SUD éducation est un syndicat intercatégoriel
SUD éducation est un syndicat intercatégoriel
Les statuts de la Fédération l’affirment sans ambiguïté. Notre syndicat se doit d’être un syndicat généraliste de l’éducation qui a pour mission de syndiquer tous les personnels qui interviennent dans le secteur de l’éducation, de la culture et de la recherche, quel que soit :
-leur lieu de travail (école, établissement, université du secteur public ou privé, les services ministériels, académiques),
– leur fonction (enseignants, administratifs ou ouvriers à l’exclusion des personnels d’autorité),
‑leur statut,
‑leur patron (l’état, une collectivité territoriale, une entreprise privée), ou leur situation au regard de l’emploi (titulaires, en CDI, précaires ou chômeurs).
SUD éducation se doit de rester un syndicat intercatégoriel
Le champ de syndicalisation de notre syndicat ne doit pas se conformer aux cloisonnements catégoriels que l’état, les collectivités territoriales et les patrons des entreprises privées tentent de nous imposer en impulsant la contre-réforme dans l’Éducation et les services publics ?
Le monde salarié, soumis à l’individualisme, est aujourd’hui profondément divisé. La diversité des statuts et la multi- plication des contrats, la disparité des salaires, la casse et la privatisation des services publics se conjuguent avec l’isolement grandissant des salariés souvent précaires, quasiment sans droit réels et massivement inorganisés. Il nous revient de penser notre activité syndicale au regard des nécessités du combat contre ceux qui précisément tentent de nous diviser en cherchant à nous enfermer dans le corporatisme.
Dans l’éducation, les Tos, dont le sort est scellé depuis 2003 par la mise en œuvre de la loi de décentralisation, ont perdu leur statut de fonctionnaires d’état et par la même, leur droit à mutation, les congés qu’ils avaient dans la fonction publique, ils ne sont plus titulaires de leur poste et leur gestion professionnelle varie d’une collectivité territoriale à une autre. L’exercice du droit syndical est aussi rendu plus difficile alors qu’ils sont exposés à la privatisation des services.
La décentralisation ouvre une voie royale à la poursuite de la privatisation de l’École déjà engagée dans les services généraux (restauration, maintenance, nettoyage) des écoles, des établissements et des administrations (IA, rectorats, ministère).
Aujourd’hui, d’autres personnels du secteur de l’éducation sont aspirés dans cette spirale de la contre réforme… Les statuts sont bouleversés avec pour conséquences l’atomisation, l’individualisation de personnels dont nous ne savons parfois plus qui sont leurs employeurs (dans les Greta par exemple) et la précarisation est massive.
C’est dans ces conditions qu’il est nécessaire de réaffirmer la syndicalisation à SUD éducation de tous les personnels de l’éducation y compris ceux embauchés par les collectivités territoriales (mairie, département, région) ou le privé.
Sinon, dans un avenir proche, si rien n’est fait, des Cop, des psychologues scolaires, des personnels administratifs, avant l’ensemble des enseignants contractualisés par voie de mastérisation, seront aussi les victimes de la décentralisation/privati- sation généralisée.
Le projet que nous devons défendre à SUD éducation, c’est d’organiser les travailleurs dans un même secteur, sur un même lieu de travail en dépit des différences de statuts et d’employeurs des uns et des autres (même lieu de travail = même syndicat). De là découlent les rapports de forces au quotidien qui deviennent de plus en plus tendus. Il est néanmoins important de présenter face à l’employeur territorial un front de syndicats de Solidaires unifié.
Face au morcellement des responsabilités, à l’affaiblissement des droits syndicaux (SMA …) et à la diversité des statuts dans l’éducation, un même syndicat pour tous les travailleurs sur un même lieu de travail est d’autant plus indispensable pour faire face à l’autonomie grandissante des établissements de la maternelle à l’université (et que viennent consacrer les EPEP, les EPLE et la LRU), au pouvoir hiérarchique qui se renforce, à une certaine opacité des règles de gouvernance des établissements et surtout au développement de la précarité.
Il est évident que nous avons à conduire un travail commun avec d’autres syndicats SUD (AP-HP, cheminots, collectivités territoriales…), parfois nous pouvons nous engager dans des démarches communes en direction des travailleurs, c’est même incontournable. On peut aussi faire des listes communes mais pour cela encore faut-il que tout soit clair à la base et que cela s’appuie sur une réelle existence syndicale et une volonté de construire un outil commun au service des personnels et de la lutte. Le fait d’être un syndicat généraliste de l’éducation, donc intercatégoriel, nous inscrit aussi dans une logique interprofessionnelle.
La Fédération SUD éducation invite ses syndicats à travailler quand cela est possible, dans le respect de leur autonomie, avec les syndicats SUD Collectivités Territoriales :
En proposant aux personnels travaillant dans les établissements scolaires, mais dont l’employeur est une collectivité territoriale, une double syndicalisation à SUD éducation et SUD CT.
En créant des sections bi-syndicales là où SUD éducation et SUD CT sont implantés dans une collectivité territoriale.
En proposant la syndicalisation des TOS à SUD éducation en encourageant un travail commun avec SUD CT quand il existe.
Créer les conditions d’un syndicalisme fort et cohérent qui s’appuie sur des dynamiques engagées sur le terrain. C’est la condition de notre représentativité et de son renforcement. Renoncer à l’intercatégoriel au sein de notre syndicat serait reconnaître la politique de décentralisation/privatisation que nous combattons, ce serait nous orienter vers le corporatisme. Est ce le syndicalisme que nous voulons ?
La sous-traitance du nettoyage dans le champ de syndicalisation de l’Education
SUD éducation Créteil syndique une vingtaine des 30 salariés du nettoyage sur le site de l’Université Paris 8 (93 Saint-Denis), qui sous-traite cette mission à des entreprises spécialisées du privé.
On connaît la totale absence de scrupule des entrepreneurs du secteur dans leurs méthodes de gestion du personnel. Au printemps 2008, l’une de ces sociétés qui reprenait le marché de l’Université entreprenait de le dégraisser en affectant sept de ses salariés en Seine-et-Marne, à une heure où il leur était impossible de rejoindre leur poste de travail. Pour eux, c’était la rupture de contrat assurée, à leur tort, bien évidemment, et la perte de leur emploi. L’intervention d’une contre- offensive syndicale était incontournable.
