[Brochure n°97] Droits des enfants

Brochure SUD éducation
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Lors de l’année 2023 – 2024, Gabriel Attal a réus­si à se mettre à dos l’ensemble de la com­mu­nau­té édu­ca­tive en seule­ment quelques mois avec sa réforme de tri social, le Choc des savoirs. Alors que les per­son­nels reven­diquent de vrais moyens pour l’école publique afin d’assurer les rem­pla­ce­ments, de garan­tir une vraie école inclu­sive et un vrai accom­pa­gne­ment médi­co-social des élèves mais aus­si de bais­ser le nombre d’élèves par classe pour la réus­site de tou·tes, Attal a choi­si d’imposer des mesures qui trient les élèves, qui sanc­tionnent la dif­fi­cul­té sco­laire et qui dépos­sèdent les enseignant·es et l’ensemble des per­son­nels de leur métier. L’école est un sujet média­tique pour Gabriel Attal qui lui per­met de par­ler à l’électorat d’extrême-droite. Pourtant, c’est avec le des­tin de mil­lions d’élèves qu’a joué le pre­mier ministre. Elles ont par­ti­ci­pé à conduire l’extrême droite aux portes du pouvoir.
Pourtant l’extrême droite porte un pro­gramme qui porte atteinte aux droits des enfants en déman­te­lant la pro­tec­tion de l’enfance.

Déjà, les annonces de Gabriel Attal en avril 2024 étaient par­ti­cu­liè­re­ment alar­mantes car elles mettent en dan­ger notre démo­cra­tie : l’État, par la voix de son pre­mier ministre, renonce à pro­té­ger les jeunes et à leur garan­tir l’égalité de trai­te­ment, il s’emploie à les cri­mi­na­li­ser pour les rendre dociles, dans la conti­nui­té de la mise en place du SNU. Attal sait que la jeu­nesse est une force de trans­for­ma­tion sociale, il est donc prêt à rompre avec les valeurs de notre démo­cra­tie pour la démo­ra­li­ser, l’humilier, la bri­ser. Pourtant la jeu­nesse n’est ni vio­lente, ni incon­trô­lable, elle subit la vio­lence sociale que le gou­ver­ne­ment fait régner aujourd’hui.

Dans cette bro­chure de SUD édu­ca­tion, nous réaf­fir­mons que les droits des jeunes et des enfants doivent être res­pec­tés : le droit à une sco­la­ri­té sans vio­lence et sans dis­cri­mi­na­tion, le droit d’être protégé·es, le droit à la liber­té d’information, d’expression et d’organisation, le droit au loge­ment, le droit au soin. Les équipes de SUD édu­ca­tion s’emploient sur le ter­rain à les faire res­pec­ter et défendent l’auto-organisation de la jeu­nesse contre les poli­tiques qui visent à les cri­mi­na­li­ser, à les réprimer.

Contre le rêve d’Attal d’une jeu­nesse docile sou­mise au SNU que nous com­bat­tons, contre les attaques de l’extrême droite contre les droits des enfants, SUD édu­ca­tion appelle les per­son­nels à défendre pied à pied les droits des élèves et des étudiant·es.

La jeu­nesse a droit à la démo­cra­tie, au res­pect, à être pro­té­gée à l’école et à l’université comme ailleurs !

Sommaire

  1. État des lieux des droits des enfants
  2. Le droit d’aller à l’école
    1. La place centrale de l’enfant dans les pédagogies émancipatrices
    2. Des classes surchargées, ça suffit !
    3. Le droit à la scolarité pour les enfants handicapé⋅es
    4. Le droit à la scolarité pour les enfants étranger.ères
    5. Les réformes d’Attal, le “Choc des savoirs” sont des attaques au droit des élèves d’accéder à un même enseignement !
  3. Le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation
    1. NON aux violences sexuelles
    2. Contre le harcèlement
  4. Le droit à la liberté d’information, d’expression et de participation
    1. Zoom sur la pédagogie Freinet et le conseil coopératif
    2. Donner la parole aux lycéen·nes du syndicat MNL
  5. Le droit d’être protégé·e contre toutes les formes de discrimination
    1. Contre les assignations sexistes
    2. Le droit à l’éducation à la vie affective et sexuelle
    3. Circulaire relative à l’accueil des élèves trans : un texte nécessaire mais insuffisant !
    4. Stop aux injonctions vestimentaires
    5. Note de service interdisant les « tenues de type abaya ou qamis »
    6. Stop aux assignations de genre
    7. Pour les droits des enfants intersexes
    8. Contre la grossophobie
    9. Contre les discriminations racistes
  6. Le droit d’être soigné·e, protégé·e des maladies
    1. Zoom sur la médecine scolaire
  7. Le droit de ne pas faire la guerre, ni de la subir : STOP au SNU !
  8. Le droit d’avoir un refuge, d’être secouru·e, et d’avoir des conditions de vie décentes
    1. Garantir le droit au logement pour tou·tes les enfants
  9. Le droit de jouer et d’avoir des loisirs
    1. Gagnons la gratuité des transports

1 - État des lieux des droits des enfants

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Les droits des enfants ont été éta­blis par plu­sieurs textes inter­na­tio­naux. Ces droits consacrent les garan­ties fon­da­men­tales à tous les êtres humains et notam­ment s’ins­crit dans la Convention Européenne des Droits de l’Homme rati­fiée en 1953.

Définir les droits de l’enfant ?

Les droits de l’en­fant s’ap­pliquent à toute per­sonne âgée de moins de 18 ans, sauf si la majo­ri­té est atteinte plus tôt en ver­tu de la légis­la­tion qui lui est appli­cable. Ils ont trait autant aux droits civils et poli­tiques qu’aux droits éco­no­miques sociaux et cultu­rels, aux droits indi­vi­duels et col­lec­tifs. Parmi eux, on peut citer le droit à une iden­ti­té, à la san­té, à l’é­du­ca­tion, à la vie en famille, à un niveau de vie suf­fi­sant, le droit d’être pro­té­gé de la vio­lence, de s’ex­pri­mer, d’être pro­té­gé de la guerre et de l’ex­ploi­ta­tion ou encore de jouer et d’a­voir des loisirs.

Quels sont les textes internationaux qui garantissent les droits des enfants ?

La décla­ra­tion des droits de l’enfant de 1959 énonce 10 prin­cipes pour répondre aux besoins spé­ci­fiques de l’enfance. Les prin­cipes 8 et 9 évoquent notam­ment le droit « en toutes cir­cons­tances, d’être par­mi les pre­miers à rece­voir pro­tec­tion et secours » et « [d »]être pro­té­gé contre toute forme de négli­gence, de cruau­té et d’ex­ploi­ta­tion, [de ne] pas être sou­mis à la traite, sous quelque forme que ce soit »

La Convention inter­na­tio­nale des droits de l’en­fant (CIDE) adop­tée par l’as­sem­blée géné­rale des Nations Unies le 20 novembre 1989, et entrée en appli­ca­tion en France le 6 sep­tembre 1990, a pour mis­sion de pro­té­ger les droits des enfants. Elle com­prend 54 articles qui défi­nissent les droits des enfants et les res­pon­sa­bi­li­tés des États pour les garan­tir. Tous ces droits sont inalié­nables et interdépendants.

Qu’en est-il dans le droit français ?

De nom­breuses sources déclinent ces mesures dans le droit français :

  • le code de l’é­du­ca­tion : droits sco­laires, édu­ca­tion à la sexualité ;
  • le code de la san­té publique : accès à la san­té et à la contraception ;
  • le code civil : pro­tec­tion de l’en­fance, auto­ri­té paren­tale, pro­tec­tion de la vie pri­vée, droits juridiques ;
  • le code pénal qui liste les délits et crimes com­mis sur les mineurs et les sanc­tions correspondantes ;
  • le code de l’entrée et du séjour des étranger⋅es rela­tif au droit des étranger⋅es mineur⋅es ;
  • le code de l’ac­tion sociale et des familles : pro­tec­tion de l’enfance.

Ces articles sont com­plé­tés par des lois dont les dis­po­si­tions concernent direc­te­ment les droits des enfants et qui trouvent leur appli­ca­tion dans des cor­pus régle­men­taires. Par exemple, on peut citer les lois des 5 mars 2007 et 14 mars 2016 rela­tives à la pro­tec­tion de l’enfance et la loi du 10 juillet 2019 rela­tive à l’in­ter­dic­tion des vio­lences édu­ca­tives ordinaires.

Si la prise en compte des droits des enfants en France est une réa­li­té juri­dique ceux-ci res­tent par­tiels : on pense par exemple au droit à l’éducation qui n’est pas tota­le­ment réa­li­sé tant que tou⋅tes les enfants n’ont pas accès à l’école publique. D’autre part, elle n’échappe pas à la logique répres­sive et sécu­ri­taire qui impacte l’ensemble de la socié­té. On peut, entre-autres, citer le retour de l’enfermement des mineur⋅es avec la loi Perben de 2002 qui (re)crée les éta­blis­se­ments péni­ten­tiaires pour mineurs (EPM) dont les pre­miers seront ouverts en 2007. Autre caté­go­rie de mineur⋅es dont les droits sont bafoués, les mineur⋅es étranger⋅es isolé⋅es : refus de recon­nais­sance de mino­ri­té et donc de pro­tec­tion, pra­tique de tests osseux, fichage bio­mé­trique, etc.

2 - Le droit d’aller à l’école

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2.1 - La place centrale de l’enfant dans les pédagogies émancipatrices

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Des pédagogies où tout s’imbrique

Le terme « péda­go­gies éman­ci­pa­trices » recoupe une mul­ti­tude de cou­rants péda­go­giques, la plu­part ayant émer­gé dans la pre­mière moi­tié du XXe siècle. Des péda­go­gies cri­tiques incar­nées prin­ci­pa­le­ment par la figure du bré­si­lien Paulo Freire, aux péda­go­gies ins­ti­tu­tion­nelles déve­lop­pées dans les mou­ve­ments d’é­du­ca­tion popu­laires, en pas­sant par les tra­vaux d’Élise et Célestin Freinet, on retrouve plu­sieurs prin­cipes com­muns per­met­tant de les regrou­per sous l’ex­pres­sion « péda­go­gies émancipatrices ».

Ces péda­go­gies envi­sagent tou­jours l’ap­pre­nant non pas comme un « élève » dans ce que ce terme à de res­tric­tif à l’u­ni­vers de l’é­cole, mais comme un indi­vi­du com­plexe et mul­tiple dont les com­pé­tences pro­viennent et s’ex­priment au-delà des savoirs dits « aca­dé­miques ». C’est la rai­son pour laquelle cha­cun de ces mou­ve­ments péda­go­giques a pour prin­cipe fon­da­men­tal de mettre l’ap­pre­nant au centre, de le rendre acteur de ses appren­tis­sages, déci­deur des conte­nus qu’il sou­haite tra­vailler, qu’il s’a­gisse d’un appre­nant adulte ou d’un enfant. Toutefois, et à la dif­fé­rence de la direc­tion prise par le tra­vail de Maria Montessori – que l’on assi­mile par­fois à ces mou­ve­ments péda­go­giques – les péda­go­gies éman­ci­pa­trices com­portent une dimen­sion poli­tique et sociale très pré­gnante : il s’a­git éga­le­ment de faire prendre conscience à l’ap­pre­nant de sa condi­tion d’être social (et sou­vent oppri­mé). Par des pro­ces­sus de conscien­ti­sa­tion des inéga­li­tés, des enjeux de lutte sociale et des enjeux de pou­voir autour de la maî­trise de savoirs et de connais­sances, l’ap­pre­nant est accom­pa­gné vers sa propre éman­ci­pa­tion. L’un des objec­tifs est de s’af­fran­chir de toute domi­na­tion et dépen­dance, tout en déve­lop­pant un sens aigu du col­lec­tif, de la res­pon­sa­bi­li­té et du vivre-ensemble. « L’apprenant au centre » ne doit donc pas se lire comme l’ex­pres­sion d’une péda­go­gie de l’in­di­vi­dua­lisme, mais au contraire comme une démarche de res­pon­sa­bi­li­sa­tion de l’ap­pre­nant comme être social.

C’est à tra­vers ce prisme que sont pen­sées les dif­fé­rentes acti­vi­tés déve­lop­pées par les péda­go­gies éman­ci­pa­trices : chaque moment d’ap­pren­tis­sage tend vers une plus grande liber­té de l’ap­pre­nant, vers une « enca­pa­ci­ta­tion » ain­si que vers un ques­tion­ne­ment du monde qui l’en­toure. Ces prin­cipes habi­tant cha­cune des pro­po­si­tions péda­go­giques que nous pré­sen­tons ici, il nous paraît impor­tant de rap­pe­ler qu’elles s’im­briquent donc dans une inter­dé­pen­dance constante : les acti­vi­tés d’ex­pres­sion libre font écho au ques­tion­ne­ment sur la démo­cra­tie dans la classe, de même que les démarches d’in­ves­ti­ga­tion résonnent dans les acti­vi­tés de pré­sen­ta­tion orale et sont étroi­te­ment liées aux obser­va­tions faites par les enfants lorsque la classe sort de l’école.

L’enfant, un être de droits

Les péda­go­gies éman­ci­pa­trices à tra­vers le mou­ve­ment de l’école moderne ont eu un rôle impor­tant dans la recon­nais­sance des droits de l’enfant qui a abou­ti à la conven­tion des droits de l’enfant adop­tée à l’unanimité par l’ONU le 20 novembre 1989. Celle-ci recon­naît le droit de l’enfant à l’ accès à la vie et à l’action citoyennes.

Aujourd’hui, les péda­go­gies éman­ci­pa­trices s’évertuent à faire en sorte que les enfants puissent exer­cer leurs droits, leurs liber­tés, leur citoyen­ne­té et par l’exercice de ces droits, construisent les com­pé­tences qui les feront deve­nir des citoyen·nes émancipé·es, qui par­ti­cipent à la démocratie.

Elles consi­dèrent l’école comme un lieu où les enfants apprennent en exer­çant leurs liber­tés, par­fois seul·es (nul besoin de la per­mis­sion de l’adulte pour aller cher­cher un mou­choir, du maté­riel ou un cama­rade pour tra­vailler, pour aller aux toi­lettes même si les dépla­ce­ments peuvent avoir besoin d’être signa­lés à l’adulte garant de la sécu­ri­té de l’enfant), par­fois avec l’adulte, par­fois après avoir mon­tré qu’on est capable de res­pec­ter les devoirs inhé­rents à l’exercice d’un droit : c’est le prin­cipe des cein­tures de com­por­te­ment de la péda­go­gie ins­ti­tu­tion­nelle qui per­mettent à l’enfant de jus­te­ment construire ce rap­port devoirs /​droits.

Le droit à s’exprimer libre­ment va s’exercer à tra­vers toutes les pra­tiques de créa­tion et d’expressions libres, ren­dues pos­sibles par un cadre qui a le sou­ci que cha­cun et cha­cune s’exprime, et pas seule­ment les plus à l’aise qui exercent déjà ce droit dans la sphère fami­liale ou ailleurs. En conseil, les plus jeunes se font pas­ser un bâton de parole, dans les classes plus âgées, un·e élève res­pon­sable note et fait res­pec­ter les tours de parole. La prio­ri­té est don­née à celui ou celle qui a le moins parlé.

Un autre droit mis en avant dans l’é­cole des péda­go­gies éman­ci­pa­trices est celui des enfants à par­ti­ci­per aux déci­sions qui les concernent, droit garan­ti par l’article 12 de la conven­tion mais qui peine à être appli­qué dans nos ins­ti­tu­tions… Et pour­tant, si l’on veut que tou·tes les enfants soient égaux·les devant ce droit, n’est-ce pas d’a­bord à l’école publique en pre­mier qu’il convien­drait de l’exercer ? L’un des piliers de la péda­go­gie Freinet est jus­te­ment une réelle par­ti­ci­pa­tion des enfants aux déci­sions quant à leur tra­vail et à l’organisation de la classe et de l’école. Cette par­ti­ci­pa­tion est notam­ment ren­due pos­sible par les conseils coopé­ra­tifs qui sont des moments d’organisation du tra­vail, de la vie, de la classe et ou de l’école.

Ainsi, le ven­dre­di lors du conseil bilan de la semaine, les président·es du conseil décrochent les 3 pochettes « J’ai un pro­blème », « Je pro­pose », « Je féli­cite » dans les­quels les cama­rades ont mis des papiers avec leur pré­nom, signi­fiant ain­si qu’ils et elles veulent s’ex­pri­mer dans l’un de ces moments. Le moment « Je pro­pose » per­met aux élèves d’exer­cer ce droit de par­ti­ci­pa­tion. Il ne suf­fit sou­vent pas car il faut éga­le­ment pré­voir des temps où les pro­po­si­tions faites et vali­dées par la classe sont concré­ti­sées. Ces pro­po­si­tions peuvent être simples et à mettre en place direc­te­ment dans la classe. Par exemple, en début d’an­née, une élève de CP pro­pose de déco­rer la classe avec des des­sins d’é­lèves. Après dis­cus­sion, les élèves décident de mettre une che­mise car­ton­née à dis­po­si­tion dans laquelle on met les des­sins qu’on sou­haite affi­cher en classe. Depuis, à chaque conseil, on ouvre la pochette, et la classe valide ou demande éven­tuel­le­ment de reprendre le des­sin en don­nant des conseils pour l’a­mé­lio­rer avant affi­chage. Pour que cette par­ti­ci­pa­tion soit pos­sible, il faut un « par­tage du pou­voir », une remise en ques­tion de la façon dont l’adulte exerce son auto­ri­té sur l’enfant.

Cela ren­voie notam­ment au concept de « part du maître » pro­po­sé en péda­go­gie frei­net : l’a­dulte est bien sûr res­pon­sable et garant de la sécu­ri­té phy­sique, morale et émo­tion­nelle des enfants dont il a la charge et doit en ce sens ins­tau­rer un cadre sécu­ri­sant, tou­te­fois, les enseignant·es ne sont pas au-des­sus, ni au ser­vice de, ils et elles font par­tie de la com­mu­nau­té sco­laire régie par des droits et des devoirs dont les adultes aus­si doivent répondre.

Il s’agit sou­vent de décons­truire l’autorité arbi­traire de l’adulte (sous pré­texte qu’il sau­rait ce qui est bon) sur l’enfant et la décons­truc­tion de cette rela­tion d’oppression n’a rien de simple, ni pour les adultes, ni pour les enfants.

Il faut alors par­fois du temps pour que les enfants s’emparent de ce droit de par­ti­ci­pa­tion, sur­tout lorsque la pra­tique du conseil n’est pas une habi­tude d’é­cole, et que les enfants ont inté­gré qu’ils et elles doivent « écou­ter les adultes ». Mais, en fin d’an­née, on peut avoir droit à ces conseils pépites dans les­quels l’enseignant·e peut s’ef­fa­cer presque complètement.

Cette rela­tion d’au­to­ri­té des adultes sur les enfants remise en ques­tion, les adultes n’en res­tent pas moins la garan­tie des droits des enfants dont ils et elles ont la res­pon­sa­bi­li­té. La res­pon­sa­bi­li­té de leur faire connaître et de leur don­ner la pos­si­bi­li­té de se défendre, mais aus­si une res­pon­sa­bi­li­té directe des liber­tés fon­da­men­tales par­mi les­quelles l’accès à des condi­tions de vie dignes : le droit à un loge­ment décent, le droit à de la nour­ri­ture en quan­ti­té suf­fi­sante, le droit à des soins, etc. Ces mêmes droits qui sont actuel­le­ment en recul en France, où de plus en plus d’enfants vivent dans la précarité.

L’ouverture au monde exté­rieur à l’école des péda­go­gies éman­ci­pa­trices, c’est donc aus­si être atten­tif aux condi­tions de vie des élèves, de leurs familles, ne pas fer­mer les yeux sous pré­texte qu’à l’école les enfants seraient égaux·les, ne pas cloi­son­ner sa vie pro­fes­sion­nelle et sa vie citoyenne et agir col­lec­ti­ve­ment pour que l’état assume ses res­pon­sa­bi­li­tés face aux enfants, pour lut­ter contre les oppres­sions vécues aus­si à l’extérieur de l’école.

Si la place de l’é­lève est cen­trale dans les péda­go­gies éman­ci­pa­trices, ces der­nières cherchent à lui mon­trer quelle posi­tion occu­per au sein de la socié­té. En effet, l’é­lève est aus­si une per­sonne sociale, occu­pant une posi­tion sociale au sein d’une struc­ture sociale, c’est-à-dire au sein d’une orga­ni­sa­tion de la socié­té. Il s’a­gi­ra donc à la fois de prendre conscience des rap­ports sociaux (de classe, de genre, de race) mais aus­si de les trans­for­mer, de cher­cher à s’en éman­ci­per. Il n’y a pas d’un côté, l’adulte qui va ensei­gner, et de l’autre l’é­lève qui va apprendre. En effet, selon les mots de Paulo Freire « per­sonne n’é­duque autrui, per­sonne ne s’é­duque seul, les hommes s’é­duquent ensemble par l’in­ter­mé­diaire du monde ».

L’adulte va cher­cher à faire conscien­ti­ser les rap­ports sociaux inéga­li­taires aux élèves, et en le fai­sant, il va en apprendre lui-même davan­tage. Pour cela, il fau­dra enquê­ter sur son monde tel un socio­logue. Toutefois, étu­dier les rap­ports sociaux seule­ment peut être source d’an­goisse et démo­bi­li­sant. Il faut donc éga­le­ment tra­vailler avec les élèves à trans­for­mer le monde, indi­vi­duel­le­ment et col­lec­ti­ve­ment. On cher­che­ra à créer ensemble une capa­ci­té d’ac­tion col­lec­tive. Par exemple, tra­vailler sur les inéga­li­tés de genre ne peut pas s’ar­rê­ter à une étude sta­tis­tique de l’i­né­gale répar­ti­tion du tra­vail domes­tique, il fau­dra réflé­chir avec ses élèves à ce qu’il est pos­sible de faire, dans nos classes, nos éta­blis­se­ments, nos quar­tiers, nos villes et ain­si de suite. Pour cela, il est pos­sible de par­tir d’un ques­tion­ne­ment simple aux élèves : que faire pour lut­ter contre ? Les élèves ne manquent pas de pro­po­si­tions, même si par­fois elles sont hési­tantes : cam­pagne de sen­si­bi­li­sa­tion, for­ma­tion du per­son­nel et de leurs cama­rades, dénon­cia­tion du pro­blème à l’é­du­ca­tion nationale…etc.

L’enfant dans le collectif

L’importance des moments de pré­sen­ta­tions collectives.

Ces péda­go­gies éman­ci­pa­trices consi­dé­rant l’en­fant comme un être social qui n’ap­prend pas seule­ment à l’é­cole des savoirs mais découvre aus­si des savoirs-être et des savoirs-vivre, elles pro­posent sys­té­ma­ti­que­ment des temps col­lec­tifs dans l’emploi du temps de la semaine. Ainsi, l’é­lève peut pré­sen­ter à l’o­ral son texte libre, son œuvre d’art, son expo­sé, son expé­rience scien­ti­fique… et le retour de la classe, sous forme de questions/​remarques /​suggestions, va à la fois rendre néces­saire et moti­vant le tra­vail effec­tué en amont et en même temps sus­ci­ter de nou­velles inter­ro­ga­tions, recherches, de nou­veaux tra­vaux et aider à évoluer.

Le col­lec­tif est essen­tiel. Il est pré­sent éga­le­ment dans les classes tra­di­tion­nelles mais il ne s’agit pas de la même chose.

Du côté des classes tra­di­tion­nelles, le col­lec­tif a pour but de faire assi­mi­ler aux élèves les mêmes règles et les mêmes conte­nus scolaires.

Du côté des péda­go­gies éman­ci­pa­trices, le col­lec­tif veut que chaque per­sonne soit recon­nue dans sa sin­gu­la­ri­té avec son apport au groupe. Là encore la dif­fé­rence va se faire au niveau de la place occu­pée par les adultes et donc par celle lais­sée aux élèves. Pour les péda­go­gies éman­ci­pa­trices c’est le col­lec­tif qui per­met d’apprendre. L’adulte n’apporte pas les connais­sances et leur vali­da­tion. L’adulte orga­nise et crée un cadre qui per­met à l’enfant d’ap­por­ter au groupe et d’être recon­nu au sein du groupe, de savoir sus­ci­ter les échanges et l’en­traide au sein du groupe. Le col­lec­tif prend du recul et réflé­chit sur des tech­niques pour amé­lio­rer leurs pro­duc­tions, mais aus­si voir qu’il peut y avoir plu­sieurs façons de faire. Ces moments poussent à l’ou­ver­ture aux autres : dès la mater­nelle, l’en­fant va réa­li­ser que le col­lec­tif peut l’ai­der à pro­gres­ser, et que lui ou elle – même – peu importe ses capa­ci­tés – peut aider et trou­ver sa place dans le groupe.

