Voeu présenté par la FSU, SUD éducation, FCPE, CFDT (EFRP et FEP) et CGT éduc'action et adopté par le CSE
Le CSE de ce jour examine une proposition de programmes de français et mathématiques pour les cycles 1 et 2, alors même que ces programmes ont été ajustés ou réécrits entre 2018 et 2021. Ces changements incessants, comme les délais qui seront donnés aux enseignant.es pour se les approprier, témoignent du mépris pour la profession enseignante.
Les modalités de rédaction de ces programmes sont inacceptables. Le temps long nécessaire pour construire des consensus engageant la communauté éducative et la recherche n’a pas été pris ; la concertation n'est restée que formelle, les alertes des organisations syndicales n'ont jamais conduit à une inflexion des projets sur le fond ; une large part des textes est en rupture avec les acquis de la recherche parce des pans entiers des sciences de l'éducation ont été évincés...
Les programmes proposés aujourd’hui présentent une conception « à l’envers » de l’apprentissage : on y trouve l’application systématique et mécanique de procédures, au détriment de la résolution de problèmes et de la construction de la pensée. La finalité même de rendre l’élève capable de penser le monde pour agir sur lui est absente de ces programmes. Les démarches socio-constructivistes sont arbitrairement écartées, alors même qu’elles permettent, pour les élèves, l’entrée par ce qui fait problème. Au moins trois conséquences majeures, liées à cette « conception à l’envers », apparaissent dans ces programmes :
- les notions se succèdent sans lien entre elles, le sens des apprentissages s’en trouve masqué, ce qui nuit à la mobilisation possible des élèves. La sociologie des apprentissages nous éclaire pourtant sur la nécessité d’expliciter les liens entre savoirs et procédures.
- l’hétérogénéité des rythmes est érigée en obstacle avec l’abandon du principe des cycles. Le découpage par période interroge sur ce qu’il adviendra des élèves qui ne suivront pas les étapes fixées. Après avoir mis les élèves en difficulté, les programmes visent des traitements hors temps de classe largement inefficaces.
- Avec des situations d’apprentissage codifiées, des pratiques également codifiées, ces programmes portent la fin du respect de l’expertise enseignante. Or ce sont les systèmes scolaires qui misent sur l’expertise des enseignant.es et leur capacité à concevoir les enseignements, qui sont les plus performants et les moins soumis aux déterminismes sociaux.
Mise en difficulté des élèves et refus de s’appuyer sur la professionnalité enseignante : ces programmes s’inscrivent résolument dans toute la logique du « choc des savoirs » que nous rejetons. Nous demandons instamment que ces projets soient abandonnés, et que s’ouvrent des discussions larges permettant les consensus nécessaires appuyés sur l’ensemble de la recherche en éducation.