Solidaires met en place une Union nationale du nettoyage pour seconder les syndicats nationaux adhérents qui entreprennent de développer ce secteur de leur activité. La reconnaissance des patrons de ces entreprises de l’activité syndicale obéit à des règles spécifiques, régies par la Convention Collective nationale des Entreprises de Propreté. De ce fait, l’engagement de Solidaires dans le développement de ce volet de son champ d’action est nécessaire aux organisations locales qui s’inscrivent dans cette démarche. En effet, isolé, SUD éducation (ou SUD Culture, ou SUD RAIL…) n’est pas légitime pour se faire entendre de ces employeurs du privé. Ne sont reconnues que des instances nationales opérationnelles selon les critères de représentativité légalement fixés. En outre, il faut aménager pour ces salariés syndiqués la possibilité d’une défense dans les tribunaux des Prud’hommes auxquels nous n’avons pas accès.
Par conséquent, pour défendre de manière valide ses adhérents du site de Paris 8, SUD éducation Créteil a besoin de l’engagement fédéral de SUD éducation qui décide d’adhérer à l’Union Solidaires Nettoyage et de l’inscrire dans ses statuts fédéraux.
Tant sur les sites de l’enseignement supérieur que dans les collectivités territoriales, le recours au privé pour sous-traiter certaines missions, avec en tout premier lieu celles du nettoyage ou de la restauration, risque de prendre de l’ampleur, dans notre champ de syndicalisation. L’arsenal législatif qui l’autorise est prêt. Notre axe de lutte prioritaire est de l’interdire. Mais dans le même temps, les faits nous amènent à constater que sur le terrain, dans des secteurs clé de notre engagement syndical interprofessionnel et inter catégoriel, la démarcation entre le public et le privé déplace ses lignes. Il n’est pas incompatible de la combattre pied à pied et de favoriser, dans le même temps, une évolution de nos structurations pour faire face aux bouleversements à l’œuvre dans le monde professionnel et pour satisfaire aux besoins de la défense des salariés de notre champ de syndicalisation.SUD éducation combat pour la défense intégrale du service public d’éducation.
Dans le même temps, le congrès se prononce pour l’adhésion de la Fédération SUD éducation à l’Union Solidaires Nettoyage et pour l’ajout, dans les statuts fédéraux, d’un article qui l’autorise.
Mesure qui va permettre de mener à bien la défense des conditions de travail des salariés du nettoyage qui ont fait confiance à SUD éducation.
Droit et travail
La Fédération SUD éducation s’engage à mettre tout en œuvre pour que la législation la plus favorable relative au travail (le Code du Travail) s’applique.
Au sein de l’Éducation nationale, les règles relatives à la sécurité du personnel sont souvent bafouées avec comme conséquences : souffrance au travail, harcèlement, accidents, etc.
Devant l’ampleur du retard dans l’application des lois, la Fédération SUD éducation appelle tous ses syndicats à faire respecter des droits élémentaires :
1- Les visites médicales du travail :
En se référant au décret 82 – 453 du 28 mai 82, et au B.O. n° 37 du 2 octobre 2008, chacun doit l’obtenir, à condition de la demander – au chef de service (Principal, Proviseur, ou autres).
Chacun(e) doit au moins en avoir eu une, tous les 5 ans. Les personnels soumis à des risques particuliers (bruit, poussières, EPS, etc…) doivent avoir eu cette visite au moins tous les deux ans.
2- Les équipements de protection individuelle :
Pour les enseignants, les tenues de travail doivent être fournies gratuitement par l’employeur. À cette fourniture s’ajoutent le nettoyage et l’entretien (A. R.4323 – 95 du Code du Travail) qui doivent obligatoirement être effectués par l’établissement. Il faut en exiger l’application, si nécessaire par l’utilisation du cahier d’hygiène et sécurité.
Pour les élèves, les mêmes textes s’appliquent.
3- Le nettoyage et la ventilation des locaux de travail :
La responsabilité du nettoyage incombe aux établissements. Cet entretien doit être réalisé avec des moyens adaptés respectant la santé de chacun. Les poussières en suspension en raison de l’activité de l’atelier (bois, métal, amiante dans le passé etc…) sont la cause directe de pathologies invalidantes voire mortelles.
4- Cahier d’Hygiène et de Sécurité : la traçabilité doit être sans faille !
Généralisons l’utilisation des cahiers d’hygiène et de sécurité ! Opposons-nous à toute forme de pression visant à les supprimer (remplacement par des feuilles, ou cahiers d’entretien, etc ). Ces outils sont indispensables au travail des différentes Commissions d’Hygiène et de Sécurité (locales départementales, académiques et ministérielle) pour améliorer la prévention, réaliser un arbre des causes en cas d’accident, ester en justice.
5- Le risque routier :
Postes partagés : Dénonçons les emplois du temps ne respectant pas des temps de route suffisants.
Visites d’élèves en stage : dénonçons l’utilisation imposée des véhicules personnels. En cas d’accident grave, même en possession d’un ordre de mission, un enseignant pourrait ne pas être indemnisé ; cela dépendrait du contrat passé avec l’assureur. Un véhicule de service doit être mis à disposition.
6- Les risques psycho-sociaux :
Aucun personnel de l’Éducation, titulaire ou précaire, ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, notamment lors du recrutement, titularisation, formation, notation, discipline, promotion, affectation et mutation.
La Fédération SUD éducation s’engage à tout mettre en œuvre pour défendre le respect du droit et de la santé de chaque personnel dans les établissements d’enseignement et de recherche.
Pour une Union Syndicale Solidaires au plus près des adhérentEs de ses syndicats
Fonctionnement et développement de Solidaires : une double problématique
Qui de la poule ou de l’œuf… Il n’y aurait pas d’Union Syndicale Solidaires sans les syndicats qui y adhérent, mais que seraient les syndicats membres de Solidaires sans Solidaires ?
