[Brochure n°98] Pour le service public d’éducation

Brochure SUD éducation
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L’école est à un point de bascule

L’école est à un point de bas­cule, elle a été lar­ge­ment abî­mée par les cinq années Blanquer : celui-ci a sup­pri­mé presque 9000 postes dans le second degré public et il a impo­sé la poli­tique des “savoirs fon­da­men­taux” tout en impo­sant Parcoursup, la réforme du bac et les réformes des lycées dont les élèves comme les per­son­nels paient encore le prix aujourd’hui. Depuis, cinq ministres se sont suc­cé­dés et aucun·e ne s’est atta­qué aux vrais pro­blèmes de l’école : la dif­fi­cul­té à recru­ter des per­son­nels, l’indigence de la for­ma­tion, les bas salaires, le manque de moyens pour ensei­gner, la lutte contre les inéga­li­tés sociales, l’absence de poli­tique d’éducation prioritaire…

De Gabriel Attal à Anne Genetet, le minis­tère de l’Éducation natio­nale est conduit à coup de plans de com­mu­ni­ca­tion dont la tra­duc­tion sur le ter­rain marque ses effets délé­tères : choc des savoirs, uni­forme, label­li­sa­tion des manuels, acte II de l’école inclusive…
Au contraire, pour SUD édu­ca­tion, l’école publique comme l’enseignement supé­rieur sont des prio­ri­tés, il faut pré­pa­rer la socié­té de demain. Dans cette bro­chure, SUD édu­ca­tion revient d’abord sur l’état de l’école et de l’enseignement supé­rieur publics, et pro­pose des réflexions sur les mesures à prendre d’urgence pour garan­tir un vrai ser­vice public d’éducation et d’accès au supérieur.

Ensuite, ce diag­nos­tic de l’école et de l’enseignement public est mis en pers­pec­tive avec la com­plai­sance de l’État vis-à-vis de l’enseignement pri­vé et de la der­nière réforme édu­ca­tive, celle du “choc des savoirs”.
Enfin, un focus plus impor­tant est fait sur la ques­tion cen­trale de la lutte contre les inéga­li­tés sociales, y com­pris postcoloniales.

Sommaire

  1. École publique en danger
    1. Alerte budget 2025
    2. Handicap et inclusion
    3. Crise d’attractivité
    4. Pour une école qui réponde aux enjeux écologiques et sociaux d’aujourd’hui et de demain
    5. Un budget 2025 qui met en danger l’Enseignement supérieur public 
  2. « Le choc des savoirs contre l’école publique »
    1. Une liberté pédagogique cadenassée dans les écoles 
    2. Vers la fin du collège unique 
  3. En finir avec le financement public de l’enseignement privé
    1. Le dualisme scolaire : d’où ça vient ?
    2. L’école privée, c’est 75% d’argent public !
    3. Quel est le rôle du privé dans la ségrégation scolaire et sociale ? 
    4. Une mixité sociale qui ne s’embarrasse pas de la lutte contre les inégalités sociales !
    5. Des établissements majoritairement catholiques : de véritables atteintes à la laïcité ! 
    6. Tribune collective pour la défense de l’école publique 
    7. Quand l’État développe le financement public de l’enseignement privé hors contrat…
  4. Pour lutter contre les inégalités, relancer l’éducation prioritaire !
    1. Un premier bilan des dédoublements en éducation prioritaire
    2. Les élèves des lycées de banlieues populaires : les grand·es oublié·es de l’éducation prioritaire
    3. La lutte des lycées des quartiers populaires du Rhône
  5. Le système scolaire français creuse les inégalités et contribue à perpétuer des déterminismes liés au colonialisme
  6. Le privé à l’assaut de l’enseignement supérieur
  7. Des moyens pour l’école publique, et vite !

1 - École publique en danger

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1.1 - Alerte budget 2025

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L’éducation repré­sente le plus gros objet de dépenses de l’État. C’est un enjeu majeur pour pré­pa­rer la socié­té de demain, une socié­té plus juste socia­le­ment et éco­lo­gi­que­ment. Or on constate que les moyens enga­gés sont insuf­fi­sants et la poli­tique édu­ca­tive à l’œuvre creuse les inéga­li­tés. L’école est à un point de rup­ture, et cela a des consé­quences sur la socié­té dans son ensemble.
Les der­niers gou­ver­ne­ments pré­textent la baisse démo­gra­phique pour jus­ti­fier les sup­pres­sions de poste, cet argu­ment ne tient pas face aux don­nées de l’OCDE. Or le pro­jet de bud­get 2025 pré­sen­té par Barnier pré­voit 4035 sup­pres­sions de postes répar­ties ainsi :
· 3 155 ETP sont sup­pri­més dans le pre­mier degré public ;
· 181 ETP sont sup­pri­més dans le second degré public ;
· 660 ETP sont sup­pri­més dans le pre­mier degré pri­vé sous contrat ;
· 40 ETP sont sup­pri­més dans le second degré pri­vé sous contrat ;
· 35 ETP admi­nis­tra­tifs sont créés.
On remarque que le pri­vé subi­ra moins les effets des sup­pres­sions de postes que le public puisque, alors que l’enseignement pri­vé concerne 20% des élèves, ce sont moins de 20% des sup­pres­sions de postes qui seront pris en charge par le privé.
La 1er degré devrait sup­por­ter les sup­pres­sions de postes les plus impor­tantes selon le pro­jet de bud­get 2025. Pourtant, en 2024, on compte en moyenne 18,2 élèves par enseignant·e (ce qui ne cor­res­pond pas à la taille moyenne des classes) dans le 1er degré en France tan­dis que la moyenne de l’OCDE se situe à 14 élèves pour un·e enseignant·e. La ren­trée 2024 a vu ain­si la sup­pres­sion de 650 postes, ce qui tra­duit la volon­té du gou­ver­ne­ment de ne pas se rap­pro­cher de la moyenne de l’OCDE.
Le manque de per­son­nels enseignant·es conduit à une situa­tion de mise sous ten­sion per­ma­nente : les per­son­nels ne sont plus remplacé·es et chaque absence pèse sur l’école entière. Dans le 2d degré, entre 2017 et 2023, on a comp­té 8 865 sup­pres­sions de postes dans le second degré, l’équivalent de 166 col­lèges, à rap­por­ter aux 7441 élèves sup­plé­men­taires. Pour retrou­ver le taux d’encadrement de 2006, il fau­drait recru­ter 45257 enseignant·es sur le pro­gramme 140. Selon l’OCDE, la France est l’un des pays où l’élève entend le moins bien l’enseignant·e.
Le défi­cit de per­son­nels médi­co-sociaux est criant : 900 méde­cins, moins de 8 000 infirmièr·es pour 12 mil­lions d’élèves. Moins de 20% des élèves de 6 ans passent la visite médi­cale, pour­tant obligatoire.
De même, le minis­tère de l’Éducation natio­nale est l’un des plus mal dotés en ges­tion­naires au regard de l’effectif impor­tant d’agents puisque le ratio gérants-gérés est de 0,6%, soit 6 ges­tion­naires pour 1000 agents.

1.2 - Handicap et inclusion

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On compte près de 134000 per­son­nels AESH, pour plus de 93% des femmes, au salaire moyen de 850 euros, et sans pers­pec­tive d’évolution salariale.
L’Éducation natio­nale crée des postes d’AESH pour répondre aux besoins des élèves en situa­tion de han­di­cap mais ne par­vient pas à les pour­voir. Chaque année, ce sont les AESH qui contactent le plus nos équipes syn­di­cales dans les dépar­te­ments pour être accompagné·es dans leur démis­sion. L’annonce des 2000 créa­tions de postes d’AESH à la ren­trée 2025 est illu­soire tant l’Éducation natio­nale ne par­vient pas à recruter.
Pour pro­fes­sion­na­li­ser les mis­sions d’AESH et répondre aux besoins de l’école inclu­sive, il faut recon­naître que l’accompagnement des élèves en situa­tion de han­di­cap est un métier et créer un sta­tut de la Fonction publique.
Créer un sta­tut de fonc­tion­naire pour 129 000 AESH avec un temps plein à 24h face élève et un salaire net à 1700 euros coû­te­rait 0,216 mil­liards d’euros, soit une aug­men­ta­tion de 0,3% du bud­get du minis­tère de l’Éducation nationale.
En com­pa­rai­son : la géné­ra­li­sa­tion du SNU est éva­luée de 3,5 à 5 mil­liards d’euros par an.

1.3 - Crise d’attractivité

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La crise d’attractivité est per­sis­tante et a des consé­quences désastreuses :
· le non-rem­pla­ce­ment fré­quent : dans le bilan de la ren­trée 2024, selon les aca­dé­mies, entre 21% et 72% des éta­blis­se­ments manquent de professeur·es. Au niveau natio­nal, ce sont 56% des éta­blis­se­ments qui avaient au moins un·e professeur·e manquant·e.
· la baisse de la qua­li­té du ser­vice ren­du à la popu­la­tion : les aca­dé­mies doivent recru­ter des contractuel·les insuf­fi­sam­ment formé·es.
· la perte de confiance dans le sys­tème édu­ca­tif est pal­pable dans la popu­la­tion et pro­fite au sec­teur privé.
Les causes de la crise sont connues :
· des salaires trop faibles en milieu et fin de car­rière et peu com­pé­ti­tifs avec des emplois du sec­teur privé ;
· le recru­te­ment à bac+5 a assé­ché le vivier de recru­te­ment et modi­fié sa sociologie ;
· les sup­pres­sions de postes rendent inac­ces­sibles des muta­tions per­met­tant de retour­ner dans leur dépar­te­ment d’origine pour une part impor­tante des per­son­nels du second degré ;
· les réformes suc­ces­sives dété­riorent les condi­tions de tra­vail et la qua­li­té de la rela­tion avec les élèves et le reste de la com­mu­nau­té éducative ;
À cela s’ajoutent le déla­bre­ment du bâti, l’inexistence d’une méde­cine du tra­vail, et un mana­ge­ment libé­ral bru­tal et inefficace.

1.4 - Pour une école qui réponde aux enjeux écologiques et sociaux d’aujourd’hui et de demain

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Une école qui combat les inégalités sociales et les discriminations

Pour faire mieux réus­sir les élèves il faut amé­lio­rer leurs condi­tions d’études en bais­sant le nombre d’élèves par classe et en garan­tis­sant des classes encore moins nom­breuses en édu­ca­tion prio­ri­taire. Mais il est éga­le­ment néces­saire d’améliorer les condi­tions d’étude des élèves en les accom­pa­gnant hors de la classe : tous les per­son­nels sont néces­saires au bien-être et à la réus­site des élèves. L’école manque de per­son­nels médi­co-sociaux, de vie sco­laire, d’AESH, de per­son­nels admi­nis­tra­tifs et techniques.
Depuis la révi­sion de la carte de l’éducation prio­ri­taire en 2015 et l’exclusion des lycées de la carte, la situa­tion s’est lar­ge­ment dégra­dée avec une homo­gé­néi­sa­tion par le bas des IPS (Indice de Position Sociale) des écoles et des col­lèges d’éducation prio­ri­taire à mesure que les IPS des éta­blis­se­ments pri­vés n’ont ces­sé de s’homogénéiser par le haut. Aujourd’hui, l’octroi de moyens sup­plé­men­taires en édu­ca­tion prio­ri­taire résulte de choix aca­dé­miques, de réa­li­sa­tion de pro­jets por­tés par des per­son­nels volon­taires ou de concen­tra­tion des moyens sur cer­tains niveaux (dédou­ble­ments par exemple) au détri­ment des autres. La poli­tique d’éducation prio­ri­taire ne conçoit pas la sco­la­ri­té de l’élève dans son entiè­re­té ni dans sa conti­nui­té. De même, les poli­tiques d’appels à pro­jets ou de dis­po­si­tifs d’excellence témoignent d’une vision méri­to­cra­tique de la lutte contre les inégalités.
L’éducation prio­ri­taire est mal­me­née, or elle reste la réponse la plus appro­priée pour lut­ter contre les inéga­li­tés sociales : don­ner plus de moyens aux élèves des milieux les plus défa­vo­ri­sés afin de leur per­mettre d’accéder à un même ser­vice public d’éducation. On constate aujourd’hui que les classes de col­lège ne sont pas beau­coup moins char­gées en édu­ca­tion prio­ri­taire (25,9 pour la moyenne natio­nale pour 24 en édu­ca­tion prio­ri­taire) et que les bâti­ments y sont lar­ge­ment insalubres.
Le rap­port de la Depp (Direction de l’évaluation, de la pros­pec­tive et de la per­for­mance) de juillet 2022, mis à jour en avril 2024, au sujet de l’éducation prio­ri­taire en France, donne des élé­ments sur les inéga­li­tés sociales en jeu : 84 % des col­lèges en REP+ et 34 % des col­lèges en REP accueillent au moins 60 % d’élèves d’origine sociale défa­vo­ri­sée, contre seule­ment 2 % dans les col­lèges publics hors édu­ca­tion prioritaire.
On peut à par­tir des résul­tats au DNB mesu­rer à quel point les inéga­li­tés sociales pro­duisent des inéga­li­tés sco­laires : en 2022, 23,7 % des élèves des col­lèges REP+ et 32,3 % des élèves des REP ont obte­nu une moyenne supé­rieure à 10/​20 aux épreuves écrites du diplôme natio­nal du bre­vet (DNB), contre 52,8 % dans les col­lèges publics hors édu­ca­tion prio­ri­taire. De même, la carte de 2015 exclut toute une par­tie des écoles et des éta­blis­se­ments dont les IPS des élèves ont évo­lué et qui devraient être clas­sés en édu­ca­tion prio­ri­taire. C’est le cas de l’école Mandela à Saint-Herblain, pour laquelle SUD édu­ca­tion est inter­ve­nu en CSA (Comité social d’administration) minis­té­riel, mais aus­si des écoles du Biollay (Chambéry), Notre Dame de Briançon (La Léchère), Roosevelt et Sierroz (Aix-les-Bains) dont les IPS sont sem­blables à ceux des écoles d’éducation prio­ri­taire du dépar­te­ment. Cette carte n’intégrant plus aucun lycée, elle prive éga­le­ment de nom­breux lycées, et en par­ti­cu­liers grand nombre de lycées pro­fes­sion­nels, de la poli­tique d’éducation prio­ri­taire, mal­gré des IPS infé­rieurs à ceux des col­lèges classés.
Enfin, alors que la lutte contre le har­cè­le­ment sco­laire était une prio­ri­té de l’ancien ministre de l’Éducation natio­nale, Gabriel Attal, on regrette que les paroles ne soient pas sui­vies d’actes. Toutes les poli­tiques de lutte contre le har­cè­le­ment, les dis­cri­mi­na­tions, les vio­lences ou pour amé­lio­rer le cli­mat sco­laire butent sur un manque de per­son­nels : la for­ma­tion conti­nue dis­pa­raît pour limi­ter les cours annu­lés faute de remplaçant·es, il n’y a pas assez de per­son­nels médi­co-sociaux, de Vie sco­laire pour accom­pa­gner, écou­ter et mettre en sécu­ri­té les élèves… Pour prendre un exemple concret, le défaut de for­ma­tion que subissent les per­son­nels explique en par­tie le chiffre inquié­tant de 85% des élèves qui ne béné­fi­cient pas des trois séances annuelles d’éducation à la sexualité.