Les dictées coopératives : un exemple d’activité qui développe l’entraide entre élèves

La dic­tée coopé­ra­tive est facile à mettre en place : on part sur une dic­tée clas­sique, non pré­pa­rée. Sauf qu’à un moment don­né, les enfants ont la pos­si­bi­li­té de deman­der de l’aide à la classe. De cette manière, on pousse les enfants à se poser des ques­tions sur l’or­tho­graphe des mots : par exemple, « est-ce que man­ger s’é­crit [an] ou [en] ? » Les élèves de la classe vont alors essayer d’apporter une aide sans épe­ler le mot, mais en se réfé­rant à un mot que tous savent déjà écrire (tra­vailler par ana­lo­gie) : « le début de man­ger, ça s’é­crit comme la fin de maman ».

Cette acti­vi­té per­met d’en­le­ver le stress de la dic­tée clas­sique : l’en­fant sait qu’il ou elle peut comp­ter sur le groupe classe pour l’ai­der, et qu’il a tout inté­rêt à véri­fier l’or­tho­graphe des mots avant de les écrire. Ce qui est au final le but d’une dic­tée : apprendre à écrire en fai­sant le moins d’er­reurs pos­sibles et avoir le réflexe de véri­fier l’or­tho­graphe si l’on a un doute.

Les marchés de connaissances : quand l’enfant-apprenant devient l’enfant-enseignant

Les mar­chés de connais­sances sont des moments où un groupe d’é­lèves volon­taires va orga­ni­ser des stands pour ensei­gner aux autres élèves de la classe ou de l’é­cole des choses sur les­quelles ils ou elles se consi­dèrent comme experts : on y voit des ate­liers scou­bi­dous, pixels arts, ori­ga­mis, pâte fimo, Minecraft… ou encore des mar­chés spor­tifs (hip hop, bas­ket, foot­ball, cirque…).

Lors de cette acti­vi­té, l’adulte est un régu­la­teur – il ou elle peut aus­si gérer un stand mais ce sont essen­tiel­le­ment les élèves qui enseignent. L’enfant réa­lise que lui aus­si maî­trise des connais­sances qu’il ou elle peut par­ta­ger, et cela lui per­met de se mettre à la place de l’a­dulte et d’ap­pré­hen­der les pro­blèmes (et solu­tions) qu’il peut ren­con­trer lors de la trans­mis­sion des savoirs. Au fur et à mesure des mar­chés, on met en place des tech­niques et du maté­riel pour faci­li­ter cette trans­mis­sion (pré­pa­rer la trame de ce qu’on va dire, cibler les com­pé­tences tra­vaillées, rédi­ger un tuto­riel écrit, un ques­tion­naire pour voir si tout est bien com­pris…) ; on fait le point sur les droits et les devoirs des groupes par­ti­ci­pants et des groupes experts (l’im­por­tance de res­pec­ter et d’é­cou­ter, de pré­pa­rer son stand correctement).

2.2 - Des classes surchargées, ça suffit !

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Une condi­tion indis­pen­sable pour garan­tir les bonnes condi­tions d’apprentissage et un cli­mat sco­laire pro­pice aux appren­tis­sages est d’avoir des condi­tions d’étude sereines pour les élèves. Mais au lieu d’investir dans l’Éducation natio­nale, le minis­tère ne cesse de réduire ses moyens. Le bien-être des élèves ne semble pas être une prio­ri­té pour le minis­tère qui ne cesse de sup­pri­mer des postes. Dans le second degré, dans un contexte de hausse démo­gra­phique, on en est à 9 000 sup­pres­sions de postes en 6 ans. SUD édu­ca­tion réclame un plan d’urgence pour l’éducation, pré­voyant des recru­te­ments impor­tants afin de dimi­nuer les effec­tifs en classe, un accent mis sur la for­ma­tion conti­nue des per­son­nels, et des moyens maté­riels per­met­tant une mise à niveau du bâti scolaire.

SUD édu­ca­tion revendique :

Des moyens en per­son­nels :Limiter les effec­tifs par classe avec au collège :

  • 20 élèves maxi­mum en col­lège ordi­naire, 16 en édu­ca­tion prio­ri­taire, 12 en SEGPA ;
  • des dédou­ble­ments natio­naux sur la moi­tié des horaires d’enseignement dans toutes les matières.

Des Vies sco­laires renforcées :

  • Au moins 1 CPE dans tous les col­lèges quel que soit le nombre d’élèves ;
  • 1 CPE pour 120 élèves dans les col­lèges ordi­naires et 1 pour 100 en édu­ca­tion prioritaire ;
  • En plus du CPE, 1 per­son­nel de vie sco­laire pour 50 élèves en col­lège ordi­naire et 2 pour 50 en édu­ca­tion prioritaire.

Un réseau de ser­vice public à taille humaine et égalitaire :

  • Une taille des col­lèges limi­tée avec des col­lèges de 400 élèves maxi­mum ; la fin des regrou­pe­ments d’établissements dans des cités sco­laires de taille trop impor­tante pour assu­rer un sui­vi cor­rect des élèves.

2.3 - Le droit à la scolarité pour les enfants handicapé⋅es

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En 2006, seul·es 155 361 enfants en situa­tion de han­di­cap étaient scolarisé·es en milieu sco­laire. Aujourd’hui, ils et elles sont plus de 470 000. Le nombre de per­son­nels en charge de leur accom­pa­gne­ment est pas­sé de 12 640 à plus de 130 000.

Pourtant, nous consta­tons une dégra­da­tion des condi­tions d’accueil des élèves en situa­tion de han­di­cap en milieu ordi­naire dont le nombre d’heures en accom­pa­gne­ment dimi­nue. Les condi­tions d’une école réel­le­ment inclu­sive ne sont donc pas rem­plies. L’accompagnement ne se fait pas selon l’évaluation réelle des besoins des élèves, mais selon une logique de ren­ta­bi­li­sa­tion et d’économie des moyens qui n’a pas sa place à l’école. La mutua­li­sa­tion des moyens doit ces­ser et il faut des embauches mas­sives de per­son­nels accompagnant·es des élèves en situa­tion de handicap.

SUD édu­ca­tion dénonce les carences de l’État en matière de sco­la­ri­sa­tion des élèves handicapé·es. Combien fau­dra-t-il de rap­ports à charge pour que le minis­tère décide de don­ner à l’école les moyens de sco­la­ri­ser réel­le­ment les élèves handicapé·es et de leur garan­tir les mêmes droits que tou·tes les autres élèves ?

Validisme et politiques de l’Etat français sur le handicap

Le vali­disme désigne l’oppression dont sont vic­times les per­sonnes han­di­ca­pées : dis­cri­mi­na­tions, blagues, handiphobie…

C’est un sys­tème d’idées et de repré­sen­ta­tions que la socié­té vali­diste dans laquelle nous vivons nous inculque et avec les­quelles nous appré­hen­dons le monde social. Notre socié­té se struc­ture autour de l’idée que la norme, c’est la per­sonne valide, ren­voyant de fait les per­sonnes han­di­ca­pées dans les marges et l’anormalité. Cette idée nie tout conti­nuum entre les per­sonnes valides et les per­sonnes han­di­ca­pées et cette bina­ri­sa­tion a deux consé­quences immédiates :

  • Elle objec­ti­fie les per­sonnes han­di­ca­pées, per­çues par les valides comme des per­sonnes onto­lo­gi­que­ment vouées au mal­heur du fait de leur pré­ten­due incom­plé­tude et de leur pré­ten­du écart à la norme (c’est le ver­sant misé­ra­bi­liste) ou au contraire, dans un point de vue faus­se­ment valo­ri­sant, comme des modèles d’inspiration en ver­tu d’une sup­po­sée supé­rio­ri­té d’âme et de cou­rage (c’est le ver­sant ins­pi­ra­tion porn). Dans les deux cas, les per­sonnes han­di­ca­pées ne sont pas appré­hen­dées comme des per­sonnes mais sont réduites à leur han­di­cap, essentialisées.
  • Elle induit une hié­rar­chie des vies dans laquelle la vie des per­sonnes han­di­ca­pées a moins de valeur que celle des per­sonnes valides. C’est en rai­son de cette hié­rar­chie des vies que la socié­té pense – autre­ment dit que nous pen­sons col­lec­ti­ve­ment – accep­table le fait que les per­sonnes han­di­ca­pées aient moins de droits que les per­sonnes valides. Cette res­tric­tion de droits est un fait et concerne tous les aspects de la vie, depuis le loge­ment, les trans­ports, le tra­vail, les loi­sirs, la vie sociale, la fête ou encore l’éducation.

Puisque le vali­disme fait sys­tème, puisqu’il est pré­sent par­tout et tout le temps, puisqu’il struc­ture nos ima­gi­naires et nos repré­sen­ta­tions, il nous appa­raît comme allant de soi, comme étant le résul­tat d’implacables lois natu­relles. Il semble que les choses sont ain­si par­tout et depuis tou­jours, ce qui a pour effet de légi­ti­mer les dis­cri­mi­na­tions, d’en amoin­drir ou effa­cer l’injustice. Ainsi pense-t-on com­mu­né­ment ces res­tric­tions de liber­tés comme étant néces­saires et, tour de force rhé­to­rique, pour le bien des per­sonnes handicapées.

Ces dis­cri­mi­na­tions et res­tric­tions de liber­té sont pour­tant construites his­to­ri­que­ment et sont le résul­tat de choix poli­tiques et peuvent donc, de ce fait, être com­bat­tues. Les luttes anti­va­li­distes sont menées – dans les mêmes pers­pec­tives d’émancipation et de jus­tice sociale que l’antisexisme, l’antiracisme ou l’anticlassisme par exemple – depuis les années 68 en France et à l’internationale par des col­lec­tifs de per­sonnes han­di­ca­pées. Elles ont ame­né à la rédac­tion de la Convention inter­na­tio­nale des droits des per­sonnes han­di­ca­pées de l’Organisation des Nations Unies ( Onu), rati­fiée par la France en 2010. C’est le texte de réfé­rence. La conven­tion a, dans le texte, « pour objet de pro­mou­voir, pro­té­ger et assu­rer la pleine et égale jouis­sance de tous les droits de l’homme et de toutes les liber­tés fon­da­men­tales par les per­sonnes han­di­ca­pées et de pro­mou­voir le res­pect de leur digni­té intrin­sèque ». Elle est construite autour des prin­cipes fon­da­teurs de la digni­té, de l’égalité et de l’accessibilité. C’est notam­ment pour son appli­ca­tion pleine et entière que se battent des col­lec­tifs anti­va­li­distes comme le CLHEE, les Dévalideuses ou encore Handisocial aujourd’hui.

En août 2021, le Comité des droits des per­sonnes han­di­ca­pées de l’Onu audi­tionne la France afin d’évaluer sa poli­tique rela­tive au han­di­cap. Les conclu­sions pré­sen­tées dans le rap­port ren­du public le 14 sep­tembre et dis­po­nible sur le site de l’ Onu sont sans appel.

Ce Comité constate « une légis­la­tion et des poli­tiques publiques fon­dées sur le modèle médi­cal et des approches pater­na­listes du han­di­cap » qui « met l’ac­cent sur l’in­ca­pa­ci­té des per­sonnes han­di­ca­pées et fait de l’ins­ti­tu­tion­na­li­sa­tion la norme », qui « fait per­du­rer l’institutionnalisation sys­té­ma­tique de per­sonnes sur la base de leur han­di­cap ». Il demande à « empê­cher le pla­ce­ment en ins­ti­tu­tions fer­mées » et à en « finir avec l’institutionnalisation des adultes et des enfants en situa­tion de han­di­cap » en met­tant en œuvre des méthodes « res­pec­tant les droits humains tels que la digni­té, l’égalité, la liber­té l’autonomie et l’accessibilité, qui com­prend le sou­tien de ses pairs » ain­si que « le droit de vivre de manière indé­pen­dante et dans la com­mu­nau­té ».

La France est donc loin d’être en confor­mi­té avec la Convention inter­na­tio­nale des droits des per­sonnes han­di­ca­pées, en par­ti­cu­lier parce qu’elle ne remet pas véri­ta­ble­ment en cause le modèle de l’institutionnalisation et parce que les poli­tiques qu’elle met en œuvre sur le han­di­cap ne sont pas fon­dées sur les droits humains.

Ce rap­port doit nous ame­ner à nous posi­tion­ner éthi­que­ment, poli­ti­que­ment et syn­di­ca­le­ment par rap­port à l’institutionnalisation. Pour SUD édu­ca­tion, il y a urgence à convaincre que tou·tes les élèves ont leur place à l’école et que c’est bien à l’école qu’il revient de garan­tir des com­pen­sa­tions du han­di­cap afin d’en finir avec le vali­disme et la ségré­ga­tion sco­laire et sociale.

Des Pials aux Pas…

Il faut d’urgence aban­don­ner cette machine à mor­ce­ler l’accompagnement qu’est le PIAL, de don­ner des moyens pour l’accueil de tou·tes les élèves à l’école quelques soient leurs besoins et créer un vrai sta­tut de la Fonction publique pour les AESH.

La mise en place des PIALS (Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés), ins­tau­rée par la loi du 26 juillet 2019, en ren­for­çant la mutua­li­sa­tion des moyens humains, a eu pour consé­quence de réduire le temps et la qua­li­té d’ac­com­pa­gne­ment des élèves handicapé·es en classe. La moyenne serait de 6 heures d’ac­com­pa­gne­ment par élève. Les moyens alloués ne per­mettent pas de mettre en place une véri­table poli­tique d’ac­com­pa­gne­ment qui ten­drait vers une auto­no­mie pro­gres­sive en fonc­tion des besoins de l’é­lève pen­dant les temps de cours. Et il n’a pas du tout été pré­vu de temps dédiés pour reprendre ces cours et appor­ter une aide spé­ci­fique aux devoirs. On est – sous pré­texte d’au­to­no­mi­sa­tion des élèves et d’in­clu­sion– dans une logique de réduc­tion bud­gé­taire des moyens.

L’acte II de l’é­cole inclu­sive et ses douze mesures, annon­cées lors de la 6 ème confé­rence du han­di­cap qui s’est tenue le 26 avril 2023 à l’Elysée, n’é­chappe pas à cette logique finan­cière. Aucun texte ne cadre pour l’ins­tant ces annonces. Mais on peut repé­rer plu­sieurs points inquiétants.

Les Pials seraient rem­pla­cés par des Pas (Pôles d’Appui à la Scolarisation). Un nou­veau sta­tut, paral­lèle à celui des AESH (Accompagnantes d’Elèves en Situation de Handicap) serait créé : ARE (Agent à la Réussite Éducative). Ces nou­veaux acro­nymes font dis­pa­raître la notion de han­di­cap, ils s’accompagnent éga­le­ment d’une volon­té d’étendre les mis­sions actuelles des AESH pour “régler” la ques­tion des temps de tra­vail incom­plets. On pour­rait se réjouir que les élèves handicapé‧es, comme nous le reven­di­quons à SUD édu­ca­tion, soient consi­dé­rés comme des élèves à part entière. Mais la néga­tion du han­di­cap n’est en revanche pas for­cé­ment le signe d’une socié­té véri­ta­ble­ment inclu­sive. C’est ain­si que les mis­sions de la MDPH seraient réduites : les équipes édu­ca­tives auraient à charge de défi­nir les besoins des élèves handicapé‧es, sauf pour cer­taines situa­tions lourdes. Le gou­ver­ne­ment annonce pour rem­plir cet objec­tif un plan de for­ma­tion ren­for­cée à des­ti­na­tion des per­son­nels. Si les moyens et la for­ma­tion ne sont pas à la hau­teur des enjeux, on peut ima­gi­ner que les per­son­nels vont rapi­de­ment se retrou­ver à gérer la pénu­rie et à prendre des déci­sions, prises aupa­ra­vant par une équipe plu­ri­dis­ci­pli­naire. On déspé­cia­lise la sco­la­ri­sa­tion des élèves han­di­ca­pés. On le voit éga­le­ment à la créa­tion et l’aug­men­ta­tion de dis­po­si­tifs comme les UEMA (Unités d’Enseignement Maternel Autisme), les UEEA (Unités d’Enseignement Elémentaire Autisme) et sur­tout les DAR (Dispositifs d’au­to­ré­gu­la­tion) qui ne seraient plus coor­don­nés par des enseignant‧es spécialisé‧es,

De l’autre côté, le gou­ver­ne­ment annonce qu’une par­tie des moyens alloués aux éta­blis­se­ments spé­cia­li­sés serait trans­fé­ré vers les écoles et éta­blis­se­ments avec l’im­plan­ta­tion d’u­ni­tés d’en­sei­gne­ment d’Itep ou d’IME et de ser­vices médi­co-sociaux, comme les Sessad mais déspé­cia­li­sés. On peut se réjouir en théo­rie que l’é­cole soit ren­due acces­sible à des élèves dont le par­cours de sco­la­ri­sa­tion était ségré­gué. On peut se réjouir éga­le­ment d’un ren­for­ce­ment des liens entre le médi­co-social et l’é­cole. On s’é­ton­ne­ra que les per­son­nels concer­nés des éta­blis­se­ments spé­cia­li­sés ne soient pas du tout tenus au cou­rant de ces trans­for­ma­tions de leurs métiers. Et on peut craindre for­te­ment d’a­bou­tir à un sau­pou­drage des moyens en lieu et place du sui­vi spé­ci­fique et per­son­na­li­sé que ces struc­tures offraient jus­qu’à pré­sent. Les élèves risquent d’en être insécurisé·es, de subir une forme de mal­trai­tance ins­ti­tu­tion­nelle et les per­son­nels d’être confron­tés à des situa­tions com­pli­quées, comme on le voit sou­vent déjà par manque de moyens, d’ac­com­pa­gne­ment et d’en­ca­dre­ment spé­ci­fiques, pour les­quelles la créa­tion d’é­quipes mobiles apporte une réponse limi­tée. Sans par­ler du pro­blème de place dans les écoles, on peut se deman­der éga­le­ment si la confu­sion des lieux dédiés au médi­co-social et à l’ap­pren­tis­sage sco­laire est un élé­ment struc­tu­rant pour les élèves.

Les droits des enfants, c’est aus­si ceux des élèves handicapé‧es et notam­ment de l’ac­ces­si­bi­li­té à l’é­cole. Pour favo­ri­ser cette acces­si­bi­li­té, le han­di­cap ne sau­rait être nié. Si la sco­la­ri­sa­tion des élèves han­di­ca­pés doit deve­nir l’af­faire de toutes, on pren­drait des risques pour les enfants à la déspécialiser.

Enfin, une autre ques­tion fon­da­men­tale est celle de la for­ma­tion. Si on regarde du côté des AESH, le droit à la for­ma­tion, pour­tant ins­crit dans les textes, est entra­vé : défaut d’offre de for­ma­tion, conte­nu inadap­té, pro­blèmes d’accès à l’information, etc. Ces entraves au droit à la for­ma­tion des AESH pèsent lour­de­ment sur les pra­tiques pro­fes­sion­nelles des col­lègues. L’absence de for­ma­tion ini­tiale en amont de la prise de poste oblige les col­lègues nou­vel­le­ment recruté·es à s’auto-former et les place dans une situa­tion pro­fes­sion­nelle com­pli­quée. Accompagner des élèves en situa­tion de han­di­cap dans leur par­cours et leur vie sco­laire ne peut pas s’improviser. De même, les pra­tiques pro­fes­sion­nelles des AESH, tant elles sont diverses, néces­sitent une for­ma­tion tout au long de la car­rière, pour les ré-inter­ro­ger et les appro­fon­dir. Elles néces­sitent par ailleurs, une co-construc­tion et des échanges entre pair·es.

Rentrée 2023 : Toujours pas de respect des droits des élèves handicapé-es

Depuis la ren­trée 2023, le Ministère de l’Education Nationale se targue de la mise en place de moyens inédits pour la sco­la­ri­sa­tion de ces élèves (source education‧gouv.fr) :

  • + de 436 000 élèves en situa­tion de han­di­cap accueilli·es dans les éta­blis­se­ments scolaires ;
  • 3,6 % des élèves en situa­tion de han­di­cap dans les écoles et éta­blis­se­ments scolaires ;
  • + de 132 000 accom­pa­gnant-es d’élèves en situa­tion de handicap ;
  • + de 164 000 livrets de par­cours inclusif ;
  • Pour les accompagnant·es d’élèves en situa­tion de han­di­cap (AESH) : 6 500 postes sup­plé­men­taires et des mesures de revalorisation ; 
  • L’ouverture de 37 uni­tés d’enseignement mater­nelle autisme (UEMA), de 44 uni­tés ;d’enseignement élé­men­taire autisme (UEEA) et de 29 dis­po­si­tifs d’auto-régulation (DAR) ;
  • La créa­tion de 25 postes de pro­fes­seurs res­sources troubles du neu­ro­dé­ve­lop­pe­ment (TND) ;
  • Une nou­velle mis­sion pro­po­sée aux pro­fes­seurs dans le cadre du Pacte ensei­gnant : l’appui à la prise en charge d’élèves à besoins par­ti­cu­liers dans le pre­mier et le second degrés ;
  • La mise en œuvre des mesures de la Conférence natio­nale du han­di­cap 2023. 

Pour SUD édu­ca­tion, les effets d’an­nonce du minis­tère cachent les réa­li­tés de ter­rain des col­lègues, des élèves et de leurs familles pour qui l’in­clu­sion et le droit à la sco­la­ri­sa­tion res­tent un com­bat quotidien.

De l’a­veu même de la Défenseure des droits, les moyens ne sont pas à la hau­teur pour la mise en œuvre d’une école réel­le­ment inclusive :

« Le comi­té des droits de l’enfant de l’ONU a par ailleurs deman­dé expres­sé­ment en juin der­nier à la France de prendre toutes mesures per­met­tant d’améliorer signi­fi­ca­ti­ve­ment l’inclusion sco­laire des enfants en situa­tion de handicap. »

« La Défenseure des droits constate que les éta­blis­se­ments sco­laires, fai­sant face à un nombre d’élèves par classe sou­vent très éle­vé, et très sol­li­ci­tés pour la mise en œuvre de l’école inclu­sive, ne se voient pas allouer les moyens néces­saires pour per­mettre une inclu­sion res­pec­tueuse des droits et de l’intérêt supé­rieur des enfants concer­nés. Elle réitère ain­si ses recom­man­da­tions et appelle urgem­ment les pou­voirs publics à mobi­li­ser les moyens indis­pen­sables pour garan­tir l’école inclu­sive. »

Depuis la ren­trée sco­laire, les constats remon­tés par les équipes péda­go­giques sont sans appel : manque de per­son­nels AESH, manque de places dans les dis­po­si­tifs exis­tants (écoles, médi­co-social…), difficultés/​refus d’ac­cès au temps péri­sco­laires (can­tine, centres de loi­sirs…), manque de for­ma­tion des per­son­nels (ensei­gnant-es et non ensei­gnant-es), dif­fi­cul­tés de mise en place d’a­mé­na­ge­ments péda­go­giques dans des classes déjà sur­char­gées, manque de maté­riel adap­té, inac­ces­si­bi­li­té de cer­tains bâtis scolaires…

Du côté des familles, des cen­taines de témoi­gnages ont été publiés dans la presse, révé­lant un nombre consi­dé­rable d’é­lèves sans sco­la­ri­sa­tion aucune ou avec des sco­la­ri­sa­tions par­tielles, les obli­geant à res­ter chez elles ou eux ce qui accen­tue la charge paren­tale, que l’on sait majo­ri­tai­re­ment repo­ser sur les épaules des femmes.

SUD édu­ca­tion dénonce cette situa­tion depuis des années. La mise en appli­ca­tion du droit pour tou·tes les élèves de nos ter­ri­toires reste une lutte essen­tielle à mener au sein de notre sys­tème éducatif.

SUD édu­ca­tion revendique :

  • Des moyens pour accueillir et répondre aux besoins de tou·tes les élèves qu’importe leur situa­tion sco­laire, sociale, admi­nis­tra­tive, leur ori­gine ou leur han­di­cap… sur tout le territoire,
  • La créa­tion mas­sive de postes d’AESH, de RASED, de per­son­nels médi­co-sociaux, d’enseignant·es, de CPE et de per­son­nels de Vie sco­laire et d’interprètes ;
  • La créa­tion d’un vrai sta­tut de la Fonction publique d’éducateur·trice sco­laire spécialisé·e pour les AESH, de réelles aug­men­ta­tions de salaire et la recon­nais­sance d’un temps plein cor­res­pon­dant à 24h d’accompagnement ;
  • La baisse des effec­tifs par classe ;
  • Une véri­table for­ma­tion ini­tiale et conti­nue à l’inclusion sco­laire adap­tée aux besoins des élèves et des per­son­nels avec des temps de co-for­ma­tion et de concer­ta­tion pour toutes les personnels ;
  • L’adaptation des bâti­ments et du maté­riel scolaire ;
  • Du temps de concer­ta­tion heb­do­ma­daire ins­ti­tu­tion­na­li­sé et consa­cré à l’in­clu­sion des élèves à besoins spé­ci­fiques à accueillir.