Du point de vue effectifs, l’inscription et le développement de Solidaires dans le paysage syndical sont liés au développement des syndicats qui la composent. Mais sans une affiliation interprofessionnelle, les syndicats membres de Solidaires seraient en grande difficulté existentielle. D’un point de vue strictement statutaire, une très large partie d’entre eux revendiquent la nécessité d’un engagement interprofessionnel. D’une manière plus générale, dans le paysage syndical actuel, en France et dans le monde, œuvrer à la recomposition syndicale autour d’un projet alternatif nécessite une véritable organisation inter- professionnelle. C’est encore plus vrai dans le secteur privé où des équipes syndicales cherchent à rejoindre (voire fonder) des syndicats de l’US Solidaires. Enfin, et plus concrètement, Solidaires c’est aussi des possibilités de fonctionnement indépendant (accès à des locaux, matériel bureautique…) pour un certain nombre de ses syndicats notamment dans les régions et/ou départements. C’est, entre autres, vrai pour SUD éducation.
Paradoxalement, cette interdépendance entre Solidaires et les syndicats qui la composent ne débouche pas forcément sur des choix d’engagement interpro clairs. La question interpro est rarement une priorité dans les débats internes des syndicats de l’Union Syndicale et l’investissement dans Solidaires se réduit bien souvent au « minimum syndical ». De fait, si la question de la lisibilité de Solidaires se pose en externe – il faut vraiment être un observateur averti de la vie syndicale pour savoir que Solidaires regroupe les syndicats SUD (ceux-là, on les connaît !) et plusieurs syndicats nationaux autonomes – elle se pose aussi en interne. Pour la très grande majorité des adhérentEs des syndicats membres de Solidaires, ils sont avant tout adhérentEs de leur syndicat, certainEs ne connaissent même pas l’organisation interpro à laquelle ils/elles appartiennent. Celles et ceux qui rejoignent nos syndicats souhaitent davantage s’inscrire dans un syndicalisme de lutte plutôt que de rejoindre une organisation effectivement interprofessionnelle.
Cette difficulté à exister n’est pas qu’une question d’appellation. Nommer l’US Solidaires, US SUD ou nommer tous les syndicats de l’US Solidaires, Solidaires (Solidaires Douanes par exemple) ne résoudra pas le problème (où est l’interpro à la CGT ?). Le développement de l’US Solidaires passe par le développement des syndicats qui la composent et dans le même temps le développement des syndicats qui la composent, ou qui voudraient la rejoindre, passe par le développement de l’US Solidaires. Cela justifie amplement que chaque syndicat consacre des moyens significatifs au fonctionnement de Solidaires. Mais construire et développer notre union syndicale demande aussi de permettre aux adhérentEs « de base » d’être directement impliqués dans l’interpro.
Où sont les adhérentEs de Solidaires ?
Par définition, Solidaires est une union syndicale, ce sont donc des organisations syndicales qui y adhérent. En l’état, le niveau de structuration de Solidaires n’est pas en relation directe avec les adhérentEs. On adhère à un SUD ou à un syndicat autonome membre de Solidaires mais pas à Solidaires. C’est le syndicat auquel on adhère, et/ou la fédération à laquelle on appartient, qui mandate ou qui délègue ses représentantEs dans les instances de Solidaires. Aujourd’hui c’est surtout au niveau national que cela se joue. Il est vrai qu’en parallèle, les Solidaires départementaux ou régionaux (que l’on appelle Solidaires locaux) se développent et gagnent en autonomie. Mais ces derniers fonctionnent sur la base de délégations ou de mandatements. Bref, Solidaires est une organisation syndicale de militantEs et non d’adhérentEs. Représenter son syndicat dans Solidaires nécessite une certaine maîtrise des pratiques syndicales. Seul un engagement militant peut y amener et, dans la quasi- totalité des cas, on se mettra au service de Solidaires après avoir assumé des responsabilités dans son syndicat.
Concrètement, aujourd’hui la question qui se pose est assez simple : quand et où unE adhérentE de SUD éducation va-t-il/elle rencontrer unE adhérentE de SUD rail ou de SUD Renault, et inversement, pour parler métiers, syndicat, stratégie, mobilisation ? En dehors des manifs *, les espaces de vie syndicale interprofessionnelle pour les adhérentEs sont limités à quelques Unions Interprofessionnelles Locales (appellation choisie dans le Nord/Pas-de-Calais, à ne pas confondre avec les Solidaires locaux structurés sur un plan départemental ou régional) aux commissions locales et nationales, aux stages locaux ou nationaux, aux quelques permanences locales. Si, par définition, l’adhésion à un syndicat est liée à un champ d’activité professionnelle, il est fondamental de développer le niveau d’organisation interpro local (ville, bassin d’emploi…) pour dépasser réellement une tendance au corporatisme induite par une structuration qui fait, pour le moment, de Solidaires un outil syndical que les adhérentEs de nos syndicats ont des difficultés à s’approprier.
Rapprocher de Solidaires les adhérentEs de ses syndicats pour renforcer et maîtriser au mieux notre engagement interprofessionnel lorsque c’est possible
Développer les Unions Interprofessionnelles Locales Solidaires (UIL) au niveau d’une commune ou d’un bassin d’emploi UIL, l’appellation a son importance. Y faire figurer le mot interprofessionnel dépasse la simple symbolique. Il est ici question de permettre aux adhérentEs des syndicats de Solidaires de s’organiser effectivement en interprofessionnel plus que de créer une structure locale à simple finalité repré- sentative. Comme le permet l’article 16 des statuts de Solidaires, l’UIL a vocation à développer l’identité inter- professionnelle de Solidaires dans le cadre d’une autonomie de fonctionnement. C’est assurément le lieu clé d’une véritable construction interprofessionnelle, puisque lieu de rencontre d’adhérentEs et non de syndicats ou de sections de syndicat.
Avec l’organisation actuelle de Solidaires, nous ne sommes pas à l’abri de ce que nous reprochons parfois à d’autres confédérations (et en particulier à la CGT) à savoir un décalage entre direction syndicale nationale et équipes syndicales de base. Le principe de la représentation par double délégation (on délègue dans son syndicat qui délègue pour Solidaires) ou par double mandatement (c’est déjà mieux) dans Solidaires limite son contrôle par la base. Si aujourd’hui, globalement, la stratégie et les positionnements de Solidaires au niveau national, cadrés par le dernier congrès, répondent aux attentes de la majorité des adhérentEs des syndicats de Solidaires, des questions restent ouvertes (l’unité syndicale jusqu’ où ?) Il est donc important que chaque adhérentE puisse se faire entendre dans les débats interpro et pas seulement par l’intermédiaire de son syndicat. D’une manière peut-être plus provocatrice, le fonctionnement actuel de Solidaires ne nous préserve pas d’une éventuelle dérive bureaucratique. Cette situation peut d’ailleurs expliquer une certaine prudence, si ce n’est carrément un frein, à l’engagement de syndicats (SUD éducation en fait partie) vis à vis de Solidaires. N’étant pas à une contradiction près dans Solidaires, se retrouvent alors côte à côte, dans cette attitude « frileuse », des syndicats qui reprochent à leur union interpro soit une insuffisance des pratiques démocratiques, soit un excès d’autonomie décisionnelle.