Une école qui répond aux enjeux écologiques et de santé

L’école doit prendre sa part dans la recon­ver­sion éco­lo­gique de la socié­té : SUD édu­ca­tion reven­dique une approche glo­bale de la réno­va­tion du bâti sco­laire qui repré­sente 45% du patri­moine immo­bi­lier des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales. Pour tenir ses objec­tifs de réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre, les 140 mil­lions de m², où sont accueilli·es les élèves et les per­son­nels dans les écoles et éta­blis­se­ments sco­laires, doivent être réno­vés. Par ailleurs, les épi­sodes de cani­cule, qui se répètent à pré­sent chaque année, mais aus­si les inon­da­tions, mettent au jour la néces­si­té d’adapter le bâti pour garan­tir l’accès du ser­vice public d’éducation sur tous les ter­ri­toires. Un rap­port d’Oxfam France sur l’adaptation au chan­ge­ment cli­ma­tique montre que 1,3 mil­lions d’enfants en mater­nelle seront expo­sés à des cha­leurs excé­dant 35° dans les classes d’ici 2030, soit dans 5 ans et demi.
Selon le rap­port séna­to­rial de François Demarcq sur la réno­va­tion éner­gé­tique des bâti­ments sco­laires datant de 2020, 40 mil­liards d’euros sont néces­saires pour réno­ver le bâti sco­laire. Dans le cadre du pro­gramme EduRénov, la Banque des ter­ri­toires a annon­cé une enve­loppe de
2 mil­liards d’euros pour rénover
10 000 éta­blis­se­ments sco­laires d’ici à 2027 afin d’atteindre au mini­mum 40% d’économies d’énergie. À cela s’ajoutent 50 mil­lions pour accom­pa­gner les col­lec­ti­vi­tés territoriales.
SUD édu­ca­tion constate que l’enveloppe allouée est très insuf­fi­sante au regard des besoins chif­frés par le rap­port Demarcq. Le finan­ce­ment des réno­va­tions manque de trans­pa­rence et d’un pilo­tage glo­bal qui devrait répar­tir les moyens en fonc­tion des ter­ri­toires, de leurs carac­té­ris­tiques sociales et de leur vul­né­ra­bi­li­té face au dérè­gle­ment climatique.

Retrouvez nos revendications et notre analyse
pour la reconversion écologique de l’école
> sudeducation.org/tracts/brochure-n92-changer-lecole-pas-le-climat
pour la restauration scolaire et universitaire
> sudeducation.org/
mobilisons-nous-pour-des-restaurations-scolaires-et-universitaires-qui-promeuvent-lagroecologie-2

Face à l’amiante, réagissons !

L’amiante est un maté­riau hau­te­ment can­cé­ro­gène qui peut pro­vo­quer des mala­dies mor­telles dès la pre­mière expo­si­tion. En France, il a été inter­dit en 1997. 85% des écoles et éta­blis­se­ments sco­laires et uni­ver­si­taires ont été construits avant cette date, il y a donc de l’amiante dans la plu­part d’entre eux. La vétus­té de ces bâti­ments implique une dégra­da­tion gran­dis­sante des maté­riaux de construc­tion, qui libère de plus en plus de fibres d’amiante dans l’air. Aujourd’hui, le réchauf­fe­ment cli­ma­tique met en lumière les pro­blé­ma­tiques d’isolation ther­mique des bâti­ments. D’importants fonds sont déblo­qués pour une réno­va­tion ther­mique du bâti sco­laire et uni­ver­si­taire : cette réno­va­tion, qui va tou­cher un grand nombre de bâti­ments où l’amiante est pré­sent, ne doit se faire ni en igno­rant cet enjeu, ni au péril de la san­té des ouvrièr·es, des agent·es, des élèves et étudiant·es.
Le scan­dale de l’amiante qui a reten­ti avec fra­cas dans les années 1990 est donc loin d’être ter­mi­né, et nous ne sommes encore qu’aux pré­mices de la catas­trophe : les esti­ma­tions tablent sur 100 000 décès liés à l’amiante d’ici à 2050 selon le Haut Conseil de la san­té publique, qui se base sur plu­sieurs rap­ports de l’Institut natio­nal de veille sani­taire (InVS), rap­ports rédi­gés par des membres de la com­mu­nau­té scien­ti­fique. Combien de décès dans l’Éducation natio­nale, l’enseignement supé­rieur et la recherche ? Il y a donc là un enjeu de san­té publique majeur ! La cam­pagne de SUD édu­ca­tion contre l’amiante en milieu sco­laire et uni­ver­si­taire témoigne de la néces­si­té d’un inves­tis­se­ment mas­sif de l’État pour pro­cé­der au recen­se­ment des DTA (dos­siers tech­niques amiante) et aux opé­ra­tions de désa­mian­tage. Retrouvez notre cam­pagne en une de notre site inter­net. Le refus de l’administration de com­mu­ni­quer nombre de docu­ments admi­nis­tra­tifs (les dos­siers tech­niques amiante, mais aus­si le cal­cul de la répar­ti­tion des moyens entre éta­blis­se­ments, les moyens alloués au pri­vé, etc.), pose des pro­blèmes de trans­pa­rence et de démo­cra­tie. Il y a néces­si­té d’obliger les col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales à faire les diag­nos­tics et les tra­vaux qui s’imposent pour pro­té­ger la san­té des per­son­nels comme celle des élèves. Notre cam­pagne a mis au jour des situa­tions dra­ma­tiques : maté­riaux dégra­dés, actions cor­rec­tives immé­diates qui attendent des années, mise en dan­ger des per­son­nels et usa­gers, iner­tie des pou­voirs publics…

Pour financer ces travaux et aider les collectivités territoriales qui n’ont que peu de fonds, SUD éducation revendique la création d’un fonds de diagnostic et de désamiantage abondé par les industriels.

1.5 - Un budget 2025 qui met en danger l’Enseignement supérieur public 

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Une dépense publique par étudiant inégalitaire

La dépense publique par étudiant·e est de 8 800 € par an à l’université (en moyenne car la dépense est de 4 200 € à l’université de Nîmes contre 14 369 € à l’université Paris Saclay) mais elle est de 15 000 € par an en classe pré­pa­ra­toire, de 17 000 € par an à Sciences Po, de 42 000 € par an à l’École nor­male supé­rieure, et de 107 000 € à l’INSP (ex ENA). Ces inéga­li­tés de dépenses ren­forcent un ensei­gne­ment supé­rieur à 2 vitesses qui repro­duit les inéga­li­tés sociales et pousse de plus en plus d’étudiant·es vers les for­ma­tions pri­vées, faute de place dans le public.

Deux mesures fortes permettraient de corriger les inégalités :
• porter le financement des licences au niveau des CPGE coûterait 5 milliards d’euros
• mettre en place un salaire étudiant à 1000 € par étudiant·e, mesure évaluée aux alentours de 21 milliards d’euros.
Ces 2 mesures seraient compensables par :
• la fin du crédit d’impôt recherche (7,2 Md€) qui va pour moitié à 500 grandes entreprises privées et qui n’a aucun impact réel sur la recherche (ni même la recherche et développement dans le privé) ;
• la suppression des exonérations aux entreprises type CICE et CVAE : 20 milliards d’euros.

Crise de l’ESR public

Le nombre d’étudiant·es sur les dix der­nières années a aug­men­té de 16%. Mais sur la même période, le nombre de per­son­nels n’a lui aug­men­té que de 2,3%. Le taux d’encadrement s’est effon­dré de 12% entre 2008 et 2021, avec des inéga­li­tés énormes : 4,21 pour 100 étudiant·es à l’université de Nîmes, contre 14,39 pour 100 à l’université Paris Saclay ; soit un rap­port de un à trois. Il fau­drait désor­mais ouvrir plus de 11 000 postes pour retrou­ver les taux d’encadrement de 2010. Il faut éga­le­ment construire 10 uni­ver­si­tés de proxi­mi­té notam­ment pour per­mettre un réel maillage ter­ri­to­rial et des pos­si­bi­li­tés de pour­suite d’études. Un effort de recru­te­ment de 10 000 enseignant·es chercheur·ses et 10 000 BIATSS est néces­saire dès main­te­nant pour accueillir les 300 000 étudiant·es sans fac ou dans des for­ma­tions très éloi­gnées de leurs vœux. Une loi de pro­gram­ma­tion bud­gé­taire avec une tra­jec­toire de recru­te­ment de 60 000 per­son­nels sup­plé­men­taires sur 10 ans consti­tue la reven­di­ca­tion cen­trale de l’intersyndicale de l’ESR.
Depuis des années, les bud­gets de l’ESR sont très lar­ge­ment insuf­fi­sants et bien loin de l’objectif des 3% du PIB. Ces choix bud­gé­taires mettent en dan­ger l’ESR public, la for­ma­tion des étudiant·es et les condi­tions de tra­vail des per­son­nels. Une poli­tique de casse du ser­vice public pro­fite aux for­ma­tions pri­vées qui se déve­loppent de plus en plus (voir 6/​Le pri­vé à l’assaut de l’enseignement supérieur).

2 - « Le choc des savoirs contre l’école publique »

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Le 5 décembre 2023, l’ex-ministre Attal a fait une série d’annonces des­ti­nées à “éle­ver le niveau des élèves” en réponse aux “mau­vais résul­tats” de l’enquête PISA. Ces résul­tats montrent, d’une part, un décro­chage en fran­çais et en mathé­ma­tiques plus impor­tant en France que dans la moyenne des autres pays de l’OCDE et, d’autre part, que la France est l’un des 6 pays de l’OCDE où l’origine sociale pèse le plus sur les résul­tats des élèves. Les élèves issus de milieux défa­vo­ri­sés sont tou­jours sur-repré­sen­tés dans les filières pro­fes­sion­nelles. Mais plu­tôt que de don­ner davan­tage de moyens pour la sco­la­ri­té des élèves les plus fra­giles en rai­son de leurs dif­fi­cul­tés sco­laires et/​ou sociales, d’une his­toire fami­liale liée à l’immigration, de leur han­di­cap, l’ex-ministre Attal fait le choix de mesures qui sanc­tionnent, qui sélec­tionnent et qui trient ces élèves. La poli­tique édu­ca­tive du minis­tère répond aux pres­sions de la droite libé­rale et réac­tion­naire et de l’extrême-droite en repre­nant leurs propositions.
Au contraire, SUD édu­ca­tion porte des reven­di­ca­tions pour lut­ter contre les inéga­li­tés sociales en amé­lio­rant les condi­tions d’études des élèves : baisse du nombre d’élèves par classe, for­ma­tion des per­son­nels, accom­pa­gne­ment médi­co-social des élèves, recon­nais­sance du métier d’AESH par la créa­tion d’un véri­table statut…
PISA montre l’ampleur des inéga­li­tés sociales à l’œuvre à l’école et le gou­ver­ne­ment a choi­si avec sa réforme “choc des savoirs” de les aggraver !

2.1 - Une liberté pédagogique cadenassée dans les écoles 

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Dans le pre­mier degré, le minis­tère est tout à la fois reve­nu à une pra­tique régu­lière du redou­ble­ment « à l’ancienne » dont l’utilité est loin d’être prou­vée, a écrit de nou­veaux pro­grammes avec des objec­tifs annuels ren­for­cés et a déci­dé de contrô­ler davan­tage l’utilisation des manuels.
On assiste en effet à une véri­table infla­tion du volume des pro­grammes de fran­çais et de mathé­ma­tiques dans le pre­mier degré, pro­grammes qui ne se contentent plus de fixer les objec­tifs d’apprentissage géné­raux mais détaillent les situa­tions-types à pré­sen­ter aux élèves, pres­crivent des atten­dus chro­no­mé­trés (nombre de mots à lire, nombre de cal­culs à réus­sir, etc.) et mul­ti­plient les exemples nor­ma­tifs : le minis­tère a consta­té que les petits guides colo­rés envoyés dans les écoles n’étaient pas assez uti­li­sés et il décide donc de les copier/​coller dans les pro­grammes ! Les pro­jets de nou­veaux pro­grammes de fran­çais sont ain­si trois fois plus longs en cycle 1 et deux fois plus longs en cycle 2 tan­dis que les pro­jets de nou­veaux pro­grammes de mathé­ma­tiques sont sept fois plus longs en cycle 2 et dix fois plus longs en cycle 1. Cela risque de lais­ser peu de place aux autres domaines d’enseignement… Cette incroyable pro­lixi­té, qui rap­proche plu­tôt ces nou­veaux pro­grammes d’un manuel sco­laire ou d’un guide d’application (au total presque 100 pages de pro­grammes rien qu’en mathé­ma­tiques de la petite sec­tion au CE2 !), tra­hit à la fois une défiance vis-à-vis du tra­vail des professeur·es des écoles (dont la liber­té péda­go­gique se trouve remise en cause par des dizaines de pages pres­crip­tives) et une volon­té de cadrer très fer­me­ment les rythmes d’apprentissage.
Jusqu’alors les pro­grammes fixaient les objec­tifs à atteindre ; désor­mais ils risquent de fixer aus­si les méthodes à employer et les acti­vi­tés à pratiquer.
Conjuguée à la label­li­sa­tion des manuels sco­laires, cette infla­tion des pro­grammes s’inscrit dans la même logique que l’ensemble des mesures du « choc des savoirs » : for­ma­ter les ensei­gne­ments, fixer des normes d’apprentissage et écar­ter, de fait, les élèves qui ne peuvent pas s’y confor­mer. Avec un tel volume d’injonctions péda­go­giques, com­ment amé­na­ger des pos­si­bi­li­tés d’adaptation au rythme des élèves ? com­ment prendre en compte les élèves en dif­fi­cul­té ? Comment amé­na­ger les acti­vi­tés sco­laires pour les élèves à besoins particuliers ?
Dans les conte­nus, les pro­grammes de cycle 1 marquent une étape sup­plé­men­taire dans l’élémentarisation de l’école mater­nelle, qui se retrouve jusque dans le voca­bu­laire employé : le domaine « mobi­li­ser le lan­gage dans toutes ses dimen­sions » devient « fran­çais » et « acqué­rir les pre­miers outils mathé­ma­tiques » devient « mathé­ma­tiques ». Il ne s’agit pas là d’un simple effet de mode ter­mi­no­lo­gique (comme le rem­pla­ce­ment de « lexique » par « voca­bu­laire ») mais bien d’une évo­lu­tion du regard por­té sur l’école mater­nelle, qui est peu à peu trans­for­mée en une simple école pré­pa­ra­toire au CP.
En cycle 2, outre la sur­en­chère nor­ma­tive, l’évolution la plus notable concerne les pro­grammes de mathé­ma­tiques, qui sont cen­sés faire la part belle à la « méthode de Singapour ». Cela se tra­duit par l’introduction pré­coce de cer­taines notions (en par­ti­cu­lier les frac­tions et l’écriture déci­male des nombres) et par une des­crip­tion détaillée des méthodes à employer en numé­ra­tion et en réso­lu­tion de problèmes.
SUD édu­ca­tion exprime sa plus vive inquié­tude face à ces pro­grammes qui brident la liber­té péda­go­gique des enseignant·es et ne prennent abso­lu­ment pas en compte les rythmes d’apprentissage des élèves, au risque de nour­rir le décro­chage scolaire.
La même volon­té de nor­ma­li­sa­tion des méthodes d’enseignement se retrouve dans l’annonce d’une label­li­sa­tion des manuels sco­laires, à com­men­cer par les manuels de lec­ture de CP à la ren­trée 2024. Cette label­li­sa­tion doit s’accompagner d’investissements de l’État pour favo­ri­ser l’achat de manuels en CP et en CE1. Face à ce contrôle par l’État des manuels uti­li­sés (et qui concer­ne­ra d’ici 2026 tous les manuels du CP à la ter­mi­nale !), SUD édu­ca­tion rap­pelle son atta­che­ment à la liber­té péda­go­gique : ce sont les enseignant·es qui sont les plus à même de choi­sir la méthode et les outils les plus adap­tés à leurs élèves et à leur approche pédagogique.