2.4 - Le droit à la scolarité pour les enfants étranger.ères

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Nous avons de plus en plus d’enfants de familles dit·es sans papier et à la rue, mais aus­si de Jeunes isolé·es étranger·ères, dans nos classes. Par ailleurs, les élèves français⋅es allo­phones ren­contrent les mêmes pro­blé­ma­tiques et ne béné­fi­cient trop sou­vent d’aucun dis­po­si­tif spé­ci­fique ou d’aucune mesure adap­tée au fait qu’ils et elles relèvent des élèves à besoin particulier.

Pendant très long­temps la sco­la­ri­sa­tion des élèves dit·es étranger.ères n’est pas men­tion­née dans les textes offi­ciels fran­çais. La loi d’o­bli­ga­tion sco­laire du 28 mars 1882 dite lois Jules Ferry, n’ins­taure ni ne pré­cise aucune condi­tion de natio­na­li­té. La pre­mière cir­cu­laire qui offi­cia­lise la pos­sible pré­sence d’é­lèves qui ne soient pas français·es date de 1936 : « L’instruction pri­maire est obli­ga­toire pour les enfants des deux sexes, fran­çais et étran­gers, âgés de 6 à 14 ans révo­lus. » Si grâce à cette cir­cu­laire est ins­crit le droit à être scolarisé‧e quelle que soit la natio­na­li­té, pen­dant plus de trente ans, c’est le prin­cipe d’é­ga­li­té répu­bli­caine qui régit la façon d’en­vi­sa­ger la sco­la­ri­sa­tion des enfants des étranger·ères qui viennent s’ins­tal­ler en France. Dans un contexte où le fran­çais n’est pas encore la langue mater­nelle de la tota­li­té de la popu­la­tion et où l’une des mis­sions des enseignant·es est de rayer les langues régio­nales de la carte de France, ce texte n’é­voque pas la pos­si­bi­li­té que ces élèves puissent avoir des besoins lan­ga­giers spé­ci­fiques. Au début des années 60, les chercheur·es en sciences sociales com­mencent à s’in­té­res­ser à la ques­tion de l’ins­truc­tion des enfants d’immigré·es par le prisme des inégalités.

Après l’ouverture

A l’école aus­si, les Clin (classe d’INitiation ), les Cla (cLasse d’accueil) et les Cla-ENSA (Élèves Non Scolarisé⋅es Antérieurement) ont été rem­pla­cées par des dis­po­si­tifs UPE2A et UPE2A-NSA avec la cir­cu­laire d’octobre 2012 signée Jean Michel Blanquer. L’idée prin­ci­pale était d’inclure davan­tage les élèves dans leur classe d’affectation. En réa­li­té, l’Éducation natio­nale a fait des éco­no­mies en sup­pri­mant des heures pour récu­pé­rer des postes. En effet, dans les classes d’accueil les élèves béné­fi­ciaient de 23 à 26 heures de cours par semaine. Aujourd’hui dans les dis­po­si­tifs les élèves n’ont plus que 9 à 18 heures de cours heb­do­ma­daires. Dans le 1er degré la notion de dis­po­si­tif a per­mis à l’administration de ne fixer aucune limite au nombre d’élèves accueilli·es. S’ajoute à cela un par­cours des familles très dif­fi­cile pour inté­grer un dis­po­si­tif, un racisme ins­ti­tu­tion­nel et une orien­ta­tion déter­mi­née. Sans comp­ter la pro­blé­ma­tique du loge­ment et des démarches admi­nis­tra­tives qui ne faci­litent pas des appren­tis­sages dans de bonnes condi­tions. Une seule année en dis­po­si­tif UPE2A est insuf­fi­sante pour une inclu­sion totale dans une classe. Ces élèves ont besoin de temps, ils et elles ont vu et vécu par­fois des évé­ne­ments très lourds et mar­quants dans leur pays d’origine.

SUD édu­ca­tion dénonce l’hypocrisie de l’Éducation natio­nale : dans les textes il y a bien obli­ga­tion de sco­la­ri­sa­tion des enfants étranger·ères sur le ter­ri­toire fran­çais, en réa­li­té les moyens alloués pour ces élèves se réduisent à peau de cha­grin depuis 2012 et sont insuf­fi­sants au vu de leurs condi­tions de vie.

SUD édu­ca­tion revendique : 

Pour la liber­té de cir­cu­la­tion et d’installation : 

  • la régu­la­ri­sa­tion de tou⋅tes les sans-papiers ;
  • la fer­me­ture des centres de réten­tion admi­nis­tra­tive et l’arrêt des expulsions ;
  • l’a­bro­ga­tion de tous les textes qui entravent la liber­té de cir­cu­la­tion et d’installation (cir­cu­laire Valls, règle­ment Schengen, loi Immigration…) ;
  • le res­pect du droit d’asile inconditionnel.

Pour le res­pect des droits : 

  • l’abolition réelle de la double-peine et la libé­ra­tion de toutes les per­sonnes empri­son­nées pour défaut de papiers ;
  • l’accès à un loge­ment, à l’école, aux soins et à la san­té pour tou⋅tes.

Pour les élèves allo­phones arrivant⋅es :

  • la sco­la­ri­sa­tion incon­di­tion­nelle des jeunes étranger·ères allo­phones au sein du ser­vice public d’éducation indé­pen­dam­ment de l’âge, la natio­na­li­té et du sta­tut administratif ;
  • l’ouverture de dis­po­si­tifs UPE2A par­tout où cela est néces­saire, notam­ment à côté des struc­tures d’hébergement de per­sonnes exilé⋅es ;
  • des effec­tifs de 15 élèves maxi­mum en UPE2A et 12 élèves maxi­mum en UPE2A-NSA et leur prise en compte dans les effec­tifs des classes ;
  • une durée d’accueil des élèves dans les dis­po­si­tifs adap­tée aux besoins de chaque élève pour une orien­ta­tion choi­sie et non subie ;
  • la for­ma­tion des per­son­nels aux besoins spé­ci­fiques des élèves allo­phones, le déve­lop­pe­ment de l’enseignement du fran­çais langue seconde au moyen de décharges horaires ;
  • la créa­tion de postes d’interprètes dans l’Éducation nationale ;
  • l’enseignement des langues d’origine des élèves dans les établissements ;
  • la tra­duc­tion des docu­ments offi­ciels dans une langue com­prise par les res­pon­sables légaux de l’élève ou par l’élève.

La scolarisation des élèves dit·es migrant·es

Officiellement, la sco­la­ri­sa­tion des enfants, quel que soit leur âge, ne peut être sou­mise à la pos­ses­sion d’un titre de séjour. Celui-ci ne peut donc pas être exi­gé lors de l’inscription ou de l’admission de l’élève à l’école.

De même, les mineur·es ne sont pas en « situa­tion irré­gu­lière », puisqu’ils et elles n’ont pas besoin de titre de séjour et sont protégé·es contre les mesures d’éloignement du ter­ri­toire (contrai­re­ment à leurs parents).

Il faut dis­tin­guer la sco­la­ri­sa­tion dans le 1er et dans le 2nd degré pour plu­sieurs raisons :

  • En termes d’appareil juri­dique, nous le ver­rons, les outils sont différents ;
  • En termes de lutte, il n’existe pas de Mineur·e Non Accompagné·e dans le 1er degré contrai­re­ment au second degré. Les élèves des écoles mater­nelles et pri­maires sont géné­ra­le­ment présent·es avec leurs parents. On pour­ra donc les asso­cier à la lutte. La mino­ri­té des élèves dans les écoles ne peut pas être contes­tée contrai­re­ment aux élèves du second degré.

Accès à l’école dans le 1er degré :

Outre les conven­tions inter­na­tio­nales, signées par la France, l’article L111‑2 du Code de l’Éducation est très clair : “Tout enfant a droit à une for­ma­tion sco­laire qui, com­plé­tant l’ac­tion de sa famille, concourt à son éducation.”

Dans la cir­cu­laire 2014 – 88, défi­nis­sant le règle­ment dépar­te­men­tal type des écoles mater­nelles et pri­maires, le texte rap­pelle : “En appli­ca­tion de l’article L. 111 – 1 du Code de l’é­du­ca­tion, l’é­du­ca­tion est un droit pour tous les enfants rési­dant sur le ter­ri­toire natio­nal, quels que soient leur natio­na­li­té, leur sta­tut migra­toire ou leur par­cours anté­rieur. La Convention rela­tive aux droits de l’en­fant du 20 novembre 1989, rati­fiée par la France, garan­tit à l’en­fant le droit à l’é­du­ca­tion en dehors de toute dis­tinc­tion qui tienne à sa natio­na­li­té ou à sa situa­tion personnelle.”

L’inscription est-elle sou­mise à la situa­tion admi­nis­tra­tive des parents ? NON

“aucune dis­tinc­tion ne peut être faite entre élèves de natio­na­li­té fran­çaise et de natio­na­li­té étran­gère pour l’ac­cès au ser­vice public de l’é­du­ca­tion” (Circulaire 2003 – 63).

Instruction et sco­la­ri­sa­tion, est-ce dif­fé­rent ? OUI 

La loi pré­voit que tout·e enfant doit être instruit·e de 3 à 16 ans. Cependant, le pas­sage par l’école n’est pas obli­ga­toire. Les parents peuvent ins­truire leur enfant par eux et elles-mêmes. Par contre, si les parents d’enfants, âgé·es de 3 à 16 ans, sou­haitent que l’instruction passe par l’école, alors l’accès à la sco­la­ri­sa­tion doit être mis en œuvre par l’Etat. Elle est sou­mise à condi­tion pour les enfants de moins de 3 ans. Refuser l’accès à l’école pour les enfants de familles étran­gères condui­rait à mettre ces mêmes familles dans une situa­tion illé­gale au regard de l’obligation d’instruction de leur enfant.

L’inscription se fait-elle uni­que­ment par les parents ou représentant·es légaux‧les ? NON

Nul besoin d’être dépo­si­taire d’une auto­ri­té légale pour ins­crire un enfant. En effet : “ Les dis­po­si­tions légis­la­tives rela­tives à l’o­bli­ga­tion sco­laire imposent à toute per­sonne exer­çant une simple auto­ri­té de fait sur un enfant la charge d’as­su­rer son ins­truc­tion (article L.131 – 4 du code de l’é­du­ca­tion) : “ Dans ce cas, la preuve que l’en­fant est régu­liè­re­ment confié à cette per­sonne peut être effec­tuée par tout moyen (lettre des parents, noto­rié­té publique…). L’inscription dans un éta­blis­se­ment sco­laire ne peut donc être subor­don­née à la pré­sen­ta­tion par la per­sonne qui ins­crit l’en­fant d’un acte de délé­ga­tion de l’au­to­ri­té parentale. “.

La jus­ti­fi­ca­tion de domi­cile est-elle obli­ga­toire pour l’inscription ? OUI

Les parents cèdent l’instruction de leur enfant à l’école, il ou elle doit être alors inscrit·e dans leur com­mune de rési­dence. Pour prou­ver sa domi­ci­lia­tion, la famille peut four­nir une attes­ta­tion sur l’honneur ou une attes­ta­tion déli­vrée par une asso­cia­tion agréée. Le CCAS de la com­mune peut éga­le­ment déli­vrer un attes­ta­tion de domi­cile mais sous cer­taines condi­tions. En effet des res­tric­tions sont appa­rues en 2021, dans l’article 264 – 2, du Code de l’Action Sociale et des Familles. Si l’un·edes parents est d’origine extra-Européenne, qu’il ou elle n’a pas de titre de séjour, il ou elle peut alors béné­fi­cier d’une attes­ta­tion SI il ou elle sol­li­cite l’AME, l’aide juri­dic­tion­nelle ou une aide juri­dique. Certaines asso­cia­tions comme la Croixouge per­mettent aus­si d’avoir une adresse pos­tale. Il ne faut pas hési­ter à aider les parents à se rap­pro­cher d’elles.

En cas de démé­na­ge­ment, l’enfant peut-il ou elle ter­mi­ner son année sco­laire dans dans son école ? OUI

Article Code de l’Éducation L212‑8 : “La sco­la­ri­sa­tion d’un enfant dans une école d’une com­mune autre que celle de sa rési­dence ne peut être remise en cause par l’une ou l’autre d’entre elles avant le terme soit de la for­ma­tion pré­élé­men­taire, soit de la sco­la­ri­té pri­maire de cet enfant com­men­cées ou pour­sui­vies durant l’an­née sco­laire pré­cé­dente dans un éta­blis­se­ment du même cycle de la com­mune d’accueil.”

La stra­té­gie des auto­ri­tés repo­se­ra sur l’envoi des familles loin de l’école, si pos­sible avec des trans­ports sco­laires com­pli­qués voire inexis­tants, obli­geant de fait la dés­ins­crip­tion de l’enfant d’une part et de reprendre à zéro la sco­la­ri­sa­tion. Cependant le démé­na­ge­ment ne doit pas être une rai­son de dés­ins­crip­tion automatique.

Le ou la Maire a‑t-il ou elle le der­nier mot lors de l’inscription de l’enfant ? NON

En effet, consi­dé­rant par­fois que le ou la maire ayant le der­nier mot en termes d’inscription, les direc­teurs et direc­trices d’école pensent que ceci empêche l’accès à l’école. Or si les parents décident de délé­guer l’instruction de leur enfant à l’Education natio­nale. Celle-ci doit obli­ga­toi­re­ment la prendre en charge ce qui peut l’amener à contre­dire un·e maire récalcitrant·e. Comment ?

Le règle­ment dépar­te­men­tal type (cir­cu­laire 2014-088) des écoles mater­nelles et pri­maires répond très clai­re­ment à cette situation :

“Le direc­teur d’é­cole pro­nonce l’ad­mis­sion sur présentation :

  • du cer­ti­fi­cat d’ins­crip­tion déli­vré par le maire de la com­mune dont dépend l’é­cole. Ce der­nier docu­ment indique, lorsque la com­mune dis­pose de plu­sieurs écoles, celle que l’en­fant fréquentera ;
  • d’un docu­ment attes­tant que l’en­fant a subi les vac­ci­na­tions obli­ga­toires pour son âge ou jus­ti­fie d’une contre-indi­ca­tion en appli­ca­tion des dis­po­si­tions des articles L. 3111 – 2 et L. 3111 – 3 du code de la san­té publique (cer­ti­fi­cat du méde­cin ou pho­to­co­pie des pages du car­net de san­té rela­tives aux vac­ci­na­tions, car­net inter­na­tio­nal de vaccinations).

Faute de la pré­sen­ta­tion de l’un ou de plu­sieurs de ces docu­ments, le direc­teur d’é­cole pro­cède pour les enfants sou­mis à l’o­bli­ga­tion sco­laire confor­mé­ment à l’ar­ticle article L. 131 – 1‑1 du code de l’é­du­ca­tion à une admis­sion pro­vi­soire de l’enfant.”

Le direc­teur ou la direc­trice de l’école peut pro­cé­der à une admis­sion provisoire.

Des recours existent :

Le Dasen peut inter­pel­ler le Préfet sur cette ques­tion Article L131‑5 du Code de l’Éducation.

“En cas de refus d’ins­crip­tion sur la liste sco­laire de la part du maire sans motif légi­time, le direc­teur aca­dé­mique des ser­vices de l’é­du­ca­tion natio­nale agis­sant sur délé­ga­tion du pré­fet pro­cède à cette ins­crip­tion, en appli­ca­tion de l’ar­ticle L. 2122 – 34 du code géné­ral des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, après en avoir requis le maire.”

En effet, le ou la Préfet·e peut pro­cé­der à l’inscription si le ou la Maire refuse. Article L2122-34 du code géné­rale des col­lec­ti­vi­tés territoriales. 

“Dans le cas où le maire, en tant qu’agent de l’Etat, refu­se­rait ou négli­ge­rait de faire un des actes qui lui sont pres­crits par la loi, le repré­sen­tant de l’Etat dans le dépar­te­ment peut, après l’en avoir requis, y pro­cé­der d’of­fice par lui-même ou par un délé­gué spécial.”

Si ces auto­ri­tés défaillent, on peut sai­sir le-la Défenseur·e des droits ou dépo­ser un recours en urgence au Tribunal Administratif. Des juges ont déjà condam­né des Maires et des Préfet·es.

Le cas des élèves allophones 

Circulaire n° 2012-141 du 2-10-2012

L’obligation d’ac­cueil dans les écoles et les éta­blis­se­ments s’ap­plique de la même façon pour les élèves allo­phones nou­vel­le­ment arri­vés en France que pour les autres élèves.

L’espace d’accueil est le lieu unique d’accueil pour la sco­la­ri­sa­tion des enfants allo­phones de 6 à 17 ans.

Les familles ont un entre­tien et les élèves sont testé·es dans la langue pre­mière. Suite à ce test, la famille reçoit une pro­po­si­tion d’affectation. Cette pro­po­si­tion d’affectation passe par un ser­vice du rec­to­rat qui envoie une noti­fi­ca­tion à la famille et à l’établissement retenu.

À l’é­cole élé­men­taire, tout élève allo­phone arri­vant béné­fi­cie d’une éva­lua­tion menée par la per­sonne nom­mée par l’ins­pec­teur de l’é­du­ca­tion natio­nale, avec le concours des for­ma­teurs du Casnav.

Dans le second degré, en fonc­tion du nombre d’é­lèves à accueillir, les centres d’o­rien­ta­tion et d’in­for­ma­tion, de manière décon­cen­trée ou au sein des cel­lules d’ac­cueil mises en place dans les ser­vices dépar­te­men­taux de l’Education natio­nale apportent leur contri­bu­tion à l’é­ta­blis­se­ment d’ac­cueil, dans cette pro­cé­dure d’évaluation.

L’inclusion dans les classes ordi­naires consti­tue la moda­li­té prin­ci­pale de scolarisation.

Les élèves allo­phones arri­vants sont inscrit·es obli­ga­toi­re­ment dans les classes ordi­naires de l’é­cole mater­nelle ou élé­men­taire. À par­tir du cours pré­pa­ra­toire, les élèves peuvent être regroupé·es dans des Unités Pédagogiques pour Elèves Allophones Arrivants (UPE2A) pour un ensei­gne­ment de fran­çais comme langue de sco­la­ri­sa­tion, quo­ti­dien et pour un temps variable.

Un·e élève peut béné­fi­cier des struc­tures UPE2A un an, excep­tion­nel­le­ment 2.

Les groupes pris en charge en UPE2A ne doivent pas dépas­ser 15 élèves.

Le cas par­ti­cu­lier des élèves NSA (Non Scolarisés Antérieurement) ou PSA (Pas Scolarisés Antérieurement) relèvent dans le pre­mier degré des UPE2A, dans le second degré d’UPE2A spé­ci­fiques : UPE2A-NSA.

Accès à l’école dans le second degré : 

La cir­cu­laire n° 2002-063 du 20 – 3‑2002 régit très clai­re­ment les condi­tions d’ins­crip­tion de sco­la­ri­sa­tion des élèves du second degré. 

Concernant l’inscription :

L’instruction est obli­ga­toire jus­qu’à 16 ans, si les parents le dési­rent, ils et elles peuvent ins­crire leur enfant dans le col­lège ou le lycée de sec­teur auprès des ser­vices de la DSDEN. A savoir qu’il peut aus­si s’agir de per­sonnes dis­po­sant d’une délé­ga­tion de l’autorité paren­tale, ou exer­çant sur l’enfant une « auto­ri­té de fait » éta­blie par tout moyen (lettre des parents, noto­rié­té publique…).

En aucun cas, l’inscription ne peut être refu­sée au motif que la per­sonne qui accom­pagne l’enfant ne dis­pose pas de titre de séjour 

Pour les Mineur·es non accompagné·es, ce sont les Conseils Départementaux qui doivent pro­cé­der à l’inscription.

De 16 ans à 18 ans, “même s’ils ne sont pas sou­mis à l’o­bli­ga­tion sco­laire, il y a lieu de veiller à ce que leur sco­la­ri­sa­tion puisse être assu­rée, en pre­nant en compte natu­rel­le­ment leur degré de maî­trise de la langue fran­çaise et leur niveau sco­laire” comme indi­qué dans la cir­cu­laire. Le refus de sco­la­ri­sa­tion doit être moti­vé ((arrêt de sec­tion du Conseil d’État du 23 octobre 1987 consorts Métrat).

Attention, les ser­vices de pro­tec­tion à l’enfance de cer­tains conseils dépar­te­men­taux consi­dèrent qu’ils sont libé­rés des obli­ga­tions sco­laires des mineur·es non accompagné·es dès que les 16 ans sont atteints. Or comme le rap­pelle l’ordonnance du 12 juillet 2016, du Tribunal Administratif de Poitiers, le refus par les ser­vices du dépar­te­ment d’inscrire en for­ma­tion un·e mineur·e isolé·e –quel que soit son âge– confié par déci­sion judi­ciaire consti­tue une atteinte au droit à l’instruction.

Le cer­ti­fi­cat de sco­la­ri­té peut être éta­bli dès l’inscription effectuée. 

Voyages sco­laires :

Vraiment pas simple à orga­ni­ser selon les des­ti­na­tions et l’o­ri­gine des élèves à emme­ner. Toutes les condi­tions sont décrites dans cette cir­cu­laire : Transport et enca­dre­ment des élèves dans le cadre des sor­ties et voyages sco­laires dans les pre­mier et second degrés | Ministère de l’Education Nationale et de la Jeunesse

A savoir que le ou chef·fe d’établissement peut faire la demande d’un pas­se­port col­lec­tif per­met­tant des prises en charges moins complexes.

Stages en entreprise : 

S’il s’agit d’un stage sous sta­tut sco­laire, il n’y a aucun pro­blème, en lycée géné­ral comme en lycée pro. Pour les élèves majeur·es, certain·es patron·es véri­fient mal­heu­reu­se­ment le titre de séjour. Il faut le savoir

En ce qui concerne les apprenti·es, ils et elles dépendent du minis­tère du tra­vail et doivent être autorisé‧es à tra­vailler, sur­tout au pas­sage de la majo­ri­té. Ni Patron, ni CFA ne pour­ront rien faire si le ou la jeune majeure n’a pas de titre de séjour travail.

Les bourses :

Aucune condi­tion de régu­la­ri­té du séjour ne peut empê­cher l’accès aux bourses. Seules les res­sources finan­cières de la famille ou de la per­sonne ayant “la charge effec­tive et per­ma­nente” sont consi­dé­rées. Un·e élève majeur·e peut dépo­ser une demande de bourse en son nom.

Les bourses peuvent être com­plé­tées par une prime à l’internat et aux trous­seaux pour les élèves des lycées pros (code de l’Éducation articles D 531 – 27 , 29 et 42 ).

La jus­ti­fi­ca­tion des res­sources se fait sur pré­sen­ta­tion de l’avis d’impôt. Si l’élève et/​ou sa famille viennent d’arriver, cela ne peut les empê­cher d’ac­cé­der aux demandes de bourses. En effet, les cir­cu­laires d’applications pré­voient l’examen de la demande “à la lumière de toute jus­ti­fi­ca­tion de res­sources” telles que avis d’imposition du pays d’origine de l’année pré­cé­dente si pos­sible ou pré­sen­ta­tion de bul­le­tins de salaire.

La non pré­sen­ta­tion d’un RIB ne doit pas empê­cher l’accès à la demande de bourses. Aucun moyen de paie­ment n’est sti­pu­lé dans les circulaires.

Enfin des bourses mul­tiples existent : bourses aux mérites, bourses dans les lycées agri­coles, bourses dépar­te­men­tales ou régio­nales aux cri­tères mul­tiples et variées.

La can­tine :

Les enfants de familles migrantes ont aus­si le droit à l’accès au ser­vice de res­tau­ra­tion s’il existe dans le pre­mier degré et obli­ga­toire dans le second degré. Ils et elles ont aus­si le droit d’ac­cé­der aux tarifs cor­res­pon­dants aux res­sources fami­liales. Si la famille est sans res­source, elle peut pré­sen­ter une attes­ta­tion sur l’honneur. En cas de refus, un avis d’imposition.