Développer et renforcer les UIL représente donc un enjeu de taille pour l’US Solidaires. Chacun des syndicats qui la composent doit s’engager dans ce sens. C’est ainsi que l’on donnera aux adhérentEs la possibilité de s’approprier l’union interpro, que l’on permettra un rapprochement entre nos syndiquéEs du privé et ceux/celles du public, que l’on établira une réelle base démocratique à Solidaires et que l’on amènera certains de ses syndicats à s’y investir plus.
Des UIL et des Comités régionaux ou départementaux parties prenantes de Solidaires.
Il n’est pas ici question de bouleverser l’organisation structurelle de Solidaires mais simplement de trouver un juste équilibre entre les niveaux national, départemental ou régional et local. Le dernier congrès de l’US Solidaires a d’ailleurs entrepris une réflexion qui devrait déboucher sur une participation plus affirmée des comités départementaux ou régionaux aux instances nationales de Solidaires. On ne peut que se satisfaire de cette évolution, mais elle sera d’autant plus légitime si des UIL se développent au sein des comités régionaux ou départementaux. Il ne s’agit pas d’un « toujours plus » mais bien de permettre, et de le reconnaître dans nos instances, une présence interpro au plus près du terrain, au plus près des luttes. À l’image des syndicats de Solidaires dans leurs champs professionnels respectifs, Solidaires doit exister en interpro dans l’organisation locale des mobilisations sociales.
Sans aller jusqu’à parler de « contre pouvoir », donner une voix délibérative aux comités régionaux ou départementaux dans Solidaires national et aux UIL dans les comités régionaux ou départementaux apportera un peu plus « d’horizontalité » à la structuration de Solidaires. La connexion avec la réalité du terrain étant une de nos priorités, elle doit aussi s’inscrire dans notre fonctionnement.
De la même façon, pour réduire le risque de bureaucratisation inhérente à toute forme de délégation et être en accord avec notre choix d’un militantisme de terrain, il serait souhaitable que le congrès de la Fédération SUD éducation réfléchisse aux modalités de son engagement dans l’union Interprofessionnelle Solidaires. Beaucoup de syndicats locaux SUD éducation, par le biais de nombreux militantEs, sont investis sur le terrain de l’interpro local et dans le fonctionnement des Solidaires locaux alors que dans le même temps, nous arrivons très difficilement à avoir une participation nationale dynamique et cohérente. Plutôt que d’opposer les deux niveaux d’engagement dans Solidaires, il s’agit d’améliorer l’articulation entre le niveau local et le niveau national. Dans ce sens, s’appuyer sur les militantEs SUD éducation investis dans l’interpro local permettrait un engagement plus cohérent de SUD éducation dans le fonctionnement des instances nationales (BN, Comité National, Commissions voire Secrétariat).
SUD éducation réaffirme sa volonté d’un engagement inter- professionnel effectif. Défendre les salariés du privé et du public avec ou sans papiers, lutter contre le chômage et la précarité, contribuer à l’auto-organisation des mobilisations sociales, œuvrer à une transformation sociale en rupture avec le modèle capitaliste, nécessite un outil syndical inter- professionnel alternatif fort. C’est en développant encore la structuration en interpro à sa base que Solidaires se donnera toutes les chances de relever ce défi.
NOTES
* Les manifs sont d’ailleurs des rendez-vous non négligeables dans une organisation qui prône un syndicalisme d’action et de lutte. C’est d’ailleurs lors des grandes mobilisations sociales de ces quinze dernières années (95, 2003, CPE) que Solidaires a franchi des paliers significatifs dans son développement.
Arrêtons la reproduction !
Un nouveau rapport de la HALDE (1) sur les stéréotypes et la discrimination dans les manuels scolaires vient de paraître fin 2008. Il vérifie une fois de plus que les outils de travail que nous utilisons, non seulement continuent à véhiculer les stéréotypes sexistes et sexuels, mais encore ne répercutent même pas les évolutions de la société en matière d’égalité de genre. Il s’agit donc pour nous enseignantEs de prendre conscience de cet état de fait, puis d’imaginer comment enrayer ces machines à reproduire.
Une volonté de changement proclamée
En 1981 a été créée une commission nationale de relecture des manuels scolaires. La Convention Internationale des Droits de l’Enfant (1989) veut « agir dans un esprit d’égalité entre les sexes », ce que recommande aussi le conseil de l’Europe. Le 29/07/2006 la Convention pour l’Égalité entre les filles et garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif déclare « inciter les professionnels de l’édition à renforcer la place des femmes dans les manuels scolaires et écarter les stéréotypes sexistes des supports pédagogiques ». C’est reconnaître que le manuel transmet un système de valeurs, une idéologie, une culture propres à nos sociétés. C’est vouloir aussi que le manuel n’ait plus une fonction de maintien de l’existant mais devienne un instrument au service du changement. Mais qu’en est-il de l’application de ces mesures ?
Des éditeurs incontrôlés
La Halde s’est intéressée d’une part à la place consacrée aux discriminations dans les manuels d’éducation civique, et d’autre part à la manière dont les manuels de plusieurs disciplines (2) les pratiquaient, à partir d’un corpus d’une trentaine de titres parmi les plus utilisés en collège et lycée, datant pour la plupart des années 2000 et surtout de
2005 – 2007. Ses conclusions montrent clairement un traitement différencié des filles dans l’échantillonnage des manuels de toutes les disciplines. La raison en est que les éditeurs, malgré les multiples recommandations, ont pour seule prescription de respecter les programmes scolaires que le ministère leur transmet. Une fois un manuel réalisé, aucune habilitation n’est nécessaire pour le commercialiser. Les valeurs véhiculées par notre société étant assez largement
« consensuelles », il n’est pas étonnant que les concepteurs des manuels les partagent. Il ne nous reste donc plus qu’à être circonspects dans nos choix au moment où les spécimens arrivent dans les établissements !
