Alors que la mobilisation AED bat son plein, il est important que chaque équipe de vie scolaire puisse avoir à sa disposition les outils nécessaires pour lutter de façon efficace et organisée et imposer ses revendications. Cela passe par une connaissance de vos droits syndicaux et des solutions à votre disposition. L’Éducation nationale joue bien souvent avec le manque d’informations des personnels et particulièrement des plus précaires pour éviter que les mouvements de contestation ne se développe et ne prennent de l’ampleur. Ce guide est là pour répondre à vos questions et vous proposer des pistes de réflexions et d’actions. Il sera régulièrement mis à jour en fonction des besoins. N’hésitez pas à vous en servir, à le faire circuler et à nous contacter en cas de question, à la page https://www.sudeducation.org/contact/
Sommaire
1 - Le droit de grève
En tant qu’AED vous avez parfaitement le droit de vous mettre en grève comme tous les personnels de l’Éducation nationale qu’ils-elles soient fonctionnaires ou non-titulaires. Il s’agit là d’un droit fondamental et constitutionnel incontestable.
En théorie pour faire grève, il faut qu’il y ait un préavis de grève. Toute structure syndicale dont les statuts sont déposés (le syndicat départemental comme le syndicat national) peut user du droit d’appeler à la grève et de déposer un préavis de grève.
Il doit être adressé à l’autorité compétente (DSDEN, recteur-rice) en principe au plus tard 5 jours francs à l’avance (c’est à dire : 5 jours plus celui d’expédition et celui de la grève).
En règle générale si vous avez besoin d’un préavis de grève informez-nous suffisamment à temps de votre demande.
Dans la réalité, c’est une question de rapport de force lorsqu’il est favorable, on peut se moquer des délais et de la forme du préavis, voire se passer de préavis tout court, surtout en cas d’urgence ou de nécessaire réaction.
ATTENTION : les préavis de grève couvrent l’ensemble des catégories de personnels qui y sont mentionnées et pas uniquement les syndiqué-e‑s de l’organisation syndicale qui dépose ce préavis.
Non, en tant que personnels du second degré si vous avez l’intention de faire grève, vous n’avez en aucun cas l’obligation de vous déclarer gréviste, sous aucun délai que ce soit. Si comme certains collègues vous faites le choix de vous déclarer gréviste c’est par choix et non par contrainte. Aucun délais non plus ! Par conséquent, en fonction de votre choix, vous pouvez vous déclarer gréviste, une semaine à l’avance, 48h, 24h ou pas du tout. Y compris le jour même de la grève, vous n’avez rien à faire remonter. C’est à l’administration de faire la preuve de votre absence. Vous recevrez dans les jours qui suivent (ce n’est pas automatique), un courrier dans votre casier constatant l’absence de service fait. Cette procédure est tout à fait normale, pas d’inquiétude à avoir. L’administration et votre hiérarchie ne seraient en aucun cas faire pression sur vous pour exiger une telle déclaration d’intention.
Prévenir ou pas, mais agir collectivement
Si généralement ce n’est pas le cas lorsqu’un‑e AED fait grève de façon isolée, lorsque toute une vie scolaire fait grève, un établissement peut vite être désorganisé. Même si ce n’est pas l’objectif premier de la grève c’est clairement une façon de montrer l’importance des vie scolaires et des assistant-e‑s d’éducation au sein d’un établissement. En fonction de la situation, du rapport de force, du fonctionnement de l’établissement, certaines équipes ont fait le choix de ne pas se déclarer grévistes pour faire naître une prise de conscience chez les autres personnels et les directions.
Dans ce cas de figure, inutile de se voiler la face, il arrive que des pressions existent et soient exercées par les directions qui culpabilisent ainsi les AED, évoquent la mise en danger des élèves, exigent un délai de prévenance, jouent sur la corde sensible. Cela est parfaitement déplacé et anormal, vous ne devez subir aucune pression en raison de votre participation à la grève ! Les préavis sont déposés pour cette raison et c’est à l’administration et à la direction de l’établissement de s’organiser en conséquence. Cela relève de leurs responsabilités.