Examens :

Comme rap­pe­lé dans la cir­cu­laire n° 2002-063 du 20 – 3‑2002, l’élève doit prou­ver que c’est bien lui pour elle qui com­pose ou expose. Un docu­ment tel que pas­se­port, même péri­mé, ou cer­ti­fi­cat de sco­la­ri­té récent avec une pho­to­gra­phie et cer­ti­fié, suf­fi­ra. L’élève ne doit pas four­nir un titre de séjour.

2.5 - Les réformes d’Attal, le “Choc des savoirs” sont des attaques au droit des élèves d’accéder à un même enseignement !

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Pendant long­temps, le sys­tème sco­laire témoi­gnait d’une forte ségré­ga­tion : ségré­ga­tion de genre et ségré­ga­tion sociale. L’enseignement secon­daire ne suc­cé­dait pas à l’enseignement pri­maire : il s’agissait de deux voies dif­fé­rentes pour deux publics dif­fé­rents. Selon leur milieu d’origine, les élèves allaient, à la sor­tie de l’école élé­men­taire, soit vers l’enseignement pri­maire supé­rieur (4 ans après le cer­ti­fi­cat d’étude), soit vers l’enseignement secon­daire long (7 ans d’étude jusqu’à la ter­mi­nale), soit vers les centres d’apprentissage.

Néanmoins, ce modèle en trois voies socia­le­ment ségré­guées ne per­met pas de répondre aux besoins éco­no­miques et à la néces­si­té d’élever le niveau sco­laire moyen de la popu­la­tion. En 1959, la sco­la­ri­té obli­ga­toire passe de 14 à 16 ans : les cours com­plé­men­taires de l’enseignement pri­maire supé­rieur deviennent des col­lèges d’enseignement géné­ral (CEG). Les centres d’apprentissage deviennent des col­lèges d’enseignement tech­nique (CET). Les élèves suivent un cycle d’observation de deux ans (6e et 5e) avant d’être orien­tés vers les CET ou les CEG. Ce modèle d’orientation pré­coce montre que, dans un sys­tème édu­ca­tif, plus l’orientation a lieu tôt, plus elle est le fruit de déter­mi­nismes sociaux.

En 1963, des col­lèges d’enseignement secon­daire (CES) sont ins­tau­rés, mais il faut attendre la loi Haby du 11 juillet 1975 pour sup­pri­mer la dis­tinc­tion entre CES et CEG qui deviennent tous des col­lèges. Les élèves ont ain­si tou·tes accès à un même ensei­gne­ment jusqu’à la fin du col­lège, filles comme gar­çons, élèves des classes popu­laires comme des classes aisées. Les élèves en situa­tion de han­di­cap res­tent exclu·es de l’école et relégué·es à des struc­tures spécialisées.

Depuis sa mise en oeuvre en sep­tembre 1977, le col­lège unique est confron­té à la dif­fi­cul­té de garan­tir un même ensei­gne­ment à des élèves au niveau hété­ro­gène : le col­lège unique est un pro­jet éman­ci­pa­teur mais, pour fonc­tion­ner, il faut lui don­ner les moyens de com­pen­ser les dif­fi­cul­tés sco­laires et sociales des élèves, le col­lège unique est indis­so­ciable d’une poli­tique de lutte contre les inéga­li­tés. Or, on observe que la poli­tique d’éducation prio­ri­taire est en panne : les col­lèges de REP n’ont pas les moyens de fonc­tion­ner : classe trop char­gée, bâti déla­bré, turn-over des per­son­nels en rai­son des condi­tions de tra­vail dégra­dées… De même, la poli­tique de sco­la­ri­sa­tion de tou·tes les élèves néces­site d’engager des moyens sup­plé­men­taires pour bais­ser le nombre d’élèves par classe, pour for­mer les per­son­nels et pour recru­ter des per­son­nels spécialisés.

SUD édu­ca­tion dénonce les sup­pres­sions de postes opé­rées depuis l’élection de Macron en 2017. Le col­lège unique subit une asphyxie de moyens qui a conduit à une dégra­da­tion des condi­tions de tra­vail et d’étude et à des résul­tats insuf­fi­sants. Or, aujourd’hui, plu­tôt que de don­ner au col­lège les moyens de garan­tir la réus­site de tou·tes les élèves, Attal et Belloubet reviennent sur le pro­jet même du col­lège unique. Deux mesures sont par­ti­cu­liè­re­ment inquié­tantes : les groupes de niveau et la néces­si­té d’avoir le Diplôme National du Brevet (DNB) pour accé­der au lycée.

Malgré le recul du gou­ver­ne­ment sur la manière de qua­li­fier les groupes, la réforme impo­sée par Gabriel Attal et mise en oeuvre par Nicole Belloubet reste bien une réforme de tri social.

L’organisation en groupes concerne l’ensemble du volume horaire dis­ci­pli­naire de fran­çais et de mathé­ma­tiques : les élèves seront donc répar­tis sur 1/​3 du temps sco­laire selon leur niveau. Pourtant l’ensemble de la recherche en sciences de l’éducation montre que, si les groupes de besoin ponc­tuels peuvent avoir un effet posi­tif sur les résul­tats des élèves, les groupes de niveau sur l’ensemble du volume dis­ci­pli­naire ont pour effet de nive­ler le niveau des élèves en dif­fi­cul­té vers le bas.

Si le ministre par­vient à mettre en oeuvre cette orga­ni­sa­tion sco­laire, on peut craindre de voir les élèves allo­phones ou les élèves en situa­tion de han­di­cap relé­gués dans les groupes de niveau d’élèves les plus faibles alors que c’est l’hétérogénéité du groupe-classe qui per­met aux élèves de pro­gres­ser. De même, on peut craindre que les filles soient sur-repré­sen­tées par­mi les élèves en dif­fi­cul­té en mathé­ma­tiques. Les groupes de niveau enferment les élèves dans leurs dif­fi­cul­tés. Enfin, on peut dou­ter de la manière dont ces groupes seront consti­tués et de la pos­si­bi­li­té pour des élèves d’aller d’un groupe à l’autre : cela for­ce­rait les enseignant·es à suivre la même pro­gres­sion tri­mes­trielle, au mépris de la liber­té péda­go­gique, et pour des élèves de 6eme et de 5eme de chan­ger de groupe et d’enseignant·es plu­sieurs fois dans l’année.

Les annonces au sujet du Brevet sont tout aus­si inquié­tantes. Attal veut faire du Brevet un exa­men d’entrée au lycée. Le Brevet sera plus dif­fi­cile à obte­nir pour les élèves les plus en dif­fi­cul­té et des aca­dé­mies les plus défa­vo­ri­sées avec le rééqui­li­brage entre épreuves ponc­tuelles et moyennes dis­ci­pli­naires annuelles à 50 – 50 et l’abandon des cor­rec­tifs aca­dé­miques. On peut craindre une fuite mas­sive vers les col­lèges pri­vés. Les élèves qui échoue­ront au Brevet devraient aller en “pré­pa-lycée”, véri­table classe de relé­ga­tion qui risque de démo­ra­li­ser les élèves en attente d’une affec­ta­tion en seconde.

Avec ces annonces, Attal et Belloubet ins­taurent une véri­table poli­tique de tri social qui se nour­rit du renon­ce­ment à la garan­tie d’un même ensei­gne­ment pour tou·tes les élèves. Ils recréent des classes et des groupes de relé­ga­tion pour les élèves aux dif­fi­cul­tés sco­laires et sociales or l’histoire de l’école a mon­tré à de nom­breuses reprises le lien fort entre ségré­ga­tion sco­laire et ségré­ga­tion sociale.

Mais le Choc des savoirs ne se résume pas aux groupes en fran­çais et en mathé­ma­tiques et à la sélec­tion à l’entrée du lycées, il y a aus­si la label­li­sa­tion des manuels et des annonces de géné­ra­li­sa­tion des éva­lua­tions natio­nales du CP à la 4eme. Nous devrions garan­tir aux enfants le droit à une école qui pré­pare la socié­té de demain : une socié­té plus juste, plus inclu­sive, prête à affron­ter le défi de la bifur­ca­tion éco­lo­gique, or le Choc des savoirs des­sine une école qui éva­lue, qui sélec­tionne et qui trie, c’est le pro­lon­ge­ment de la réforme du lycée dont on a vu les effets dévas­ta­teurs sur les lycéen·nes : avec la pres­sion du contrôle conti­nu les élèves n’ont plus le temps d’apprendre et sont soumis.es à un stress per­ma­nent. SUD édu­ca­tion appelle les per­son­nels à refu­ser toutes les réformes de tri social.

Après l’annonce du Choc des Savoirs, Attal a annon­cé une série de mesures affec­tant l’école et sanc­tion­nant les élèves, par­mi les­quelles le retrait de points sur le bre­vet ou sur le bac avec une men­tion dans Parcoursup en cas d’événements dis­ci­pli­naires sur­ve­nus pen­dant la sco­la­ri­té de l’élève et l’introduction de la réa­li­sa­tion d’activités d’intérêt géné­ral au sein de l’établissement sco­laire pour effa­cer la men­tion et rega­gner les points. Ces dis­po­si­tions sont de véri­tables rup­tures du prin­cipe d’égalité des candidat·es à un exa­men natio­nal : Attal va plus loin que la très contro­ver­sée note de vie sco­laire puisque les élèves seront dou­ble­ment sanc­tion­nés : d’abord par la voie dis­ci­pli­naire puis dans leur accès aux diplômes et à une orien­ta­tion choi­sie. Cette sanc­tion n’a aucune por­tée édu­ca­tive et contre­vient au rôle du ser­vice public d’éducation, qui doit aider les élèves à sor­tir de leurs dif­fi­cul­tés, non les y enfoncer.

Ces mesures visant les exa­mens et Parcoursup s’ancrent dans le ren­for­ce­ment d’un arse­nal judi­ciaire qui tranche avec les dis­po­si­tions de la Cour Internationale des Droits des Enfants qui dis­posent que leur inté­rêt supé­rieur est une consi­dé­ra­tion pri­mor­diale pour chacun·e. L’État leur doit la pro­tec­tion, qu’importe les actes com­mis. SUD édu­ca­tion dénonce toutes les mesures qui bafouent les droits des per­sonnes mineures : la remise en cause de l’excuse de mino­ri­té, l’abaissement de 18 à 16 ans pour la mise en place d’une com­pa­ru­tion immé­diate devant le tri­bu­nal, les mesures de com­po­si­tion pénale qui per­met­trait la mise en œuvre d’une sanc­tion sans pro­cès contre un·e mineur·e de plus 13 ans, les com­pa­ru­tions immé­diates pour les jeunes identifié·es dans les écoles comme « com­men­çant à par­tir à la dérive ». La place des per­sonnes mineures est à l’école et non sur les bancs des accusé·es dans les tribunaux.

Pour habiller ses mesures iniques et dan­ge­reuses, Attal livre un ensemble de dis­po­si­tions qui n’ont de répu­bli­caine que l’apparence. Il entend par exemple ren­for­cer les équipes « valeurs de la République » dans les éta­blis­se­ments sco­laires et créer un contrat d’engagement à res­pec­ter l’autorité et les valeurs de la République entre les parents, les éta­blis­se­ments et les élèves : Gabriel Attal réin­vente donc le règle­ment inté­rieur qui existe pour­tant déjà. La poli­tique menée par le pre­mier ministre tend à faire croire que l’école serait mena­cée par des élèves qui ne res­pec­te­raient pas la laï­ci­té et les valeurs de la République. Pourtant en jan­vier 2024, on recen­sait uni­que­ment 280 faits d’atteinte au prin­cipe de laï­ci­té, alors que l’école accueille tous les jours 12 mil­lions d’élèves. Gabriel Attal fait d’événements rares une prio­ri­té poli­tique de pre­mier ordre dans l’unique des­sein de séduire l’électorat d’extrême droite et de créer un sen­ti­ment de peur dans la socié­té. Sans avoir besoin de les nom­mer, le pre­mier ministre pointe du doigt dans son dis­cours les per­sonnes pauvres, les per­sonnes immi­grées, les per­sonnes raci­sées et les per­sonnes musul­manes ou sup­po­sées comme telles. SUD édu­ca­tion dénonce le racisme et l’islamophobie qui sous-tendent ces annonces.

Il faut pour­tant rap­pe­ler que l’État est le pre­mier res­pon­sable de l’insécurité dans les écoles et les éta­blis­se­ments sco­laires puisqu’il ne met pas les moyens en oeuvre pour assu­rer la sécu­ri­té des élèves et des per­son­nels : l’école manque de per­son­nels de Vie sco­laire, de per­son­nels médi­co-sociaux, d’enseignant·es… les élèves ne sont pas suf­fi­sam­ment accompagné·es et protégé·es dans leur sco­la­ri­té. 3000 enfants dorment à la rue, 160 000 enfants sont vic­times de vio­lences sexuelles chaque année, 10% des élèves sont vic­times de har­cè­le­ment sco­laire, les jeunes placé·es en famille d’accueil ont deux fois moins de chances que le reste de la popu­la­tion d’obtenir le bac­ca­lau­réat : les réponses ne doivent pas être répres­sives mais édu­ca­tives et sociales. Le minis­tère de l’Éducation natio­nale refuse tou­jours aux Assistant·es de Service Social les reva­lo­ri­sa­tions sala­riales indis­pen­sables pour recréer de l’attractivité et recru­ter ces per­son­nels dont l’école manque cruellement.

3 - Le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation

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3.1 - NON aux violences sexuelles

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L’affaire Duhamel et la vague de témoi­gnages sur les réseaux #Metooinceste a mis en lumière les vio­lences sexuelles sur les enfants et l’o­mer­ta qui les accom­pagne. En France, un·e enfant sur 10 est vic­time d’in­ceste selon une enquête d’Ipsos sur l’inceste. Au pri­maire, c’est en moyenne 1 enfant par classe, au secon­daire 2 ou 3. Face à ces chiffres alar­mants, l’Éducation natio­nale ne donne tou­jours pas les moyens néces­saires pour mener des pro­grammes de pré­ven­tion qui favo­risent l’ac­cueil de la parole et abordent la ques­tion du consen­te­ment, pour assu­rer la pro­tec­tion et l’ac­com­pa­gne­ment des vic­times, pour recru­ter des per­son­nels médi­co-sociaux. Il y a urgence à recru­ter des per­son­nels comme des infirmier·es sco­laires, méde­cins sco­laires, assistant·es de ser­vices sociaux et psyEN.

Quelle réalité ?

Les vio­lences sexuelles, ce sont 130 000 filles et 30 000 gar­çons vic­times chaque année. Une fille sur cinq et un gar­çon sur treize en sont vic­times au cours de leur vie.

  • L’âge moyen des pre­mières vio­lences sexuelles est 10 ans. Ce sont des filles dans 83% des cas.
  • 1 fois sur 5, ces vio­lences sexuelles sont un viol.
  • 44% des vio­lences sont incestueuses.
  • 96% des cas d’in­ceste com­mis par des hommes.
  • 5% des vic­times sont en situa­tion de han­di­cap au moment des faits.
  • 50% des vic­times de vio­lences sexuelles durant l’enfance font par la suite une ten­ta­tive de suicide.
  • Avoir subi des vio­lences durant l’enfance est le pre­mier fac­teur de décès pré­coce et peut faire perdre jus­qu’à 20 ans d’es­pé­rance de vie.

A l’ins­tar des vio­lences sexuelles sur les femmes et les mino­ri­tés sexuelles, la majo­ri­té des enfants vic­times de vio­lences connaît son agres­seur. C’est un membre de la famille, de la com­mu­nau­té édu­ca­tive, du centre de loi­sirs, un adulte de confiance. Il s’a­git d’é­vé­ne­ments quo­ti­diens qu’in­vi­si­bi­lise leur banalité.

Comment la loi caractérise les violences sexuelles sur mineur·es ?

Le cadre légal qui défi­nit les vio­lences sexuelles est ren­for­cé si la vic­time est mineure.

Harcèlement sexuel :
Le har­cè­le­ment sexuel est un délit.

Article 222 – 33 du code pénal : « Le har­cè­le­ment sexuel est le fait d’im­po­ser à une per­sonne, de façon répé­tée, des pro­pos ou com­por­te­ments à conno­ta­tion sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa digni­té en rai­son de leur carac­tère dégra­dant ou humi­liant, soit créent à son encontre une situa­tion inti­mi­dante, hos­tile ou offensante. »

Le code pénal défi­nit comme cir­cons­tance aggra­vante le har­cè­le­ment sexuel sur un·e mineur·e quand :

  • Un mineur assiste à un har­cè­le­ment sexuel ;
  • Quand le har­cè­le­ment sexuel est réa­li­sé par un ascen­dant ou par une per­sonne ayant auto­ri­té sur la victime ;
  • Si le har­cè­le­ment sexuel a lieu en ligne ou par un ser­vice de com­mu­ni­ca­tion public.

L’agression sexuelle :

L’agression sexuelle est un délit.

222 – 22 du code pénal : « Constitue une agres­sion sexuelle toute atteinte sexuelle com­mise avec vio­lence, contrainte, menace ou surprise ».

Article 222 – 22‑2 du code pénal : « Constitue éga­le­ment une agres­sion sexuelle le fait de contraindre une per­sonne par la vio­lence, la menace ou la sur­prise à subir une atteinte sexuelle de la part d’un tiers. »

Le code pénal défi­nit que cinq par­ties du corps entrent dans le cadre de l’atteinte sexuelle : les seins, la bouche, le sexe, les fesses et l’entrecuisse.

En des­sous de 15 ans ou en cas d’inceste sur mineur, la vio­lence, la contrainte, la menace ou la sur­prise ne sont plus à démon­trer pour consta­ter et punir le viol ou l’a­gres­sion sexuelle. La ques­tion du consen­te­ment de l’en­fant ne se pose donc plus en-des­sous de l’âge de 15 ans en géné­ral et de 18 ans dans les affaires d’inceste.

L’ Article 222 – 22‑3 défi­nit la qua­li­fi­ca­tion d’incestueux des viols et des agres­sions sexuelles lorsque l’agresseur est un ascen­dant (parents, grand-parents, etc) ou toute autre per­sonne ayant auto­ri­té de droit ou de fait (frère, sœur, oncle, tante, grand-oncle, grand-tante, neveu ou une nièce ain­si que leurs conjoints ou concubins).

Le viol :
Le viol est un crime.
Article 222 – 23 du code pénal : « tout acte de péné­tra­tion sexuelle, de quelque nature qu’il soit, (ou tout acte buco-géni­tal) com­mis sur la per­sonne d’autrui ou sur la per­sonne de l’auteur par vio­lence, contrainte, menace ou sur­prise est un viol. Le viol est puni de quinze ans de réclu­sion criminelle. »

Le code pénal étend le crime de viol :

  • Article 222 – 22‑1 : « Lorsque les faits sont com­mis sur la per­sonne d’un mineur, la contrainte morale […] ou la sur­prise […] peuvent résul­ter de la dif­fé­rence d’âge exis­tant entre la vic­time et l’auteur des faits et de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur la vic­time, cette auto­ri­té de fait pou­vant être carac­té­ri­sée par une dif­fé­rence d’âge signi­fi­ca­tive entre la vic­time mineure et l’auteur majeur. »
  • Article 222 – 22‑1 : « Lorsque les faits sont com­mis sur la per­sonne d’un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la sur­prise sont carac­té­ri­sées par l’abus de la vul­né­ra­bi­li­té de la vic­time ne dis­po­sant pas du dis­cer­ne­ment néces­saire pour ces actes. »

Comment détecter des violences ?

Être vigilant·e : Les signaux de souf­france chez le OU la jeune enfant

Comportement de l’enfant :

  • chan­ge­ment récent et mas­sif du com­por­te­ment (taci­turne, très excité·e, triste, isolé·e, agres­si­vi­té, dis­pa­ri­tion des conduites ludiques, pleurs…)
  • atti­tudes crain­tives ou peu­reuses sur­tout vis-à-vis des hommes
  • avi­di­té affective
  • des­sins très sexualisés
  • dés­in­ves­tis­se­ment sco­laire bru­tal, retard psy­cho­mo­teur, dif­fi­cul­tés sco­laires non justifiées
  • refus de ren­trer à la maison
  • refus de se cou­cher, de se désha­biller la nuit
  • ten­dance à se bar­ri­ca­der la nuit dans sa chambre
  • troubles du som­meil avec ter­reurs nocturnes
  • pré­oc­cu­pa­tions sexuelles exces­sives pour l’âge de l’en­fant, mas­tur­ba­tion exces­sive et en public, com­por­te­ment séduc­teur et sexua­li­sé avec les adultes

Manifestations psy­cho­so­ma­tiques :

  • énu­ré­sie secon­daire (incon­ti­nence), enco­pré­sie (incon­ti­nence des matières fécales)
  • consti­pa­tion
  • ano­rexie
  • gêne de la déglutition
  • vomis­se­ments
  • dou­leurs abdominales
  • dou­leurs diffuses

Pour l’adolescent·e, se surajoutent

Manifestations psy­chia­triques :

  • dépres­sion avec par­fois ten­ta­tive de suicide
  • mutisme, repli
  • sca­ri­fi­ca­tion
  • exci­ta­tion, sautes d’hu­meur impor­tante, réac­tions émo­tion­nelles intenses
  • com­por­te­ment exa­gé­ré­ment sexualisé

Conduites anti­so­ciales :

  • fugue
  • toxi­co­ma­nie
  • pros­ti­tu­tion
  • absen­téisme sco­laire inha­bi­tuel et injustifié

Manifestations psy­cho­so­ma­tiques :

  • troubles ali­men­taires (ano­rexie, boulimie)
  • éva­nouis­se­ment, malaise
  • mutisme, iso­le­ment,
  • cynisme, pro­vo­ca­tion, agressivité
  • rituels de lavage obses­sion­nels ou au contraire peur de la toi­lette des organes génitaux

La souf­france mani­fes­tée par un·e enfant ou un·e adolescent·e ne signi­fie pas for­cé­ment qu’il ou elle subit des agres­sions sexuelles, mais, quelle que soit la cause de ce mal-être, il faut lui venir en aide. On sait aujourd’­hui que l’en­semble des consé­quences des vio­lences sexuelles est consi­dé­ra­ble­ment aggra­vé quand la réa­li­té des faits n’a pas été prise en consi­dé­ra­tion et que l’au­teur n’a pas été sanctionné.

Que faire ?

Comment prévenir les violences sexuelles ?

Former les personnels : 

  • à la réa­li­té des vio­lences sexuelles, leurs typo­lo­gies, les auteurs potentiels
  • à per­ce­voir les manœuvres d’ap­proche déve­lop­pées par les pédocriminels
  • à iden­ti­fier les signaux faibles
  • à repé­rer les interlocuteurs·trices ins­ti­tu­tion­nels qui peuvent intervenir
  • à maî­tri­ser les aspects juri­diques de base (droits fon­da­men­taux des enfants)
  • iden­ti­fier les per­sonnes res­sources dans l’é­cole /​dans l’é­ta­blis­se­ment /​dans l’administration
  • orga­ni­ser l’é­change de savoirs entre pairs

Sensibiliser les élèves, libé­rer la parole : 

  • être capable de par­ler de son corps, de ses sentiments
  • repé­rer les situa­tions à risques, les éviter
  • apprendre à dire non
  • savoir où trou­ver de l’aide
  • tra­vailler l’es­time de soi
  • tra­vailler l’é­ga­li­té fille-garçons

Les reven­di­ca­tions de SUD éducation 

SUD édu­ca­tion porte des reven­di­ca­tions pour lut­ter contre les vio­lences sexistes et sexuelles sur mineur·es :

  • l’ap­pli­ca­tion des cir­cu­laires et lois qui assurent la pro­tec­tion des mineur·es vic­times de vio­lences sexuelles ;
  • la for­ma­tion de tous les per­son­nels de l’Éducation natio­nale à l’ac­cueil de la parole des mineur·es vic­times de vio­lences sexistes et sexuelles, et à la ques­tion du consentement ;
  • dans l’Éducation natio­nale, la sus­pen­sion immé­diate à titre pré­ven­tif de l’agresseur dès lors qu’un·e enfant témoigne de violences ;
  • des créa­tions de postes suf­fi­santes pour que chaque cir­cons­crip­tion et chaque éta­blis­se­ment soit doté de postes de méde­cins et/​ou d’infirmier·es à temps plein et/​ou d’assistant·es de ser­vices sociaux ;
  • des moyens, du temps, de la for­ma­tion et des per­son­nels pour une édu­ca­tion à la vie sexuelle et affec­tive au-delà des 3 séances annuelles ;
  • que l’administration pro­cède à des signa­le­ments aux ser­vices de police sans aucune pres­sion à l’encontre des élèves ou des per­son­nels qui relatent des vio­lences sexuelles dont ils ou elles ont recueilli le témoignage.
Des ressources

Associations :

  • 119 : Service National d’Accueil Téléphonique de l’Enfance en Danger
  • Face à l’inceste
  • SOS Inceste & vio­lences sexuelles
  • Association AREVI (Action/​Recherche et Echange entre les Victimes d’Inceste)
  • Mémoire trau­ma­tique et victimologie
  • Women Safe – Femmes et enfants vic­times de violences
  • Lamevi : l’as­so­cia­tion mille et une vic­times d’inceste
  • Collectif fémi­niste contre le viol

Études :

  • Le Berceau des domi­na­tions, Dorothée Dussy
  • Le Livre noir des vio­lences sexuelles, Muriel Salmona
  • Penser les rap­ports de pou­voir adulte-enfant, Tal Piterbraut-Merx
  • Enfance et vul­né­ra­bi­li­té. Ce que la poli­ti­sa­tion de l’en­fance fait au concept de vul­né­ra­bi­li­té, Tal Piterbraut-Merx

Podcasts :

  • Inceste et pédo­cri­mi­na­li­té, Un Podcast à soi, Charlotte Bienaimé – Arte radio
  • Ou peut-être une nuit, Charlotte Pudlowski – Louie Media
  • La Fille sur le cana­pé, Axelle Jah Njiké – Nouvelles écoutes
  • L’Inceste, LSD, Johanna Bedeau et Marie-Laure Ciboulet

Expo :

Récits pour adulte :

  • Je sais pour­quoi chante l’oi­seau en cage, Maya Angelou
  • L’Oeil le plus bleu, Toni Morrison
  • Peau, Dorothy Allison
  • Outrages, Tal Piterbraut-Merx
  • La Familia grande, Camille Kouchner
  • Le Consentement, Valérie Springora
  • La Consolation, Flavie Flament
  • La petite Fille sur la ban­quise, Adélaïde Bon
  • Le Voyage dans l’Est, Christine Angot
  • Un Amour impos­sible, Christine Angot
  • Une Mélancolie arabe, Abdhellah Taïa
  • Rien ne s’op­pose à la nuit, Delphine de Vigan
  • Summer of love, Debbie Drechsler
  • Daddy’s girl, Debbie Drechsler

Récits pour enfant :

  • Le loup, Mai Lan Chapiron

Derrière la communication, le ministère oublie ses responsabilités

Dans une lettre aux pro­fes­seurs d’octobre der­nier, le minis­tère de l’Éducation natio­nale et de la jeu­nesse met en avant la cam­pagne contre les vio­lences sexuelles faites aux enfants. Si l’initiative d’une telle cam­pagne est louable et affiche la volon­té de pro­té­ger les enfants, une fois de plus le minis­tère se foca­lise uni­que­ment sur les vio­lences intra­fa­mi­liales et oublie d’y asso­cier des moyens humains et matériels.