Des discriminations quantitatives
En 1979 et 1997 deux précédentes enquêtes (3) montraient l’absence des femmes dans les livres d’histoire ou de littérature et leur relégation dans la sphère domestique. Michelle Perrot et bien d’autres ont interrogé « les silences de l’histoire » et contribué à sortir les femmes de l’oubli. Il ne s’agit pas pour nous de chercher à tout prix une égalité numérique évidemment introuvable, mais tout simplement de vérifier dans les supports pédagogiques qu’ils tiennent compte que les femmes ont joué un rôle dans l’évolution de l’humanité.
Le monde entier préfère les hommes, notre société aussi : dans l’ensemble des exercices de mathématiques du corpus étudié (choisi en fonction de la fréquence d’usage), 70% des personnes citées portent des prénoms masculins, ce qui rapproche le comportement des concepteurs de manuels de celui des journalistes qui, rappelons-le, interrogent trois fois moins souvent les femmes et enquêtent trois fois moins souvent sur elles, sauf quand il s’agit du fameux « panier de la ménagère ». La représentation des femmes ne suit même pas l’évolution de leur place sociale et politique : dans les manuels étudiés, sur 1046 illustrations concernant des adultes en situation professionnelle, 341 seulement montrent des femmes au travail. En revanche dans l’iconographie consacrée à la sphère domestique, l’homme seul n’apparaît que dans 25% des cas (les 75% restants étant des femmes ou des familles). Dernier exemple : dans une manuel de français de seconde (Hatier 2006), les auteures de la littérature représentent moins de 10% des documents (35 sur 357), et Simone de Beauvoir est toujours… la femme de Jean-Paul Sartre, qui, lui, n’a pas besoin d’étiquetage conjugal pour exister. Comparons simplement, sans commentaire, tous ces chiffres avec une autre statistique féminine : 83% des nus des musées sont des nues…
Des traitements qualitatifs différentialistes
Les situations dans lesquelles apparaissent femmes et hommes dans ces livres scolaires perpétuent une vision très sexuée des rôles et des espaces. Comme dans les albums pour tout- petits où le Père Lapin porte la pipe et le journal et la Mère le tablier, comme dans l’univers enfantin qui délimite toujours la zone des jupes roses et celle des pantalons bleus ou kakis, les manuels assignent des rôles traditionnels aux femmes, les font volontiers apparaître en situation de ménage, cuisine, shopping, ou dans des métiers dévalorisés.
Comme dans la publicité, les femmes occupent toujours les espaces qui leur sont réservés, pendant que la domination masculine s’impose dans les zones de pouvoir publiques ou domestiques. Or représenter trois fois plus d’hommes dans la sphère productive ne correspond absolument pas à la réalité sociale actuelle. Dans le manuel d’éducation civique de 6e Grandir ensemble (Hatier 2005), dans le chapitre
« Qui travaille au collège ? », tous les postes d’autorité sont occupés par des hommes, et celui de 3e renforce aussi la sexualisation des professions. Comment avec de tels supports identitaires réussirons-nous à rééquilibrer les choix d’orientation des élèves, et encourager les minoritaires de genre potentielLEs à assumer leurs projets ? Dans le livre de mathématiques de 5e Phare (Hachette 2006), François collectionne les voitures miniatures et Joséphine les poupées (p.58). Cette ségrégation des activités s’accompagne parfois de l’assignation des filles à des activités futiles, par exemple dans le manuel d’anglais de 4e Step in (Hatier 2002), et à la réduction des femmes aux rôles d’icône, d’emblème, d’épouse, de mère, entourée d’enfants ou séductrice. Il est rarissime que les femmes soient montrées dans des contextes qui ne tiennent pas compte de leur appartenance de genre, et l’accent est mis sur la fragilité, la gentillesse, voire la niaiserie. Le seul domaine où les apparitions soient relativement égalitaires est celui de l’école.
Des manuels androcentrés et hétéronormés
Conformément aux habitudes discursives de notre société, les manuels continuent à assimiler le masculin à l’universel, à valider les termes de droits de l’Homme à majuscule et de LA femme au singulier, à ne pas féminiser la langue. Dans ce monde traditionnel qui ne cherche pas à transformer l’image, la place, les rôles des femmes et des hommes, une ouverture à la diversité des orientations sexuelles constituerait une hardiesse inouie. Homo et bi-sexualité n’existent pas dans les manuels scolaires, sauf indirectement, quand par exemple un livre de SES de terminale (Hatier 2007) montre des associations et des minorités, la Gay Pride en étant la manifestation la plus osée (la seule image d’une orientation sexuelle minoritaire sur 3097). Aucun livre d’histoire de 6e ne se risquerait à évoquer la liberté sexuelle des anciens Grecs, et seule la présence du Sida au programme de SVT contraint les auteurEs à lever le tabou, au risque de stigmatiser l’homosexualité comme propagatrice de l’épidémie, même si dans la réalité les relations hétérosexuelles en sont le principal vecteur. Dans le domaine de l’éducation sexuelle, l’omission est la règle, les livres scolaires en transmettent une vision très mécanique et médicale, et continuent à assener que la puberté est le moment où chaque sexe est immanquablement attiré par l’autre, exactement comme les publications extra-scolaires destinées aux adolescentEs du type « Les garçons expliqués aux filles » et « Les filles expliquées aux garçons ». Dans la totalité des livres de sciences, la procréation médicalement assistée n’est traitée que sous l’angle de l’infertilité du couple hétérosexuel, dans le cadre normatif de la famille nucléaire. Nos outils pédagogiques construisent et renforcent donc activement des schémas cognitifs hétéronormés, voire hétéro- sexistes, même si les bulletins officiels de l’Éducation nationale recommandent la vigilance à l’égard de l’homophobie.
Alors, que faire ?
Nous avons déjà insisté sur la nécessité de vigilance dans le choix des manuels. Mais aucun d’entre eux n’étant vraiment outil de transformation sociale, il nous faut peser sur ceux qui en sont responsables, c’est-à-dire les éditeurs et le ministère.
Les syndicats de la Fédération doivent donc engager une campagne dans leur direction pour obtenir :
Une réelle volonté politique d’application des textes existants.
Un comité de relecture avant édition destiné à éliminer les entorses à l’égalité.