2.2 - Vers la fin du collège unique 

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Le déman­tè­le­ment du col­lège unique est une reven­di­ca­tion de la droite et de l’extrême-droite. Le col­lège unique est un acquis social, c’est l’assurance pour tous les élèves d’avoir accès à un même ensei­gne­ment, qu’importe leur ori­gine et leur milieu social, afin de com­battre les déter­mi­nismes sociaux. L’hétérogénéité des classes est l’instrument de l’élévation du niveau moyen. Pour mettre en œuvre ce pro­jet de démo­cra­ti­sa­tion sco­laire, il faut don­ner les moyens néces­saires, or on constate un aban­don de l’éducation prio­ri­taire ain­si que la sup­pres­sion de 8865 postes dans le second degré depuis 2017 alors que le nombre d’élèves a aug­men­té de 7441 élèves.
Une des mesures phares du “choc des savoirs” est la créa­tion de groupes de niveaux, de besoins ou hété­ro­gènes en fran­çais et en mathé­ma­tiques en 6e et 5e. La mobi­li­sa­tion a per­mis de faire recu­ler le minis­tère dans sa volon­té d’imposer stric­te­ment cette mesure comme Blanquer l’avait fait pour ses réformes des lycées. Le minis­tère a fini par accep­ter une plus grande sou­plesse dans la mise en oeuvre de ces groupes puisqu’il n’est pas par­ve­nu à impo­ser le tri des élèves aux enseignant·es : on constate que 2/​3 des col­lèges n’ont pas appli­qué les groupes tels qu’ils avaient été annon­cés par Gabriel Attal. Cette situa­tion reste inac­cep­table et va à l’encontre de l’égalité de trai­te­ment des élèves sur le ter­ri­toire puisque leurs condi­tions d’études résultent de la capa­ci­té de leurs enseignant·es à amoin­drir cette mesure.
Par ailleurs, on constate que pour finan­cer ces groupes en fran­çais et en mathé­ma­tiques, les autres dis­ci­plines ont per­du les heures leur per­met­tant d’enseigner en demi-effec­tif sur cer­taines heures. Ce sont des pertes d’heures pour les langues vivantes, les sciences ou le fran­çais et les mathé­ma­tiques en 4e et en 3e, qui ne per­mettent plus de tra­vailler l’oral, de faire des expé­riences, de la méthodologie.
Les groupes de niveau sont par­ti­cu­liè­re­ment pré­ju­di­ciables pour le ser­vice public : la recherche a mon­tré que l’enseignement en groupes de niveaux a des effets délé­tères sur le niveau moyen des élèves. Les résul­tats des élèves les plus performant·es n’augmentent pas et, au contraire, les résul­tats des élèves en dif­fi­cul­té s’effondrent car les enseignant·es nivellent leurs attentes vers le bas dans ces groupes.
L’organisation en groupes de niveaux/​de besoins/​hétérogènes casse les dyna­miques d’apprentissage des classes, fra­gi­lise les élèves et désor­ga­nise les col­lèges. On peut citer le bilan catas­tro­phique de la casse des groupes-classes au lycée. C’est aus­si une casse en pro­fon­deur de nos métiers puisque les enseignant·es de fran­çais et de mathé­ma­tiques n’auront plus de classe en charge mais des groupes de niveau qui pour­ront évo­luer au cours de l’année : est-il tou­jours pos­sible d’être prof principal·e ou de tra­vailler sur un pro­jet inter­dis­ci­pli­naire si l’on n’a pas de classe ?

Attal a vou­lu aller plus loin dans le col­lège “à la carte” qui sélec­tionne les élèves avec des sco­la­ri­tés amé­na­gées autour du lire-écrire-comp­ter, mais aus­si avec des “pré­pa-lycée” qui tendent à exter­na­li­ser la dif­fi­cul­té sco­laire hors de la classe ordi­naire dans des dis­po­si­tifs qui enferment les élèves dans leurs dif­fi­cul­tés sco­laires. La ren­trée 2024 a mon­tré l’échec de ce dis­po­si­tif de pré­pa-seconde puisque celles-ci n’ont pas trou­vé leur public. Pire encore, dans cer­taines, ce sont des élèves qui ont obte­nu le DNB mais qui étaient sans affec­ta­tion qui y ont été scolarisés.
Enfin, le minis­tère entend agir sur le bre­vet pour lui don­ner à terme un vrai rôle de sélec­tion sociale (obten­tion indis­pen­sable pour accé­der au lycée, ren­for­ce­ment du poids des notes dans le contrôle conti­nu, aban­don des consignes de cor­rec­tions aca­dé­miques…). Si la fin des consignes de cor­rec­tion aca­dé­mique a bien été appli­quée sur la ses­sion 2024 du DNB, met­tant au jour un effon­dre­ment des notes dans les ter­ri­toires les plus défa­vo­ri­sés, la trans­for­ma­tion du DNB devrait être repous­sée à 2028, c’est-à-dire après les élec­tions pré­si­den­tielles. En atten­dant, le minis­tère sou­haite revoir le Socle et les programmes.
La poli­tique édu­ca­tive du minis­tère de l’Éducation natio­nale est par­ti­cu­liè­re­ment inquié­tante : la ministre Anne Genetet répète sans cesse qu’elle veut “éle­ver le niveau”, néan­moins elle refuse d’agir sur les véri­tables causes des dif­fi­cul­tés sco­laires. PISA a mon­tré que ce n’était pas tant le niveau qui avait bais­sé mais les inéga­li­tés sco­laires qui s’étaient creu­sées. Dès lors, il faut une poli­tique édu­ca­tive qui réponde spé­ci­fi­que­ment aux enjeux des inéga­li­tés en agis­sant dans les ter­ri­toires défa­vo­ri­sés via l’éducation prio­ri­taire. Enfin, le minis­tère semble n’avoir pas com­pris à quel point l’école s’est trans­for­mée du fait de l’inclusion sco­laire : il y a pour­tant urgence à don­ner les moyens aux per­son­nels pour accueillir véri­ta­ble­ment tou·tes les élèves dans les classes.

3 - En finir avec le financement public de l’enseignement privé

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« Je vais vous dire pour­quoi nous avons sco­la­ri­sé nos enfants à l’école Stanislas […] Notre aîné, Vincent, a com­men­cé comme sa maman à l’école publique, celle de Littré. Et puis la frus­tra­tion de ses parents, mon mari et moi, qui avons vu un paquet d’heures qui n’étaient pas sérieu­se­ment rem­pla­cées […] À un moment on en a eu marre comme des parents de mil­liers de famille qui ont fait un choix d’aller cher­cher une solu­tion dif­fé­rente », narre Amélie Oudéa-Castéra, fraî­che­ment nom­mée ministre de l’Éducation natio­nale, en jan­vier 2024. La polé­mique est lan­cée : l’école Littré, où étaient sco­la­ri­sés les enfants de l’ex-Ministre, n’a pas souf­fert des non rem­pla­ce­ments. La ministre a donc déni­gré le ser­vice public d’éducation pour jus­ti­fier son choix de sco­la­ri­ser ses enfants dans le pri­vé. La polé­mique se pour­suit avec la dif­fu­sion par Mediapart d’un rap­port acca­blant de l’inspection géné­rale de l’Éducation natio­nale sur le col­lège Stanislas où sont sco­la­ri­sés les enfants de la Ministre : on y lit des exemples de non-res­pect de la liber­té de conscience et des pro­grammes, et le rap­port relate des choix et des com­por­te­ments qui entre­tiennent des sté­réo­types de genre. Un débat s’ouvre alors sur le finan­ce­ment de l’école pri­vée et sur les carences en matière de contrôle des éta­blis­se­ments privés.
En effet, depuis 2017 on observe, d’une part un embour­geoi­se­ment des éta­blis­se­ments pri­vés et en paral­lèle une dégra­da­tion de la mixi­té sociale dans les éta­blis­se­ments publics, et d’autre part, un manque de finan­ce­ment et d’ambition pour l’école publique qui contraste avec les 10 mil­liards d’argent public attri­bués chaque année au privé.

3.1 - Le dualisme scolaire : d’où ça vient ?

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En 1959, la loi Debré éta­blit la pos­si­bi­li­té de pas­ser des contrats d’association entre les éta­blis­se­ments d’enseignement pri­vé et l’État. L’État s’engage à rému­né­rer les enseignant·es et à prendre en charge les frais de fonc­tion­ne­ment de ces éta­blis­se­ments qui doivent en retour dis­pen­ser un ensei­gne­ment conforme aux pro­grammes et garan­tir la liber­té de conscience et l’égal accès de tou·tes les élèves.
La loi Debré inter­vient dans un contexte de très forte aug­men­ta­tion du nombre d’élèves du fait de l’extension de la sco­la­ri­té obli­ga­toire jusqu’à 16 ans : c’est une loi de tran­si­tion adop­tée pour faire face à une situa­tion d’urgence. Elle tend éga­le­ment à rem­pla­cer pro­gres­si­ve­ment les enseignant·es reli­gieux par des enseignant·es laïcs. Avant 1959, les éta­blis­se­ments pri­vés sont glo­ba­le­ment finan­cés par les contri­bu­tions reli­gieuses et celles des familles. Les écoles pri­vées, appe­lées “écoles libres” depuis la charte consti­tu­tion­nelle de 1830 par oppo­si­tion aux écoles publiques, ne reçoivent aucuns fonds de l’État.
Le dua­lisme sco­laire naît offi­ciel­le­ment avec la loi Falloux du 15 mars 1850 qui dis­tingue les écoles publiques et les écoles pri­vées dites “libres” et garan­tit l’utilisation des fonds publics pour les écoles publiques uni­que­ment, sauf dans son article 69 qui pré­voit un pla­fon­ne­ment du finan­ce­ment public des éta­blis­se­ments pri­vés à hau­teur de 10% maxi­mum des dépenses annuelles de l’établissement. La loi Gobelet du 30 octobre 1886 réaf­firme la dis­tinc­tion de finan­ce­ment entre les éta­blis­se­ments publics et les éta­blis­se­ments “libres”.
La loi Debré rompt avec les lois pré­cé­dentes et sera sui­vie de toute une série de lois qui accroissent le finan­ce­ment public des éta­blis­se­ments pri­vés. Récemment la loi Blanquer pour une école de la confiance qui abaisse la sco­la­ri­té obli­ga­toire à 3 ans a eu pour consé­quence des trans­ferts d’argent public aux mater­nelles pri­vées du fait de l’obligation pour les com­munes de prendre en charge les dépenses de fonc­tion­ne­ment des écoles mater­nelles pri­vées dont le finan­ce­ment public était facul­ta­tif avant. De même avec le Pacte, dont on observe que mal­gré une enve­loppe pari­taire (400 mil­lions pour le pri­vé), il a per­mis de finan­cer davan­tage l’enseignement pri­vé que le public, et on constate que les éta­blis­se­ments pri­vés, moins contrô­lés que ceux du public, ont uti­li­sé le Pacte pour rému­né­rer d’autres missions.

3.2 - L’école privée, c’est 75% d’argent public !

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En 2022, l’enseignement pri­vé aurait per­çu 13,8 mil­liards d’euros, dont au moins 10,4 mil­liards d’argent public : 8,5 mil­liards viennent de l’État et 1,9 mil­liards des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales. La somme allouée au pri­vé est en hausse en 2024 puisque l’État a déjà ver­sé 9 mil­liards d’euros au pri­vé. Entre 2014 et 2024, le pro­gramme 139 du minis­tère de l’Éducation natio­nale qui finance le pri­vé a aug­men­té de 27%.
Le rap­port par­le­men­taire de la mis­sion d’information sur le finan­ce­ment public de l’enseignement pri­vé pré­sen­té par Paul Vannier et Christopher Weissberg le 2 avril 2024 montre le défaut de trans­pa­rence dans l’utilisation des fonds publics pour finan­cer l’enseignement pri­vé, en par­ti­cu­lier dans l’utilisation des fonds des col­lec­ti­vi­tés territoriales.
Il y a par exemple une forte pres­sion du pri­vé pour aug­men­ter le for­fait exter­nat à la charge des com­munes et pour y inclure la can­tine. Il est éga­le­ment très dif­fi­cile de véri­fier si les dota­tions des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales sont bien uti­li­sées pour finan­cer l’externat ou si, au contraire, l’établissement les uti­lise pour finan­cer son “carac­tère propre”, c’est-à-dire son carac­tère religieux.
Le scan­dale de l’établissement Stanislas où étaient sco­la­ri­sés les enfants de l’ex-ministre Amélie Oudéa-Castéra montre à quel point il est com­plexe de rompre un contrat d’association, alors même que des manques graves sont consta­tés : non res­pect de la liber­té de conscience, non res­pect des pro­grammes, des choix et des com­por­te­ments qui entre­tiennent des sté­réo­types de genre…
Enfin, l’État finance direc­te­ment l’inclusion sco­laire dans le pri­vé puisque les per­son­nels AESH rému­né­rés par l’Éducation natio­nale peuvent être affecté·es indif­fé­rem­ment dans le public comme dans le privé.
Les défen­seurs de l’enseignement pri­vé uti­lisent sou­vent l’argument selon lequel le coût par élève est plus fort dans le public que dans le pri­vé, néan­moins il faut fouiller la réa­li­té der­rière les chiffres. Le coût par élève est plus faible dans le pri­vé que dans le public car la masse sala­riale y est moins coû­teuse (moins de per­son­nels agrégé·es, davan­tage de contrac­tuels et de per­son­nels à temps incom­plet, pas d’éducation prio­ri­taire), les filières pro­fes­sion­nelles les plus coû­teuses se trouvent dans le public et le bâti sco­laire est pris en charge après les col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales contrai­re­ment au privé.
Le modèle fran­çais reste tou­te­fois aty­pique par­mi les pays de l’OCDE puisqu’aucun autre pays ne finance autant l’enseignement pri­vé en le contrô­lant si peu. L’État finance lui-même la mise en concur­rence du ser­vice public d’éducation, hors de tout contrôle. Cette situa­tion résulte en par­tie de la com­plai­sance des gou­ver­ne­ments pour l’enseignement pri­vé catho­lique et/​ou bour­geois. Jean-Michel Blanquer a sui­vi sa sco­la­ri­té à Stanislas, les enfants de Pap Ndiaye sont sco­la­ri­sés à l’École alsa­cienne, éta­blis­se­ment pari­sien pri­vé laïque sous contrat où étu­diait Gabriel Attal.

3.3 - Quel est le rôle du privé dans la ségrégation scolaire et sociale ? 

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Au début des années 1960, on comp­tait 1,3 mil­lion d’élèves dans le pri­vé, ils sont 2 mil­lions en 2022, soit 17% des élèves.
13,4% des élèves du pre­mier degré sont sco­la­ri­sés dans le pri­vé contre 21% dans le second degré.

