Les acquis laïques sont les nôtres !
La laïcité est un principe pour lequel se sont battues des générations de militant·es du progrès social. Les lois laïques de la IIIe République, sont le résultat d’un compromis : entre celles et ceux qui voulaient avant tout une offensive contre le cléricalisme (et parfois contre la religion), et celles et ceux qui souhaitaient préserver les institutions de l’influence de la religion. Le résultat en fut la notamment la loi de 1905, qui instaure la séparation des Églises et de l’État, et garantit à toutes et tous la liberté de croire ou de ne pas croire. Il s’agit d’un acquis fondamental de la construction de l’école publique. Précisons qu’encore aujourd’hui, la loi de 1905 n’est pas appliquée partout, et notamment en Alsace-Moselle, qui n’étaient pas sur le territoire français au moment de son adoption, ni dans certains territoires ultra-marins issus de la colonisation. SUD éducation réclame l’extension de la loi de 1905 aux territoires qui n’en bénéficient pas.
C’est notre camp social qui s’est battu pour la laïcité, pas celui des gouvernements au service des capitalistes. Pour SUD éducation, la loi de 1905 doit être défendue pleinement et entièrement. C’est bien l’État et les institutions qui doivent être défendues contre l’intrusion de la religion, et non les individus. Les acquis laïques sont les nôtres, ils n’appartiennent pas aux réactionnaires !
SUD éducation revendique toujours l’abrogation du concordat en Alsace-Moselle et l’application des lois laïques sur l’ensemble du territoire.
Combattre le retour du catholicisme d’État
Mise en avant de son éducation chez les Jésuites, admiration pour Paul Ricoeur... Macron avait bien mis en scène pendant sa campagne son inscription dans la foi chrétienne. Depuis lors, le gouvernement multiplie les entorses à la laïcité, montrant qu’au plus haut sommet de l’État, le principe de séparation avec l’Église catholique n’est pas sans ambivalence. Le 23 septembre 2023, Macron participait à une messe géante organisée au stade Vélodrome avec le pape François. Le même jour, il annonçait une collecte pour l’entretien des bâtiments religieux, en particulier les églises catholiques datant d’avant 1905 dont l’entretien revient aux communes, dans le cadre de laquelle les dons sont défiscalisés aux ⅔. Ces dévoiements de la laïcité gagnent chaque année du terrain : en témoigne le nombre d’élu·es, député·es ou maires·ses, qui installent des crèches à l’approche de Noël.
La laïcité, pour le gouvernement, est moins importante que la valorisation de l’identité chrétienne de la France. Plus que jamais, il est nécessaire de réaffirmer le principe de séparation des Églises et de l’État.
Reprendre l’offensive pour la laïcité, c’est commencer par dénoncer ces compromissions. Car il ne faut pas se leurrer : le gouvernement ne défend pas la laïcité, il défend l’alliance historique des capitalistes avec le catholicisme, pour mieux chasser sur les terres de l’extrême droite.
Contre les dévoiements islamophobes de la laïcité
Le dévoiement, largement partagé par une large frange de la sphère politique, consiste à stigmatiser de manière systématique la population musulmane ou considérée comme telle. Depuis la loi de 2004, la laïcité a changé de nature : d’un principe qui s’applique à l’Etat, elle est devenue un instrument coercitif sur des usager·es du service public. Depuis, cette dérive ne cesse de s’étendre. Blanquer s’était fait une spécialité des dévoiements islamophobes de la laïcité, déclarant par exemple en octobre 2019 que selon lui “le voile n’est pas souhaitable dans notre société”.
Depuis lors, l’islamophobie d’État n’a fait que croître, particulièrement en cette année 2023 :
Printemps 2023 : la fête de l’Aïd al-Fitr a donné lieu à des situations inacceptables, en particulier la demande de remontée des noms d’élèves absents pendant le Ramadan et l’Aïd al-Fitr, suite à des instructions de la police dans les académies de Toulouse et de Montpellier ;
Juin 2023 : le ministre Ndiaye a cédé à plusieurs reprises aux pressions des franges les plus réactionnaires de l’échiquier politique, notamment lorsqu’il s’est associé par un communiqué commun au maire de Nice, qui avait instrumentalisé des prières effectuées par des élèves dans des cours d’école ;
Septembre 2023 : au cours de la rentrée 2023, le ministre Attal a monté d’un cran dans l’islamophobie d’État en interdisant les abayas à l’école. Loin du principe de la laïcité, cette interdiction est une nouvelle mesure de stigmatisation des jeunes filles musulmanes, dans une logique sexiste, raciste, coloniale et islamophobe.