Une apparition des femmes et des minorités dans tous les domaines et tous les contextes (politique, intellectuel, artistique, professionnel, domestique).
Une dénonciation des conditionnements sexués (jouets, couleurs, orientation, langue…) dans les programmes dès l’école primaire et pas seulement en SES.
Une disqualification des contrevérités sur les capacités physiques, créatrices, cognitives des femmes.
Une féminisation effective des noms de métiers.
Une remise en question de la conception scolaire de l’éducation sexuelle
Un module de formation pour les enseignantEs.
Il nous faut aussi rendre plus visibles les luttes féministes dans nos publications, et programmer des stages nationaux et locaux qui sensibilisent à l’emprise du genre et à la prégnance des stéréotypes dans le système éducatif,
Pour enfin ne plus être complices de la reproduction d’une société que par ailleurs nous combattons.
(1) Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité, qui, malgré des avis parfois contestables, fournit des don- nées utiles, et aui a commandé cette étude à l’Université Paul Verlaine de Metz
(2) Education civique, ECJS, Histoire-Géo, SES, Français, Anglais, SVT, Math
(3) Decroux-Masson, A. Papa lit et maman coud. Rignaud, S. et Richert, P. La représentation des hommes et des femmes dans les manuels scolaires. MEN
Précarité : Plateforme revendicative
La multiplication des corps et des statuts dans les fonctions publiques organisée par les gouvernements qui se sont succédés depuis des décennies a pour but la division des personnels par catégorie qui se traduit par la disparité des contrats de travail, des salaires et des indemnités et par des différences dans les obligations de service, la séparation des formations, etc. Ces divisions participent à la segmentation sociale du travail qui veut faire croire au caractère inéluctable de la concurrence entre individus comme moteur « naturel » de la vie sociale. Contre la gestion managériale actuelle des personnels des fonctions publiques, il est de la plus haute importance pour l’ensemble des personnels de renforcer leurs liens et leurs luttes autour de revendications claires : titularisation immédiate et sans conditions de concours ni de nationalité de toutEs les précaires, garantie d’emploi et du salaire, arrêt du recrutement de nouveaux/nouvelles précaires.
Titulaires et non-titulaires font le même travail. Aussi nous revendiquons un statut égal garantissant les mêmes droits pour toutes et tous. Aucun règlement de la question de la précarité ne peut en outre se faire sans la réintégration des personnels licenciés et la titularisation de toutes et tous, réintégration assortie de l’arrêt du recrutement de précaires. Ce dernier volet ne peut d’ailleurs être atteint que si la titularisation immédiate et sans conditions est obtenue. Il y a cohérence nécessaire entre les deux revendications. Remarquons que tous les syndicats qui refusent cette reven- dication refusent de fait – mais ne le disent pas – l’arrêt de tout recrutement de nouveaux précaires.
Pour ce qui est des fonctions publiques, ne pas reconnaître qu’unE précaire doit être titulariséE sans conditions relève de calculs catégoriels étroits et corporatistes contre lesquels nous nous battons chaque jour. L’unification des statuts de personnels est en cohérence avec la volonté de créer une école refusant le tri social pour les personnels mais aussi pour les élèves. La sélection scolaire n’est en effet rien d’autre que l’organisation dès le plus jeune âge de l’inégalité sociale.
En outre, la loi sur les 35h dans le privé et l’ARTT dans les fonctions publiques ont accentué la flexibilité, permettant au patronat et à l’État et aux collectivités territoriales de mettre en place l’annualisation des horaires qui va de pair avec l’individualisation salariale, sur la base d’un prétendu mérite et de promotion individuelle, s’assurant par là même, un puissant levier de division des personnels.
Quel que soit le travail effectué, quelles que soient les fonctions assignées aux personnels par l’État et les collectivités territoriales (enseignants, agents administratifs, techniques, ouvriers et de services, personnels de santé, vie scolaire…), toutes et tous concourent de façon égale au service public de l’Éducation. Il en est de même pour les personnels des autres services publics. La revendication du corps unique, qui se fonde sur le principe d’une égalité de tous et toutes, garantit une lutte efficace contre les attaques patronales.
Qu’entendons-nous par « corps unique » ? Il ne s’agit pas de faire disparaître les métiers mais de constater que les nécessaires compétences et connaissances pour exercer tel ou tel métier ne justifient en rien une hiérarchie des statuts et des salaires. Un corps unique doit permettre d’obtenir la garantie des emplois et des salaires que seul un statut (amélioré) d’agent de la Fonction Publique permettra. Nous nous prononçons aussi pour une réduction massive du temps de travail (sur la base de 32h tout de suite) pour toutes et tous, avec embauches compensatoires (création des postes statutaires correspondant dans les fonctions publiques), sans perte de salaire, sans annualisation et sans flexibilité. De même, nous combattons toutes les modalités d’évaluation des personnels visant à instaurer une hiérarchie entre les salariés eux-mêmes. L’instauration d’un corps unique serait un levier puissant pour contrer l’individualisation croissante.
Les reculs revendicatifs de certains collectifs de précaires encouragés par des opportunismes syndicaux montre que SUD éducation doit continuer à faire un travail d’argumentation et de conviction. SUD éducation continuera à susciter et soutenir les luttes des précaires sous toutes leurs formes en appuyant les combats qu’ils mènent. Il n’y a de victoire possible contre la précarité que s’il y a une solidarité de lutte de l’ensemble des secteurs du public et du privé contre la précarité.
Nous combattons tous les contrats et situations précaires quels qu’ils soient, CDI, CDD, CAE, CAV, AE, AP, vacataires, contractuels, auxiliaires, contrats d’apprentissage, stagiaires en alternance, chômeurs, étudiants salariés et boursiers. Nous combattons également le flicage des chômeurs, des RMIstes, avatars de la rationalisation du contrôle des populations.
Dans le privé, les travailleur-ses se battent pour l’embauche définitive des personnels en contrats à durée déterminée ou intérimaires qui sont licenciéEs. En soutenant activement ces mouvements, il s’agit d’insister sur la nécessité d’obtenir la garantie des emplois par la suppression des licenciements et la création d’un véritable statut garantissant la continuité de l’ensemble de leurs droits. Son financement doit être assuré collectivement par les employeurs.