Le minis­tère com­mu­nique mais n’augmente pas les moyens :

Comme le dit l’article du minis­tère « les enfants qui subissent des vio­lences sexuelles ne savent pas quoi faire, ni à qui en par­ler ». Pour mettre fin à ce silence, tou·tes les per­son­nels doivent être formé·es à l’accueil de la parole, ce n’est pas le cas aujourd’hui. Trop sou­vent, la parole des enfants est mini­mi­sée voire remise en ques­tion, par manque de for­ma­tion et d’information des per­son­nels. Il est en effet très dif­fi­cile d’entendre ces vio­lences et d’en accep­ter la réa­li­té, c’est pour­quoi nous reven­di­quons que l’accueil de la parole soit ensei­gné lors de la for­ma­tion ini­tiale des enseignant·es et des CPE, puis que des for­ma­tions soient proposées/​imposées tout au long de la car­rière. Les AED et AESH doivent aus­si accé­der à ces formations.

De plus, le manque de per­son­nel social et de san­té dans les éta­blis­se­ments ne per­met pas d’orienter cor­rec­te­ment les enfants vic­times ou témoins de telles vio­lences. L’équipe péda­go­gique ne doit pas res­ter seule face aux enfants vic­times de vio­lences et doit pou­voir s’appuyer sur le tra­vail du per­son­nel médi­co-social (assistant·es sociales, infirmièr·es sco­laires, méde­cins sco­laires, psy­cho­logue de l’éducation natio­nale, etc) pour accom­pa­gner cor­rec­te­ment ces élèves. La pré­sence d’un·e assistant·e social·e et d’un·e infirmier·re sco­laire à temps plein, et formé·e·s sur l’accueil de la parole des vic­times, dans chaque éta­blis­se­ment est indis­pen­sable pour répondre aux besoins des élèves.

Mettre fin à l’omerta : les vio­lences n’ont pas lieu uni­que­ment dans les familles : 

L’école, pre­mier lieu de socia­bi­li­sa­tion et de parole après la famille, doit être un espace pro­tec­teur. C’est ce que le minis­tère pré­cise dans son article « Agir contre les vio­lences sexuelles faites aux enfants ». Mais com­ment affi­cher une telle volon­té sans lever l’omerta quant aux vio­lences sexuelles exer­cées par cer­tains membres du personnel ?
Si la majo­ri­té des vio­lences sexuelles subies par les enfants a lieu dans la famille ou l’entourage proche, il ne faut pas occul­ter l’existence de vio­lences au sein même de l’école. Pourtant, les témoi­gnages d’élèves vic­times au sein de l’École sont trop sou­vent mis sous le tapis par les col­lègues, les chef·fes d’établissement ou les rec­to­rats, sous pré­texte de pro­té­ger la répu­ta­tion d’un éta­blis­se­ment ou de l’Éducation natio­nale. Et dans les rares cas où les rec­to­rats essaient de prendre en compte la parole des élèves, ils s’en remettent sou­vent aux déci­sions de jus­tice. Or on sait que le temps de la jus­tice est long, et que les cas de judi­cia­ri­sa­tion de vio­lences sexuelles sont rares et com­plexes. On sait que 50% des vic­times de vio­lences sexuelles durant l’enfance font par la suite une ten­ta­tive de sui­cide. Les sanc­tions (ou absences de sanc­tions) judi­ciaires ne sont pas tou­jours adap­tées à la pro­tec­tion des élèves. On a par exemple vu un pro­fes­seur accu­sé de viol par des élèves auto­ri­sé à reve­nir devant des classes après un non lieu, alors même que l’enseignant a admis avoir eu un rap­port sexuel avec une élève, mais a basé sa défense sur la sup­po­si­tion d’un consen­te­ment de celle-ci.

Apprendre ne doit jamais faire l’objet de rela­tions ou pres­sion sexiste, sexuelle ou pédo­cri­mi­nelle. Le silence des per­son­nels et de l’institution apprend à nos élèves que dans notre socié­té face aux vio­lences sexistes et sexuelles les agres­seurs sont pro­té­gés et les vic­times ignorées.

Il est urgent qu’une réelle poli­tique de prise en compte de la parole des enfants soit menée, affi­cher de beaux dis­cours ne suf­fi­ra pas à repé­rer ou évi­ter des vio­lences si les actes ne suivent pas.

SUD édu­ca­tion revendique : 

  • Le recru­te­ment de per­son­nels socio-médi­caux pour prendre en charge cor­rec­te­ment les vio­lences sexistes et sexuelles dont sont vic­times les élèves dans les établissements ;
  • La for­ma­tion de tous les per­son­nels aux vio­lences sexistes, sexuelles et pédocriminelles ;
  • La sus­pen­sion sys­té­ma­tique des per­son­nels agres­seurs pré­su­més, le temps des enquêtes admi­nis­tra­tives et judiciaires ;
  • La radia­tion des per­son­nels agres­seurs condam­nés par la justice ;
  • La mise en place d’enquête et de mesures par l’administration paral­lè­le­ment au tra­vail de la justice ;
  • L’accompagnement des élèves vic­times par l’Education natio­nale dans leurs démarches médi­cales et juridique ;
  • La mise en place de cel­lules d’écoute pour les élèves vic­times de vio­lences sexuelles dans l’Éducation nationale ;
  • La mise en place d’une étude minis­té­rielle sur l’ampleur des vio­lences sexuelles à l’École.

Constat d’une infraction que faire juridiquement ?

En plus du signa­le­ment au pro­cu­reur de la répu­blique vous pouvez :

Saisir Le·la défenseur·e des droits

En France, le·la Défenseur·e des droits est l’or­ga­ni­sa­tion dési­gnée pour veiller au res­pect de ces droits. Elle s’as­sure du res­pect de « l’in­té­rêt supé­rieur de l’en­fant ». Elle peut être sai­sie par l’en­fant lui-même, ou un adulte. Elle peut pro­po­ser la réforme de textes légis­la­tifs et/​ou régle­men­taires. Elle peut éga­le­ment rédi­ger des recom­man­da­tions à l’at­ten­tion de l’administration.

Proposer une assis­tance juridique

Lorsqu’un·e enfant est vic­time d’un pré­ju­dice, iel béné­fi­cie d’une pro­tec­tion spé­ci­fique par la loi. Iel peut se rendre seul·e dans les locaux de la police et ou de la gen­dar­me­rie. Au cours de la pro­cé­dure, iel peut être représenté·e par ses parents, un adulte de son choix, une per­sonne dési­gnée par le tri­bu­nal, et iel a éga­le­ment le droit d’être assis­té par un avo­cat gra­tui­te­ment. Pour cer­taines infrac­tions, l’a­vo­cat est obligatoire.

3.2 - Contre le harcèlement

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2023, c’est aus­si 3 sui­cides, 3 vic­times du har­cè­le­ment sco­laire : Lucas, en jan­vier, Lindsay en mai et Nicolas en sep­tembre. Chaque sui­cide affecte et touche toute la pro­fes­sion. La prise en compte par l’institution de la situa­tion vécue par Nicolas, qui a mis fin à ses jours, conduit à s’interroger sur les réponses ins­ti­tu­tion­nelles mais, au-delà de ces drames, il y a trop de situa­tions qui ne sont pas bien prises en charge, pas prises en charge du tout voire pas du tout iden­ti­fiées. Rien ne semble vrai­ment avoir chan­gé ou presque 10 ans après le sui­cide de Marion, âgée de 13 ans. Les dys­fonc­tion­ne­ments consta­tés dans l’académie de Versailles l’attestent. Le plan de lutte contre le har­cè­le­ment qui a été pré­sen­té, même s’il a le mérite de remettre ce sujet majeur sur le devant de la scène, ne per­met pas une lutte effi­cace sur du long terme et manque cruel­le­ment d’ambition au niveau éducation.

Le Code de l’éducation pré­voit le droit à une sco­la­ri­té sans har­cè­le­ment. Le site du minis­tère pro­pose dif­fé­rents outils pour lut­ter contre le har­cè­le­ment, mais sans moyens finan­ciers et humains, cela reste du bri­co­lage et de la communication.

Nommer les vio­lences et le har­cè­le­ment LGBTIphobes, racistes, sexistes, validistes

De plus, il faut être en mesure de nom­mer les vio­lences et le har­cè­le­ment LGBTIphobes, racistes, sexistes, vali­distes que subissent certain·es élèves, comme Dinah, jeune fille raci­sée et les­bienne, qui s’est sui­ci­dée en 2022. En France, 10% des élèves (soit envi­ron 700 000 élèves) sont vic­times de har­cè­le­ment. Les ten­ta­tives de sui­cide et les pen­sées sui­ci­daires sont plus éle­vées chez les vic­times de har­cè­le­ment sco­laire (12 % et 36 %). 25% de l’ab­sen­téisme concerne des élèves vic­times de har­cè­le­ment. Les LGBTIphobies en milieu sco­laire et uni­ver­si­taire tuent. Les jeunes vic­times d’homophobie et de trans­pho­bie sont 2 à 7 fois plus touché·es par le sui­cide que les autres jeunes.

Il faut de la concertation, de la formation, de la prévention

Les arres­ta­tions spec­ta­cu­laires en milieu sco­laire ne per­mettent pas de lut­ter effi­ca­ce­ment contre le har­cè­le­ment sco­laire. Le dépla­ce­ment des élèves har­ce­leurs est une réponse uni­que­ment répres­sive alors que la solu­tion réside dans la pré­ven­tion et donc dans la for­ma­tion des équipes édu­ca­tives et dans la for­ma­tion des élèves mais aus­si dans la mise en place de dis­po­si­tifs appro­priés par tou·tes.

La lutte contre le har­cè­le­ment doit rele­ver de dyna­miques pro­fes­sion­nelles col­lec­tives au sein des éta­blis­se­ments. À ce titre, il faut du temps et de la concer­ta­tion pour échan­ger entre col­lègues, construire des pro­jets et amé­lio­rer le cli­mat sco­laire. La bana­li­sa­tion de demi-jour­nées pour per­mettre aux équipes de construire de tels pro­jets, à l’occasion notam­ment de la jour­née de lutte contre le har­cè­le­ment sco­laire qui a lieu le pre­mier jeu­di après les vacances d’automne est à ce titre un levier pertinent.

Pour lut­ter contre le har­cè­le­ment sco­laire, SUD édu­ca­tion demande la réduc­tion des effec­tifs dans les classes et des éta­blis­se­ments à taille humaine.

SUD édu­ca­tion reven­dique davan­tage de per­son­nels médi­co-sociaux avec notam­ment une infir­mière et une assis­tante sociale par éta­blis­se­ment et l’accès aux visites médi­cales aux­quelles ont droit tous les élèves. Avec un méde­cin pour 12 000 élèves, l’accompagnement médi­cal des élèves est très insuf­fi­sant. Actuellement les élèves peuvent béné­fi­cier de 8 séances gra­tuites. Les familles cessent le sui­vi après les 8 séances, faute de moyens. SUD édu­ca­tion reven­dique la gra­tui­té des séances chez le·la psy­cho­logue pour les élèves qui sou­haitent béné­fi­cier d’un accompagnement.

Pour lut­ter contre le cybe­rhar­cè­le­ment, il faut for­mer les élèves, les parents et les per­son­nels à l’usage du numé­rique et des réseaux sociaux. Il est inutile d’ajouter des sanc­tions sup­plé­men­taires du type confis­ca­tion du télé­phone dans la mesure où l’élève aura tou­jours accès à un autre télé­phone. Pour les réseaux sociaux, tant que les règles ne seront pas claires et les mêmes pour les adultes et les enfants, il sera bien inutile de prendre des mesures sur l’accès aux réseaux sociaux par les élèves qui trou­ve­ront tou­jours des moyens pour contour­ner les inter­dic­tions. Il faut don­ner accès sur la pré­ven­tion, l’éducation de tous et toutes.

SUD édu­ca­tion revendique : 

la créa­tion de postes dans la méde­cine sco­laire et l’assistance sociale : 

  • 1 infir­me­rie ouverte sur tout le temps sco­laire dans chaque établissement ;
  • 1 assistant·e de ser­vice social à temps plein dans chaque éta­blis­se­ment et leur déploie­ment dans le pre­mier degré ;
  • le ren­for­ce­ment de la méde­cine sco­laire avec des visites obli­ga­toires pour tous·tes les élèves.

des créa­tions de postes pour réduire les effec­tifs par classe et ren­for­cer les vies scolaires :

  • limi­ter les effec­tifs par classe avec au col­lège : 20 élèves maxi­mum en col­lège ordi­naire, 16 en édu­ca­tion prio­ri­taire, 12 en SEGPA ;
  • des dédou­ble­ments natio­naux sur la moi­tié des horaires d’enseignement dans toutes les matières ;
  • au moins 1 CPE dans tous les col­lèges quel que soit le nombre d’élèves ;
  • 1 CPE pour 120 élèves dans les col­lèges ordi­naires et 1 pour 100 en édu­ca­tion prioritaire ;
  • en plus du ou de la CPE, 1 per­son­nel de vie sco­laire pour 50 élèves en col­lège ordi­naire et 2 pour 50 en édu­ca­tion prioritaire.

la for­ma­tion ini­tiale et conti­nue sur le har­cè­le­ment scolaire : 

  • des vraies for­ma­tions à l’identification et la prise en charge des situa­tions de har­cè­le­ment dans les écoles et les éta­blis­se­ments sco­laires avec des intervenant·es extérieur·es et non pas du sau­pou­drage avec des kits ou des for­ma­tions à distance ;
  • les for­ma­tions qui doivent prendre en compte de manière spé­ci­fique les oppres­sions sexistes, racistes, LGBTIphobes, validistes.

Pour lut­ter contre le har­cè­le­ment sco­laire, il faut des moyens humains et maté­riels . SUD édu­ca­tion porte des pro­po­si­tions pour trans­for­mer en pro­fon­deur le ser­vice public d’éducation. Le har­cè­le­ment sco­laire tue. La vio­lence n’a sa place dans aucune école et aucun éta­blis­se­ment scolaire

4 - Le droit à la liberté d’information, d’expression et de participation

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4.1 - Zoom sur la pédagogie Freinet et le conseil coopératif

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Fiche basée sur une pra­tique en cours de fran­çais dans le secon­daire, adap­table à toutes les dis­ci­plines et tous les niveaux.

Le conseil de coop : qu’est-ce que c’est, d’où ça vient ?

Le conseil de coopé­ra­tion est un dis­po­si­tif péda­go­gique qui s’inspire de la péda­go­gie Freinet et de la péda­go­gie ins­ti­tu­tion­nelle. C’est une ins­ti­tu­tion auto­gé­rée par les élèves : à la fois un lieu de parole, un lieu de réflexion et d’analyse mais aus­si un lieu de prises de déci­sions, il vise à orga­ni­ser à la fois le tra­vail et la vie de la classe, comme celle de l’établissement.

« Le conseil de coopé­ra­tion : lieu d’apprentissage de la démo­cra­tie. C’est sans conteste l’institution de base de la classe, le lieu où les enfants éta­blissent leurs lois, règlent leurs conflits, exa­minent les pro­po­si­tions concer­nant les acti­vi­tés et les rela­tions au sein du groupe, mettent au point leur plan de tra­vail, dis­cutent de leurs réa­li­sa­tions. C’est un lieu d’échange, un lieu de parole où se trouvent confron­tées paroles du groupe et parole de l’individu. C’est un lieu de conflits où s’expriment la lutte entre les dominant·es, les conflits dominant·e·s/dominé·e·s et les conflits entre groupe et indi­vi­du. » (La péda­go­gie Freinet au col­lège et au lycée, publi­ca­tion de l’Icem sec­teur 2nd degré, 1997)

« Le conseil est une ins­ti­tu­tion cen­trale de la classe de péda­go­gie ins­ti­tu­tion­nelle. C’est un moment struc­tu­ré et solen­nel où le groupe est confron­té à son quo­ti­dien et à ses aspi­ra­tions. Nous réglons des conflits et féli­ci­tons des cama­rades, […] nous votons des pro­jets qui enga­ge­ront toute la classe dans des appren­tis­sages et de nou­velles orga­ni­sa­tions du groupe. Tous ces débats et déci­sions poten­tielles créent une énorme attente, réamor­çant du désir, car il y a là des enjeux impor­tants pour chacun·e. » (Andrès Monteret, Les che­mins du col­lec­tif, Libertalia 2020).

Comment mettre en place un conseil de coopération ? 

À chacun·e de s’approprier cette pra­tique selon les élèves, les classes, les besoins et visées

Comment pré­pa­rer le pre­mier conseil de coopération ? 

  • pré­sen­ter en quelques mots le conseil de coopé­ra­tion et annon­cer aux élèves la date du pre­mier conseil ;
  • pré­pa­rer un ques­tion­naire à faire rem­plir en amont avec des ques­tions qui font un bilan du tra­vail et de l’atmosphère en classe (voire dans l’établissement), tout en ouvrant vers la pos­si­bi­li­té, pour les élèves, de s’emparer des espaces, des pro­grammes, des moda­li­tés de tra­vail… et d’en pro­po­ser d’autres.

Quelques exemples : que penses-tu du tra­vail en classe ? Ce qui te satis­fait le plus ? Ce qui te pose pro­blème ? Les chan­ge­ments que tu sou­hai­te­rais ? Qu’est-ce qu’il fau­drait ajou­ter dans la salle, ou reti­rer ? Sur quoi tu as besoin d’être aidé·e ? Sur quoi tu aime­rais tra­vailler ? De quelles manières tu aimes travailler ?

  • à par­tir de ce ques­tion­naire, la/​le prof pré­pare l’ordre du jour du pre­mier conseil, en ras­sem­blant par thé­ma­tiques, par exemple. On peut choi­sir de le détailler ou non. L’ordre du jour des conseils sui­vants, dans l’idéal, sera pré­pa­ré par les élèves.
    Ce ques­tion­naire et ce “bilan-ordre du jour” peuvent pré­cé­der chaque conseil de coopé­ra­tion. Il existe des pra­tiques où les bilans sont faits au moyen de boîtes recueillant les idées des élèves, de tableaux où les élèves notent leurs propositions…
    D’autres pra­tiques vont plus loin dans l’autogestion par les élèves en met­tant en place des équipes tour­nantes pour gérer la consti­tu­tion de l’ordre du jour.
  • pré­pa­rer une pré­sen­ta­tion som­maire des rôles dans le conseil : pré­si­dence, secré­ta­riat, ges­tion du temps, ges­tion de la parole, ain­si que les règles et le dérou­le­ment type du conseil.

Les rôles

Pour chaque conseil, les rôles sont distribués.

Président·e : l’é­lève ouvre et ferme le conseil et fait res­pec­ter l’ordre du jour et les règles du conseil. La ou le président·e doit res­ter neutre, veiller à ce qu’il n’y ait pas de hors-sujet.

Secrétaire : l’é­lève prend des notes sur les débats et, sur­tout, consigne les déci­sions prises.

Maître·sse de la parole : l’é­lève dis­tri­bue la parole. Pour cela, elle ou il note le pré­nom des élèves qui sou­haitent prendre la parole (et qui lèvent la main pour être noté·es) et dis­tri­bue la parole dans l’ordre des inscrit·es. Mais si un·e élève n’a jamais par­lé encore, il est pos­sible de la ou le faire pas­ser en priorité.

Maître·sse du temps : l’é­lève veille à ce que le temps accor­dé à chaque point soit res­pec­té. Elle ou il peut rap­pe­ler le temps res­tant lorsque cela lui semble nécessaire.

Les règles

L’ensemble du groupe doit écou­ter et res­pec­ter la parole de la per­sonne qui s’ex­prime, élève ou adulte. Chacun·e attend son tour pour pou­voir s’ex­pri­mer. Un·e élève est char­gé de la dis­tri­bu­tion de la parole pour cela. Les pro­blèmes à gérer doivent être clai­re­ment expli­qués par les per­sonnes qui en ont fait part. Une dis­cus­sion a lieu ensuite pour trou­ver des solu­tions et faire des pro­po­si­tions concrètes. S’il n’y a pas de consen­sus sur une pro­po­si­tion, celle-ci est sou­mise au vote. À par­tir du moment où une déci­sion est votée, tout le monde s’en­gage à la respecter.

Pendant le conseil

On peut ima­gi­ner plu­sieurs dis­po­si­tions dans la salle pour favo­ri­ser la participation :

  • une grand rec­tangle avec les tables
  • un grand U
  • pas de table, mais des chaises en cercle

L’essentiel est que tou·tes les élèves se voient et que per­sonne ne soit exclue.

Le dérou­le­ment s’appuie sur le bilan pré­pa­ré en amont. On peut ajou­ter à ce dérou­lé un temps dédié à chaque point :

  1. Ouverture par la ou le président·e : « je déclare le conseil ouvert » ;
  2. Présentation des élèves qui assument les dif­fé­rents rôles du conseil ;
  3. Rappel des règles de fonc­tion­ne­ment du conseil : « on ne se moque pas, on est bien­veillant et en confiance, on écoute la per­sonne qui parle, on demande la parole ; on ne dis­cute pas en apar­té ; les élèves qui gênent trois fois ne pour­ront plus participer » ;
  4. Lecture des déci­sions du conseil précédent ;
  5. Lecture de l’ordre du jour à l’is­sue de laquelle on demande s’il y a un point à ajouter ;
  6. Lecture des points posi­tifs, appré­ciés dans la période écoulée ;
  7. Déroulement des points à dis­cu­ter et à régler si possible ;
  8. Les pro­jets en cours ;
  9. Les pro­po­si­tions ;
  10. Les res­pon­sables et la date du conseil suivant ;
  11. Relecture des déci­sions prises ;
  12. Remarques sur l’a­ni­ma­tion du conseil ;
  13. Fermeture du conseil : « je déclare le conseil fermé ».

L’adulte par­ti­cipe au conseil au même titre que les élèves et vote mais sa voix ne compte pas davan­tage et n’oriente pas le vote. L’adulte conserve un droit de veto si les pro­po­si­tions ne res­pectent pas les règles de la classe.