L’implantation du pri­vé est très hété­ro­gène selon les ter­ri­toires et a évo­lué depuis 2017 : on compte plus de 50% d’établissements pri­vés en Vendée alors qu’ils sont moins de 5% dans la Creuse. Selon le cher­cheur Julien Grenet dans son rap­port “L’école publique a‑t-elle encore un ave­nir à Paris ?”, il pour­rait y avoir plus d’élèves sco­la­ri­sés dans le pri­vé que dans le public d’ici 10 ans à Paris. Le fort déve­lop­pe­ment du pri­vé a une forte inci­dence dans les éta­blis­se­ments publics. On constate que le pri­vé rural et moins bour­geois ferme peu à peu au pro­fit d’un pri­vé plus urbain des­ti­né aux élèves des milieux aisés.
En 2021, 40,1% des élèves sco­la­ri­sés au sein des col­lèges pri­vés sont issus de milieux très favo­ri­sés contre 19,5% des élèves des col­lèges publics. De même, à la ren­trée 2022, l’IPS moyen des élèves est plus éle­vé de 15 à 20 points dans le pri­vé. Le sec­teur pri­vé est res­pon­sable à hau­teur de 33 à 45% selon les ter­ri­toires de la ségré­ga­tion sociale entre les collèges.
À Paris, la ségré­ga­tion sociale des col­lèges résulte à 5% d’inscriptions dans le public mais hors sec­teur, à 49% de la ségré­ga­tion spa­tiale ou rési­den­tielle et à 46% des ins­crip­tions dans le privé.
La publi­ca­tion des Indices de Positionnement Sociaux (IPS) en octobre 2022 a mon­tré le lien entre ensei­gne­ment pri­vé et ségré­ga­tion sociale : lorsqu’un col­lège favo­ri­sé est situé près d’un éta­blis­se­ment défa­vo­ri­sé, dans 85% des cas c’est un éta­blis­se­ment pri­vé. De même, les éta­blis­se­ments de REP+ accueillent un public homo­gène aux IPS bas et les éta­blis­se­ments pri­vés accueillent un public homo­gène aux IPS éle­vés puisqu’ils sco­la­risent 40% des élèves favo­ri­sés. Les col­lèges publics non clas­sés accueillent des élèves aux pro­fils plus hétérogènes.
Dans l’enseignement pri­vé catho­lique, les moyens du pre­mier et du second degré sont fon­gibles, contrai­re­ment aux dota­tions publiques où le pre­mier et le second degré consti­tuent deux pro­grammes bud­gé­taires dis­tincts. Ainsi l’enseignement pri­vé catho­lique s’emploie à concen­trer ses moyens dans le second degré, et par­ti­cu­liè­re­ment en lycée pour atti­rer les élèves les plus aisés mais aus­si pour cap­ter les bons élèves du public.
L’enquête menée par France info et publiée en sep­tembre 2024 au sujet du meilleur finan­ce­ment des lycées pri­vés expose l’exemple du lycée public Victor Duruy à Paris qui dis­pose d’un H/​E (nombre d’heures par élève) de 1,04 heure par élève alors que le lycée pri­vé Stanislas, à peu près simi­laire en termes de taille et de com­po­si­tion sociale a un H/​E de 1,16. Le lycée public Duruy béné­fi­cie d’une cen­taine d’heures de cours heb­do­ma­daires en moins, c’est autant d’options ou de dédou­ble­ments de classe qui ne seront pas pro­po­sés à Duruy mais qui le seront à Stanislas. L’enquête montre que dans 19 aca­dé­mies sur 24, le nombre d’heures par élève (H/​E) est plus éle­vé dans les lycées pri­vés que dans les lycées publics. Alors que les réformes Blanquer ont lar­ge­ment abî­mé le lycée et que le nombre d’élèves par classe a explo­sé, la liber­té de répar­ti­tion des moyens dans l’enseignement pri­vé per­met aux lycées pri­vés de res­ter com­pé­ti­tif. De même, dans son rap­port de 2023, la Cour des Comptes notait que : « cer­tains rec­to­rats sont contraints d’accepter des ouver­tures de classes pro­po­sées par le réseau catho­lique ou d’autres réseaux, qui leur parais­saient par­fois dif­fi­ci­le­ment compréhensibles ».
Les socio­logues Stéphane Bonnéry et Pierre Merle ont éga­le­ment mon­tré que l’enseignement pri­vé a été mieux doté que le public pour faire face au baby boom des années 2000 puisque l’enseignement public a per­du 56000 postes d’enseignant·es depuis 1998, soit 7% de baisse alors que le pri­vé n’a per­du que 3800 postes, soit une baisse de 2,6%. Cet effort par­ti­cu­lier de l’État pour le pri­vé lui a per­mis de sco­la­ri­ser davan­tage d’élèves.
Nous ren­con­trons à pré­sent une baisse démo­gra­phique avec une baisse du nombre d’élèves dans le pre­mier degré, le pri­vé va devoir se mon­trer encore plus com­pé­ti­tif et cap­ter tou­jours plus d’élèves du public pour jus­ti­fier sa masse sala­riale. La dégra­da­tion du ser­vice public d’éducation sert bien enten­du cette poli­tique au pro­fit du privé.

3.4 - Une mixité sociale qui ne s’embarrasse pas de la lutte contre les inégalités sociales !

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Pendant son bref pas­sage au minis­tère de l’Éducation natio­nale, l ’ex-ministre Pap Ndiaye avait vou­lu ouvrir le dos­sier de la mixi­té sociale, néan­moins il n’était pas ques­tion pour l’ancien ministre de reve­nir sur la racine du pro­blème : le dua­lisme scolaire.
Le minis­tère envi­sa­geait au contraire la signa­ture d’un pro­to­cole avec le Secrétariat géné­ral de l’enseignement catho­lique pour aug­men­ter le nombre d’élèves issus de milieux défa­vo­ri­sés dans le pri­vé. Pour atteindre cet objec­tif, l’enseignement catho­lique a pris l’engagement d’augmenter de 50% d’ici 5 ans le nombre d’établissements pro­po­sant des tarifs adap­tés aux reve­nus des familles défa­vo­ri­sées pour mul­ti­plier par deux le nombre d’élèves bour­siers. Ainsi l’ex ministre Pap Ndiaye a par­ti­ci­pé à orga­ni­ser la fuite des meilleurs élèves de l’éducation prio­ri­taire vers le privé.
Pour atteindre cet objec­tif de déman­tè­le­ment de l’école publique, Pap Ndiaye avait annon­cé six mesures : la publi­ci­té par l’Éducation natio­nale des tarifs du pri­vé, l’augmentation de la part d’élèves à besoins par­ti­cu­liers dans le pri­vé, l’implantation du pri­vé dans les quar­tiers socia­le­ment mixtes, une com­mu­ni­ca­tion ren­for­cée entre les aca­dé­mies et le pri­vé et enfin un encou­ra­ge­ment des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales à attri­buer les mêmes aides sociales (can­tine, trans­ports…) aux élèves du pri­vé qu’à ceux du public et à finan­cer les tra­vaux de réno­va­tion éner­gé­tique des bâti­ments sco­laires du pri­vé. Elles ont don­né lieu à la signa­ture d’un plan Mixités en mai 2023 entre le minis­tère de l’Éducation natio­nale et le Secrétariat géné­ral de l’Enseignement catho­lique, à nou­veau on peut s’interroger sur le carac­tère laïque d’un tel accord.
Ce plan est par­ti­cu­liè­re­ment par­ti­cu­liè­re­ment scan­da­leux dans le contexte de sous-finan­ce­ment de l’école publique.
On constate à tra­vers les échanges qui ont eu lieu sur le sujet en 2023, que le minis­tère conçoit la mixi­té sociale comme une poli­tique au ser­vice de l’enseignement pri­vé. Au contraire, SUD édu­ca­tion reven­dique la réou­ver­ture du dos­sier de l’éducation prio­ri­taire : il faut don­ner aux écoles et aux éta­blis­se­ments sco­laires des quar­tiers défa­vo­ri­sés les moyens de lut­ter contre les inéga­li­tés sociales et non don­ner plus de moyens au pri­vé pour qu’il capte les meilleurs élèves du public !

Pour SUD éducation, il est plus que jamais temps de reprendre le débat sur la fin du dualisme scolaire :
• en mettant fin au financement public de l’enseignement privé
• en nationalisant l’enseignement privé, sans indemnité ni rachat, et en transférant ses personnels dans les corps correspondants de l’enseignement public

3.5 - Des établissements majoritairement catholiques : de véritables atteintes à la laïcité ! 

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On constate que l’enseignement pri­vé est actuel­le­ment très majo­ri­tai­re­ment catho­lique : 96% des 7500 éta­blis­se­ments pri­vés sont catho­liques, 35000 élèves sont sco­la­ri­sés dans du pri­vé laïque, 25000 élèves dans des éta­blis­se­ments juifs, 15000 élèves dans les éta­blis­se­ments d’enseignement en langue régio­nale, 3000 élèves dans des éta­blis­se­ments pro­tes­tants, 1300 dans des éta­blis­se­ments musulmans.
Le rap­port Vannier-Weissberg met en lumière une pra­tique qui porte atteinte au prin­cipe de laï­ci­té et qui n’est pas pré­vue par la loi Debré. En effet, l’État entre­tient une rela­tion pri­vi­lé­giée avec le SGEC (Secrétariat Général de l’Enseignement Catholique) dont le secré­taire géné­ral est nom­mé par la Conférence des évêques de France.

Depuis la loi de 1905, l’État “ne recon­naît, ne sala­rie ni ne sub­ven­tionne aucun culte” or ici l’État entre­tient un dia­logue de ges­tion, non pas avec chaque éta­blis­se­ment pri­vé par le biais des rec­to­rats comme cela est pré­vu par la loi Debré, mais avec un réseau d’enseignement catho­lique nom­mé par le pou­voir clé­ri­cal. On parle d’une “confes­sion­na­li­sa­tion” de la rela­tion entre l’État et les éta­blis­se­ments pri­vés. À SUD édu­ca­tion, on consi­dère que cette pra­tique aggrave l’atteinte à la laï­ci­té que consti­tue déjà le finan­ce­ment de l’enseignement pri­vé par l’argent public.
Chaque année, la DAF (Direction des Affaires Financières du minis­tère de l’Éducation natio­nale) négo­cie avec le SGEC la répar­ti­tion des moyens sur les ter­ri­toires. L’atteinte à la laï­ci­té est double puisque l’État négo­cie avec un réseau confes­sion­nel et, puisqu’il pri­vi­lé­gie le réseau catho­lique au détri­ment des autres réseaux : il applique des pro­cé­dures dis­tinctes selon les réseaux et selon les reli­gions, et sans que cela ne soit per­mis par la loi.
Une fois les moyens négo­ciés avec la DAF, le SGEC éla­bore une pro­po­si­tion de répar­ti­tion des moyens entre aca­dé­mies pour le pre­mier et le second degré confon­dus. Il peut ain­si pri­vi­lé­gier une stra­té­gie d’implantation dans cer­tains ter­ri­toires ou dans le second degré où il peut concen­trer davan­tage de moyens afin de garan­tir de meilleures condi­tions d’études à un public aisé. Le par­te­na­riat pri­vi­lé­gié entre l’État et le réseau d’enseignement catho­lique per­met à l’enseignement catho­lique de choi­sir stra­té­gi­que­ment com­ment et où répar­tir les moyens pour atti­rer davan­tage d’élèves comme le montre l’enquête de France info de sep­tembre 2024 sur les moyens des lycées privés.
Une fois que l’enseignement catho­lique s’est ser­vi géné­reu­se­ment dans la répar­ti­tion glo­bale du pri­vé, il reste une enve­loppe gar­dée par le minis­tère pour les réseaux hors ensei­gne­ment catho­lique pour ouvrir de nou­velles classes. On constate que le réseau catho­lique ouvre davan­tage de classes que tous les autres réseaux confondus.

Les affaires des lycées Averroès et Stanislas montrent bien la dif­fé­rence de trai­te­ment entre les éta­blis­se­ments catho­liques et musulmans.
Voici la décla­ra­tion com­mune Sud Éducation 59 et Sundep Solidaires aca­dé­mie de Lille au sujet du lycée Averroès :
Le 6 décembre 2024 le pré­fet de Région a déci­dé de pro­cé­der à la rési­lia­tion du contrat d’association du lycée Averroès à la ren­trée 2024.
Les syn­di­cats Sundep Solidaires Sud Enseignement pri­vé 59 – 62 et Sud Éducation Nord s’associent pour réaf­fir­mer l’une de leurs reven­di­ca­tions fon­da­men­tales : un ser­vice public unique de l’Éducation incluant l’ensemble des per­son­nels sous sta­tut de la fonc­tion publique.
Cependant, nos syn­di­cats dénoncent la déci­sion du pré­fet de pro­cé­der à la rési­lia­tion du contrat d’association du lycée Averroès. Cette déci­sion inter­vient dans un contexte poli­tique dans lequel les Français·es de confes­sion musul­mane sont accusé·s de com­mu­nau­ta­risme et rendu·es res­pon­sables de tous les dys­fonc­tion­ne­ments de notre socié­té. Cette isla­mo­pho­bie est ins­tru­men­ta­li­sée pour mas­quer les ques­tions impor­tantes : casse du ser­vice public, pau­vre­té crois­sante liée à la baisse des salaires et du pou­voir d’achat, urgence écologique…
Nos syn­di­cats dénoncent le deux poids, deux mesures : la fai­blesse voire l’absence de tout contrôle des éta­blis­se­ments pri­vés catho­liques sous contrat contraste avec les nom­breux contrôles et ins­pec­tions réa­li­sées au lycée Averroès. L’utilisation du for­fait d’externat dans l’enseignement pri­vé catho­lique sous contrat n’est jamais véri­fiée, les sub­ven­tions aux éta­blis­se­ments pri­vés de la région ou des dépar­te­ments ne répondent jamais à des déci­sions dont les prio­ri­tés d’investissement seraient déci­dées démo­cra­ti­que­ment, la bonne exé­cu­tion du contrat n’est jamais éva­luée (jour­nées de tra­vail payées aux enseignant·es sur des acti­vi­tés liées à l’aspect confes­sion­nel, recru­te­ment sur des bases confessionnelles…).
Les motifs invo­qués par le pré­fet pour rési­lier le contrat du lycée Averroès relèvent plus de l’insinuation que de l’argumentation. Ils négligent le der­nier rap­port de l’inspection géné­rale de 2020, qui fait l’éloge de l’engagement péda­go­gique des enseignant·es et de l’équipe édu­ca­tive du lycée Averroès. Le rap­port signale aus­si qu’« aucun de ces jeunes n’a paru sou­mis à une quel­conque contrainte ; au contraire beau­coup font preuve de maturité ».
Cette déci­sion plonge les per­son­nels de droit pri­vé et enseignant·es dans une situa­tion où leur ave­nir pro­fes­sion­nel est remis en cause : l’arrêt des sub­ven­tions liées au for­fait d’externat pose la ques­tion de leur éven­tuel licen­cie­ment. Les enseignant·es ne sont pas assuré·es de retrou­ver un emploi à la ren­trée pro­chaine, la garan­tie de l’emploi n’existant pas dans l’enseignement pri­vé sous contrat.
Les syn­di­cats Sundep Solidaires Sud Enseignement pri­vé 59 – 62 et Sud Éducation Nord apportent leur sou­tien au col­lec­tif de défense des per­son­nels d’Averroès et au CSE (comi­té social et éco­no­mique) de l’établissement, qui ont pré­sen­té un recours en annu­la­tion en réfé­ré de la déci­sion du préfet.
Ils estiment qu’en l’état le main­tien du contrat d’association est la meilleure solu­tion pour assu­rer un fonc­tion­ne­ment sous un contrôle nor­mal du rec­to­rat et des autres ins­ti­tu­tions compétentes.

