Les personnels de l’Éducation nationale ont reçu une lettre de votre part le vendredi 16 septembre 2022. Vous les remerciez du travail accompli pendant la crise sanitaire, période pendant laquelle elles et ils ont été contraint·es de se battre pour obtenir des moyens de protection et une organisation du travail qui protège leur santé et celle des élèves qu’ils ont partiellement obtenus. Ils ont été tellement méprisés durant ces deux dernières années qu’ils ont fini par se mettre massivement en grève le 13 janvier. Ces temps auraient sans doute été moins “difficiles” comme vous le dites si l’administration avait pris ses responsabilités en élaborant des protocoles sanitaires réalistes et protecteurs, si les personnels avaient été respectés et si vous les aviez réellement soutenu au lieu de promouvoir le profbashing comme avec la cueillette des fraises et autres provocations du genre.
Vous tracez dans votre lettre votre projet pour l’école : égalité des chances, réduction des inégalités, reconnaissance du métier, développement de l’esprit critique. Néanmoins vos réformes vont dans un sens contraire : votre obsession d’une priorité aux savoirs fondamentaux met au jour une vision étriquée de l’école et des mécanismes d’apprentissage, les dispositifs de découverte des métiers en 5e ne sont qu’un moyen de plus de développer petit à petit une pré-orientation des élèves qui conduit à toujours plus de reproduction des inégalités sociales. La réforme du lycée a dégradé les conditions de travail des personnels et d’étude des élèves et votre nouvelle réforme du lycée professionnel vient détruire ce qui restait d’un enseignement professionnel sous statut scolaire déjà mal en point.
Les personnels ont appris dans votre lettre que, pour vous, “reconnaissance du métier” rime avec “missions supplémentaires”. Or vous savez très bien que cette politique d’heures supplémentaires et de primes au mérite accroît les inégalités entre les hommes et les femmes, entre les personnels handicapés et les autres. Si, comme vous le dites, les personnels effectuent déjà les missions de suivi, de coordination, d’accompagnement à l’orientation, augmentez les salaires de tou·tes de manière inconditionnelle. Vous semblez oublier dans votre propos que les salaires sont insuffisants dans l’Éducation nationale pour les AESH, les AED, les infirmier·es et Assistant·es de Service Social, les agent·es… Vos mesures de revalorisation sont insuffisantes car elles ne rattrapent pas la perte de salaire subie par les personnels depuis 25 ans et elles oublient tous les personnels non enseignants.
De même vous parlez de formation pendant que vos services envoient des stagiaires à plein temps dans les écoles et établissements scolaires pour pallier le déficit d’enseignant·es.
Enfin, vous parlez de “transformer l’école en profondeur” avec “celles et ceux qui la font vivre au quotidien”, pourtant vous poursuivez dans les réformes arbitraires, imposées aux personnels sans concertation. Les personnels ne cessent d’exprimer leurs revendications, celle d’un plan d’urgence pour l’éducation. SUD éducation a largement détaillé le contenu de ce plan d’urgence en partant des besoins des équipes sur le terrain, à commencer par la baisse du nombre d’élèves par classe. Pourtant le ministère de l’Éducation nationale refuse toujours de les entendre et trop souvent les équipes éducatives mobilisées sont reçues sur les trottoirs devant les DSDEN et devant les Rectorats.
Vous parlez de “projets”, "d'expérimentation", de “dispositif”, de “labellisation” et maintenant de “fonds d’innovation pédagogique” mais les personnels ne sont pas dupes de cette novlangue managériale derrière laquelle se cache la casse du service public d’éducation. Il faut mettre des moyens pour améliorer le temps en classe pour tou·tes et pas seulement pour les équipes qui montent des projets. Ces dispositifs nécessitent de remplir une paperasse inutile d’un point de vue pédagogique pour répondre aux exigences de l’institution et obtenir des moyens. Cette mise en concurrence des équipes et des personnels est maltraitante pour les personnels et pour les élèves. De même, la lutte contre les inégalités de genre et la transformation écologique de l’école ne peuvent faire l’objet d’une labellisation accessible à certaines écoles et établissements mais doivent être des priorités avec des moyens attribués nationalement.
Enfin, alors que d’une main vous dites vouloir transformer l’école et faire confiance aux enseignant·es, de l’autre vous réprimez brutalement les syndicalistes : aujourd’hui c’est Kai Terada, enseignant dans le 92 et co-secrétaire départemental de SUD éducation 92, que vous sanctionnez en raison de son activité syndicale.
Le service public d’éducation mérite mieux que vos fausses promesses Monsieur le Président.
SUD éducation