Après le conseil

Les déci­sions sont conser­vées dans le cahier des élèves et dans le cahier de la classe, s’il en existe un. Chacun·e veille au res­pect des déci­sions car elles servent de points de repère pour la vie de la classe et les ques­tions qui se posent. Au fil des conseils, la mémoire de la classe se construit ain­si : les déci­sions sont reprises, remises en ques­tion ou com­plé­tées. Les pro­jets s’affinent, s’ajoutent les uns aux autres.

Quelle puissance pédagogique et émancipatrice dans le conseil de coopération ?

Comme pour toutes les pra­tiques péda­go­giques, le risque est de ne faire du conseil de coopé­ra­tion qu’un outil d’organisation tech­nique du temps et du tra­vail, de réduire le conseil à un lieu de pla­ni­fi­ca­tion des élé­ments pro­po­sés par l’enseignant·e seul·e, en oubliant le poten­tiel de trans­for­ma­tion de la classe et de l’école par les élèves, sans en faire un levier d’analyse cri­tique et d’émancipation pour les jeunes.

La puis­sance péda­go­gique du conseil de coopé­ra­tion réside dans le fait que les élèves s’emparent de l’espace, des savoirs, du tra­vail, y injectent les notions qui les inté­ressent, les ques­tion­ne­ments (sur l’école, sur le monde) qui les pré­oc­cupent, les réa­li­tés qui les laissent per­plexes ou qui les révoltent. Par cette prise de pou­voir sur ce qu’elles et ils font en classe, leur enga­ge­ment dans le tra­vail prend du sens et devient authen­tique. Par le conseil de coopé­ra­tion, les jeunes font l’apprentissage du débat et de l’analyse, réflé­chissent aux situa­tions pro­blé­ma­tiques de la classe et de l’établissement, qu’elles soient inter­per­son­nelles ou orga­ni­sa­tion­nelles, et y construisent des réponses ; elles et ils y apprennent la démo­cra­tie et l’autogestion et prennent confiance en leur pou­voir d’agir. L’émancipation ici, se tra­duit par l’exercice d’un esprit cri­tique face au fonc­tion­ne­ment tra­di­tion­nel de la classe et de l’école, et par une dyna­mique de trans­for­ma­tion de ce fonctionnement.

Pour les per­son­nels qui impulsent le conseil, cela demande un chan­ge­ment de pos­ture pas tou­jours facile : ne plus être la per­sonne qui domine, qui décide seul·e du dérou­le­ment des cours, des points à abor­der, des moda­li­tés de tra­vail ; mais éga­le­ment accep­ter la parole cri­tique des élèves et s’ouvrir à leurs pro­po­si­tions. Cette pra­tique per­met aus­si aux per­son­nels de s’émanciper des pos­tures héri­tées de leurs propres études, des­cen­dantes et dominatrices.

Quelques ressources pour aller plus loin

4.2 - Donner la parole aux lycéen·nes du syndicat MNL

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Pourquoi s’auto-organiser au lycée ?

Pourquoi les lycéen·nes ont besoin d’or­ga­ni­sa­tion syn­di­cale spé­ci­fique où iels décident pour elleux de leurs propres reven­di­ca­tions et de leurs moda­li­tés d’action ?

C’est en 1987 qu’est créé le pre­mier syn­di­cat lycéen suite à la vic­toire face au pro­jet de loi Devaquet. Ce pro­jet de loi visait à réfor­mer les uni­ver­si­tés et notam­ment le pas­sage du lycée à l’u­ni­ver­si­té en créant de la concur­rence entre les élèves, ce qui nous rap­pelle Parcoursup aujourd’hui. Contre cette loi, la mobi­li­sa­tion lycéenne est extrê­me­ment forte, ce qui conduit à l’a­ban­don du pro­jet de loi. Ce pre­mier syn­di­cat est créé par des cadres du PS et de SOS Racisme, et sera le seul pen­dant très long­temps. En 1993 est fon­dée l’Union Nationale Lycéenne, lui aus­si à la suite d’une forte mobi­li­sa­tion lycéenne, et lui aus­si très proche du PS à ses débuts. A l’origine, les syn­di­cats lycéens n’étaient donc pas tota­le­ment auto­nomes et indé­pen­dants. Ils étaient même gan­gre­nés par le car­rié­risme et étaient un moyen pour les par­tis de for­mer leurs suc­ces­seurs poli­tiques. C’est ain­si que nombre de syn­di­ca­listes lycéen·nes ont par la suite conti­nué leur car­rière dans le syn­di­ca­lisme étu­diant puis dans les assem­blées, les mai­ries, les ministères…

Pour com­prendre d’où vient ce manque d’autonomie il est néces­saire de rap­pe­ler que pour se finan­cer, les orga­ni­sa­tions lycéennes n’ont pas beau­coup de choix. Les coti­sa­tions venant de lycéen·nes ne suf­fisent pas à faire fonc­tion­ner une orga­ni­sa­tion entière. Autre pos­si­bi­li­té, les sub­ven­tions publiques, très variables d’une année à l’autre en fonc­tion de l’évolution du syn­di­cat et de la poli­tique du minis­tère de l’Éducation natio­nale. Il reste donc les dons faits par d’autres orga­ni­sa­tions, ce qui pousse les syn­di­cats à se rap­pro­cher de par­tis poli­tiques, qui voient d’un bon œil de se mettre les lycéen·nes dans la poche.

Pourtant, il est indis­pen­sable de s’auto-organiser et de faire naître les ini­tia­tives et les pro­po­si­tions direc­te­ment des lycées et ne pas être orien­té par un organe exté­rieur. Nous fai­sons les frais d’un sys­tème sco­laire oppres­sif qui vou­drait nous for­ma­ter et nous mettre au pas. En tant que lycéen·nes, nous avons les clés pour le com­prendre de l’intérieur et lut­ter contre. Certaines pro­blé­ma­tiques lycéennes sont les mêmes depuis tou­jours, comme la reven­di­ca­tion d’une gra­tui­té totale de l’éducation par exemple. Les lycéen·nes ne peuvent pas se per­mettre de pas­ser une année en écar­tant une ou des reven­di­ca­tions à cause de l’omniprésence d’une autre cause choi­sie par une orga­ni­sa­tion exté­rieure (l’année der­nière pen­dant les mou­ve­ments contre la réforme des retraites, le micro était ten­du au lycéen·nes seule­ment pour par­ler de la réforme des retraites). Parmi les orga­ni­sa­tions lycéennes gérées et contrô­lées en par­tie par des asso­cia­tions non lycéennes nous avons vu des représentant·es dépar­te­men­taux être obligé·es d’assister aux for­ma­tions de cette asso­cia­tion non lycéenne, leur pre­nant du temps sur un évé­ne­ment natio­nal, les obli­geant à aban­don­ner des dis­cus­sions à pro­pos de reven­di­ca­tions lycéennes.

Dans les ins­tances, dans la vie et même dans la rue où nous devrions être écouté·es, notre parole de lycéen·nes est en per­ma­nence dis­cré­di­tée. Parfois par des pro­pos pater­na­listes, sou­vent à coup de matraques. Les sphères consi­dé­rées comme repré­sen­tant l’engagement lycéen ne sont que des fausses ins­tances où rien ne se décide, en tous cas nous ne sommes jamais écouté·es. Les pro­grammes cen­sés déve­lop­per notre esprit cri­tique sont pen­sés pour nous for­ma­ter. A l’in­té­rieur des ins­tances lycéennes, nous ne sommes pas écouté·es et à l’ex­té­rieur nous sommes matraqué·es. Nous sommes vu·es comme des flemmard·es sans reven­di­ca­tion dont le seul but est de ne pas tra­vailler en séchant les cours. En tant que mineur·es, il leur est facile de balayer d’un revers de main toutes nos reven­di­ca­tions. Notre jeu­nesse nous rend aveugles diront-ils, nous n’y com­pre­nons rien… Nous, lycéen·nes, savons à quel point ces reven­di­ca­tions sont pri­mor­diales. Comment ne pas avoir la flemme jus­te­ment ? Comment avoir hâte de tra­vailler, quand nous nous ren­dons compte que le sys­tème sco­laire repro­duit les struc­tures oppres­sives de la socié­té ? Qu’il nous divise en nous met­tant en com­pé­ti­tion, nous for­mate tout en vou­lant jus­ti­fier les inéga­li­tés futures aux­quelles nous serons confronté·es sur le mar­ché du travail ?

Les parents d’élèves ain­si que les profs se rendent en par­tie compte de ces pro­blèmes spé­ci­fiques, mais se rendent mieux compte des leurs car iels les vivent. Leur capa­ci­té d’initiative en matière de luttes lycéennes est donc limi­tée. De même que nous ne pour­rions pas mener à leur place les luttes contre les pro­blèmes que les profs ren­contrent ( manque de postes, de moyens, sur­charge de tra­vail.. ) car nous ne les vivons pas, des adultes non-lycén·nes ne peuvent pas com­prendre comme nous notre posi­tion de lycéen·ne… Le rôle qui nous incombe est d’être là pour sou­te­nir et construire des ponts entre nos luttes lorsque celles-ci sont proches. Il nous fau­dra néan­moins mener notre lutte par nous-même loin de l’entrisme ou du car­rié­risme qui ne ferait que nous discréditer.

Au-delà des reven­di­ca­tions, les moda­li­tés d’action dans les lycées sont spé­ci­fiques car nos droits et condi­tions d’études sont spé­ci­fiques : nous n’avons pas de droit de grève, les syn­di­cats lycéens ne sont pas recon­nus, nos absences sont un motif de pres­sion, la plu­part d’entre nous vit encore chez ses parents… Un nombre impor­tant de par­ti­cu­la­ri­tés à prendre en compte si l’on veut com­prendre nos capa­ci­tés et modes d’actions. Il nous faut donc redé­fi­nir notre grève lycéenne, la com­bi­ner à des blo­cus pour nous per­mettre de ne pas se pré­sen­ter en cours sans for­cé­ment être considéré·es comme absent·es et déve­lop­per une soli­da­ri­té néces­saire dans nos lieux d’étude. La répres­sion admi­nis­tra­tive ne sau­rait être mini­mi­sée et est un fac­teur impor­tant de la peur res­sen­tie par les lycéen·nes qui s’engagent ( fichage pen­dant les blo­cus, conseils de dis­ci­pline, intimidations…).

Un des grands moteurs d’une mobi­li­sa­tion lycéenne, c’est l’image qu’elle renvoie.

Seul un mou­ve­ment ini­tié par des lycéen·nes, dans les lycées, avec des méthodes lycéen·nes peuvent espé­rer faire sor­tir de leur classe des non-militant·es et les faire mani­fes­ter, ou blo­quer leur lycée. Plus dyna­mique, les lycéen·nes ne se mobi­lisent pas selon les méthodes mili­tantes clas­siques la plu­part du temps, car les enjeux de leurs luttes sont sou­vent per­çus dif­fé­rem­ment et abor­dés dif­fé­rem­ment. Personne ne peut dire aux jeunes com­ment iels doivent se mobi­li­ser. Qui aurait pu pré­voir que le plus gros mou­ve­ment lycéen de ces trois der­nières années soit contre la réforme des lycées pro­fes­sion­nels ? Initié par le MNL, ce mou­ve­ment a pris une ampleur inat­ten­due, avec des cen­taines de lycées blo­qués le pre­mier jour, mais aus­si le sui­vant, et on a obser­vé des lycées géné­raux blo­qués pen­dant une semaine entière. S » il a pris de l’ampleur, c’est par le tra­vail de moti­va­tion réa­li­sé sur les réseaux sociaux par des lycéen·nes autonomes.

Pour conclure, il est impé­ra­tif que les lycéen·nes s’auto-organisent au sein des lycées, mais aus­si au sein de leurs orga­ni­sa­tions, et dans la pla­ni­fi­ca­tion de leurs actions. Il en va de la mas­si­fi­ca­tion des mou­ve­ments lycéens.

Présentation du MNL

Le MNL est un syn­di­cat lycéen auto­ges­tion­naire, donc par et pour les lycéen·nes, démo­cra­tique, syn­di­cal, indé­pen­dant et com­ba­tif. Le MNL se pose en alter­na­tive aux poli­tiques édu­ca­tion­nelles des­truc­trices, aux coupes bud­gé­taires inces­santes et à la pré­ca­ri­té gran­dis­sante. Le MNL est un syn­di­cat anti­fas­ciste, éco­lo­giste, fémi­niste et anti­ca­pi­ta­liste qui se bat pour une école plus juste, soli­daire et inclu­sive, éman­ci­pa­trice pour toutes et tous.

Nous fai­sons vivre toutes ces valeurs et tous ces com­bats au sein d’une orga­ni­sa­tion lycéenne grâce au fait que ce soit un syn­di­cat auto­ges­tion­naire, qui per­met aux lycéen·nes de s’engager comme iels le veulent et quand iels le veulent ce qui est pri­mor­diale pour les lycéen·nes. Nous voyons le syn­di­cat comme un outil au ser­vice des luttes lycéen·nes qui doit don­ner à tous.tes les armes pour se mobiliser.

5 - Le droit d’être protégé·e contre toutes les formes de discrimination

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5.1 - Contre les assignations sexistes

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Face à l’offensive réac­tion­naire et au com­por­te­ment rétro­grade de l’institution sco­laire, il nous faut réaf­fir­mer nos reven­di­ca­tions : une école qui garan­tisse l’épanouissement des élèves, qui leur per­mette de se construire en dehors des sté­réo­types et des hié­rar­chi­sa­tions alié­nantes, qui pro­meuve l’égalité entre tou·tes, filles, gar­çons, qu’elles ou ils soient hété­ros, les­biennes, gays, bi·e·s, trans, cis, intersexué·es, qui per­mette à tout·e élève de pen­ser sa vie comme un pos­sible et son iden­ti­té comme son bien propre.

Pour cela, SUD édu­ca­tion revendique :

  • la ré-inté­gra­tion du concept de genre dans les textes offi­ciels et sa prise en compte dans des pro­grammes éla­bo­rés par la com­mu­nau­té éducative ;
  • la prise en compte de ces ques­tions dans les enseignements ;
  • la pro­duc­tion de manuels qui fassent sa place entière à l’histoire des femmes, non pas sur un stra­pon­tin dans des dos­siers docu­men­taires annexes, mais dans le corps du texte et le fil de l’histoire (docu­ments-sources d’auteures, fémi­ni­sa­tion des textes, évo­ca­tion sys­té­ma­tique de la place des femmes, vision gen­rée des évé­ne­ments et des concepts) ;
  • la mise en œuvre de pra­tiques de classe favo­ri­sant la cir­cu­la­tion éga­li­taire de la parole, les pra­tiques col­la­bo­ra­tives, l’apprentissage de toutes les dis­ci­plines pour toutes et tous dans une école polytechnique ;
  • l’effectivité des séances d’éducation à la sexua­li­té pré­vues dans les textes offi­ciels et la prise en compte dans ces séances d’une pers­pec­tive non hété­ro­cen­trée, qui mette sur un pied d’égalité toutes les orien­ta­tions sexuelles et toutes les iden­ti­tés de genre ;
  • la mise en place de dis­po­si­tifs dédiés (comme l’étaient les ABCD de l’égalité) per­met­tant aux élèves de réflé­chir spé­ci­fi­que­ment aux dis­cri­mi­na­tions et sté­réo­types de genre, et de les déconstruire ;
  • la pro­mo­tion de pro­jets par exemple via les CESC (Conseil d’éducation à la san­té et à la citoyen­ne­té), et d’interventions d’associations ou orga­ni­sa­tions laïques (Planning Familial, SOS Homophobie par exemple) pour com­plé­ter les actions et pra­tiques péda­go­giques mises en œuvre dans les établissements.

5.2 - Le droit à l’éducation à la vie affective et sexuelle

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Attaque contre l’éducation affective et sexuelle : beaucoup de bruit pour presque rien !

Ces der­niers mois, les attaques contre les pro­jets d’é­du­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle mis en place dans les éta­blis­se­ments sco­laires se sont mul­ti­pliées. Cette cam­pagne est nour­rie par des men­songes et la dif­fu­sion de fake news qui déforment com­plè­te­ment la réa­li­té du ter­rain des séances d’é­du­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle mises en place dans les écoles, col­lèges et lycées, quand elle est mise en place !

En Belgique, la mobi­li­sa­tion des inté­gristes reli­gieux et de l’extrême droite contre un pro­jet de décret rela­tif à l’éducation à la vie rela­tion­nelle, affec­tive et sexuelle (« Evras ») a conduit à l’incendie de plu­sieurs écoles.

En France, sous l’im­pul­sion des groupes de « Parents vigi­lants », por­tés par les partisan·es d’Eric Zemmour ou les “mamans louves”, c’est une véri­table cam­pagne de dés­in­for­ma­tion à des­ti­na­tion de l’o­pi­nion publique, et de pres­sion sur la com­mu­nau­té édu­ca­tive qui s’in­ten­si­fie depuis la ren­trée, avec en ligne de mire les élec­tions des représentant·es de parents d’é­lèves du mois d’octobre.

Pourtant, ins­ti­tu­tions et orga­ni­sa­tions cèdent à ces sirènes réactionnaires :

  • en ne sou­te­nant pas sys­té­ma­ti­que­ment les équipes édu­ca­tives voire en entra­vant leur tra­vail, comme cela a été par exemple le cas en Ariège où le DASEN a inter­dit l’in­ter­ven­tion du Planning fami­lial dans les écoles, mal­gré son agré­ment par le Ministère et son exper­tise recon­nue pour pro­duire des conte­nus adap­tés à chaque public ;
  • en relayant cette cam­pagne nau­séa­bonde sur nos boîtes pro­fes­sion­nelles comme l’a fait Action & Démocratie ;
  • en met­tant en doute la per­ti­nence d’une édu­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle abor­dant toutes les orien­ta­tions sexuelles et iden­ti­tés de genre, comme l’a fait le Président Macron lors d’une inter­view s’a­gis­sant des écoles et du collège.

C’est pour­tant bien en abor­dant dès le plus jeune âge la ques­tion du consen­te­ment, du res­pect de l’in­té­gri­té phy­sique, de la diver­si­té des orien­ta­tions amou­reuses et des iden­ti­tés de genre que l’on œuvre à un véri­table épa­nouis­se­ment per­son­nel, débar­ras­sé de rap­ports oppres­sifs et de normes étouf­fantes. C’est aus­si pen­dant les séances d’é­du­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle que l’é­cole peut iden­ti­fier et pré­ve­nir les vio­lences sexistes et sexuelles qui menacent les élèves, notam­ment l’inceste.

Derrière ces attaques en règle contre l’é­du­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle, sous cou­vert d’in­té­rêt de l’en­fant, il y a le refus de lut­ter contre les sté­réo­types sexistes et les oppres­sions qu’ils pro­duisent, la volon­té d’im­po­ser la norme hété­ro­sexuelle et cis­genre comme seul hori­zon « naturel ».

Derrière la mise en cause de sites dédiés comme « onsex­prime » de Santé publique France, il y a le déni de la néces­si­té d’une poli­tique d’in­for­ma­tion et de pré­ven­tion sur les ques­tions de sexua­li­té, alors même qu’à l’âge de 12 ans, selon un récent rap­port de l’ARCOM, plus de la moi­tié des gar­çons consulte régu­liè­re­ment des sites pornographiques.

Assurer une édu­ca­tion à la sexua­li­té est une des mis­sions de l’é­cole, ins­crites dans le Code de l’Éducation (articles L 121 – 1 et L 312 – 16) et au lieu de céder à des « paniques morales » infon­dées et réac­tion­naires, notre ins­ti­tu­tion et toute la com­mu­nau­té édu­ca­tive doit plu­tôt se pré­oc­cu­per de l’ef­fec­ti­vi­té de ces séances, qui ne sont le plus sou­vent pas mises en place faute de moyens et de poli­tique volontariste.

À ces attaques contre l’é­du­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle, s’est éga­le­ment ajou­té en cette ren­trée un appel du col­lec­tif « Parents vigi­lants » à inté­grer les listes de parents élu·es. Les militant·es d’ex­trême droite sont encouragé·es par ce col­lec­tif à inter­ve­nir en conseil d’é­cole ou en conseil d’ad­mi­nis­tra­tion des éta­blis­se­ments sco­laires et auprès des autres parents d’élèves.

SUD édu­ca­tion dénonce cette intru­sion réac­tion­naire au sein de l’é­cole, apporte son sou­tien aux équipes édu­ca­tives qui mettent en place ces séances avec le sou­ci de les adap­ter au mieux à chaque public, et défend avec force la néces­si­té d’une édu­ca­tion à la vie affec­tive et sexuelle de l’é­cole à l’u­ni­ver­si­té. SUD édu­ca­tion dénonce éga­le­ment l’en­trisme de l’ex­trême droite au sein des ins­tances scolaires.

SUD édu­ca­tion a inter­pel­lé le Ministre de l’Éducation natio­nale afin qu’il se tienne aux côtés des per­son­nels contre cette offen­sive réactionnaire.

SUD édu­ca­tion revendique :

  • l’effectivité des séances d’éducation à la sexua­li­té pré­vues dans les textes offi­ciels et la prise en compte dans ces séances d’une pers­pec­tive non hété­ro­cen­trée et cis­genre, qui mette sur un pied d’égalité toutes les orien­ta­tions sexuelles et toutes les iden­ti­tés de genre ;
  • la réin­té­gra­tion du concept de genre dans les textes offi­ciels et sa prise en compte dans des pro­grammes éla­bo­rés par la com­mu­nau­té éducative ;
  • la mise en place de dis­po­si­tifs per­met­tant aux élèves de réflé­chir aux dis­cri­mi­na­tions et de décons­truire les stéréotypes.

5.3 - Circulaire relative à l’accueil des élèves trans : un texte nécessaire mais insuffisant !

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Le minis­tère de l’Éducation natio­nale a publié le 29 sep­tembre 2021 une cir­cu­laire “pour une meilleure prise en compte des ques­tions rela­tives à l’identité de genre en milieu sco­laire”. Ce texte s’inscrit dans le “Plan natio­nal d’actions pour l’égalité des droits, contre la haine et les dis­cri­mi­na­tions anti-LGBT+ 2020 – 2023” et fait suite au sui­cide d’une élève trans à Lille en décembre 2020 qui met­tait au jour le manque d’accompagnement et de sou­tien par l’institution sco­laire des jeunes trans. Pour SUD édu­ca­tion, ce texte est un appui pour récla­mer dans les dépar­te­ments des cam­pagnes de pré­ven­tion, néan­moins ces objec­tifs ne pour­ront être atteints sans moyens humains et finan­ciers. Par ailleurs, SUD édu­ca­tion regrette que le minis­tère ne fasse pas du choix et du bien-être des élèves l’élément cen­tral de sa poli­tique : en effet le chan­ge­ment de pré­nom est tou­jours condi­tion­né à l’accord des parents.

Un rappel salutaire du cadre législatif

La cir­cu­laire du minis­tère rap­pelle que la tran­si­den­ti­té n’est ni un trouble psy­chia­trique, ni une patho­lo­gie. Alors que, dans les éta­blis­se­ments sco­laires, les élèves trans subissent trop sou­vent des dis­cri­mi­na­tions et un har­cè­le­ment inac­cep­tables, il est néces­saire de rap­pe­ler le droit au res­pect des élé­ments comme l’identité de genre qui consti­tuent la vie pri­vée des indi­vi­dus (article 8 de la Convention euro­péenne de sau­ve­garde des droits de l’homme et des liber­tés fon­da­men­tales). Les actes et les dis­cri­mi­na­tions trans­phobes sont sanc­tion­nés par le code pénal. De même, le chan­ge­ment d’état civil, indé­pen­dam­ment de toute tran­si­tion phy­sique ou de démarche médi­cale, est un droit acquis pour les per­sonnes trans.

Cette cir­cu­laire per­met de rendre visible les élèves trans et de réaf­fir­mer leurs droits dans le cadre scolaire.

Un manque de moyens qui met en danger la mise en œuvre de la circulaire

Le manque de per­son­nels médi­co-sociaux ne per­met pas de mener les actions de pro­tec­tion néces­saires lorsque les élèves trans sont vic­times de vio­lence dans le cadre sco­laire ou fami­lial. Pourtant, les élèves trans subissent davan­tage ces vio­lences que les autres enfants et adolescent·es. Il y a urgence à accom­pa­gner les familles pour per­mettre aux jeunes de vivre leur tran­si­tion ou leur ques­tion­ne­ment quant à leur genre dans un cadre bien­veillant et serein. La pré­co­ni­sa­tion de trans­mettre une infor­ma­tion pré­oc­cu­pante n’est pas suf­fi­sante puisque les délais de trai­te­ment par la Crip (la Cellule dépar­te­men­tale de recueil des infor­ma­tions pré­oc­cu­pantes) sont très longs en rai­son d’un manque de moyens criants. Il faut accom­pa­gner les familles afin de pré­ve­nir les situa­tions de violence.

