Aucun mot. Le premier ministre J. Castex n’aura donc eu aucun mot pour les étudiant-e-s et l’Enseignement Supérieur et la Recherche lors de sa conférence de presse du 7 janvier. Ils et elles sont pourtant 2,73 millions en France. Selon la ministre F. Vidal, il ne faut « absolument pas » acter qu’il s’agit d’une année blanche pour les étudiants (entretien sur RTL du 12 janvier). Si l’on ne peut être que d’accord avec elle pour dire que « on ne peut pas dire qu’il n’y a pas eu de cours », de quels cours parle-t-on ? En dehors des TP présentiels autorisés au compte-goutte par les rectorats, l’immense majorité des cours dans les universités se sont résumés au premier semestre à des visioconférences ou à la consultation de documents électroniques.
Le 19 décembre dernier, la ministre F. Vidal publiait une “circulaire” non-contraignante laissant envisager un possible retour de petites cohortes d’étudiant-e-s “fragiles” sur les campus à partir du 4 janvier. Alors que ce sont des dizaines de milliers d’étudiant-e-s qui sont en situation de décrochage, de difficultés pédagogiques, de détresse sociale et de souffrance psychologique, les universités devraient choisir quelques étudiant-e-s pour un retour sur site avec leurs enseignant-e-s ? Sur quels critères ? Sur quelle réalité pédagogique, sociale et psychologique les enseignant-e-s doivent-elles et ils donc exclure la majorité de leurs étudiant-e-s d’une éducation et d’un enseignement réel en présentiel ? Dans plusieurs universités, les présidences proposent du tutorat ou du parrainage étudiant pour pallier les manques : ce sont pourtant bien d’enseignant-e-s, de dédoublement de TD dont ont besoin les étudiant-e-s !
Après plusieurs mois de fermeture totale des campus l’année dernière, et désormais plusieurs semaines pour cette année universitaire, il est grand temps que les universités rouvrent et que le Ministère propose des mesures d’ampleur pour les étudiant-e-s, actuellement délaissé-e-s et méprisé-e-s par ce gouvernement. Tous les indicateurs sont au rouge et l’ensemble de la communauté universitaire en a pleinement conscience : décrochage, destruction des liens sociaux et pédagogiques, isolement, pertes d’emplois et de revenus, voire de logement… jusqu’à la mort volontaire. Cette situation est d’autant plus scandaleuse qu’elle met en lumière et aggrave les inégalités sociales entre les étudiant-e-s des universités et celles-eux des CPGE ou des BTS qui continuent à aller en cours. Dans plusieurs universités, les présidences ont imposé des examens en présentiel, après des mois d’enseignement à distance, pour sauvegarder la prétendue « valeur des diplômes ». Dans certaines universités où les étudiant-e-s se sont mobilisé-e-s contre cette gabegie, la seule réponse a encore une fois été le refus du dialogue et la répression par les forces de l’ordre ou des sociétés de sécurité privées.
Pour les personnels enseignant-e-s, le confinement, la fermeture des universités et le recours à l’enseignement en distanciel, engendrent un épuisement professionnel, une perte du sens pédagogique, une surcharge de travail, des liens individuels distendus avec les étudiant-e-s. Pour les BIATSS, le télétravail ou l’alternance font des dégâts importants : déséquilibre des temps professionnels et personnels, surcharge de travail, troubles musculo-squelettiques et risques psycho-sociaux quand ce n’est pas contrôle accru par la hiérarchie ou par les pairs.
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Pour SUD éducation, il est plus qu’urgent que le gouvernement et les universités organisent dès à présent un retour des étudiant-e-s et des personnels sur site en garantissant leur sécurité sanitaire, tout en maintenant la possibilité pour les personnes vulnérables de s’isoler si elles le souhaitent. Un programme d’investissement d’ampleur doit être lancé pour la rénovation des systèmes de ventilation des locaux (incluant des capteurs de CO2 pour le contrôle de la ventilation) et pour constituer des stocks d’équipements de protection (masques FFP2, gel hydroalcoolique). Cela ne pourra se faire que par un engagement financier et humain massif : si des milliards sont trouvés pour soutenir des entreprises (qui ne se privent pas de licencier), il doit en être de même pour les universités !
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Pour assurer des conditions sanitaires dignes, il faut un allègement de service pour les enseignant-e-s, sans perte de salaire, sans pertes d’heures de cours pour les étudiant-e-s et donc par l’embauche de personnels enseignants. Cela passe par la titularisation de tou-te-s les précaires de l’ESR qui le souhaitent.
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Pour les BIATSS, cela passe aussi par une réduction du temps de travail et le recrutement de personnels sur des postes pérennes.
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Nous demandons le respect des principes garantis par le code de l’éducation, à savoir l’égalité d’accès au service public d’éducation, de pair avec l’égalité de traitement des usagers, mais aussi le principe de gratuité de tous les degrés de l’éducation, bafoués en permanence par un gouvernement refusant de prendre en compte la charge économique des outils numérique en distanciel pour les étudiant-e-s et les enseignant-e-s. Nous demandons enfin le respect de la neutralité commerciale normalement garantie par le code de l’éducation, en arrêtant les subventions publiques à l’égard de plateformes privées pour l’enseignement distanciel (licences privées, “zoom rooms”, etc.).
SUD éducation appelle tou-te-s les personnels des universités à se mobiliser et se mettre en grève le 26 janvier prochain, avec les collègues de l’Éducation nationale, pour imposer nos revendications et la réouverture des universités aux étudiant-e-s avec les moyens nécessaires, des créations de postes, l’amélioration de nos salaires et de nos carrières et pour défendre nos conditions de travail et d’études. Le 4 février, journée de grève et de mobilisation interprofessionnelle intersyndicale, sera l’occasion de combattre ce gouvernement qui fait payer la crise aux travailleurs-euses et à la jeunesse.