3.6 - Tribune collective pour la défense de l’école publique 

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SUD édu­ca­tion est signa­taire avec la FSU, la CGT Educ’action, l’UNSA Education, l’Association des libres-pen­seurs de France, Céméa, le Comité natio­nale d’action laïque, la Coopérative des idées 93, la FCPE, la Fédération natio­nale des DDEN, la Fédération natio­nale de la libre-pen­sée, la Jeunesse en Plein Air, la Ligue des droits de l’homme, le Réseau fran­çais des villes édu­ca­tives, Solidarité laïque, la Ligue de l’Enseignement, le Mouvement natio­nal lycéen, l’Union étu­diante, l’Union natio­nale des étu­diants de France, l’ Union syn­di­cale lycéenne, de la tri­bune ci-après.
École de toute la jeu­nesse, l’École publique, laïque, gra­tuite et obli­ga­toire doit être LA prio­ri­té du pays.
Elle doit assu­rer l’égal accès de toutes et tous aux mêmes ensei­gne­ments, dans les meilleures condi­tions sur l’ensemble du ter­ri­toire. Cela passe par des poli­tiques qui assurent la mixi­té sociale et cassent les phé­no­mènes de ghet­toï­sa­tion et de sépa­ra­tisme social. Seule l’École publique laïque sco­la­rise tous les jeunes. Il est plus que temps de ces­ser de les divi­ser. L’enseignement pri­vé sous contrat, finan­cé à 73 % par l’argent public, sépare les élèves. Ceux de familles très favo­ri­sées, en consti­tuaient 26,4 % des effec­tifs en 2000, ils en repré­sentent 40,2 % en 2021. Les élèves de milieux favo­ri­sés ou très favo­ri­sés y sont majo­ri­taires (55,4 % en 2021 contre 32,3 % dans le public). Le public sco­la­rise trois fois plus d’élèves bour­siers (29,1%) que le pri­vé (11,8%)1. La concur­rence inégale et faus­sée de l’enseignement pri­vé sous contrat par­ti­cipe à la ghet­toï­sa­tion, notam­ment des quar­tiers popu­laires. Le finan­ce­ment col­lec­tif du sépa­ra­tisme social et sco­laire n’est pas accep­table, l’argent public doit aller à l’École publique. Cela per­met­tra notam­ment une gra­tui­té com­plète effec­tive, par­ti­cu­liè­re­ment utile à la sco­la­ri­sa­tion des élèves des familles les plus défavorisées.
Redonner espoir et ambi­tions à toute la jeu­nesse, néces­site de concré­ti­ser par­tout les visées éman­ci­pa­trices de l’École publique laïque.
Elle ne se défie pas de ses élèves. La laï­ci­té sco­laire doit leur per­mettre d’entrer dans une dimen­sion réflexive et cri­tique dans laquelle, dans le cadre de la loi, leurs ques­tion­ne­ments ou avis sont légi­times et mis en pers­pec­tive par les pro­grammes et les enseignements.
Laïque bien avant la République, l’École publique fait le choix des savoirs et de la rai­son pour par­ti­ci­per à la construc­tion de l’esprit cri­tique et d’une pleine liber­té de conscience. Elle pro­meut l’égalité de genre et com­bat toutes les formes de dis­cri­mi­na­tions et de racismes. Des citoyens et citoyennes, formé·es, dans le cadre répu­bli­cain du prin­cipe de laï­ci­té peuvent ain­si faire obs­tacle à toutes les dominations.
Faute de moyens et d’ambition pour son déve­lop­pe­ment, faute d’une défense véri­table face aux attaques qu’elle subit de la part des réac­tion­naires de tous bords, l’École publique laïque est aujourd’hui abi­mée, y com­pris par des réformes et expres­sions gouvernementales.
L’École publique laïque n’incarne pas un idéal éthé­ré der­rière lequel se réfu­gier à chaque drame pour mieux pour­suivre ensuite les poli­tiques de son affai­blis­se­ment. Les atten­tats isla­mistes comme les offen­sives réac­tion­naires (dans les­quelles fon­da­men­ta­lismes reli­gieux et extrême droite sont très actifs) contre des ensei­gne­ments, des éta­blis­se­ments et des per­son­nels, le rela­ti­visme scien­ti­fique galo­pant, la dés­in­for­ma­tion, rap­pellent les enjeux démo­cra­tiques inhé­rents au ren­for­ce­ment de l’école laïque. Les poli­tiques publiques, y com­pris de l’institution sco­laire, doivent ces­ser de l’affaiblir.
Pour une école plei­ne­ment utile à la jeu­nesse, il faut inves­tir dans la for­ma­tion ini­tiale et conti­nue de tous les per­son­nels, dans une reva­lo­ri­sa­tion sans condi­tion de leur rému­né­ra­tion, leur garan­tir un cadre de tra­vail res­pec­tueux de leurs hautes qua­li­fi­ca­tions et de leur per­sonne. Il faut des actes pour assu­rer la pro­tec­tion, le res­pect et la valo­ri­sa­tion des per­son­nels comme de leurs métiers.
L’École publique laïque doit rece­voir les moyens humains et maté­riels lui per­met­tant de faire vivre ses ambi­tions intel­lec­tuelles et civiques.
Elle crée les condi­tions de l’émancipation en pro­té­geant de tout pro­sé­ly­tisme et en fai­sant ces­ser en son sein toutes les assi­gna­tions. Cela doit être pré­ser­vé et expli­qué. Y faire venir, étu­dier, s’épanouir tous les jeunes doit être une exi­gence natio­nale. Ce n’est pas le pro­jet de celles et ceux qui pré­tendent défendre la laï­ci­té de l’école, soit pour stig­ma­ti­ser les musul­mans, soit pour y per­pé­tuer leurs tutelles morales, reli­gieuses, sociales, éco­no­miques. Face à ces défis, il faut que le prin­cipe de laï­ci­té et les condi­tions de son appli­ca­tion, per­mettent l’accueil de tous les élèves sans dis­cri­mi­na­tions et sans conces­sions à l’égard de toutes les formes de pres­sions ou de prosélytisme.
L’incarnation quo­ti­dienne de la laï­ci­té à l’école ne doit en aucun cas la déna­tu­rer en la fai­sant pas­ser pour ce qu’elle ne peut pas être, une règle dis­ci­pli­naire ou une doxa par­mi d’autres. L’école laïque doit faire per­ce­voir l’utilité pour toutes et tous du prin­cipe de laïcité.
Il est urgent que la République sou­tienne plei­ne­ment son école, la seule école de toute la jeu­nesse vivant dans ce pays. Ensemble nous nous tenons debout, afin de construire le rap­port de force néces­saire pour réa­li­ser par­tout les ambi­tions de l’École publique laïque.
1·Cour des comptes, Rapport public thé­ma­tique, L’ENSEIGNEMENT PRIVÉ SOUS CONTRAT, Juin 2023.

3.7 - Quand l’État développe le financement public de l’enseignement privé hors contrat…

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Communiqué du 16 octobre 2024 de la FSU, UNSA, FO, CGT Educ’Action, SNALC, SUD édu­ca­tion, FCPE, JPA
La loi « ave­nir pro » de 2018 a per­mis la pro­mo­tion des écoles de pro­duc­tion. Le gou­ver­ne­ment veut les déve­lop­per en ren­for­çant le finan­ce­ment public de ces éta­blis­se­ments pri­vés hors contrat et ain­si atteindre la cen­taine d’ici 2028.
Lors du Conseil supé­rieur de l’Éducation le 10 octobre, l’examen de leur recon­nais­sance par l’État était à nou­veau à l’ordre du jour. Les représentant·es des orga­ni­sa­tions syn­di­cales et des asso­cia­tions de parents d’élèves, ont une fois de plus dénon­cé le déve­lop­pe­ment impor­tant de ces écoles pri­vées et le finan­ce­ment public dont elles béné­fi­cient. Alors que dans le même temps, l’enseignement pro­fes­sion­nel public voit dimi­nuer ses moyens, que toute l’Éducation est sou­mise à une cure d’austérité, et que plus de 13 000 élèves dont 9 000 en lycée pro­fes­sion­nel, sont resté·es dans l’attente d’une affec­ta­tion en lycée à la ren­trée faute de capa­ci­tés d’accueil suf­fi­santes dans le réseau public, ce finan­ce­ment du pri­vé hors contrat est scandaleux.
Les écoles de pro­duc­tion ne connaissent pas la crise !
Ces écoles béné­fi­cient mas­si­ve­ment de l’argent public, par l’usage gra­tuit d’équipements muni­ci­paux et sur­tout sous la forme de sub­ven­tions. L’argent public semble cou­ler à flot dans une totale opa­ci­té ! Les col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales (régions, métro­poles, com­mu­nau­tés de com­munes, muni­ci­pa­li­tés…), l’État, via les direc­tions régio­nales de l’économie, de l’emploi et des soli­da­ri­tés (DREETS), et tous les dis­po­si­tifs de finan­ce­ment comme « France relance » ou le Fonds natio­nal d’aménagement et de déve­lop­pe­ment du ter­ri­toire, sont mis à contri­bu­tion. Alors qu’un·e élève en lycée pro­fes­sion­nel public coûte en moyenne 13 760€, cer­taines écoles de pro­duc­tion affichent 29 700€ par per­sonne, soit plus du double, finan­cés à 85% avec des fonds publics.
Les coûts de for­ma­tion, astro­no­miques, peuvent se chif­frer à plu­sieurs dizaines de mil­liers d’euros par an et par élève, un mon­tant net­te­ment supé­rieur à ceux de la sco­la­ri­sa­tion d’un·e élève en LP, ce qui n’empêche pas un taux de décro­chage très important.
Au-delà d’un modèle éco­no­mique fon­dé sur la cap­ta­tion de fonds publics et la défis­ca­li­sa­tion de fonds pri­vés via le mécé­nat, il s’agit aus­si de confier la for­ma­tion de jeunes à des entre­prises locales, sans autre ambi­tion que de répondre à une demande locale. Il s’agit de pro­mou­voir un modèle de for­ma­tion écu­lé, la for­ma­tion « sur le tas » d’une main d’œuvre qui tra­vaille gra­tui­te­ment pour des entre­prises et sans la pro­tec­tion juri­dique que confèrent les sta­tuts de sta­giaires ou d’apprenti·es. Quid des enjeux de sécu­ri­té au tra­vail, de lutte contre le har­cè­le­ment et contre les vio­lences sexistes et sexuelles ? Quid de la qua­li­té des conte­nus ensei­gnés et de leur exhaus­ti­vi­té ? Tout cela appa­raît visi­ble­ment comme secon­daire à des ministres et des élu·es, qui pro­meuvent, chaque fois qu’ils et elles le peuvent, ces écoles avec force d’inaugurations en grande pompe et d’interviews dans la presse régionale.
Pour les orga­ni­sa­tions et asso­cia­tions FSU , UNSA, FO, CGT Educ’Action, SNALC, SUD, FCPE, JPA, il est urgent de mettre fin à ce sys­tème qui gas­pille l’argent public et orga­nise l’exploitation de jeunes, très sou­vent mineur·es, pour une for­ma­tion sans aucune garan­tie de qua­li­té et de réus­site aux exa­mens. Tout cela relève de la gabe­gie et de l’escroquerie ! Pour obte­nir une pre­mière qua­li­fi­ca­tion pro­fes­sion­nelle par un diplôme, gage d’une for­ma­tion pro­fes­sion­nelle et géné­rale glo­bale et éman­ci­pa­trice, le finan­ce­ment alloué à ces écoles de pro­duc­tions doit ces­ser et reve­nir à l’École publique.

4 - Pour lutter contre les inégalités, relancer l’éducation prioritaire !

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4.1 - Un premier bilan des dédoublements en éducation prioritaire

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Sujet de van­tar­dise pour les dif­fé­rents gou­ver­ne­ments Macron parce qu’unique preuve de sa poli­tique « sociale » vis-à-vis de l’école, le dédou­ble­ment des CP-CE1 et depuis peu GS en REP+ n’est pour­tant pas une franche réus­site dans les faits. Réalisé à moyens constants, en sup­pri­mant au pas­sage le dis­po­si­tif « + de maitres·ses que de classes » qui lais­sait aux équipe une flexi­bi­li­té d’adaptation à leurs réa­li­tés de ter­rain et sans vision de la sco­la­ri­té glo­bale des élèves en dif­fi­cul­té, elle sert plus d’outil de com­mu­ni­ca­tion et per­met au pas­sage de faire l’impasse sur les pro­blé­ma­tiques sociales qui sous-tendent les dif­fi­cul­tés des élèves en REP et au-delà.
Au delà du manque de résul­tats fla­grants chif­frés, la mise en place d’une telle réforme avec la méthode auto­ri­taire que l’on connaît au pré­sident actuel a eu pour consé­quence une appli­ca­tion sans aucune prise en compte de la réa­li­té du ter­rain : absence dans de nom­breuses écoles de locaux suf­fi­sants pour de réels dédou­ble­ments, avec pour consé­quence la nais­sance sur le tas des classes en « co-ani­ma­tion », mise à mal de struc­tures d’écoles impli­quant des doubles/​triples niveaux cycle 2/​cycle 3 qui per­met­taient de lis­ser les effec­tifs sur toutes les classes, fai­sant méca­ni­que­ment aug­men­ter les effec­tifs des classes de cycle 3 ou encore der­niè­re­ment avec le dédou­ble­ment en mater­nelle, arrêt sou­dain et for­cé de struc­tures d’école avec des classes en triples niveaux dont les avan­tages péda­go­giques sont nom­breux pour les enfants.
Toutes ces consé­quences, qui n’ont abso­lu­ment pas été anti­ci­pées et qui ne peuvent être chif­frées, génèrent conti­nuel­le­ment des ten­sions dans les équipes, entre la dis­pa­ri­té d’effectif entre les niveaux et la prise en charge for­cée de classe en « co-ani­ma­tion » lors de la répar­ti­tion des classes entre les collègues.
La réduc­tion de la lati­tude qu’ont les équipes concer­nant la struc­ture d’école au pré­texte de la réforme consti­tue une énième attaque contre le fonc­tion­ne­ment col­lé­gial des équipes et vient plus désor­ga­ni­ser les écoles qu’elle n’apporte aux élèves. On peut d’ailleurs noter qu’à moyens humains égaux dans les écoles REP mais en lais­sant com­plè­te­ment la main aux équipes sur la struc­ture d’école à adop­ter comme cela était le cas avant cette réforme, le lis­sage des effec­tifs via les doubles niveaux per­met­trait sou­vent d’atteindre l’effectif idéal de 18/​19 élèves par classe, mais du CP au CM2 dans ce cas là…

4.2 - Les élèves des lycées de banlieues populaires : les grand·es oublié·es de l’éducation prioritaire

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La France est régu­liè­re­ment épin­glée dans les enquêtes inter­na­tio­nales PISA pour le carac­tère pro­fon­dé­ment inéga­li­taire de son sys­tème sco­laire. D’une part, les écarts de per­for­mance entre élèves y sont par­ti­cu­liè­re­ment amples ; d’autre part et sur­tout, ces per­for­mances sont très étroi­te­ment liées à la pro­fes­sion de leurs parents. Loin d’ouvrir à chacun·e une des­ti­née sociale décon­nec­tée de son ori­gine, l’école repro­duit les inéga­li­tés de nais­sance. Ainsi, à la ren­trée 2021, en pre­mière et ter­mi­nale géné­rale, les enfants de cadres repré­sen­taient 35 % des élèves contre 15 % pour les enfants d’ouvriers, alors même qu’à l’entrée en 6ème la part des élèves issu·es de ces deux caté­go­ries est identique.
La poli­tique d’éducation prio­ri­taire et son prin­cipe consis­tant à « don­ner plus à ceux qui ont le moins » pré­sente certes des limites en termes de réduc­tion des inéga­li­tés. D’une part, le manque de volon­ta­risme fait que la réduc­tion des effec­tifs par classe reste minime en col­lège comme le résume le slo­gan « REP+, rien en plus ! ». D’autre part, 3/​4 des élèves issus de milieux popu­laires en pri­maire et au col­lège sont scolarisé·es dans des éta­blis­se­ments qui ne sont pas situés en édu­ca­tion prio­ri­taire. Mais, mal­gré ces imper­fec­tions, l’éducation prio­ri­taire est la seule poli­tique expli­ci­te­ment pen­sée pour réduire l’inégalité des chances. Sans cette poli­tique com­pen­sa­trice, les inéga­li­tés auraient pro­gres­sé davan­tage encore : ce sont les expert·es sollicité·es par le minis­tère elleux-mêmes qui l’affirment. Il faut donc non seule­ment défendre, mais étendre l’éducation prioritaire.