C’est la même logique revendicative qui doit guider les combats dans les fonctions publiques. C’est une raison de plus de poser la question de la précarité à tous les niveaux du monde du travail, public comme privé. Ces revendications créeront les conditions d’une solidarité pour construire des actions intercatégorielles à partir de la défense des plus attaqués.
La lutte contre la précarité est au cœur de toutes les luttes. Dans la lignée de la Charte d’Amiens, notre syndicalisme doit lier des revendications immédiates à des revendications de transformation sociale. La construction de rapports de force sur le terrain, fondée sur une satisfaction successive des différents niveaux de revendications, permet l’amélioration des conditions de vie et de travail et participe à la transformation de la société.
Pour une direction collégiale des écoles
En guise d’introduction
Pourquoi une prise de position sur la structure des écoles primaires est-elle encore souhaitable, alors que notre idéal semble s’éloigner de jour en jour, de contre-réformes en attaques répétées ?
La commission « Quelle école ? » travaille déjà sur ce sujet. Notre contribution est complémentaire. Elle a pour but de pointer les problèmes de renforcement des hiérarchies, notamment dans le primaire.
Notre action syndicale, nos prises de position sont le reflet, ou devraient l’être, des buts à atteindre. Elles ont des visées immédiates,
mais aussi plus éloignées, de construction d’une autre société.
Parfois, à trop vouloir faire dans « l’unitaire à tout prix » ou dans l’efficacité, la rapidité, on ne réfléchit pas à ce que l’on engage, à ce que l’on signe. Puis, on a du mal à se sortir de situations quand on n’a pas été clairEs au départ sur nos intentions.
Nous ne devons pas avoir honte de nos idées, bien au contraire, nous devons montrer notre originalité par rapport aux syndicats réformistes. Le but n’est pas de se marginaliser encore plus ou de se mettre en dehors de toute action col- lective mais de mesurer si celle-ci va dans le sens que l’on souhaite ou pas et avoir les bons réflexes, mêmes rapides, le cas échéant.
Nos prises de position pour le fonctionnement de l’école sont le reflet de positions éthiques et politiques. Ce fonctionnement préfigure ce que l’on souhaite pour les entreprises, les services publics et la société en général.
En l’occurrence, sur les questions de direction, est-on pour la division entre dirigeantEs et exécutantEs que l’on fait voter de temps en temps ou participer à des choix insignifiants ? Ou pense-t-on que, sur un même lieu de travail, chacunE peut et doit participer à la prise de décision ainsi qu’aux responsabilités qui font qu’il ou elle s’engage pour le bien de toutes et tous ? Dé-responsabilisation allant souvent de pair avec désintérêt et même parfois nuisance et compétition, cette prise de responsabilité de toutes et tous est indispensable pour une transformation coopérative de l’école. Alors, si nous pensons que c’est possible et que cette forme auto- gestionnaire est ce vers quoi il faut tendre, nous vous proposons d’intégrer cette prise de position dans nos orientations et d’amener la réflexion sur les moyens d’y sensibiliser nos collègues et l’ensemble des personnels.
Encore d’actualité, la direction collégiale ?
À l’heure où l’on renforce le pouvoir des directeurs et directrices et où les pressions de l’administration sur les personnels se multiplient, nous devons renforcer notre combat anti- hiérarchique et avancer des idées alternatives.
Les récentes mesures prises au ministère vont renforcer le pouvoir des directeurs et des directrices sur les adjointEs.
Cela passe, entre autres, par :
la création des EPEP,
la possession d’une clef informatique avec accès réservé aux informations,
de plus en plus de responsabilités (projet d’école, calendriers, les relations aux familles, aux Mairies, les diverses évaluations, les fichiers dont base-élèves…),
l’existence de secrétaires EVS ou stagiaires,
la notation des personnels de service,
le recrutement et la fiche d’appréciation des EVS-AVS,
la possibilité d’autoriser ou pas des sorties.
…
Que remettons-nous en cause ?
Ce ne sont pas les collègues qui ont fait le choix de la direction, mais la fonction elle-même et ceux qui en abusent. C’est l’ensemble du système qui produit la caporalisation des directeurs et des directrices, infantilise les enseignantEs et les autres personnels. Cette organisation pyramidale nous dépossède de notre métier et modifie la vision que nous avons de l’école et des buts que nous lui assignons.
Ce sont toutes les atteintes aux décisions du conseil des maîtres, au travail d’équipe, au partage de l’information, aux choix non discutés et subis (les fonctions de chacunE, les choix d’organisation, les rapports aux familles, les droits des élèves…)
C’est le recours à la rémunération aux primes et aux heures sup qui va en augmentant, divise les personnels et casse les solidarités.
Le piège du soutien aux précaires sur la ligne des autres syndicats
Bien que nous soutenions les précaires et défendions leur titularisation sans condition, avec accès à la formation, il faut se démarquer de ceux qui souhaitent créer le métier de « secrétaire de direction ».
Les EVS-AVS sont des employés précaires, souvent considérés comme subalternes. Leur fragilité les contraint à accepter toutes sortes de tâches, y compris celles qui ne sont pas de leur ressort, pour garder leur emploi. On a vu ainsi des EVS remplacer des enseignantEs absentEs, surveiller les récréations, enregistrer des évaluations et même renseigner le fichier « Base-élèves ».
Nous devons être à leurs côtés pour la reconduction de leur emploi, l’obtention d’un statut, d’une formation et l’augmentation de leurs salaires.
SUD-éducation s’est opposé dès le début au protocole qui a permis l’embauche de précaires comme « aides pour exercer les fonctions de directeur ». L’école a besoin d’enseignantEs supplémentaires, documentalistes, enseignants spécialisés et personnels de santé. Nous devons appeler les directeurs et directrices à ne pas participer à l’embauche de nouveaux précaires.
Que proposons-nous ?
Comme nous sommes pour l’égalité des salaires et des statuts, contre la hiérarchie, nous devons réaffirmer nos choix en faveur d’une direction collégiale ou coopérative des écoles.
Voici les avantages de ce choix mis en avant par l’ICEM (pédagogie Freinet) qui l’expérimente dans ses équipes et le rédige ainsi dans ces travaux de 2007 :
La direction collégiale permet :
une responsabilisation de tous les acteurs et actrices de l’école,
le partage des responsabilités dévolues traditionnellement au seul directeur ou à la seule directrice,
le renforcement du rôle du conseil des maîtres et maîtresses (prise de décisions, prise d’initiatives…).