C’est donc à vous de réfléchir collectivement à la façon de procéder en fonction des objectifs que vous cherchez à atteindre : faire réagir, mettre toute la vie-scolaire en grève…
Pour casser la grève et décourager son recours, les directions ont régulièrement appel au remplacement des personnels grévistes, principalement quand il s’agit d’AED. Ce remplacement se fait bien souvent sur la base du volontariat lorsque celui-ci est effectué par des agent-e‑s ou des professeur-e‑s.
Difficile dans ce cadre de s’y opposer, il faut qu’un travail de conviction soit fait auprès de ces collègues pour les décourager d’invisibiliser votre mouvement de grève.
Les AESH peuvent refuser le remplacement des AED
Ces dernier-e‑s sont eux-elles aussi victimes de pressions et de chantages et on leur « demande » souvent de remplacer les AED grévistes. Bien souvent on ne leur laisse pas le choix. La loi est pourtant bien clair à ce sujet et leur permet de refuser puisque les missions des AED ne sont pas les leurs comme le prévoit la circulaire du 3 mai 2017. Les collègues AESH peuvent donc refuser ce remplacement mais doivent être soutenu dans cette démarche auprès de la direction par les autres personnels de l’établissement.
Comme dit plus haut, le droit de grève est un droit constitutionnel et fondamental. Aucune sanction ne peut être prise à votre encontre et vous ne pouvez pas être licencié‑e pour ce motif. Le licenciement en cours de contrat doit passer devant une Commission consultative paritaire et ne peut être prononcé qu’en cas d’insuffisance professionnelle ou en cas de faute grave.
En revanche, des pressions existent et sont régulièrement exercées sur les collègues AED qui revendiquent leurs droits et se mobilisent. Infantilisations, mesures de vexations, chantage au renouvellement ne sont malheureusement pas rares et les personnels de direction qui sont aussi les employeurs se servent de leur pouvoir de renouvellement et de la précarité des contrats AED pour s’imposer.
Mais là encore, ils-elles n’ont pas tous les droits et une équipe soudée peut faire changer les choses. En matière de non-renouvellement, les chef-fes d’établissements pensent à tort qu’ils ‑elles n’ont aucun compte à rendre. C’est faux.
Si dans la loi, aucune justification n’est effectivement attendue ou clairement indiquée, un personnel de direction doit prendre toutes ses décisions au nom de l’intérêt du service. Il-elle doit donc être capable de justifier ces choix, ce qu’il-elle ne parviendra pas à faire en cas de licenciement pour motif syndical déguisé.
La justice nous a donné raison !
SUD éducation vient d’ailleurs d’obtenir une décision de justice qui fait désormais jurisprudence en faisant condamner à 7000 euros d’indemnité un collège marseillais pour non-renouvellement abusif.
Si vous sentez que l’un‑e d’entre vous est menacé‑e, il n’est jamais trop tôt pour agir. Contactez SUD éducation et rapprochez-vous des autres personnels de l’établissement. Le temps et la solidarité sont essentiels dans cette situation.
Les retraits pour fait de grève sont calculés sur la base d’un trentième du salaire en moins par jour de grève, c’est à dire le traitement, les primes et indemnités. Quant aux primes versées annuellement elles sont également incluses proportionnellement au nombre de jours de grèves à l’exception des prestations sociales, avantages familiaux, remboursements (décisions du Conseil d’Etat du 11/07/73 et du 22/03/89).
C’est le-la chef-fe d’établissement qui fait remonter le nombre de jours de grève au rectorat. Il doit tenir ce décompte de manière claire et accessible par tou-te‑s. En cas d’erreurs, ces chiffres sont contestables et in fine les jours de grève indûment comptés peuvent être remboursés avec un intérêt.
Cela étant, les sommes ne peuvent pas être prélevées en un seul coup en cas de grèves longues (art L. 145 – 2 et R. 145 – 2 du Code du Travail). Les quotités ou parts du salaire saisissables sont proportionnels aux revenus et déterminent l’étalement des prélèvements (les seuils prennent aussi en compte les personnes à charge).
Et concernant la grève dans les internats ?