La poli­tique de pré­ven­tion por­tée par la cir­cu­laire repose sur des dis­po­si­tifs qui existent déjà et dont l’efficacité reste limi­tée. La lutte contre les dis­cri­mi­na­tions trans­phobes ne peut se bor­ner au PAF (Plan Académique de Formation) car seuls les per­son­nels inté­res­sés par ces ques­tions s’y ins­crivent. De même, la for­ma­tion à l’accompagnement des élèves trans­genres ne doit pas être en concur­rence avec d’autres for­ma­tions péda­go­giques dans le contexte d’un droit à la for­ma­tion for­te­ment res­treint. La for­ma­tion doit se déployer pour tous les per­son­nels dans les éta­blis­se­ments sco­laires avec la par­ti­ci­pa­tion des asso­cia­tions qui défendent les droits des per­sonnes LGBTI+.

De plus, les actions de pré­ven­tion reposent dans les aca­dé­mies sur des per­sonnes char­gées de mis­sion, référent·es pour l’éducation à la sexua­li­té, les équipes réfé­rentes har­cè­le­ment. Ces mis­sions sont aujourd’hui prises en charge par des per­son­nels qui ne sont pas for­cé­ment for­més et dont la charge de tra­vail ne per­met pas de rem­plir ces missions.

Prénom et expression de genre : les élèves doivent décider !

La cir­cu­laire rap­pelle l’importance d’accompagner les élèves dans leur ques­tion­ne­ment ou dans leur tran­si­tion afin de garan­tir leur bien-être et leur sécu­ri­té dans le cadre sco­laire. Pourtant en subor­don­nant le chan­ge­ment de pré­nom à l’accord de la famille de l’élève, le texte minis­té­riel donne le der­nier mot à la famille lorsque celui-ci est en désac­cord avec le choix de l’élève. L’ école doit être un espace sécu­ri­sant pour les élèves, et les pro­té­ger des pres­sions fami­liales de tous ordres. Cette dis­po­si­tion doit être modifiée.

Au contraire, pour SUD édu­ca­tion, il faut pla­cer le bien-être de l’élève au centre de nos pré­oc­cu­pa­tions. C’est pour­quoi l’école doit accom­pa­gner les familles dans l’acceptation de la démarche de leurs enfants. Il n’est pas accep­table que l’école cau­tionne la néga­tion par cer­taines familles du droit des jeunes trans à choi­sir leur pré­nom et à expri­mer libre­ment leur genre.

SUD édu­ca­tion reven­dique une poli­tique ambi­tieuse de pré­ven­tion et d’accompagnement des jeunes trans ou en ques­tion­ne­ment quant à leur genre et leur orien­ta­tion sexuelle, appuyée par la mise à dis­po­si­tion de véri­tables moyens et par l’ouverture de postes spé­ci­fiques de référent⋅es.

SUD édu­ca­tion reven­dique le res­pect par les per­son­nels du pré­nom choi­si par les jeunes trans dans le cadre scolaire.

5.4 - Stop aux injonctions vestimentaires

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Régulièrement, dans beau­coup de col­lèges et lycées de France, de nom­breuses élèves reçoivent des aver­tis­se­ments ou se voient refu­ser l’accès de leur éta­blis­se­ment parce que leur tenue est jugée « pro­vo­cante » ou « indé­cente ». Les cou­pables : jupes courtes, shorts, hauts qui laissent appa­raître les épaules ou le nom­bril, sou­tiens-gorge qui dépassent, absence de sou­tien-gorge… Même lorsque les tem­pé­ra­tures sont très éle­vées, on demande à ces jeunes filles de mettre un gilet ou un pan­ta­lon. Les gar­çons subissent beau­coup moins d’in­jonc­tions quant à leur tenue et ne sont pas accu­sés d’y mettre une inten­tion sexuelle.

L’argument prin­ci­pal qui jus­ti­fie ces injonc­tions est mal­heu­reu­se­ment connu : ces tenues, dit-on, « exci­te­raient les gar­çons » et « les empê­che­raient de se concen­trer en classe » – sous-enten­dant que la « concen­tra­tion » des gar­çons prime sur l’accès aux cours des filles. Illustration par­faite d’une culture du viol qui consi­dère que ce sont aux femmes et aux jeunes filles de faire atten­tion à leur manière de s’habiller, qui pré­tend que les gar­çons et les hommes ne seraient pas capables de se conte­nir à la vue d’une épaule, d’un sein, d’une cuisse. Faut-il le rap­pe­ler ? Une agres­sion sexuelle ou un viol n’a qu’un seul res­pon­sable : l’agresseur.

D’autres diront qu’il s’a­git sim­ple­ment d’a­voir une tenue « cor­recte », « nor­male » ou « répu­bli­caine » dans les mots de Blanquer. Mais en quoi une jupe courte ne serait ni « cor­recte », ni « nor­male » ou « répu­bli­caine » ? La notion de décence est le règne de la sub­jec­ti­vi­té et du moralisme.

Ne nous mépre­nons pas, quelle que soit l’ar­gu­men­ta­tion pro­po­sée, l’en­jeu est tou­jours le même : contrô­ler l’ha­bille­ment des jeunes filles, consi­dé­rer qu’il n’est pas accep­table que leur corps soit visible, alors même que ce sont elles qui le choi­sissent. Ces com­men­taires dévoilent, par ailleurs, le sys­tème de double contrainte auquel sont sou­mis les femmes et jeunes filles : trop court, c’est into­lé­rable ; trop long, c’est into­lé­rable aus­si. En France, des poli­ciers peuvent à la fois deman­der à une femme, seins nus sur la plage, de remettre son haut de maillot de bain et à une autre qui porte un voile sur la plage de l’enlever. Une femme doit mon­trer son corps, mais pas trop. Il n’y a aucune façon de gagner : être une jeune fille ou une femme, c’est se voir sans cesse scru­tée, jugée, être som­mée de trou­ver le juste milieu. Une socié­té qui n’a de cesse de contrô­ler la manière dont s’habillent les femmes est une socié­té pro­fon­dé­ment sexiste et patriar­cale. Cette socié­té dis­cri­mine par­ti­cu­liè­re­ment les jeunes femmes trans, mais aus­si toute per­sonne non-binaire, agenre ou ayant une expres­sion de genre fluide.

En tant que per­son­nels de l’éducation, notre rôle est de for­mer la jeu­nesse pour l’avènement d’une socié­té res­pec­tueuse des liber­tés de chacun·e. Ce sont les gar­çons qu’il faut édu­quer, en leur disant qu’aucune tenue ves­ti­men­taire n’est jamais une invi­ta­tion à quoi que ce soit, (ni à com­men­ter, ni à tou­cher), et qu’il leur fau­dra bien apprendre à se concen­trer en classe quelques soient les circonstances.

Nous sou­te­nons les jeunes collégien·ne·s et lycéen·ne·s dans leur com­bat pour le droit de s’habiller comme ils et elles l’entendent, et contre les remarques sexistes des adultes.
• Nous condam­nons toutes les démarches qui visent à inter­dire l’ac­cès à l’é­ta­blis­se­ment sco­laire à des élèves sous pré­texte d’une tenue inadaptée.
• Nous condam­nons les règle­ments inté­rieurs qui se trans­forment en police ves­ti­men­taire et restreignent de manière injus­ti­fiable la liber­té des élèves et exi­geons la réécri­ture de ces derniers.
• Nous reven­di­quons une réelle édu­ca­tion pour tou·te·s les élèves sur les ques­tions de sexisme, de genre et de consentement.

5.5 - Note de service interdisant les « tenues de type abaya ou qamis »

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Alors que le nou­veau ministre de l’Éducation natio­nale a fait du bien-être des élèves à l’é­cole un objec­tif prio­ri­taire, l’une de ses pre­mières notes de ser­vice pointe direc­te­ment du doigt les élèves musulman·es ou supposé·es musulman·es et pros­crit les « tenues de type abaya ou qamis », consi­dé­rant que ces vête­ments « manifeste[nt] osten­si­ble­ment en milieu sco­laire une appar­te­nance religieuse ».

Ces tenues n’é­tant nul­le­ment défi­nies, c’est l’ar­bi­traire qui va pré­va­loir et, tan­dis que ce sont les chef·fes d’é­ta­blis­se­ment qui sta­tue­ront pour savoir si telle ou telle robe longue doit ou non être consi­dé­rée comme une abaya, ce sont bien les AED qui seront en pre­mière ligne pour mener cette tâche impossible.

On ima­gine déjà les situa­tions ubuesques que cette note de ser­vice va géné­rer et les humi­lia­tions isla­mo­phobes et sexistes quo­ti­diennes qu’elle va per­mettre de cau­tion­ner. Une nou­velle fois, ce sont les élèves musulman·es ou supposé·es musulman·es qui vont en faire les frais et, en pre­mier lieu, les jeunes filles musul­manes ou sup­po­sées musul­manes qui auront à se jus­ti­fier des vête­ments qu’elles portent, tan­dis que leurs cama­rades ne seront jamais ques­tion­nées à ce sujet.

Faire du port d’un cer­tain type de vête­ment une marque de pro­sé­ly­tisme est un dan­ge­reux dévoie­ment de la laï­ci­té et SUD édu­ca­tion dénonce cette note de ser­vice qui stig­ma­tise une par­tie de la popu­la­tion en rai­son de sa confes­sion réelle ou supposée.

5.6 - Stop aux assignations de genre

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Dès la nais­sance, les enfants sont assigné·es à un genre, fémi­nin ou mas­cu­lin, au regard des attri­buts de leur corps bio­lo­gique. Les études de genre ont pour­tant bien mon­tré la néces­si­té de dis­so­cier sexe d’une part, et genre d’autre part (c’est-à-dire la construc­tion sociale des iden­ti­tés). De fait, la ques­tion des iden­ti­tés trans met en lumière les pro­blèmes que pose l’assignation de genre. Les per­sonnes trans sont obligé·e·s de se battre quo­ti­dien­ne­ment pour faire valoir leur iden­ti­té face aux dis­cri­mi­na­tions et vio­lences trans­phobes systémiques.

Ils et elles subissent des injonc­tions contra­dic­toires quant à leur appa­rence phy­sique. L’injonction au « pas­sing » (c’est-à-dire répondre aux normes de genre cor­res­pon­dant à son iden­ti­té) s’abat de façon contra­dic­toire sur les per­sonnes trans : à la fois on les accuse d’être fausses si elles ne s’y conforment pas, et, dans le même temps, on les accuse de repro­duire et de véhi­cu­ler des sté­réo­types lorsqu’elles le font. Souvent, elles ont éga­le­ment à subir des ques­tions intru­sives sur leur corps (à savoir s’ils et elles sont opéré·es, s’ils et elles suivent un trai­te­ment hor­mo­nal) qui violent leur intimité.

L’autodétermination, le res­pect des par­cours de chacun·e et des pré­noms et pro­noms d’usage doivent s’imposer dans l’ensemble de la socié­té à com­men­cer par l’école (chan­ge­ments de pré­nom sur les listes d’appel, sur le car­net de cor­res­pon­dance, sur l’ENT, etc.)

5.7 - Pour les droits des enfants intersexes

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Selon la défi­ni­tion de l’Onu, les per­sonnes inter­sexes sont nées avec des carac­tères sexuels (géni­taux, gona­diques ou chro­mo­so­miques) qui ne cor­res­pondent pas aux défi­ni­tions binaires types des corps mas­cu­lins ou féminins.

C’est d’abord avec l’accord des parents – par­fois extor­qué sous la pres­sion par les méde­cins – par­fois à leur demande, que les enfants et adolescent·es inter­sexes sont le plus sou­vent mutilé·es, opéré·es et soumis·es à des « trai­te­ments » hor­mo­naux lourds. Les opé­ra­tions et muti­la­tions ne sont pas une inter­ven­tion ponc­tuelle, à la nais­sance, comme on le croit sou­vent. Elles sont répé­tées, mul­ti­pliées, durant toute l’enfance et l’adolescence – cer­tains enfants sont opé­rés plu­sieurs dizaines de fois. Les opé­ra­tions comme les trai­te­ments hor­mo­naux peuvent éga­le­ment géné­rer d’autres pro­blèmes de san­té. Outre ces muti­la­tions, les per­sonnes inter­sexes ont à subir stig­ma­ti­sa­tion et vio­lences, en par­ti­cu­lier à l’adolescence : les adolescent·es sont, en effet, obsédé·es – et socia­le­ment encouragé·es à l’être – par la trans­for­ma­tion de leur corps et sa confor­mi­té aux normes de genre domi­nantes. Des per­sonnes assi­gnées filles qui n’ont pas de seins, pas leurs règles, une pilo­si­té impor­tante, ou des per­sonnes assi­gnées gar­çons qui ne déve­loppent pas de pilo­si­té, dont le sexe ne cor­res­pond pas aux cri­tères de mas­cu­li­ni­té… seront har­ce­lées par les autres élèves, soucieux·ses de confor­mi­té aux normes de la fémi­ni­té ou de la mas­cu­li­ni­té hégé­mo­niques et vou­lant se démar­quer de ces « déviant·es ».

• Les muti­la­tions, sté­ri­li­sa­tions, trai­te­ments hor­mo­naux non consen­tis sur des per­sonnes inter­sexes, quel que soit leur âge, doivent cesser.
• Le droit à l’autodétermination des per­sonnes inter­sexes doit être recon­nu : res­pect du pré­nom et des pro­noms d’usage des élèves dans l’Éducation natio­nale, pos­si­bi­li­té de chan­ge­ment d’état civil libre et gra­tuit par simple décla­ra­tion devant un offi­cier d’état civil en mai­rie, sans inter­ven­tion des pou­voirs médi­caux et judiciaires.
• La for­ma­tion des per­son­nels édu­ca­tifs sur les ques­tions inter­sexes doit être effective.
• Une prise en compte, non patho­lo­gi­sante, des varia­tions inter­sexes dans les sup­ports péda­go­giques doit prévaloir.

5.8 - Contre la grossophobie

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En 2019, le terme gros­so­pho­bie entre dans le dic­tion­naire : « atti­tude de stig­ma­ti­sa­tion, de dis­cri­mi­na­tion envers les per­sonnes obèses ou en sur­poids ». Cette entrée est une pre­mière vic­toire sym­bo­lique pour les per­sonnes et col­lec­tifs qui se mobi­lisent pour faire entendre la réa­li­té des dis­cri­mi­na­tions sys­té­miques que subissent les per­sonnes grosses ou per­çues comme telles. La stig­ma­ti­sa­tion, les dis­cri­mi­na­tions et le déni­gre­ment que subissent ces per­sonnes sont étroi­te­ment liées aux injonc­tions nor­ma­tives sur les corps, qui pèsent avec d’autant plus de force sur les femmes. Aujourd’hui, dans les repré­sen­ta­tions (publi­ci­té, médias, films) et l’opinion com­mune, la min­ceur, voire la mai­greur, est valo­ri­sée. Tout signe de sur­poids fait l’objet d’une forte culpa­bi­li­sa­tion et s’accompagne de sté­réo­types : paresse, manque de volon­té, négli­gence, stig­mate social.

Cette dyna­mique de culpa­bi­li­sa­tion est mar­quée par l’amalgame entre sur­poids et obé­si­té et par l’argument des enjeux de san­té. Pour les asso­cia­tions concer­nées, il s’agit, d’une part, de « décor­ré­ler le sur­poids de l’obésité » (compte-ren­du des États géné­raux de la lutte contre la gros­so­pho­bie, jan­vier 2017) ; et, d’autre part, dans les poli­tiques de san­té publique, de prendre en compte non seule­ment la san­té phy­sique, mais aus­si psy­chique des per­sonnes concernées.

La dif­fi­cul­té à assu­mer socia­le­ment un corps gros ou per­çu comme tel se réper­cute dans de nom­breux champs de la vie quotidienne :

dis­cri­mi­na­tion à l’emploi

une enquête menée par le Défenseur des Droits et l’Organisation Internationale du Travail en 2016 sur les dis­cri­mi­na­tions à l’embauche liées au phy­sique sou­ligne « l’ampleur de la contrainte sociale qui pèse sur l’apparence des femmes est l’impact du sur­poids dans les dis­cri­mi­na­tions liées à l’apparence phy­sique. En effet, le sur­poids n’a pas d’effet spé­ci­fique chez les hommes, alors que les femmes en sur­poids rap­portent 4 fois plus sou­vent avoir été dis­cri­mi­nées à cause de leur appa­rence que les femmes ayant un IMC normal »

dis­cri­mi­na­tions médicales

per­son­nels médi­caux gros­so­phobes, maté­riel inadap­té (par exemple les tun­nels de scan­ner ou IRM), phar­ma­co­lo­gie éga­le­ment inadap­tée (par exemple la pilule du len­de­main impropre pour les plus de 80 kg)

socia­bi­li­té

remarques d’inconnu·es, de col­lègues ou de parents d’élèves sur une pré­ten­due gros­sesse dès lors qu’un ventre appa­raît ; dif­fi­cul­té d’accès aux trans­ports en com­mun, aux infra­struc­tures accueillant du public, etc.

Face à la gros­so­pho­bie, ce sont toutes les repré­sen­ta­tions sur les normes de beau­té et sur ce qui serait « accep­table » ou pas dans l’apparence phy­sique qu’il faut décons­truire. Il est urgent que les auto­ri­tés de san­té publique prennent en compte, sans juge­ment, les varia­tions mor­pho­lo­giques qui existent et qui sont le résul­tat bien plus de notre res­pon­sa­bi­li­té col­lec­tive (pré­ca­ri­té) que de res­pon­sa­bi­li­tés individuelles.

5.9 - Contre les discriminations racistes

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La loi de 1905

Conformément à l’esprit de la loi de 1905, la laï­ci­té est un prin­cipe d’impartialité, d’indépendance et de neu­tra­li­té des ins­ti­tu­tions publiques face à la reli­gion. Cette loi de sépa­ra­tion de l’Église et de l’État garan­tit éga­le­ment la liber­té de conscience de toutes et de tous. Dans le champ de l’éducation, c’est cette loi qui garan­tit que les ensei­gne­ments soient menés hors de toute contrainte religieuse.

Pour SUD édu­ca­tion, c’est ce prin­cipe de laï­ci­té et d’égalité qui doit sous-tendre toutes les réformes et décrets concer­nant la reli­gion dans l’éducation natio­nale et ailleurs.

Or, force est de consta­ter que depuis plu­sieurs années, toutes les reli­gions ne sont pas logées à la même enseigne. Alors que la stricte sépa­ra­tion entre le chris­tia­nisme et les ins­ti­tu­tions publiques est loin d’être res­pec­tée, l’islam est aujourd’hui stig­ma­ti­sé par l’institution sco­laire dans un contexte mon­tée en puis­sance du racisme.

Alors que les cultes et les églises ne sont plus finan­cés par des fonds publics depuis le début du XXe siècle, les éta­blis­se­ments sco­laires confes­sion­nels sous contrat conti­nuent de rece­voir les sub­ven­tions de l’État pour 73% de leur bud­get. Les lois Debré (1959) et Carle (2009) tra­hissent la loi de 1905 en fai­sant assu­mer à l’État et aux col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales les salaires des enseignant·es du pri­vé et de mul­tiples finan­ce­ments. Pourtant, les éta­blis­se­ments pri­vés sont très lar­ge­ment res­pon­sables de la ségré­ga­tion sociale.

Par ailleurs, dans les éta­blis­se­ments sco­laires publics de la mater­nelle au lycée, les entorses à cette loi de sépa­ra­tion des églises et de l’état sont manifestes :

  • une per­sis­tance des rituels d’inspiration et de tra­di­tion chré­tienne au sein même des établissements
  • des exa­mens natio­naux tenus dans des éta­blis­se­ments confes­sion­nels, dans des salles où appa­raissent des signes religieux
  • une année sco­laire cal­quée sur le calen­drier reli­gieux chré­tien (dates, cer­tains noms)

La loi de 2004 fait suite à l’arrivée pour la pre­mière fois d’un can­di­dat de l’extrême droite au deuxième tour de l’élection pré­si­den­tielle de 2002. Cette loi est un tour­nant dans la légis­la­tion : tout à coup, la laï­ci­té s’ap­plique aux usa­gers et usa­gères du ser­vice public . Cette loi de 2004 met en œuvre une idéo­lo­gie néo­laïque qui est en rup­ture avec l’es­prit de la loi de 1905 et le prin­cipe de laï­ci­té. Elle ouvre la porte à une exten­sion sans borne de la res­tric­tion de la liber­té de culte. Elle dis­cri­mine les élèves musulman·es ou supposé·es musulman·es et déroge au prin­cipe d’impartialité et de neu­tra­li­té des fonc­tion­naires vis à vis des élèves par rap­port à leurs religions.

À l’heure où les idées racistes et isla­mo­phobes sont lar­ge­ment répan­dues, il est impor­tant de rap­pe­ler nos ambi­tions d’une école éman­ci­pa­trice et éga­li­taire, ouverte à tou·tes sans dis­tinc­tions de genre, d’origine, de reli­gion et de milieu social.

Laïcité, islamophobie, racisme d’État : définitions

Laïcité : sépa­ra­tion du pou­voir poli­tique et des auto­ri­tés reli­gieuses repo­sant sur l’articulation de plu­sieurs prin­cipes : la liber­té de conscience et la liber­té de culte dans le res­pect de l’ordre public, ; l’égalité des citoyen·nes devant la loi sans consi­dé­ra­tion de reli­gion et de convic­tion ; la sépa­ra­tion du pou­voir poli­tique et des auto­ri­tés religieuses .

Racisme d’État : le racisme n’est pas seule­ment un phé­no­mène indi­vi­duel : c’est un sys­tème de domi­na­tion, d’op­pres­sion et d’ex­ploi­ta­tion dans lequel l’État et ses dif­fé­rentes ins­ti­tu­tions jouent un rôle struc­tu­rant, en met­tant en place des poli­tiques dis­cri­mi­na­toires, en cau­tion­nant des pra­tiques ou en s’abstenant d’agir pour lut­ter contre les dis­cri­mi­na­tions. La lutte contre le racisme ne doit donc pas être un com­bat pure­ment moral, c’est une lutte politique.

Islamophobie : l’islamophobie désigne l’oppression et la dis­cri­mi­na­tion sys­té­miques des per­sonnes en rai­son de leur appar­te­nance réelle ou sup­po­sée à la reli­gion musulmane.

C’est une forme de racisme struc­tu­rel et cultu­rel, qui débouche sur des peurs, des repré­sen­ta­tions dégra­dantes, des dis­cri­mi­na­tions et des vio­lences ver­bales ou phy­siques. L’islamophobie est aujourd’­hui une com­po­sante majeure du racisme d’État. L’islamophobie est recon­nue par les orga­ni­sa­tions inter­na­tio­nales dont l’ONU.

Les ori­gines de l’islamophobie

L’époque colo­niale est l’une des matrices fon­da­men­tales de l’is­la­mo­pho­bie fran­çaise. À la fois jugé comme prin­ci­pal obs­tacle à la colo­ni­sa­tion, mais aus­si per­çu comme le rap­pel des conquêtes et de la vision bel­li­ciste des croi­sades, l’is­lam est rapi­de­ment essen­tia­li­sé comme une reli­gion enne­mie, rétro­grade, vio­lente et dangereuse.

Les ins­ti­tu­tions colo­niales fran­çaises struc­turent la néces­si­té de contrô­ler l’is­lam, envi­sa­gé comme un sys­tème idéo­lo­gique plu­tôt qu’une reli­gion, pour assu­rer le suc­cès du sys­tème colo­nial et l’ex­pan­sion de l’Empire, notam­ment en Algérie. L’islam est depuis cette époque consi­dé­ré comme une menace pour les ins­ti­tu­tions fran­çaises et comme un enne­mi de l’intérieur.

À l’ins­tar de beau­coup de conquêtes colo­niales, la conquête du Maghreb et plus par­ti­cu­liè­re­ment celle de l’Algérie par les colons fran­çais fonde sa légi­ti­mi­té par la mis­sion civi­li­sa­trice des « indigènes ».

À la fin du XIXe siècle émerge une lit­té­ra­ture savante qui jus­ti­fie la sou­mis­sion des « indi­gènes« au pou­voir colo­nial, et en par­ti­cu­lier des femmes musul­manes ins­tru­men­ta­li­sées pour atteindre les hommes et pour asseoir la domi­na­tion colo­niale,. Ainsi, Ernest Renan, aca­dé­mi­cien consi­dé­ré comme un homme de science et un grand poli­tique, défend dans ses écrits l’in­fé­rio­ri­té des musul­manes, la dan­ge­ro­si­té essen­tielle de l’is­lam et son hos­ti­li­té à la rai­son et au savoir.

