SUD éducation arrache une victoire en Conseil d’Etat: la note administrative du ministère qui permettait aux établissements du supérieur de contourner la mensualisation des vacataires est annulée ! Le ministère doit désormais en prendre acte et faire respecter la loi : la mensualisation de tou·tes les vacataires d’enseignement.
L’article 11 de la loi de programmation de la recherche du 24 décembre 2020 a inséré dans le code de l'Éducation un alinéa entré en vigueur le 1er septembre 2022 qui dispose que « la rémunération des chargés d'enseignement et des agents temporaires vacataires (ATV) est versée mensuellement ». Ainsi, les établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche sont désormais contraints par la loi de verser mensuellement leur rémunération à tou·tes les vacataires d’enseignement.
Une note de la Direction générale des ressources humaines (DGRH) du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) adressée aux établissements le 4 juillet 2022 comportait des “recommandations pour parvenir à l’objectif de mensualisation”. Dans cette note, la DGRH considérait que la problématique de la mensualisation du paiement des vacations ne se posait que “pour une minorité d’agents”.
Plusieurs dispositions de cette note apparaissaient critiquables aux yeux de SUD éducation :
- nous estimions que l'interprétation de la note minorisait sciemment le périmètre des publics concernés, ce qui était contraire à la loi qui s’applique à tou·tes les chargé·es d’enseignement et ATV ;
- la note prévoyait, pour les paiements, un délai de traitement de deux mois. Nous avons souligné l’illégalité de cette mesure : la loi indique un délai maximal d'un mois ;
- la note préconisait une rémunération minimale mensuelle, avec rattrapage en fin de contrat. Cette mesure nous paraissait illégale : la loi prévoit que "la rémunération" des vacataires soit payée mensuellement.
Pour SUD éducation, les recommandations de cette note étaient donc insuffisantes pour répondre aux exigences légales et, en réalité, préconisaient en creux des pratiques illégales.
Ainsi, SUD éducation a déposé une requête devant le Conseil d’État en avril 2023 afin de :
- faire annuler pour excès de pouvoir la note de service de la DGRH
- enjoindre à la DGRH d’informer les destinataires de la note de son annulation et de leur adresser une nouvelle note préconisant des mesures de gestion des vacataires en adéquation avec la règle de la mensualisation.
Le Conseil d’État, dans sa décision du 6 février 2024, a fait annuler cette note de la DGRH, mais a rejeté notre demande de nouvelle note aux établissements visant à la mise en œuvre effective de la mensualisation des vacataires.
Cette décision du Conseil d’État permet donc de poursuivre les pressions sur la DGRH, le ministère et les établissements afin de rendre effectif un droit élémentaire : être payé·e chaque mois pour son travail.
Les différentes mobilisations de vacataires de ces dernières années dans plusieurs universités ont mis en lumière la précarité de ces personnels : véritable armée de réserve pour l’enseignement, les vacataires représentent 167 000 personnels (en croissance de 24% depuis 10 ans) et constituent un levier nécessaire aux universités pour limiter la dégradation du taux d’encadrement (diminution de 17% en 10 ans) et faire face à la chute du nombre de recrutement de titulaires dans l’ESR (diminution de moitié en 10 ans). Aujourd’hui, il y a 2,2 vacataires pour un·e enseignant·e titulaire et dans certaines filières (notamment en SHS) ou en premier cycle, plus de 50% des enseignements (principalement les TD) sont assurés par ces vacataires. Toutes ces heures représentent l’équivalent de près de 25 000 postes d’enseignant·es-chercheur·es titulaires !
Les établissements se montrant incapables de recenser correctement les vacataires et d’établir des contrats de vacation en temps et en heure, la mensualisation de ces vacataires est donc restée lettre morte dans la grande majorité des universités. Pour plusieurs dizaines de milliers de personnels, ces vacations constituent la seule source de revenus.
Payé·es 43,50€ brut pour chaque heure TD (à laquelle correspond selon le ministère lui-même 4,18h de travail effectives), les vacataires perçoivent donc une rémunération horaire de 10,40€ quand le SMIC horaire brut est de…. 11,65€. C’est donc sous le SMIC et (dans le meilleur des cas) tous les 3 ou 6 mois que sont payé·es ces agent·es qui font tourner le service public de l’ESR.
SUD éducation revendique:
- La mensualisation effective de la rémunération des vacataires, conformément à l’article 11 de la LPR (loi n°2020-1674). La DGRH doit adresser dans les meilleurs délais une nouvelle note aux établissements afin de faire respecter cette mensualisation pour toutes et tous les vacataires ;
- Le doublement de la rémunération de l’heure de vacation ;
- À court terme, la création de postes de titulaires pour renforcer les équipes administratives et permettre cette mensualisation ;
- La création massive de postes d’enseignant·es-chercheur·es fonctionnaires ;
- L’augmentation du salaire des doctorant·es contractuel·les, des ATER et des enseignant·es titulaires, afin de rattraper les 27% de perte de salaire subie depuis 25 ans, due au gel du point d’indice et à l’inflation.