Or, depuis 2016, les lycées ont été sor­tis de l’éducation prio­ri­taire, la nou­velle carte publiée sous Peillon, puis Vallaud-Belkacem, les en ayant exclus mal­gré la mobi­li­sa­tion por­tée par le col­lec­tif Touche pas ma ZEP. Pendant plu­sieurs mois, ce col­lec­tif d’une cen­taine de lycées, tota­le­ment auto-orga­ni­sé et avec le sou­tien des fédé­ra­tions CGT et SUD édu­ca­tion et de cer­taines sec­tions aca­dé­miques du SNES, a mené la lutte pour obte­nir la mise en place d’un sta­tut et d’une carte élar­gie de l’éducation prio­ri­taire pour les lycées avec la garan­tie d’effectifs limi­tés signi­fi­ca­ti­ve­ment, des moyens sup­plé­men­taires pour dédou­bler les classes et accom­pa­gner davan­tage les élèves, le main­tien et l’élargissement à tous les per­son­nels d’une indem­ni­té et de com­pen­sa­tions spé­ci­fiques pour sta­bi­li­ser les équipes.
Les ministres – nombreux·ses – qui se sont succédé·es depuis n’ont bien enten­du jamais rou­vert ce dos­sier. Depuis, on fait comme si les dif­fi­cul­tés éco­no­miques et sociales ren­con­trées par nos élèves dans leur envi­ron­ne­ment social et ter­ri­to­rial dis­pa­rais­saient comme par magie durant l’été entre la fin de la troi­sième et le début de la seconde. Les consé­quences ont été rapi­de­ment visibles dans nos éta­blis­se­ments situés dans les ban­lieues populaires.

4.3 - La lutte des lycées des quartiers populaires du Rhône

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Il y a 3 ans, suite aux nou­velles attaques du rec­to­rat de Lyon qui avait déci­dé de divi­ser par deux l’APM (allo­ca­tion pro­gres­sive de moyens) des lycées avec un faible IPS (indice de posi­tion sociale), des militant·es SUD édu­ca­tion ont déci­dé de consti­tuer un col­lec­tif des lycées des quar­tiers popu­laires du Rhône. Depuis, nous orga­ni­sons chaque année des mobi­li­sa­tions com­munes pour dénon­cer le manque de moyens humains dans nos éta­blis­se­ments. Ce col­lec­tif regroupe actuel­le­ment les lycées Brel et Sembat-Seguin à Vénissieux ; Doisneau à Vaulx-en-Velin ; Faÿs et Brossolette à Villeurbanne ; et Camus-Sermenaz à Rillieux-la-Pape.
Non seule­ment le rec­to­rat ne recon­naît tou­jours pas la néces­si­té de nos éta­blis­se­ments d’avoir des classes à effec­tifs allé­gés, mais depuis quelques années, nous consta­tons au contraire une hausse des effec­tifs avec des classes pou­vant aller jusqu’à 37 élèves dans des classes de filières technologiques.
Par ailleurs, en cette ren­trée, le Rectorat de Lyon a sup­pri­mé près de 4 500 HSE des­ti­nées à accom­pa­gner les élèves des quar­tiers popu­laires de nos 6 éta­blis­se­ments, ce qui met en péril de nom­breux dis­po­si­tifs de sou­tien à nos élèves, d’entraînements aux oraux du bac, de pro­jets d’ouverture cultu­relle et même les heures pour­tant obli­ga­toires d’éducation à la vie affec­tive, rela­tion­nelle et sexuelle. Enfin, la sup­pres­sion de toute boni­fi­ca­tion pour l’exercice dans les lycées des quar­tiers popu­laires (ni prime, ni boni­fi­ca­tion pour les muta­tions) et la dégra­da­tion des condi­tions de tra­vail et d’enseignement entraînent un fort turn-over qui com­plique le tra­vail en équipe pour­tant essen­tiel à nos élèves.
Dans le même temps, une enquête de Franceinfo nous révèle que dans notre dépar­te­ment com­por­tant une pro­por­tion impor­tante d’établissements pri­vés catho­liques, les lycées pri­vés béné­fi­cient d’un indi­ca­teur H/​E (nombre d’heures de dota­tion divi­sé par le nombre d’élèves d’un éta­blis­se­ment) plus éle­vé que celui des lycées publics. Nous avons par ailleurs récem­ment appris que l’APM qui était jusqu’alors attri­buée uni­que­ment aux lycées publics en fonc­tion de leur IPS était désor­mais uti­li­sée pour cer­tains lycées pri­vés. Le rec­to­rat choi­sit donc de finan­cer les éta­blis­se­ments pri­vés au détri­ment de nos élèves des quar­tiers popu­laires ! Ce manque de moyens et l’impossibilité de tra­vailler en effec­tifs réduits péna­lisent tou­jours les mêmes élèves : les filles qui ont moins d’espace de parole et ne peuvent pas prendre confiance en elles, les élèves les plus fra­giles sur le plan métho­do­lo­gique, les élèves en souf­france qu’on n’épaule pas comme on devrait pou­voir le faire. Ce sont donc toutes les inéga­li­tés sociales qui s’aggravent : sexisme, vali­disme, racisme… pros­pèrent d’autant plus que les élèves sont privé·es de leurs droits à une édu­ca­tion de qualité.
Le 26 sep­tembre der­nier, nous étions à nou­veau en grève avec des taux de gré­vistes allant de 40 à 60 % des enseignant·es et des vies sco­laires fer­mées. Devant le suc­cès de la mobi­li­sa­tion, le Rectorat nous a fina­le­ment reçu·es pour assé­ner sans sour­ciller qu’ “il n’y a aucune cor­ré­la­tion entre le nombre d’élèves par classe et les inci­dents dans vos éta­blis­se­ments » et nous annon­cer que la seule ouver­ture sur les moyens consis­tait à prendre davan­tage de Pactes !
Nous conti­nue­rons donc de nous battre pour le retour des lycées dans le giron de l’éducation prio­ri­taire et pour des seuils d’effectif par classe de 25 élèves en seconde et en séries tech­no­lo­giques, 15 élèves en voie pro­fes­sion­nelle et 30 élèves dans les séries générales.
Il est urgent de remettre la ques­tion de la réduc­tion des inéga­li­tés sco­laires liées à l’origine sociale au cœur de nos batailles syn­di­cales. Notre fédé­ra­tion doit jouer un rôle moteur pour étendre ce com­bat bien au-delà des quelques éta­blis­se­ments for­te­ment mobi­li­sés dans le Rhône.

5 - Le système scolaire français creuse les inégalités et contribue à perpétuer des déterminismes liés au colonialisme

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L’État fran­çais a consi­dé­ré l’éducation comme un ins­tru­ment de fran­ci­sa­tion dans les ter­ri­toires de son Empire colo­nial, sans prendre en compte les popu­la­tions, ce qui a influen­cé la façon de conce­voir les poli­tiques édu­ca­tives aujourd’hui mises en place : “Éduquer mais sou­mettre, ins­truire mais subordonner”.

L’école de Jules Ferry : colonialiste et raciste

Avant les lois Ferry (de 1881 et 1892), l’instruction des indi­gènes ne figure pas au pro­gramme colo­nial. Jules Ferry consi­dère que l’école pour les indi­gènes est le “moyen le plus effi­cace pour asseoir la domi­na­tion ter­ri­to­riale de la France et péné­trer les âmes conquises”. Sa phrase du 28 juillet 1885, “les races supé­rieures ont un droit sur les races infé­rieures”, en sera le cadre.
De la fin du dix-neu­vième siècle au début du ving­tième, les poli­tiques édu­ca­tives contri­buent sou­vent à ren­for­cer des hié­rar­chies raciales déjà anciennes entre colo­nies et métropole.
Les écoles, convain­cues de la vali­di­té du modèle assi­mi­la­tion­niste répu­bli­cain, ont conti­nué à adop­ter un modèle d’enseignement mono­lingue qui ne prend pas en consi­dé­ra­tion les par­ti­cu­la­ri­tés socio­lin­guis­tiques des élèves. L’histoire euro-cen­trée refuse aux popu­la­tions le rôle d’acteurs, niant ain­si leurs rap­ports au temps et aux connaissances.
L’idéologie d’une mis­sion civi­li­sa­trice jus­ti­fiait des pra­tiques bru­tales. Les enfants arra­chés à leur envi­ron­ne­ment fami­lial se retrou­vaient en situa­tion d’aliénation, d’acculturation
Une école éli­tiste et dis­cri­mi­na­toire avec une his­toire de la sco­la­ri­sa­tion des enfants non blancs mar­quée par une longue période de ségré­ga­tion dans des « écoles indi­gènes » mis­sion­naires puis offi­cielles : les petit·es « indi­gènes » sont exclu·es du sys­tème sco­laire fran­çais réser­vé aux enfants des colons, et il leur est impos­sible de suivre les mêmes pro­grammes ou de pas­ser les mêmes examens.
La fin de l’indigénat et l’accession à la citoyen­ne­té des dif­fé­rentes popu­la­tions marquent la fin de cette époque au len­de­main de la seconde guerre mon­diale. Au nom de l’assimilation, l’école fran­çaise telle qu’elle fonc­tionne en « métro­pole » est impo­sée à tou·tes.
Situation en Martinique, Guyane, Guadeloupe, La Réunion, Mayotte et Kanaky : échec de l’école coloniale
Malgré toutes les limites des ins­ti­tu­tions liées aux Nations Unies, l’écart dans la mise en œuvre des droits des enfants entre l’Hexagone et les der­nières colo­nies fran­çaises dénom­mées “col­lec­ti­vi­tés ter­ri­toires d’Outre mer” (CTOM) a fait l’objet d’une étude d’UNICEF France dont les conclu­sions mettent en évi­dence des inéga­li­tés endémiques.
En ce qui concerne l’accès à l’éducation, les CTOM accueillent 6 % de la popu­la­tion fran­çaise adulte en âge scolaire.
Toutefois, beau­coup d’enfants res­tent « invi­sibles » aux yeux des sta­tis­tiques et ne sont pas ins­crits à l’école, notam­ment en rai­son de contraintes admi­nis­tra­tives, de pra­tiques dis­cri­mi­na­toires, d’un éloi­gne­ment géo­gra­phique des écoles ou d’une prise en compte inadé­quate du plu­ri­lin­guisme des élèves. Bien qu’il n’y ait pas de don­nées natio­nales sur le sujet, les esti­ma­tions montrent que, en Guyane, envi­ron 10 000 enfants sont hors de l’école et qu’ils seraient entre 5 379 et 9 575 dans cette situa­tion à Mayotte.
De plus, le pro­blème de la langue d’enseignement, qui ne convient pas aux élèves allo­phones, a des consé­quences directes sur les apti­tudes et le suc­cès sco­laire des jeunes. Près de 30 % des élèves en Guadeloupe, à la Réunion et en Martinique ont des pro­blèmes de lec­ture, et plus de 50 % en Guyane et à Mayotte, contre seule­ment 12 % des gar­çons et 9,1 % des filles au niveau national.
Les enfants d’origine étran­gère ou en situa­tion de migra­tion – et même s’ils devraient rece­voir des mesures de pro­tec­tion spé­ciales – sont sou­vent vic­times de dis­cri­mi­na­tion et sont par­ti­cu­liè­re­ment vul­né­rables aux vio­la­tions de leurs droits dans les CTOM. De plus, même si la France a été plu­sieurs fois condam­née par la Cour euro­péenne des droits de l’Homme (CEDH), elle fait tou­jours appel à l’enfermement admi­nis­tra­tif des familles avec enfants et des mineurs iso­lés dans la mise en place de sa poli­tique migra­toire. Le cas de cette excep­tion à la loi est par­ti­cu­liè­re­ment fré­quent à Mayotte : en 2021, par­mi les 3 211 enfants déte­nus en France, 3 135 ont été déte­nus au centre de réten­tion de Mayotte.
« Ces inéga­li­tés au sein du ter­ri­toire fran­çais sont alar­mantes. Les pou­voirs publics se doivent de garan­tir un égal accès aux droits de tous les enfants sur le ter­ri­toire, indé­pen­dam­ment de leur lieu de rési­dence. Agir pour l’effectivité des droits de l’enfant n’est pas seule­ment un moyen de construire une socié­té plus juste aujourd’hui, mais un inves­tis­se­ment pour construire nos socié­tés de demain », déclare Adeline Hazan, pré­si­dente de l’UNICEF France.
En dépit de fortes dis­pa­ri­tés d’un ter­ri­toire à l’autre, voi­ci quelques chiffres :
• 680 000 élèves sont sco­la­ri­sés dans les CTOM, soit 6 % de l’ensemble de la popu­la­tion sco­laire fran­çaise, au sein de 1 900 écoles, et 650 col­lèges et lycées.
• 93 % des élèves sont sco­la­ri­sés dans l’enseignement public dans les DROM et 76 % dans les autres CTOM (contre 86,6 % dans l’Hexagone)
Ainsi, à Mayotte, 99,6 % des élèves sont sco­la­ri­sés dans l’enseignement public alors qu’ils ne sont que 53,9 % à Saint-Pierre-et-Miquelon, et l’enseignement est exclu­si­ve­ment dans le pri­vé hors contrat à Wallis-et-Futuna. Les Antilles et La Réunion connaissent une aug­men­ta­tion conti­nue de la part de la popu­la­tion sco­la­ri­sée dans l’enseignement pri­vé (+7,5 % en Guadeloupe et +17,5 % en Martinique dans le pre­mier degré entre 2009 et 2018) que le Sénat attri­bue à des « dis­pa­ri­tés cultu­relles », notam­ment à Saint-Martin, ou à une « méfiance envers le sec­teur public ». En Guyane, entre 5 900 enfants (Insee, 2019) et 10 000 enfants (Cour des comptes, 2020) sont en dehors de l’école. Il y a près de huit points de moins de sco­la­ri­sa­tion pour les enfants de 6 à 13 ans que pour la moyenne de l’ensemble du ter­ri­toire natio­nal. Selon l’université Paris Nanterre, en 2023, il a été rap­por­té que la non-sco­la­ri­sa­tion des enfants âgés de 3 à 15 ans révo­lus concerne au moins 5 379 à 9 575 enfants à Mayotte. En Guyane et à Mayotte, l’accès à l’école des enfants et des jeunes est tou­jours limi­té par cer­tains obs­tacles admi­nis­tra­tifs, et ce, mal­gré le décret n° 2020 – 811 du 29 juin 2020 qui sim­pli­fie les démarches d’inscription sco­laire. Les refus d’inscription sco­laire ont été dénon­cés par le col­lec­tif Migrants Outre mer, la Défenseur des droits et consta­tés par UNICEF France. S’il y a 3 % de la popu­la­tion « natio­nale » dans les CTOM, 24 % des per­sonnes en situa­tion de grande pau­vre­té sont dans les CTOM. À La Réunion, la pau­vre­té touche près de la moi­tié des enfants (46 %). Il s’agit de 6 enfants sur 10 en Guyane et de 8 sur 10 à Mayotte, tan­dis que 2 sur 10 dans l’Hexagone…