La lutte pour la nationalisation de l’enseignement privé, une lutte toujours d’actualité
La concurrence entre l’enseignement public et l’enseignement privé est un débat vieux comme l’école publique. Il est en revanche toujours d’actualité ! Dans un grand nombre de départements, la concurrence de l’enseignement privé est telle qu’il n’y a parfois tout simplement pas d’école publique dans la commune. Ailleurs, qui n’a pas connu tel ou tel élève quittant l’école publique pour aller s’inscrire dans l’école privée voisine ? Le dualisme scolaire provoque objectivement une inégalité face à l’éducation, autant que la promotion de l’enseignement religieux.
Et pour cause : l’école privée est, depuis la loi Debré de 1959, largement financée par l’État, qui organise ainsi sa propre mise en concurrence. Le projet de loi Savary de 1984, qui avait déclenché des manifestations importantes en faveur de l’école dite « libre », a fait long feu. Depuis, aucun gouvernement n’a tenté de remettre en question l’existence de ce dualisme scolaire qui met en cause l’égalité de toutes et tous les élèves face à l’éducation.
Les lois de finances successives favorisent toujours davantage l’école privée, dont le budget augmente plus vite que celui de l’enseignement public. Récemment, plusieurs établissements privés ont pu intégrer les expérimentations en cours liés à la réforme de l’éducation prioritaire.
L’enseignement privé est responsable du manque de mixité sociale, des inégalités scolaires et sociales et de la baisse du niveau
Les résultats de l’enquête PISA 2022 ont montré que le nombre d’élèves de 15 ans scolarisés dans des établissements privés avait augmenté de 5,2 points : de 16,4% en 2018 à 21,6% en 2022. Cette hausse est extrêmement inquiétante quand on sait à quel point l’enseignement privé est responsable du manque de mixité sociale. En finançant le privé, l’Éducation nationale organise et finance la ségrégation scolaire : lorsqu’un collège favorisé est situé près d’un établissement défavorisé, dans 85% des cas c’est un établissement privé.
Pour SUD éducation, il est plus que jamais temps de reprendre le débat sur la fin du dualisme scolaire :
-en mettant fin au financement public de l’enseignement privé ;
-en nationalisant l’enseignement privé, sans indemnité ni rachat, et en transférant ses personnels dans les corps correspondants de l’enseignement public.
L’enseignement privé en quelques chiffres (loi de Finances 2024) :
Une part importante...
- 9 035 305 069 €
- soit 15% du budget de l’Éducation nationale
...en augmentation : le budget de l’enseignement privé sous contrat augmente plus vite que celui du public
- 1er degré public +4,6 %
- 2d degré public de +5,4 %
- Privé sous contrat +6,7 %
Texte de congrès de SUD éducation (Congrès de Brest, 2015)
« La laïcité n’est pas une religion supplémentaire, pas plus qu’elle n’est un dogme contre les religions. Elle est la garantie de la liberté d’opinion et de conscience, et donc celle du droit de chacun·e d’avoir ou non une religion. Elle ne peut pas être un instrument servant à légitimer un arsenal de mesures normatives et répressives qui viserait à définir un « comportement citoyen » imposé à tous les niveaux. L’appel aux grands principes ne peut remplacer des politiques concrètes pour l’égalité. Il ne suffira pas de cours de morale ou d’éducation civique, de minutes de silence ou d’une « charte de la laïcité ». L’appel aux « valeurs de la République », l’enseignement abstrait d’une morale, ne peuvent qu’entrer en contradiction avec les inégalités de la société et de l’école. L’école doit être profondément, structurellement, transformée. Ce qui fait notamment le jeu des fanatiques, c’est un système inégalitaire et le « deux poids deux mesures » : comment, au nom de la laïcité, multiplier les injonctions et interdictions pour les uns tout en continuant pour les autres à financer à coups de milliards d’argent public l’enseignement privé, essentiellement catholique, sans donner le signe d’un traitement discriminatoire ? Pour toutes ces raisons, SUD éducation continue de condamner le dualisme scolaire qui prévaut en France. Avec l’Union syndicale Solidaires, nous revendiquons la nationalisation de l’enseignement privé et l’intégration de ses personnels à la fonction publique. »