Légalement une journée de grève s’étend sur la durée du service le jour prévu, (par exemple de 8h à 20h). A l’internat, le service et donc la grève débute la veille (19h00-20h00) jusqu’au lendemain (19h00-20h00). Les horaires exactes peuvent varier d’un établissement à l’autre et doivent être inscrites dans le règlement intérieur. Si la direction de l’établissement décide de fermer l’internat, vous ne pouvez pas être considéré-e‑s comme grévistes.
Dans le cas de figure des grèves reconductibles, l’administration peut faire le choix d’appliquer l’arrêt Omont décision du conseil d’État du 7/07/78). Il s’agit d’une décision de justice qui permet à l’administration de prélever l’ensemble des journées comprises entre le premier jour de grève et le dernier jour de grève inclus. Il s’agit alors clairement d’une tentative de répression de la grève.
Les jours décomptés vont théoriquement du premier au dernier jour de grève inclus. De façon concrète, si vous faites par exemple grève le jeudi, que vous ne travaillez pas le vendredi, et que vous faites à nouveau grève le lundi pour reprendre le travail le mardi, l’administration peut vous compter gréviste pour le jeudi, le vendredi, le samedi, le dimanche et le lundi, alors que vous n’avez fait que deux jours de grève en réalité. Cette mesure particulièrement injuste est là pour intimider et casser la grève. Elle a été appliquée par le ministère lors de la mobilisation contre la réforme des retraites de 2003 mais aussi de 2019/2020.
Cela dit, ce n’est ni automatique, ni obligatoire. C’est le/la chef-fe d’établissement qui fait remonter les jours de grèves. Dans le logiciel dédié à la gestion des absences (MOZART), il est parfaitement possible de vous placer en reprise sur un jour sur lequel vous ne travaillez pas. Le-la chef-fe d’établissement ne peut pas se cacher derrière l’aspect technique.
2 - S’informer, s’organiser, se coordonner
Les organisations syndicales sont autorisées à tenir pendant les heures de service, une réunion mensuelle d’information.
Le principe général est le suivant : chaque agent‑e, y compris un‑e AED à le droit de participer, a son choix à l’une de ces réunions mensuelles d’information dans la limite d’une heure par mois. La durée de chaque réunion ne peut excéder une heure (sauf si elle a lieu pendant la dernière heure de service et elle peut alors se prolonger au-delà de la fin du service en application de l’article 4 du décret n°82 – 447). Le salaire est bien entendu maintenu durant chacune de ces heures (que l’on soit en service ou non).
Pour être accordée, la demande doit être déposée auprès du-de la chef-fe d’établissement au moins une semaine avant la date de la réunion. Lorsque vous déposez une demande d’HMI, c’est vous qui proposez la date et l’heure. Contactez votre syndicat SUD éducation local.
Les intervenant-e‑s extérieur-e‑s
Tout‑e représentant‑e syndical‑e mandaté‑e à cet effet par une organisation syndicale a libre accès aux réunions tenues par cette organisation à l’intérieur des bâtiments administratifs, même si elle-il n’appartient pas au service dans lequel se tient la réunion. La venue de ce/cette représentant‑e n’est pas subordonn‑e à une autorisation préalable du-de la chef-fe d’établissement ou de service, qui doit simplement en être informé‑e avant le début de la réunion.
Restrictions de la participation
Dans les cas des AED, un‑e chef-fe d’établissement peut s’opposer à ce que l’ensemble d’une équipe participe à l’HIS, en invoquant « l’intérêt du service » puisque les élèves ne pourraient pas être accueillis ou surveillés dans l’enceinte de l’établissement. C’est parfois de mauvaise foi, mais aussi parfaitement contournable. Il suffit d’organiser cette HIS en dehors de votre service, par exemple un soir après la fermeture de l’établissement. Vous n’avez qu’à demander par la suite un rattrapage de cette heure, en commençant plus tard votre service ou en le finissant plus tôt un autre jour.
Oui, dans les limites imposées par la loi, c’est à dire sans avoir recours à l’injure et la diffamation. La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires et est inscrite dans la fonction publique (article 6 de la loi 83 – 634, dite loi Le Pors, Titre I du Statut Général). Son corollaire la liberté d’expression est donc également garantie. En l’absence de texte contraire qui viendrait limiter la parole des personnels contractuels comme les AED, de telles garanties sont également valables pour les personnels non-titulaires.