Constat de l’Unesco
L’insuffisance des infrastructures scolaires et leur répartition inadéquate sur ces deux territoires est un second frein majeur à la scolarisation des enfants. Le principe de proximité des établissements scolaires du premier degré n’est pas respecté.
À Mayotte, les infrastructures font particulièrement défaut dans le premier degré.
En Guyane, les insuffisances en équipements scolaires et transports sont particulièrement criantes dans les communes de l’Intérieur, qui accueillent 20 % des enfants et jeunes. Ainsi, les enfants de ces communes sont contraints de quitter précocement leur environnement familial pour poursuivre dès le collège leur scolarité à Saint-Georges-de-l’Oyapock et à Maripasoula (Guyane), et de se rendre sur le littoral pour le lycée. Cela génère un risque important de décrochage scolaire, mais le déracinement renforce aussi la vulnérabilité des jeunes Amérindiens, avec des risques en matière de protection et de santé mentale.Des dispositifs dérogatoires visent à pallier les lacunes des systèmes actuels :
En Guyane, le dispositif des familles « hébergeantes » est présenté comme une alternative à l’internat. Le peu de contrôle dont il fait l’objet pose toutefois des questions en matière de protection.
À Mayotte, le système de rotations et le dispositif de « classes itinérantes » essaient de répondre à l’inadéquation entre l’offre et la demande en matière de scolarisation. Mais ces dispositifs peinent à relever le défi d’une éducation de qualité, en particulier considérant le manque d’offre périscolaire et de dispositifs d’éducation populaire. Enfin, la scolarisation de tous les enfants est également conditionnée par l’accès à l’hébergement, aux transports scolaires, et à la restauration scolaire. Ces services sont à la fois indispensables à la scolarisation, et un levier à fort potentiel de réduction des inégalités.
En Guyane, la question des transports est particulièrement sensible tant les distances sont grandes et les transports coûteux, dangereux, et faiblement développés. Pourtant, le manque d’infrastructures scolaires et leur répartition sur le territoire fait des transports un maillon indispensable de la scolarisation effective des enfants.
À Mayotte, dans le secondaire, seul 1 élève sur 5 bénéficie aujourd’hui d’un repas chaud. La plupart des établissements ne proposent qu’une simple collation qui constitue parfois l’unique repas de la journée.

Rentrée 2024 - 2025 de SUD éducation Guyane  
Une rentrée scolaire, peu réjouissante pour le syndicat Sud-Education Guyane, qui dénonce, une situation explosive dans l’Ouest de la Guyane.
Des locaux scolaires délabrés, des salles de classe qui manquent cruellement de matériels informatiques. L’offre de formation est également remise en question, sans oublier la problématique des transports scolaires et de la restauration. La gestion des ressources humaines pose également problème.
Nous demandons que les promesses du rectorat de Guyane concernant la gestion des ressources humaines soient suivies. Trop d’agents restent encore sans réponse face à des situations administratives difficiles. Il y a une réelle souffrance d’un grand nombre de travailleurs, notamment dans les communes isolées.
Le syndicat Sud-Éducation Guyane veut également alerter sur le fait qu’il exige, une vraie revalorisation salariale pour tous, mais pas seulement :
Nous condamnons la non-scolarisation de trop nombreux enfants guyanais et exigeons le respect de la loi qui prévoit l’obligation de scolarisation, que l’on soit français ou étranger.

Petite histoire de la lutte des Écoles populaires Kanak

Épisode mécon­nu, l’appel au boy­cott de l’école colo­niale et la créa­tion d’une édu­ca­tion popu­laire kanak à l’occasion des « évé­ne­ments » qui ont secoué la Nouvelle-Calédonie au milieu des années 1980, est l’une des rares expé­ri­men­ta­tions à grande échelle (entre 6 et 15% des enfants kanak concer­nés, selon les sources d’une « péda­go­gie sociale » par, à tra­vers et pour le milieu).
Du boy­cott sco­laire aux Écoles popu­laires kanak
En 1985, un siècle après l’instauration des lois sco­laires de Jules Ferry, le vent de l’insurrection souffle sur la Nouvelle-Calédonie. Au cri de « indé­pen­dance et socia­lisme », le peuple Kanak, orga­ni­sé au sein de FLNKS et de l’USTKE, défie le sys­tème colo­nial, dont l’école est un rouage essen­tiel, au point que « le sys­tème édu­ca­tif – le conte­nu des pro­grammes, la com­po­si­tion du corps ensei­gnant, etc. – est, avec la terre, le point focal des reven­di­ca­tions et des pres­sions kanak. »
Pour le gou­ver­ne­ment indé­pen­dan­tiste issu des bar­ri­cades, il y a « urgence [à] mettre en place une école popu­laire kanak » (Instruction du gou­ver­ne­ment de Kanaky aux Comités de lutte, 28 février 1985) pour par­tir à la conquête de l’indépendance édu­ca­tive, cultu­relle, poli­tique et économique.
Cette réso­lu­tion, qui accom­pagne les occu­pa­tions de terre et les bar­rages, appelle au « boy­cott sco­laire » et invite les Comités de lutte à déser­ter les éta­blis­se­ments colo­niaux pour créer, inves­tir et ani­mer des écoles popu­laires kanak.
Doublement accu­sée de mar­gi­na­li­ser les Kanak, en leur inter­di­sant la réus­site dans le monde des Blanc·hes et en les cou­pant de leurs racines, l’école, qua­li­fiée de « dif­fi­cile » par Jean-Marie Tjibaou est, avec la terre, au coeur du conten­tieux colo­nial qui éclate avec les « évé­ne­ments » (1984 – 1988). Au-delà de l’inadaptation des pro­grammes, la ques­tion de la langue d’enseignement est l’objet de nom­breuses cris­pa­tions car le refus du mono­pole de la langue fran­çaise comme langue de la sco­la­ri­sa­tion est per­çu comme le refus de la pré­sence fran­çaise. Le déclen­che­ment des « évé­ne­ments » en 1984 entraîne une poli­ti­sa­tion de la ques­tion de la place des langues et de la culture à l’école, et un dur­cis­se­ment des posi­tions : alors que l’État fran­çais conti­nue de faire la sourde oreille devant la demande réité­rée d’introduire un ensei­gne­ment en langues kanak, les militant·es s’organisent et décrètent un boy­cott de « l’école coloniale ».
Face aux blo­cages d’ordre poli­tique aux­quels se heurte la reven­di­ca­tion natio­na­liste d’une éga­li­té des chances à l’école et d’un res­pect de la culture kanak, le contexte des « évé­ne­ments » voit se déve­lop­per une logique de rup­ture entraî­nant les militant·es indé­pen­dan­tistes dans une expé­rience d’écoles alter­na­tives, les Écoles Populaires Kanak. L’EPK se pré­sente comme une alter­na­tive, lit­té­ra­le­ment une « autre école », en rup­ture avec le sys­tème sco­laire exis­tant : il s’agit de faire l’école « autre­ment », en inté­grant la langue d’origine des enfants, en fai­sant par­ti­ci­per la com­mu­nau­té à l’éducation « pour que les parents se mêlent de ce qui les regarde », en res­pec­tant les savoirs autoch­tones et leurs modes de trans­mis­sion. L’objectif est d’enraciner l’enfant dans la culture kanak et de pré­pa­rer poli­ti­que­ment les futur·es citoyen·nes d’une Kanaky deve­nue indé­pen­dante. À son apo­gée, en mars 1985, l’EPK sco­la­rise 1 500 à 2 000 enfants, grâce au tra­vail béné­vole de 230 animateur·rices : 12 à 15% des enfants kanak de brousse ne sont pas retourné·es à leur école habi­tuelle à la ren­trée. Mais le mou­ve­ment connaît rapi­de­ment des signes d’essoufflement : des qua­rante EPK qui voient le jour dans la fou­lée de la ren­trée de 1985, il n’en reste que neuf trois ans plus tard, après la signa­ture des accords de Matignon-Oudinot. Seules deux écoles (Canala et Ouvéa) sur­vi­vront dans les années 1990.

6 - Le privé à l’assaut de l’enseignement supérieur

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Depuis plu­sieurs années, contrai­re­ment à l’Enseignement supé­rieur public, les offi­cines d’enseignement supé­rieur pri­vé lucra­tif se portent bien : un quart des effec­tifs contre 14% il y a 20 ans, la moi­tié des effec­tifs étu­diants sup­plé­men­taires depuis 10 ans. Sur cette période, le pri­vé a crû de 65% contre 16% pour le public.
Une situa­tion qui résulte de choix poli­tiques depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pou­voir en 2017 :
• consé­quence de la loi Pénicaud de 2018 qui octroie de géné­reux finan­ce­ments publics au pri­vé et du déve­lop­pe­ment sans pré­cé­dent de l’apprentissage (mul­ti­plié par 5 en 7 ans)
• effet de la sélec­tion par Parcoursup et de la pros­pec­tion de groupes pri­vés auprès des recalé·es ou de celles et ceux qui sont inquiet·es de l’être et pré­fèrent “sécu­ri­ser” leur pos­si­bi­li­té de pour­suivre des études supérieures ;
• dés­in­ves­tis­se­ment de l’État dans le public : la dépense par étu­diant a chu­té de 16% entre 2012 et 2022.
Pourtant, tout le monde est par­fai­te­ment au cou­rant des dys­fonc­tion­ne­ments majeurs de ces for­ma­tions pri­vées : des appel­la­tions de diplômes men­son­gères, des for­ma­tions tout en dis­tan­ciel, des recon­nais­sances trom­peuses, des frais d’inscriptions frau­du­leux…. La Direction des fraudes avait ren­du un rap­port qui esti­mait que 30% des écoles pri­vées avaient des pra­tiques com­mer­ciales trompeuses/​douteuses. Tout cela ados­sé à un mar­ke­ting agres­sif à des­ti­na­tion des recalé·es ou inquiet·es de l’être de Parcoursup.
Ce déve­lop­pe­ment éclair dans un far-west régle­men­taire se fait par ailleurs dans un contexte de pro­mo­tion de l’apprentissage par le gou­ver­ne­ment : en 7 ans, les aides publiques aux entre­prises pour l’apprentissage sont pas­sées de 5 à 25 mil­liards. Et les entre­prises pri­vées de l’enseignement supé­rieur en pro­fitent aus­si lar­ge­ment. Aujourd’hui, la seule ins­crip­tion de ces entre­prises pri­vées au Répertoire natio­nal des cer­ti­fi­ca­tions pro­fes­sion­nelles les auto­risent à être réper­to­riées sur Parcoursup. Ce déve­lop­pe­ment rapide et bien peu régle­men­té de l’enseignement supé­rieur pri­vé est un dan­ger pour le ser­vice public de l’ESR, pour ses per­son­nels (recru­te­ments paral­lèles, débau­chages…) et les étudiant·es (aug­men­ta­tion des frais d’inscription, for­ma­tions non reconnues…).
En mai 2024, un rap­port par­le­men­taire éta­blis­sait une série de recom­man­da­tions afin d’encadrer ces for­ma­tions et pro­po­ser un label minis­té­riel. SUD édu­ca­tion par­tage une série de recom­man­da­tions de ce rap­port tant à l’heure actuelle le flou et la trom­pe­rie géné­ra­li­sée ont des consé­quences graves pour des étudiant·es qui vont s’endetter pour des for­ma­tions non recon­nues. Protéger l’appellation “mas­ter” pour les diplômes natio­naux, limi­ter les appel­la­tion “mas­tères” et “bache­lor” aux for­ma­tions recon­nues par l’Etat, dis­tin­guer diplômes et for­ma­tion RNCP, contrô­ler la qua­li­té péda­go­gique de ces for­ma­tions pri­vées, condi­tion­ner les fonds d’apprentissage… sont cer­tai­ne­ment des pre­mières mesures à prendre rapidement.
Mais pour SUD édu­ca­tion, le “label qua­li­té” pro­po­sé par ce rap­port et pro­chai­ne­ment repris par le minis­tère va fina­le­ment venir ren­for­cer l’enseignement supé­rieur pri­vé lucra­tif qui se ver­ra garan­tir ses for­ma­tions tan­dis que le bud­get de l’ESR public conti­nue lui de s’appauvrir. Pour SUD édu­ca­tion l’État ne doit pas octroyer d’accréditations pour des for­ma­tions qui existent dans le public. Depuis des années main­te­nant, notre minis­tère ouvre la porte à cette concur­rence du pri­vé : en 2021, F. Vidal auto­ri­sait (contre l’avis una­nime du CNESER) l’intégration dans Parcoursup des for­ma­tions dis­pen­sées par des éta­blis­se­ments pri­vés ni sous contrat avec l’État ni d’intérêt géné­ral ; pour la direc­trice géné­rale de l’enseignement supé­rieur et de l’insertion pro­fes­sion­nelle, peu importe que les étudiant·es se tournent vers le public ou le privé.

Pour SUD édu­ca­tion, l’heure n’est pas à la label­li­sa­tion des for­ma­tions d’enseignement supé­rieur pri­vé lucra­tif appar­te­nant à de grands groupes capi­ta­listes (Galileo appar­tient à la famille Bettencourt) ou des fonds d’investissements, mais à la mise en place d’un plan d’urgence mas­sif pour l’Enseignement supé­rieur et la Recherche publique et la fin de la sélection.
Avec une aide de l’État à hau­teur de 8000€ par appren­ti, le coût de l’apprentissage pour­rait avoi­si­ner les 25Md€ en 2024. Par com­pa­rai­son celui de l’ESR est de… 25Md€. L’État dépense donc sans comp­ter dans des for­ma­tions qui ne sont ni garan­ties, ni contrô­lées. Sur ces 8000€ ce ne sont par­fois uni­que­ment que 1600€ qui vont à la for­ma­tion réelle. Le reste allant dans les poches de ces grands groupes capi­ta­listes amis. Un comble : Murielle Pénicaud, ministre du tra­vail ayant mis en place cette poli­tique mas­sive en faveur de l’apprentissage, tra­vaille aujourd’hui pour Galileo. C’est à un trans­fert mas­sif d’argent public vers le pri­vé auquel nous assis­tons, orches­tré par l’État et les gou­ver­ne­ments de Macron.
SUD édu­ca­tion reven­dique la mise en place d’un grand ser­vice public d’enseignement supé­rieur. SUD édu­ca­tion s’oppose à toute forme de label­li­sa­tion des for­ma­tions pri­vées. Ces label­li­sa­tions contri­buent à la légi­ti­ma­tion des ces for­ma­tions au détri­ment des for­ma­tions publiques. Une fois obte­nue la label­li­sa­tion, com­ment ces for­ma­tions seront-elles contrô­lées, quelle sera l’effectivité de ces contrôles ?

