Dans une interview à la presse ce vendredi 2 juillet, la ministre Frédérique Vidal vient d'annoncer qu'elle allait créer 19 000 places supplémentaires dans l'enseignement supérieur cet été, en plus des 15 000 déjà annoncées dans l'année. La ministre annonce donc la création de 34 000 places, 5000 dans les BTS, le reste dans les universités ou encore en institut de formation en soins infirmiers.
Cet effet d'annonce médiatique, corrélé à un autosatisfecit sur l'extrême réussite de Parcoursup, est une provocation de plus puisqu'elle n'est accompagnée d'aucune annonce de postes d'enseignant-e-s et de personnel de soutien, ni d'ouverture d'universités et de locaux.
Créer des places sur un tableur excel dans un ministère est aisé, mais pour répondre à cette hausse d'étudiant-e-s dans l'ESR, il faut une embauche massive d'enseignant-e-s. Avec un taux d'encadrement dans le supérieur d'environ 1 enseignant-e pour 18 étudiant-e-s, Madame la Ministre va-t-elle créer près de 2000 postes dès cette rentrée ? Nous pourrions faire le même calcul pour le nombre de salles qu'il faudrait créer.
La ministre peut se désoler en fin d'interview de la baisse du nombre de doctorant-e-s en France, mais pour parvenir au doctorat, les étudiant-e-s en France devront passer par des 1ères années de supérieurs dégradées, où l'on est assis sur les marches d'un amphi, ou à près de 50 étudiant-e-s dans certains TD.
SUD éducation et Sud Recherche EPST, avec l'ensemble des organisations syndicales, n'ont eu de cesse de vous alerter et interpeller sur la situation dramatique de l'ESR : l'absorption des nouveaux étudiant-e-s depuis 2 ans nécessite la création de 3 universités tout de suite (10 en tout pour un encadrement digne), il faut embaucher dès à présent 9000 enseignant-e-s sur statut de fonctionnaires et non pas des contractuel-les payé-e-s tous les 6 mois ou sous contrat LRU au SMIC.
Venons-en maintenant aux sujets du jour : quatre décrets d’application de la LPR sont présentés « pour information ». Le premier concerne la mise en œuvre des chaires de professeurs juniors, un dispositif rejeté par l’ensemble des organisations syndicales, un choix idéologique basé sur le simple fait que « ça se fait ailleurs donc il faut le faire » ; un dispositif qui constitue un net recul par rapport aux statuts actuels et dont on peut prévoir qu’il aura des conséquences néfastes sur les collectifs de travail. Nous y reviendrons ultérieurement.
Les trois autres textes, qui concernent l’avenir des étudiantes et étudiants que nous formons, que nous encadrons, ont déjà été soumis au vote dans l’instance supérieure. Autant dire que le ministère se moque profondément de la position de cette instance représentative sur ces textes ! Concernant le contrat doctoral de droit privé, le recours aux contrats Cifre existants aurait été suffisant pour répondre aux objectifs du texte.
Concernant les deux autres projets de texte, le contrat post-doctoral de droit privé et le CDI de mission ou d’opération de recherche de droit privé, il s’agit là rien moins que de casser le code du travail au motif que le diplôme de doctorat ne serait pas suffisant pour débuter une carrière dans la recherche et que pour faire de la recherche, dans le privé comme dans le public, il faudrait en passer par la précarité, voire être précaire à vie. Donc non content de casser le statut de la fonction publique, le ministère offre un super cadeau au MEDEF : en permettant de maintenir en CDD des collègues pendant 4 ans, alors que le droit du travail impose une CDIsation au bout de 18 mois, en instaurant le CDI de projet ou d’opération de recherche, le ministère offre au MEDEF une brèche dans le CDI, que celui-ci – on n’en doute pas - saura exploiter. Sûr, qui si nous avions pu nous exprimer sur ces textes nous aurions voté contre !