Cette lit­té­ra­ture dite éli­tiste va infu­ser long­temps dans la socié­té fran­çaise et être vul­ga­ri­sée pour être éten­due à un lec­to­rat plus large. Elle est ins­ti­tu­tion­na­li­sée comme un savoir dans les manuels sco­laires de la IIIe République. Cette rhé­to­rique savante est encore bien vivante aujourd’­hui à tra­vers des hommes et des femmes poli­tiques ou des édi­to­ria­listes poli­tiques qui l’u­ti­lisent comme une réfé­rence aca­dé­mique accep­table pour jus­ti­fier leur islamophobie.

Plus tard, durant la guerre d’Algérie, des mili­taires spé­cia­listes de la guerre psy­cho­lo­gique inci­taient les femmes musul­manes à reje­ter le voile en orga­ni­sant des céré­mo­nies de dévoi­le­ment sur place publique. L’obsession fran­çaise pour le voile est lar­ge­ment issue de son his­toire coloniale.

Il existe une conti­nui­té entre le sexisme et le racisme des colons fran­çais et les dis­cri­mi­na­tions qui frappent actuel­le­ment les femmes et les hommes issu·es de l’im­mi­gra­tion postcoloniale.

Instrumentalisation sexiste et raciste du féminisme

La loi de 2004 est éga­le­ment une loi sexiste, défen­due par des figures poli­tiques et intel­lec­tuelles qui ont ins­tru­men­ta­li­sé la lutte pour les droits des femmes à des fins racistes.

Si la loi de 2004 étend en prin­cipe l’interdiction des signes reli­gieux à l’ensemble des élèves sans dis­tinc­tion de genre ou de reli­gion, son objec­tif prin­ci­pal était de déter­mi­ner la manière dont les filles, spé­ci­fi­que­ment musul­manes, pou­vaient s’habiller à l’école. En décré­tant com­ment les filles peuvent s’habiller, l’État s’inscrit dans la tra­di­tion patriar­cale du contrôle du corps des femmes et des filles. La loi de 2004 est l’une des mul­tiples injonc­tions ves­ti­men­taires que fait peser le minis­tère de l’Éducation natio­nale sur les filles.

En sep­tembre 2023, la cir­cu­laire Attal impose une nou­velle inter­dic­tion, celle de la robe longue. Comment déter­mi­ner la signi­fi­ca­tion reli­gieuse d’un voile ? Comment faire la dif­fé­rence entre une robe longue auto­ri­sée et une robe longue inter­dite si ce n’est en fonc­tion de celle ou de celui qui la porte ? Jugées trop cou­vertes pour la loi de 2004, les filles seront consi­dé­rées comme trop dévê­tues quand elles déci­de­ront de por­ter d’autres vête­ments. Ces injonc­tions sont des vio­lences de genre qui pointent du doigt nos élèves et les stig­ma­tisent en repro­dui­sant des sté­réo­types sexistes, racistes et colo­niaux. Il faut apprendre aux filles que leur corps leur appar­tient et que leurs choix ves­ti­men­taires ne doivent faire l’objet d’aucune contrainte : ce ne sont ni des menaces ni des invitations.

Par cette loi, les élèves por­tant le fou­lard ou le voile sont des vic­times per­ma­nentes d’une sus­pi­cion. Elles sont soit consi­dé­rées comme des vic­times sou­mises aux injonc­tions reli­gieuses, soit décla­rées cou­pables et com­plices d’une idéo­lo­gie reli­gieuse radi­cale. Cette loi consti­tue une ins­tru­men­ta­li­sa­tion à des fins natio­na­listes et isla­mo­phobes de la lutte pour les droits des femmes . C’est ce qu’on appelle le fémo­na­tio­na­lisme, qui accom­pagne la mon­tée du racisme et du fas­cisme et impose sa lec­ture iden­ti­taire. La lutte des femmes contre toutes les formes d’op­pres­sion patriar­cale ne peut être bran­die pour en oppri­mer d’autres. La loi de 2004 témoigne du suc­cès d’une par­tie du fémi­nisme uni­ver­sa­liste, qui invi­si­bi­lise les dif­fé­rences entre les femmes, oubliant notam­ment les femmes racisées.

Des enfants nié·es dans leur capacité de réflexion

L’article L 141 – 2du Code de l’é­du­ca­tion sti­pule que « l’État assure aux enfants et ado­les­cents dans les éta­blis­se­ments publics d’en­sei­gne­ment la pos­si­bi­li­té de rece­voir un ensei­gne­ment conforme à leurs apti­tudes dans un égal res­pect de toutes les croyances ».

Tout enfant a droit à l’éducation quelle que soit sa reli­gion. Tout enfant a le droit d’être et de sen­tir plei­ne­ment inclus dans le sys­tème édu­ca­tif sans qu’un regard sus­pi­cieux ou non neutre soit posé sur lui. Des lois qui visent à mar­gi­na­li­ser certain·es élèves musulman·es ou supposé·es musulman·es vont à l’encontre de ce droit fon­da­men­tal sous pré­texte de lut­ter pour l’émancipation des élèves et contre l’obscurantisme reli­gieux. La loi de 2004, et les décrets qui en découlent, trans­forment la laï­ci­té en un prin­cipe qui exclut les élèves musulman·es ou supposé·es tel·les. Elle inter­dit l’ac­cès aux éta­blis­se­ments sco­laires et à tous éta­blis­se­ments publics dans le cadre sco­laire (remise de diplômes, céré­mo­nies offi­cielles) à des élèves. Elle vise prin­ci­pa­le­ment les élèves musul­manes ou sup­po­sées telles. Comment peuvent-elles se sen­tir plei­ne­ment incluses si la sus­pi­cion qui pèse sur elles amènent les adultes à scru­ter même la taille, la forme et la cou­leur de leurs habits, à mesu­rer la taille d’un ban­deau sur les cheveux ?

Tout enfant a le droit à la liber­té d’expression, y com­pris sur le sujet des valeurs répu­bli­caines. La laï­ci­té, en par­ti­cu­lier, ne peut être un caté­chisme répu­bli­cain : elle doit se vivre en classe, être inclu­sive et ques­tion­née, dis­cu­tée, appro­priée par les élèves. Cela ne peut que pas­ser par l’acceptation des désac­cords, sans stig­ma­ti­sa­tion, et en fai­sant confiance au pro­fes­sion­na­lisme des enseignant·es pour expli­ci­ter les notions. Les signa­le­ments abu­sifs et répres­sifs de paroles d’élèves vont à l’encontre de ce droit et par­ti­cipent à une cri­mi­na­li­sa­tion de leur dis­cours qui les amène à se cen­su­rer, ce qui empêche un véri­table ensei­gne­ment de ces notions.

Les élèves sont ain­si nié·es dans leur capa­ci­té de réflexion. Or la liber­té d’expression est une néces­si­té péda­go­gique en plus d’être un droit fondamental.

La loi de 2004 : un cadre abusif de légitimation des violences islamophobes dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur

Imposer l’interdiction du port du fou­lard ou de la robe longue revient à réduire les élèves au silence, ce qui est contra­dic­toire avec leur liber­té de conscience et d’expression, voire à les invisibiliser.

A l’école, les mères d’é­lèves por­tant le fou­lard sont expo­sées à de nom­breuses offen­sives isla­mo­phobes. Quant aux enfants de familles musul­manes ou sup­po­sées l’être, leurs actes sont sys­té­ma­ti­que­ment pas­sés au crible de la laï­ci­té et enta­chés de soup­çon. On a ain­si vu la mai­rie de Nice et les médias locaux s’émouvoir en 2023 de la radi­ca­li­sa­tion d’élèves de 8 ans, signalé·es pour s’être amusé·es à faire des prières dans la cour ! On ima­gine le trau­ma­tisme et la vio­lence sym­bo­lique que repré­sente cet achar­ne­ment sur ces enfants, et la perte de confiance en l’école publique qu’il peut engen­drer. La ques­tion des repas à la can­tine consti­tue elle aus­si un véri­table enjeu.

Dans les lycées et les col­lèges, les assistant·es d’éducation sont en pre­mière ligne de la mise en appli­ca­tion de cette poli­tique répres­sive. On leur demande de contrô­ler que les élèves musul­manes ou sup­po­sées telles enlèvent bien leur abaya et robe longue, de véri­fier qu’elles ne mettent pas leur capuche, de refu­ser l’entrée à des élèves qui portent le fou­lard ou une tenue sup­po­sée reli­gieuse, par­fois même de contrô­ler la taille des ban­deaux et des jupes des élèves. Ces pra­tiques, impul­sées par des chef·fes d’établissement, sont légi­ti­mées par les cir­cu­laires des ministres Ndiaye et Attal. Et lorsque les AED pro­testent contre les dérives racistes et isla­mo­phobes, en se met­tant en grève ou en affi­chant leur désac­cord, ils et elles sont sanctionné·es, licencié·es ou a mini­ma non-renouvelé·es, comme ce fut le cas au lycée Victor Hugo à Marseille.

Dans le supé­rieur, l’enquête natio­nale Acadiscri de 2022 sur les ques­tions de dis­cri­mi­na­tions, racisme et sexisme à l’u­ni­ver­si­té, montre que, par­mi le faible taux de participant·es,12,3 % des étudiant·es qui se disent perçu·es comme musulman·es affirment avoir subi des faits racistes, notam­ment en rai­son du port du fou­lard, en cours comme face à l’administration. L’enquête « isla­mo­pho­bie et dis­cri­mi­na­tion à l’université », menée par l’association des étu­diants musul­mans de France en 2022, éta­blit que les dis­cri­mi­na­tions à carac­tère racial ou isla­mo­phobe ont eu une consé­quence directe sur la sco­la­ri­té de 35% des répondant·es et des réper­cus­sions sur le plan psy­cho­lo­gique et men­tal pour 38%, sans pou­voir les por­ter devant une cel­lule de veille et d’écoute puisque la moi­tié des uni­ver­si­tés n’en dis­posent pas.

Face aux appels récur­rents de la droite et de l’extrême droite fran­çaises à inter­dire le port du voile à l’université, il convient de rap­pe­ler que celle-ci ne vit que par les échanges inter­na­tio­naux, l’accueil de chercheur·es étranger·es, la confron­ta­tion libre des idées. Une des condi­tions en est le res­pect strict de la laï­ci­té au sens de la loi de 1905. La liber­té qu’ont aujourd’hui les femmes de por­ter ou ne pas por­ter le voile à l’université, en France comme dans la majo­ri­té des uni­ver­si­tés dans le monde, doit être défen­due sans réserve. Les accu­sa­tions qu’ont fait por­ter Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal sur les pré­ten­dus « ravages à l’université » de l’« isla­mo-gau­chisme » témoignent d’une volon­té inédite de contrô­ler la pro­duc­tion de savoirs et de pensée.

SUD édu­ca­tion revendique :

  • une école publique réel­le­ment éman­ci­pa­trice et ouverte à tou·tes qui ne dis­cri­mine pas, ne domine pas et ne stig­ma­tise pas ;
  • l’a­bro­ga­tion de la loi 2004 ;
  • l’a­bro­ga­tion de toutes les lois et cir­cu­laires islamophobes ;
  • la fin de l’in­ter­dic­tion des robes longues dans les éta­blis­se­ments scolaires ;
  • la fin des convo­ca­tions et des sanc­tions abu­sives d’élèves accusé·es d’enfreindre la laïcité ;
  • la réin­té­gra­tion des per­son­nels mis·es à pied ou licencié·es abu­si­ve­ment pour avoir pro­tes­té contre l’is­la­mo­pho­bie dans l’Éducation nationale ;
  • la fin du finan­ce­ment de l’école pri­vée par l’État et le trans­fert des per­son­nels dans le public

6 - Le droit d’être soigné·e, protégé·e des maladies

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6.1 - Zoom sur la médecine scolaire

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On ne compte en moyenne qu’un méde­cin pour 12 000 élèves. Les per­son­nels infir­miers sont très rare­ment affec­tés à temps plein dans un éta­blis­se­ment sco­laire dans le second degré, et couvrent un nombre impor­tant d’écoles dans le pre­mier degré. Alors que la san­té, y com­pris men­tale, des élèves s’est for­te­ment dégra­dée depuis le début de la crise sani­taire, le minis­tère refuse de don­ner les moyens au ser­vice public de l’éducation pour veiller à la san­té des élèves scolarisé·es

SUD édu­ca­tion revendique :

  • Des per­son­nels médi­caux-sociaux en nombre suffisant ;
  • 1 infir­me­rie ouverte sur tout le temps sco­laire dans chaque éta­blis­se­ment avec la pré­sence d’au moins un per­son­nel infir­mier titu­laire. Cela per­met aus­si du temps pour des inter­ven­tions en classe, des concer­ta­tions et de la co-ani­ma­tion avec des professeur·es et les CPE ;
  • 1 Assistant·e de Services Sociaux à temps plein dans chaque éta­blis­se­ment et leur déploie­ment dans le pre­mier degré ;
  • Le ren­for­ce­ment de la méde­cine sco­laire avec des visites obli­ga­toires pour tous·tes les élèves ;
  • Le ren­for­ce­ment des CMP et de l’équipe para­mé­di­cale de pré­ven­tion et de dépis­tage (ortho­pho­nie, psy­cho­mo­tri­ci­té, psy­cho­lo­gie, ophtalmologie…);
  • Des PsyÉN en nombre suffisant ;
  • 1 PsyÉN pour 400 élèves au maximum.

7 - Le droit de ne pas faire la guerre, ni de la subir : STOP au SNU !

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La mise en place du SNU sur le temps sco­laire est encore un coup por­té aux heures dévo­lues aux appren­tis­sages, déjà mis à mal par la réforme Blanquer du bac. C’est une mili­ta­ri­sa­tion et un ren­for­ce­ment de la sou­mis­sion qui éloignent encore plus l’école d’un pro­jet émancipateur.

Le déploie­ment du SNU sur temps sco­laire nous ren­force dans nos reven­di­ca­tions : abro­ga­tion pure et simple du dis­po­si­tif, rever­se­ment des fonds alloués dans le ser­vice public d’éducation. Il s’agit en effet d’une entre­prise de mili­ta­ri­sa­tion de la jeu­nesse, d’un déploie­ment des idées natio­na­listes, qui met en dan­ger les jeunes accueilli·es. De nom­breux cas de mal­trai­tances et de vio­lences sont rele­vés à chaque séjour sans excep­tion, dont des agres­sions sexuelles et viols, des pro­pos racistes et homophobes.

A rebours de ce pro­jet mili­ta­riste et réac­tion­naire, SUD édu­ca­tion reven­dique une école éman­ci­pa­trice. Celle-ci ne peut pas­ser que par la liber­té d’expression des élèves, y com­pris sur le sujet des valeurs répu­bli­caines. La laï­ci­té, en par­ti­cu­lier, ne peut être un caté­chisme répu­bli­cain, mais doit se vivre en classe, être ques­tion­née, dis­cu­tée, appro­priée par les élèves. Cela ne peut que pas­ser par l’acceptation des désac­cords, sans stig­ma­ti­sa­tion, et en fai­sant confiance à la pro­fes­sion­na­li­té des enseignant·es pour expli­ci­ter les notions. Il en va de même pour les ques­tions géo­po­li­tiques. La situa­tion actuelle en Palestine sus­cite de manière légi­time des inter­ro­ga­tions et des indi­gna­tions de la part des élèves : il appar­tient plei­ne­ment aux enseignant·es de favo­ri­ser, dans une logique de citoyen­ne­té et d’esprit cri­tique, les échanges sur les sujets d’actualité. Dans ces situa­tions, le prin­cipe qui doit pré­va­loir est la liber­té d’expression des élèves, qui est à la fois un droit fon­da­men­tal et une néces­si­té pédagogique.

8 - Le droit d’avoir un refuge, d’être secouru·e, et d’avoir des conditions de vie décentes

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8.1 - Garantir le droit au logement pour tou·tes les enfants

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Destruction d’ha­bi­tats de for­tune à coups de pel­le­teuse lors de l’o­pé­ra­tion Wuambushu à Mayotte, matra­quage des jeunes migrant·es lors du démon­tage du cam­pe­ment qui s’é­tait éta­bli devant le Conseil d’État : les auto­ri­tés fran­çaises ont une manière bien par­ti­cu­lière de gérer la ques­tion du mal-loge­ment, qui frappe de plein fouet les enfants.

D’après le baro­mètre des enfants à la rue de l’Unicef, dans la nuit du 21 au 22 août, près de 2 000 enfants “sont resté·es sans solu­tion d’hébergement” et “29 780 enfants ont été héber­gés en hôtel”. 20% d’enfants en plus dorment dehors. La place d’un·e enfant, en pleine nuit, n’est pas dans la rue. Un·e enfant ne peut, sur du long terme, vivre dans un hôtel avec sa famille. Des héber­ge­ments dignes doivent être pro­po­sés à ces familles et les enfants ne devraient pas être amené·es à chan­ger de loge­ment plu­sieurs fois par mois sans prise en compte du sui­vi de leur sco­la­ri­té ou de leur besoin de sta­bi­li­té, d’au­tant que, selon une étude de l’Insee de 2021, il existe près de 3,1 mil­lion de loge­ments vacants en France,

Plus de 42 000 enfants vivaient dans des héber­ge­ments d’urgence, des abris de for­tune ou dans la rue d’après l’UNICEF France et la Fédération des acteurs de la soli­da­ri­té. SUD édu­ca­tion reven­dique un toit pour tous et toutes et la fin des expul­sions des immigré·es. L’accès à l’éducation est un droit fon­da­men­tal et doit pou­voir être acces­sible à tous et toutes dans des condi­tions décentes. Des élèves sans toit ou menacé·es d’expulsion ne béné­fi­cient pas d’une sco­la­ri­té comme les autres enfants alors qu’il s’agit d’un droit. Afin de per­mettre à ces élèves de suivre dans de meilleures condi­tions, leur sco­la­ri­té, SUD édu­ca­tion se mobi­lise aux côtés d’associations et de col­lec­tifs afin de faire res­pec­ter les droits de tous les enfants en par­ti­cu­lier les enfants immigré·es et leur obte­nir un toit pour vivre décem­ment en France. SUD édu­ca­tion apporte son sou­tien à tou·tes les militant·es, à toutes celles et ceux qui luttent au quo­ti­dien en faveur des droits des élèves immigré·es à être scolarisé·es comme les autres élèves.

L’absence de domi­cile a un impact sur la san­té men­tale de l’élève (mal-être, som­meil, estime de soi, ali­men­ta­tion, stress). Cela peut pro­vo­quer des troubles de l’anxiété, de la dépres­sion et des troubles de l’humeur.

L’augmentation de la pré­ca­ri­té, ren­for­cée par le contexte d’inflation actuel, jette à la rue des familles de plus en plus nom­breuses, et notam­ment des familles de per­sonnes sans-papiers. De plus en plus de per­sonnes sont tou­chées par la pré­ca­ri­té et sont de plus en plus concer­nées par les pro­blèmes de loge­ment. Pour rap­pel, le rap­port de la fon­da­tion Abbé Pierre indique que 4 mil­lions de per­sonnes sont non ou mal logées, dont 300 000 per­sonnes pri­vées de domi­cile fixe. Ce rap­port pré­cise que 14,6 mil­lions de per­sonnes sont fra­gi­li­sées par la crise du loge­ment. De plus en plus de per­sonnes ren­contrent de nom­breuses dif­fi­cul­tés à payer leur loyer, leurs fac­tures de gaz et d’électricité dans des loge­ments insa­lubres et mal-iso­lés. 12 mil­lions de per­sonnes vivent dans une situa­tion de pré­ca­ri­té éner­gé­tique. 500 000 loca­taires sont en impayé de loyer et risquent une pro­cé­dure d’expulsion.

Dans les éta­blis­se­ments sco­laires et les écoles, des col­lègues se mobi­lisent avec les familles, en lien avec les asso­cia­tions de sou­tien aux per­sonnes sans papiers et les asso­cia­tions de défense du droit au loge­ment. L’accès à l’éducation est un droit fon­da­men­tal et doit pou­voir être acces­sible à tous et toutes dans des condi­tions décentes. Des élèves sans toit ou menacé·es d’expulsion ne béné­fi­cient pas d’une sco­la­ri­té comme les autres enfants. L’absence de domi­cile fixe a un impact sur la san­té men­tale de l’élève (mal-être, som­meil, estime de soi, ali­men­ta­tion, stress). Cela peut pro­vo­quer des troubles de l’anxiété, de la dépres­sion et des troubles de l’humeur. Afin de per­mettre à ces élèves de suivre dans de meilleures condi­tions, leur sco­la­ri­té, SUD édu­ca­tion se mobi­lise aux côtés d’associations et de col­lec­tifs afin de faire res­pec­ter les droits de tous les enfants en par­ti­cu­lier les enfants immigré·es et leur obte­nir un toit pour vivre décem­ment en France. Des occu­pa­tions d’écoles ont d’ores et déjà per­mis de déblo­quer des moyens d’hébergement qui, si ils sont pro­vi­soires, repré­sentent néan­moins de pre­mières vic­toires. SUD édu­ca­tion encou­rage et sou­tient les mobi­li­sa­tions des per­son­nels de l’éducation natio­nale aux côtés de leurs élèves et leur famille, et reven­dique un toit pour toutes et tous.

La véri­table urgence n’est pas de débattre de l’u­ni­forme à l’é­cole comme le fait la secré­taire d’État à la ville mais de per­mettre à l’en­semble des élèves d’a­voir un loge­ment digne pour com­men­cer cette ren­trée sco­laire. Aucun·e élève ne devrait dor­mir dans la rue en 2023.

Les reven­di­ca­tions de SUD éducation :

  • SUD édu­ca­tion dénonce le sort réser­vé aux élèves sans toit et/​ou menacé·es d’expulsion ;
  • SUD édu­ca­tion exige l’annulation de l’obligation de quit­ter le ter­ri­toire fran­çais et la déli­vrance d’un titre de séjour pour toutes les familles concernées ;
  • SUD édu­ca­tion reven­dique la régu­la­ri­sa­tion de toutes et tous les sans papiers et l’accès à une sco­la­ri­té publique, gra­tuite et éman­ci­pa­trice pour toutes et tous, sans condi­tion aucune ;
  • SUD édu­ca­tion reven­dique la réqui­si­tion de loge­ments, notam­ment les loge­ments de fonc­tion vides dans l’éducation nationale ;
  • SUD édu­ca­tion appelle à rejoindre toutes les mobi­li­sa­tions et tous les col­lec­tifs, à pro­po­ser des actions visibles de mise à l’a­bri comme les occu­pa­tions d’é­cole, à signer des péti­tions, à par­ti­ci­per aux goû­ters pour que ces élèves pour­suivent leurs études en France.

9 - Le droit de jouer et d’avoir des loisirs

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9.1 - Gagnons la gratuité des transports

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Plus de 4 mil­lions d’é­lèves uti­lisent les trans­ports en com­mun pour se rendre dans leurs éta­blis­se­ments sco­laires. La gra­tui­té des trans­ports est effec­tive dans cer­taines villes. Des villes comme Dunkerque ou Calais pro­posent des trans­ports tota­le­ment gra­tuits. D’autres villes comme Paris ont choi­si une gra­tui­té par­tielle des trans­ports. Paris pro­pose éga­le­ment la gra­tui­té des trans­ports aux élèves depuis 2021. 376 com­munes pro­posent la gra­tui­té totale des trans­ports sur leurs com­munes. Dans cer­taines métro­poles comme celle de Lyon pro­posent la gra­tui­té des trans­ports pour les sor­ties scolaires.

Les pre­miers résul­tats des “Bilans Bas-Carbone” dans l’Éducation natio­nale montrent que les plus grosses émis­sions de gaz à effet de serre des éta­blis­se­ments sco­laires qui ne se trouvent pas dans des centres urbains résultent des dépla­ce­ments des per­son­nels et des élèves pour se rendre dans leur éta­blis­se­ment scolaire.

La gratuité des transports est une mesure écologique mais aussi une mesure sociale
  • Elle assure l’accès aux trans­ports à tous et toutes ;
  • Elle favo­rise la mobi­li­té de tous et toutes.

La gra­tui­té des trans­ports en com­mun est déjà mise en place dans cer­taines villes comme Lyon. Cela favo­rise la réduc­tion des inéga­li­tés sociales et ter­ri­to­riales tout en fami­lia­ri­sant per­son­nels et élèves aux trans­ports en com­mun. Il existe plu­sieurs lieux comme les musées et les parcs qui sont gra­tuits mais les bud­gets des éta­blis­se­ments sco­laires pour les sor­ties sco­laires sont tel­le­ment insuf­fi­sants qu’ils ne per­mettent pas d’effectuer cer­taines sor­ties pour­tant gra­tuites. La gra­tui­té des trans­ports en com­mun ren­drait la culture en par­ti­cu­lier plus acces­sible à tous et toutes.