7 - Des moyens pour l’école publique, et vite !

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SUD édu­ca­tion pré­sente ses revendications 

L’école publique a besoin d’une poli­tique véri­ta­ble­ment volon­ta­riste pour soi­gner les maux des pré­cé­dentes réformes de Jean-Michel Blanquer et Gabriel Attal : SUD édu­ca­tion porte au sein de l’Intersyndicale l’abandon du Choc des Savoirs, mais cela ne suf­fit pas, il faut des moyens pour l’école publique. SUD édu­ca­tion détaille ses mesures pour l’école.
Les per­son­nels se sont mas­si­ve­ment mobilisé·es contre le Choc des savoirs que vou­lait nous impo­ser Attal. Cette réforme s’opposait fron­ta­le­ment à la concep­tion qu’ont les per­son­nels de l’école publique : une école pour tou·tes, exi­geante, qui lutte contre les inéga­li­tés et la repro­duc­tion sociale pour for­mer de futur·es citoyen·nes.
Les attaques contre l’école sont de deux ordres : libé­rales car elles tendent à déman­te­ler le ser­vice public d’éducation, à faire tou­jours plus de cadeaux à l’école pri­vée et à repro­duire les inéga­li­tés sociales, et réac­tion­naires à tra­vers les dis­cours sur les savoirs fon­da­men­taux contre les dis­ci­plines, sur l’autorité, l’uniforme, le SNU …
Dans le pre­mier comme dans le second degré, les moyens alloués sont insuf­fi­sants pour assu­rer l’accompagnement de tou·tes les élèves : l’inclusion des élèves en situa­tion de han­di­cap se fait sans moyens suf­fi­sants, les per­son­nels AESH reven­diquent tou­jours un sta­tut de la fonc­tion publique et un salaire digne de ce nom, les RASED et les éta­blis­se­ments spé­cia­li­sés sont réduits à peau de cha­grin. De même, les classes d’accueil pour les élèves allo­phones ne béné­fi­cient pas des moyens néces­saires. Enfin, l’éducation prio­ri­taire, cen­sée réduire les inéga­li­tés, n’existe qua­si plus.
Pour faire face à ce constat alar­mant, SUD édu­ca­tion met à jour ses reven­di­ca­tions pour l’éducation.
Plus que jamais, c’est le moment pour les per­son­nels de se syn­di­quer en masse.
C’est au mou­ve­ment syn­di­cal d’aller arra­cher des mesures de pro­grès social !
Ce plan d’urgence comprend :
• un volet pour une école pour tou·tes • un volet édu­ca­tion prioritaire
• un volet péda­go­gie et sys­tème éducatif
• un volet postes
• un volet médico-social
• un volet bâti scolaire
• un volet restauration.

Une école pour tou·tes

C’est l’ensemble de l’inclusion sco­laire qui doit être repen­sée, en com­men­çant par la satis­fac­tion des reven­di­ca­tions des per­son­nels essen­tiels, les AESH :
• une baisse des effec­tifs par classe. À titre de repère, la reven­di­ca­tion géné­rale de SUD édu­ca­tion pour la SEGPA est de 12 élèves maximum ;
• des dis­po­si­tifs d’aide et de pré­ven­tion com­plets : 1 RASED com­plet par groupe sco­laire et 1 enseignant·e sup­plé­men­taire pour cinq classes (pour le 1er degré) et un recru­te­ment mas­sif de per­son­nels médi­co-sociaux (assis­tance sociale, infir­me­rie, psychologue…) ;
• la satis­fac­tion des reven­di­ca­tions des AESH : la créa­tion d’un sta­tut d’éducateur·trice sco­laire spécialisé·e avec un temps plein à 24 heures face élève, un salaire à 2000 euros bruts ;
• une for­ma­tion en accord avec les besoins ren­con­trés par les col­lègues en poste dans l’ASH ;
• des ouver­tures d’UPE2A et d’ULIS ain­si que l’augmentation du nombre d’heures allouées à ces dispositifs.

Postes

Pour SUD édu­ca­tion, il existe plu­sieurs leviers pour créer dans l’urgence les postes nécessaires :
• la réaf­fec­ta­tion des cré­dits non enga­gés par le minis­tère vers des créa­tions de postes à comp­ter de la rentrée ;
• la recon­ver­sion mas­sive des heures sup­plé­men­taires dans le second degré vers des créa­tions de postes, afin d’augmenter le nombre de per­son­nels dans les éta­blis­se­ments et amé­lio­rer les condi­tions de travail ;
• la titu­la­ri­sa­tion à temps plein de l’ensemble des enseignant·es non titu­laires, sans condi­tion de concours ni de natio­na­li­té : les col­lègues en ques­tion sont déjà sou­vent en poste depuis long­temps, il n’y a aucune rai­son pour qu’ils et elles ne béné­fi­cient pas du sta­tut de fonctionnaire ;
• l’admission de l’ensemble des admis­sibles, aux concours internes comme externes : les recalé·es des oraux des concours consti­tuent un nombre très impor­tant de potentiel·les futur·es col­lègues ; au vu de l’urgence de la situa­tion, il est sou­hai­table qu’ils et elles soient stagiarisé·es dans leur totalité ;
• l’organisation de concours excep­tion­nels : il est arri­vé, encore récem­ment, que des concours sup­plé­men­taires soient orga­ni­sés en fonc­tion des besoins pour le recru­te­ment des professeur·es des écoles ; ce dis­po­si­tif pour­rait être géné­ra­li­sé, en fonc­tion des besoins locaux, dans les départements ;
• l’embauche de per­son­nels aidant à la direc­tion pour le pri­maire, avec un réel statut ;
• l’embauche mas­sive d’AESH et d’AED et la titu­la­ri­sa­tion dans le cadre d’emplois sta­tu­taires d’éducateurs·trices scolaires ;
• le réta­blis­se­ment des moyens en rem­pla­ce­ment dans le 1er et le 2d degré.

Médico-social

SUD édu­ca­tion revendique :
• des créa­tions de postes de per­son­nels médi­co-sociaux à hau­teur des besoins, pour l’ensemble des actes professionnels ;
• l’abandon de tous les pro­jets de trans­fert vers les col­lec­ti­vi­tés des per­son­nels médicaux ;
• la com­pen­sa­tion dans son entiè­re­té de la baisse des fonds sociaux qui est inter­ve­nue au cours des années précédentes ;
• l’augmentation des aides à la demi-pen­sion et des bourses ;
• des trans­ports gra­tuits pour les élèves.

Education prioritaire

SUD édu­ca­tion porte des reven­di­ca­tions pour l’éducation prio­ri­taire : elles doivent être immé­dia­te­ment mises en œuvre pour répondre aux enjeux de la crise sanitaire :
• l’extension de la pon­dé­ra­tion de 1,1 heures à l’ensemble des per­son­nels pour toute l’éducation prio­ri­taire, REP inclus. Cette pon­dé­ra­tion cor­res­pond à une décharge pour recon­naître la charge de tra­vail spé­ci­fique à l’éducation prio­ri­taire, mais ne doit pas être condi­tion­née à des mis­sions ou réunions supplémentaires ;
• une baisse des effec­tifs : pour l’éducation prio­ri­taire, SUD édu­ca­tion reven­dique 16 élèves par classe en école et col­lège, 12 en SEGPA, 20 en lycée ;
• des vies sco­laires ren­for­cées : 1 CPE pour 100 élèves et 1 AED pour 50 élèves dans toute l’éducation prioritaire ;
• des moyens médi­co-sociaux ren­for­cés : 1 RASED com­plet par groupe sco­laire et 1 enseignant·e sup­plé­men­taire pour cinq classes (pour le 1er degré) et un recru­te­ment mas­sif de per­son­nels médi­co-sociaux (assis­tance sociale, infir­me­rie, psychologue) ;
• sur la carte de l’éducation prio­ri­taire : SUD édu­ca­tion reven­dique le main­tien en REP des lycées dont les élèves sont majo­ri­tai­re­ment issus de col­lèges REP et REP+. L’intégration de nou­velles écoles et éta­blis­se­ments dans la carte de l’éducation prio­ri­taire, y com­pris des écoles ou éta­blis­se­ments situés dans des espaces ruraux sus­cep­tibles d’intégrer la carte, doit se faire sur la base de cri­tères sociaux, dans le cadre d’un clas­se­ment trans­pa­rent et renou­ve­lé tous les quatre ans. L’intégration des écoles ou éta­blis­se­ments ruraux à la carte ne doit pas se faire au détri­ment d’écoles ou éta­blis­se­ments d’ores et déjà classés ;
• l’attribution du même mon­tant de la prime REP à tous les per­son­nels de l’ensemble de l’éducation prio­ri­taire, et notam­ment aux AED et AESH.

Pédagogie et système éducatif

SUD édu­ca­tion reven­dique plu­sieurs mesures :
• la limi­ta­tion des effec­tifs pour favo­ri­ser la dif­fé­ren­cia­tion, le tra­vail coopé­ra­tif entre élèves pour nive­ler les écarts de niveaux. À titre de repère, la reven­di­ca­tion géné­rale de SUD édu­ca­tion (hors édu­ca­tion prio­ri­taire) est de 20 élèves maxi­mum en école élé­men­taire et en col­lège, et de 25 en lycée, mais les cir­cons­tances excep­tion­nelles impliquent de des­cendre encore en-deçà ;
• dans le second degré, des dédou­ble­ments sys­té­ma­tiques sur la moi­tié des horaires dis­ci­pli­naires par un cadrage national ;
• l’aménagement des pro­grammes, afin que les enseignant·es puissent mettre en œuvre au mieux une péda­go­gie per­met­tant de com­pen­ser les inéga­li­tés scolaires ;
• l’intégration dans les pro­grammes d’une vraie édu­ca­tion à la vie affec­tive et à la sexua­li­té mais aus­si aux enjeux environnementaux ;
• la liber­té péda­go­gique et de sup­port notam­ment en CP dans le cadre de l’apprentissage de la lecture ;
• une for­ma­tion ini­tiale et conti­nue sur temps de ser­vice qui tienne compte de ces pro­blé­ma­tiques et de ces enjeux, qui impliquent des pra­tiques péda­go­giques par­ti­cu­lières ; • un retour des PDMQDC, sans remise en cause des dédou­ble­ments là où ils existent, et un réta­blis­se­ment des RASED dans leur totalité ;
• l’abandon de Parcoursup et de la sélec­tion à l’entrée à l’université, qui dans cette période fonc­tionne encore davan­tage comme une machine de tri social ;
• l’abandon des contre-réformes du bac et des lycées qui accroissent les inéga­li­tés, cette année encore plus que d’habitude ;
• l’abandon du Choc des savoirs, de la poli­tique édu­ca­tive des Savoirs fon­da­men­taux et du SNU.

Bâti scolaire

Pour SUD édu­ca­tion, le minis­tère doit reprendre la main sur la ges­tion du bâti sco­laire de la mater­nelle à l’université en injec­tant les moyens finan­ciers à la hau­teur des enjeux. Le parc immo­bi­lier sco­laire a besoin d’un plan d’urgence afin de le réno­ver, de mieux l’isoler et d’appliquer sa mise aux normes, pour en finir avec les pas­soires ther­miques que sont nos écoles et éta­blis­se­ments sco­laires et uni­ver­si­taires. Les éta­blis­se­ments sco­laires et d’enseignement supé­rieur sont très rare­ment dotés de ther­mo­stats. Vétustes, ils rendent le tra­vail très pénible dès qu’il fait froid ou chaud. Les équi­pe­ments de chauf­fage ne peuvent pas tou­jours être contrô­lés par les uti­li­sa­teurs et uti­li­sa­trices des salles, condui­sant à ouvrir les fenêtres avec le chauf­fage en route.
Des reven­di­ca­tions concrètes sur les bâti­ments sco­laires et l’énergie :
• Un plan de réno­va­tion /​recons­truc­tion du bâti sco­laire pour la réduc­tion des consom­ma­tions éner­gé­tiques (iso­la­tion des bâti­ments, pro­gramme de réduc­tion des consom­ma­tions…) et en eau ;
• La maî­trise des consom­ma­tions : iso­la­tion des bâti­ments, éclai­rages à basse consom­ma­tion et « intel­li­gents », toits végé­ta­li­sés, ven­ti­la­tion natu­relle, récu­pé­ra­tion des eaux pluviales ;
• Le déve­lop­pe­ment de la pro­duc­tion d’énergie renou­ve­lable sur site (pan­neaux solaires…) ;
• La trans­pa­rence totale sur les risques envi­ron­ne­men­taux, leur prise en compte par les for­ma­tions spé­cia­li­sées et notam­ment une cam­pagne de désa­mian­tage des éta­blis­se­ments sco­laires dans le cadre de l’application du Plan amiante relan­cé en 2016 ; une prise en charge des per­son­nels exposés ;
• La débi­tu­mi­sa­tion /​végé­ta­li­sa­tion des cours de récréa­tion qui doivent être acces­sibles en dehors du temps sco­laire à la popu­la­tion en cas de fortes cha­leurs et la dépol­lu­tion des sols ;
• L’instauration de tem­pé­ra­tures mini­males et maxi­males de tra­vail ; le contrôle effec­tif des tem­pé­ra­tures dans les bâti­ments par les for­ma­tions spé­cia­li­sées (aupa­ra­vant CHSCT).

Restauration

L’éducation à l’alimentation et le déve­lop­pe­ment d’une ali­men­ta­tion issue des cir­cuits courts est un enjeu pri­mor­dial pour garan­tir notre san­té et celle des élèves, et pour agir contre la crise envi­ron­ne­men­tale. Il faut relo­ca­li­ser l’agriculture. La plu­part des pro­duits ser­vis dans les can­tines sont issus de l’agriculture indus­trielle, qui entraîne la défo­res­ta­tion de nom­breuses zones de la pla­nète, détrui­sant des réserves de car­bone, une pol­lu­tion des sols et des nappes phréa­tiques à cause de l’utilisation de pes­ti­cides et impacte for­te­ment la san­té des agriculteurs·trices et de leurs familles.
Les reven­di­ca­tions de SUD édu­ca­tion pour des res­tau­ra­tions sco­laires et uni­ver­si­taires agroécologiques :
• La réduc­tion de la consom­ma­tion de viande et de pois­son, leur rem­pla­ce­ment par des alter­na­tives végé­ta­riennes et la mise en place, pour les per­son­nels, de for­ma­tions à la créa­tion de menus végétariens ;
• Le ren­for­ce­ment des filières locales et bio­lo­giques dans la res­tau­ra­tion sco­laire avec pour objec­tif le 100 % bio, sans hausse du prix du repas pour les familles ;
• La fin des can­tines cen­trales et le retour à des can­tines sur site, et la créa­tion d’une pla­te­forme met­tant en rela­tion les producteur·trices en bio et local et les éta­blis­se­ments et mairies ;
• La créa­tion de postes d’agent·es fonc­tion­naires pour mettre en œuvre la recon­ver­sion éco­lo­gique dans les cantines.