux revendications des personnes transgenres. Le RN s’oppose violemment à l’éducation à la vie affective et sexuelle, si importante pour lutter contre le sexisme systémique, contre les discriminations que subissent les personnes LGBTQIA+.