Les rapports de l'HCERES envoyés à la mi-février 2025 ont été reçus avec stupeur dans les universités de Paris 8, d'Amiens, de Lille, de Paris-Est Créteil, de la Réunion, ou encore de Mayotte. Dans ces universités, de très nombreuses formations de licence et de master ont été évaluées avec des avis "défavorables" ou "réservés", et ce jusqu'à presque 50% des formations dans certaines universités, et plus de 50% dans certains cycles. Si la colère est généralisée, il semble que certaines universités aient été évaluées plus durement que d'autres au vu de nos premiers bilans. C'est notamment le cas de Paris 8 : 15 des 21 formations de licence et 19 des 42 formations de master de Paris 8 ont été sanctionnées d'un avis "défavorable". C'est bien plus qu'à Lille ou à l'UPEC, où environ 15% des formations ont été évaluées défavorablement contre environ 45% à Paris 8. Si on cumule les avis défavorables et les avis réservés, l'UPEC est également très durement évaluée pour les formations de premier cycle, tout comme l'Université d'Amiens. Par ailleurs, sans surprise, les Arts et Lettres et les SHS sont très clairement les disciplines les plus sévèrement évaluées par l'HCERES.
Les arguments justifiant ces avis sont tous les mêmes : un trop faible taux d'internationalisation (avec quel argent nos étudiant·es seraient supposé·es faire plus de séjours internationaux ?), un trop faible taux d'encadrement (un argument particulièrement incroyable quand on sait que les collègues ne cessent de demander des postes de titulaires), un trop faible taux de réussite en L1 (quand ces taux sont parfois tout à fait égaux à la moyenne nationale ou quand ils reflètent précisément le manque de moyens), l'absence de "conseils de perfectionnement" ou encore le manque "d'indicateurs" chiffrés pour évaluer justement. Il faut donc produire des "indicateurs" pour, nous dit-on, permettre des "mesures correctives". Il faut mettre en place des conseils de perfectionnement ayant "pour vocation l’évaluation interne de la formation dans une démarche d’amélioration continue, en réunissant des universitaires, des étudiants et des représentants du monde socio-professionnel en lien avec la formation". Des acteurs extérieurs au monde universitaire dans les conseils et des indicateurs permettant une mesure d'impact : on voit bien le projet.
Ces formations évaluées défavorablement ne seront pas fermées demain, nous le savons, mais ce coup de semonce est un coup de pression. Il vise à discipliner, à mettre au pas les récalcitrant·es, à imposer l'approche par compétences et les modalités gestionnaires, et à terme, oui, à faire disparaitre des formations qui ne seraient pas assez "performantes".
Nous refusons ces évaluations, les critères qu'elles instaurent comme pertinents et les modes de gouvernance qu'elles entérinent. Nous refusons de nous soumettre au calendrier qui nous est imposé et qui voudrait que chaque formation rende des réponses argumentées aux critiques qui lui ont été faites. Nous exigeons un moratoire et appelons à une réponse collective de toutes les universités et de tous les départements. Cessons de jouer les bon·nes élèves ! Refusons la légitimité de cette instance à évaluer notre travail ! Répondons collectivement plutôt que de continuer à espérer sauver notre formation en regardant disparaitre celles de nos collègues. Il s'agit de se mobiliser pour défendre l'Université que nous voulons et c'est maintenant !