Nombreux-ses sont celles et ceux qui nous rapportent avoir reçu des reproches, voire des menaces, de la part de leurs supérieurs hiérarchiques Ces reproches, ces menaces, peuvent se résumer ainsi : « vous n’avez pas respecté le devoir de réserve, vous n’avez pas à vous exprimer publiquement ! ».
Que ce soit de manière volontaire ou non, ces dernier-es se trompent lourdement. SUD éducation affirme haut et fort qu’il s’agit là d’une légende urbaine. Une expression publique est donc tout à fait possible et souhaitable, et lorsqu’elle se fait dans un cadre syndical notamment, elle est inattaquable. Le devoir de réserve, s’il existe, s’applique en réalité principalement et proportionnellement aux supérieurs hiérarchiques. Ne gardez donc pas votre langue dans la poche !
Lorsque l’on mène une lutte, il faut le faire savoir ! Le meilleur moyen, c’est encore de réaliser un communiqué de presse, d’organiser une conférence de presse, ou de faire venir les médias à un rassemblement pour médiatiser votre action. C’est une façon de faire comprendre ce que vous faites et d’obtenir le soutien de la population. C’est aussi l’occasion de mettre la pression sur l’administration et de tourner les regards vers elle, c’est aussi une manière de s’adresser aux autres AED pour les convaincre de rejoindre la mobilisation.
N’hésitez pas non plus à informer les parents d’élèves de votre mobilisation. En effet, en dehors de votre temps de service, vous avez le droit de vous adresser aux parents d’élèves. Cela peut se faire en remettant aux élèves un courrier cacheté (agrafé ou sous enveloppe) et adressé aux parents d’élèves, aux élèves eux-elles mêmes. Vous ne pourrez ainsi pas être accusé d’enfreindre votre devoir de neutralité (ce qui n’est pas la même chose que le devoir de réserve…).
Adressez-vous à votre syndicat SUD éducation local qui pourra vous fournir une liste précise et locale de journalistes à contacter. Nous pourrons aussi diffuser sur nos réseaux votre communiqué pour augmenter la visibilité de votre lutte.
Dans la salle des personnels, un panneau d’affichage syndical doit être installé dans tous les établissements. Chaque organisation syndicale y a accès et il est tout à fait possible pour vous de communiquer sur la situation de la vie scolaire, sur vos revendications et actions. N’hésitez donc pas à vous en servir si vous êtes vous-même syndiqué-e‑s. Le cas échéant, demandez aux camarades des organisations syndicales présentes dans votre établissement pour qu’une place soit faite à vos communiqués, tracts et infos.
C’est aux AED de mener cette lutte et de décider des suites à lui donner. Mais pour réussir toute mobilisation, il est important de ne pas rester isolé-es et d’organiser à plusieurs niveaux la solidarité. C’est ce qui donnera de la force à ce mouvement et lui permettra de durer et de gagner.
Penser à informer les autres personnels de l’action que vous menez. Trop souvent, vie-scolaires et salles des professeurs restent dos à dos. Il vous faut entraîner d’autres personnels dans votre action pour y participer ou apporter son soutien.
Faites des caisses de grève, en ligne ou de la main à la main. Les caisses locales sont plus efficaces que les caisses générales.
Faites jouer la solidarité à l’intérieur de votre vie-scolaire en vous servant sur les différences entre temps-pleins et temps partiels. Si vous décidez ponctuellement de participer à une journée de grève et tout le monde ne travaille pas ce jour-là pourquoi ne pas s’entraider financièrement ? Par exemple si la grève à lieu le mardi et que plusieurs d’entre vous ne travaillent pas mais veulent quand même participer, pourquoi ne pas reverser une partie de votre salaire aux grévistes ?
Des collectifs d’AED se sont créés un peu partout sur le territoire. N’hésitez pas à entrer en contact avec eux et s’il n’y en a pas à en créer un.
SUD éducation fait de la lutte contre la précarité un des axes centraux de son action. Préavis de grève, guides catégoriels, caisse de grève pour les AED et AESH… De nombreux outils sont mis à disposition des personnels pour défendre leurs droits et construire les luttes. Rendez-vous sur le site www.sudeducation.org.
Pour nous la lutte menée par les AED, est l’affaire de chacun‑e !