SUD éducation a porté les revendications des personnels lors du CSA du 9 octobre. Vous trouverez ci-dessous la déclaration de SUD éducation lue au début de l'instance.
Déclaration de SUD éducation
Mesdames et Messieurs,
En décembre 2023, les résultats de l’enquête PISA ont à nouveau mis au jour le caractère profondément inégalitaire de notre école : la France est toujours l’un des pays de l’OCDE où le lien entre le statut socio-économique des élèves et la performance qu’ils obtiennent au PISA est le plus fort.
On observe en effet 21 % de la variation des performances des élèves en mathématiques en France dans PISA 2022, contre 15 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. En compréhension de l’écrit, la variation est de 17 %, contre 13 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. Ce constat d’une école qui reproduit les inégalités socio-économiques prend une dimension raciste lorsqu’on observe que près de 50% des élèves immigrés sont issus d’un milieu défavorisé, contre 37% en moyenne dans les pays de l’OCDE. Cette caractéristique impacte directement la performance de ces élèves en mathématiques puisque les élèves issus de l’immigration ont 2,4 fois plus de chance de se retrouver parmi les élèves peu performants en mathématiques.
Face à ce constat, Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, a choisi de s’inscrire dans la continuité de Jean-Michel Blanquer avec sa réforme du “choc des savoirs”.
Le “choc des savoirs” vient parachever l’altération du service public d’éducation. La politique des “savoirs fondamentaux” sous les quinquennats d’Emmanuel Macron a fait reculer l’école : aux classes populaires, une école des opérations simples autour du lire-écrire-compter et des groupes d’élèves en difficultés aux attentes nivelées vers le bas, et aux classes plus favorisées, une école de la richesse disciplinaire et des opérations cognitives complexes et des groupes de bons élèves. Cet arsenal ségrégatif tient via un continuum entre évaluations nationales et tri des élèves, de la 6e jusqu’à Parcoursup.
La rentrée 2024 a mis au jour l’incapacité du ministère à imposer les mesures “choc des savoirs” telles qu’elles avaient été voulues par Gabriel Attal. Les 2/3 des collèges n’ont pas mis en oeuvre les groupes de niveau, les évaluations nationales sont imposées aux personnels qui, majoritairement, les trouvent inutiles et chronophages. Le “choc des savoirs” a été refusé par les personnels dans la rue et dans les urnes en juin dernier, il est également refusé dans les établissements scolaires. Votre refus d’entendre les urnes, les organisations syndicales et la mobilisation des personnels est lourd de conséquences : vous devez abroger le “choc des savoirs” si vous ne voulez pas être responsables de l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite.
Les discussions qui s’ouvrent sur le budget doivent permettre de remettre la défense du service public d’éducation au centre des priorités. SUD éducation a construit des revendications urgentes pour réparer le service public d’éducation. L’urgence n’est pas de généraliser le SNU, ni d’imposer de nouveaux programmes en français et en mathématiques ou de faire du brevet un couperet pour l’entrée en seconde. Non, il y a urgence à recruter des personnels pour améliorer les taux d’encadrement en classe avec des postes d’enseignant·es et d’AESH, et hors des classes avec des postes d’AED, de CPE, de personnels médico-sociaux, d’agents administratifs et techniques…
Nous portons à SUD éducation le projet d’un même accès à l’école pour toutes et tous, cela passe par une vraie politique d’inclusion scolaire. Le ministère ne cesse de bricoler avec les PIAL ou les PAS pour pallier l’insuffisance des moyens engagés. L’Éducation nationale doit sortir de cette logique de mutualisation des moyens où l’accompagnement des élèves dépend des moyens disponibles alors que l’accompagnement devrait, au contraire, résulter des besoins des élèves. L’inclusion scolaire repose aujourd’hui sur la précarisation des personnels AESH, or l’accompagnement des élèves en situation de handicap est un métier qui doit être reconnu par la création d’un vrai métier et par des garanties statutaires, c’est pourquoi SUD éducation revendique la création d’un vrai statut de la Fonction publique pour les AESH.
De même, le budget 2025 doit être l’occasion pour l’école de mettre en oeuvre une politique de lutte contre les inégalités sociales et scolaires. Pour SUD éducation, l’éducation prioritaire est la meilleure réponse à apporter dans les écoles et établissements qui concentrent une forte proportion d’élèves d’origine sociale défavorisée : 84 % des collèges en REP+ et 34 % des collèges en REP accueillent au moins 60 % d’élèves d’origine sociale défavorisée, contre seulement 2 % des collèges publics hors éducation prioritaire. Ces inégalités sociales ne font pas l’objet d’une politique suffisamment volontariste pour endiguer leurs effets sur les performances scolaires des élèves. La mobilisation pour un plan d’urgence dans le 93, à laquelle vous n’avez apporté aucune réponse, comme la situation alarmante du collège Mallarmé de Marseille témoignent de l’abandon des quartiers défavorisés par les pouvoirs publics. Au collège Mallarmé, les personnels en droit de retrait ont été contraints de médiatiser les risques qu’ils encouraient pour obtenir l’attention de leur DSDEN. Ce manque de considération, de moyens pour accueillir correctement les élèves et d’ambition pour l’éducation prioritaire conduit les familles qui en ont les moyens à fuir le public pour le privé, y compris dans les quartiers populaires.
La carte de l’éducation prioritaire elle-même est à revoir puisqu’on constate de nombreuses injustices dans les académies avec des écoles qui ne bénéficient pas du classement en REP malgré des IPS semblables aux autres écoles REP du département, avec des collèges mal classés, surtout dans les territoires ultramarins, et avec les lycées exclus arbitrairement de la carte en 2015, comme si les difficultés sociales s’effaçaient à l’entrée au lycée. La récente mobilisation des lycées du Rhône pour leur retour dans la carte de l’éducation prioritaire montre à quel point les lycées ont besoin de moyens supplémentaires, ceux de l’éducation prioritaire, pour faire réussir leurs élèves.
Alors que l’éducation prioritaire est largement délaissée par le ministère de l’Éducation nationale, nous revendiquons que le budget 2025 cesse de faire la part belle à l’école privée. Avec un financement à hauteur d’au moins 13 milliards par an, l’État finance la mise en concurrence de l’école publique et sa dégradation en payant pour garantir aux élèves des milieux favorisés l’entre-soi d’une scolarité ségréguée. L’argent public doit être utilisé pour combattre les inégalités et garantir l’accès à un même service public d’éducation pour toutes et tous et non pour aggraver les inégalités sociales et scolaires. C’est pourquoi SUD éducation revendique l’arrêt du financement de l’école privée, sa nationalisation, sans indemnité ni rachat, et le transfert de ses personnels dans les corps correspondants de l’enseignement public.
Enfin, pour finir cette déclaration de rentrée, nous souhaitons vous alerter sur des situations qui sont de plus en plus alarmantes puisqu’on a vu se multiplier des mobilisations de groupes d’extrême droite autour des rectorats et des établissements scolaires contre les futurs programmes d’EVARS ou à l’encontre de personnels de l’Éducation nationale sur les réseaux sociaux. SUD éducation tient à alerter le ministère et exige un soutien indéfectible de l’Éducation nationale envers ses personnels avec l’octroi de la protection fonctionnelle lorsque le nom de leur école ou établissement est diffusé sur les réseaux sociaux avec des appels à la violence à leur encontre. L’extrême droite est une menace pour l’école et pour sa vocation émancipatrice, c’est pourquoi l’école et ses personnels doivent bénéficier d’un soutien sans faille de la part du ministère de l’Éducation nationale.