Par la dynamique et la concertation qu’elle instaure dans les équipes, elle facilite :
l’élaboration commune d’institutions et d’outils au sein de l’école, des cycles et des classes,
la cohérence et l’harmonisation des pratiques et des projets,
la co-formation (échanges, confrontation d’idées et de pratiques, réflexion, projets de recherches …),
des pratiques de recherche-action vers la réussite de l’école…
Elle s’appuie sur des dispositions adéquates :
une décharge de direction à disposition de l’équipe pédagogique et non du seul directeur ou de la seule directrice,
l’ indemnité de direction doit disparaître au profit d’une dotation en postes supplémentaires,
un conseil des maîtres et maîtresses hebdomadaire prenant toutes les décisions relatives à la vie de l’école et garant de celles-ci,
des temps d’animation pédagogique et de concertation pour travailler au niveau de l’équipe et confronter avec d’autres équipes,
une régulation du travail de l’équipe par l’analyse des pratiques.
Elle suppose une formation des enseignantEs au travail en équipe (organisation coopérative de l’école, gestion des conflits…).
Dans cette optique, il est indispensable :
de renforcer notre combat antihiérarchique. Cela passe par l’explication de ce que l’on veut atteindre et par le soutien aux équipes et collectifs qui vont dans ce sens,
de redire que le fonctionnement collégial existe et qu’il est possible de le faire vivre,
de mettre en œuvre une campagne de sensibilisation contre les EPEP, le renforcement des hiérarchies et la mise en avant d’alternatives comme la direction collégiale ou coopérative,
d’engager ce débat à tous les niveaux de l’école, également dans le second degré et à l’université.
Il est également indispensable d’engager ce débat à tous les niveaux de l’école, dans le second degré et à l’université.
En effet, nous constatons que les mêmes choix politiques s’appliquent dans toute l’éducation, sous la forme d’attaques sectorielles destinées à empêcher une riposte globale. À tous les niveaux, ils prétendent calquer le fonctionnement des établissements sur le fonctionnement de l’entreprise : sous couvert d’autonomie, il s’agit de mettre en concurrence les établissements, les services et les personnels, en même temps que ces derniers sont de plus en plus écartés des prises de décision. Les lois et les règlements mettant en place cette autonomie fallacieuse institutionnalisent la précarité et la dérégulation afin de laisser aux directions une grande marge de manœuvre, avec une main d’œuvre plus précaire et flexible. L’aboutissement logique de cette politique est la disparition du statut de fonctionnaire.
Il convient de nous réapproprier la notion d’autonomie dans un sens collégial et démocratique, en accord avec des cadres et des statuts nationaux, et de l’inclure dans nos projets militants d’éducation.
Pas de soumission au monde de l’entreprise par le biais de l’apprentissage en lycée professionnel
Il est indispensable que chacun d’entre nous devienne un individu à part entière conscient de ses responsabilités, conscient de son rôle social et ouvert sur le monde extérieur.
La formation professionnelle est dispensée aujourd’hui :
pour les élèves, en formation initiale sous statut scolaire assurée en Lycée Professionnel (L.P.), public ou privé ;
pour les apprentis, en apprentissage assuré principalement en entreprise par le patronat par le biais d’un Centre de Formation d’Apprentis (C.F.A.) public ou privé.
Le rôle premier d’une entreprise n’est pas de former mais de produire. Dans ce contexte, l’apprentissage a pour but premier de fournir une main d’œuvre immédiatement productive. Une entreprise se contentera généralement de transmettre un savoir correspondant à son équipement et à sa production. Elle formera donc des individus conformes à ses besoins.
Des statistiques de l’ANPE concernant la tenue dans l’emploi à 10 ans montrent que les élèves formés en lycée professionnel sont confortés dans leur emploi : ce qui n’est pas le cas des apprentis qui alimentent la masse des travailleurs précaires. L’apprentissage permet tous les excès : travail de nuit, journées trop longues, tâches ingrates…
Le patronat a intérêt à avoir des employés formatés et obéissants. C’est un mode de relations sociales qui infantilise plus qu’il n’éduque interdisant le regard critique sur l’activité professionnelle. L’apprenti n’est pas conduit à élargir ses connaissances sur la législation du travail qui pourrait lui apprendre ses droits, dans les domaines artistiques et culturels qui pourraient l’éloigner du travail, dans le domaine de l’économie qui pourrait lui faire comprendre le fonctionnement social, dans le domaine de la consommation qui pourrait en faire un consommateur averti réfléchissant avant d’acheter.
L’attrait de l’apprentissage sur les jeunes a des raisons multiples :
la rémunération, même si elle est faible et une source de revenu supplémentaire pour les familles ;
une certaine valorisation et le sentiment d’appartenir au monde des adultes ;
l’abandon d’un système scolaire dans lequel ils ne se sentent pas à l’aise,
une certaine valorisation et le sentiment d’appartenir au monde des adultes ;
la fuite des problèmes familiaux en se créant une illusion d’autonomie.
Mais malheureusement, l’apprenti n’acquiert pas les connaissances suffisantes lui permettant de changer de condition dans le futur et d’évoluer au cours de sa vie.
Le patronat y trouve :
une main‑d’œuvre sous-payée, docile, respectueuse de l’autorité, sans exigence, directement rentable ;
une main d’œuvre ouvrant droit à des indemnités importantes et des exonérations de cotisations sociales et de taxes ;
une main d’œuvre jeune souvent inconsciente des dangers professionnels ;
et la mainmise sur la formation professionnelle pour des raisons idéologiques.
L’autorisation récente d’avoir jusqu’à deux apprentis par tuteur, assure parfois un fonctionnement avec une majorité d’apprentis.
L’État y trouve :
des économies financières immédiates (moins de fonctionnaires) mais un coût social élevé engendré par le chômage !
un désengagement de ses missions d’éducation augmentant la reproduction d’un schéma dans lequel l’as- censeur est en panne ;
la poursuite de la mise en place d’une économique libérale.
Quant aux Régions :
elles interviennent dans l’élaboration de la carte des formations ;
en cas d’apprentissage, elles peuvent être les seuls maîtres des décisions.
Cette idéologie libérale n’est pas libératrice. L’apprentissage n’est pas une formation d’avenir mais une servitude d’aujourd’hui.
Si une certaine forme d’apprentissage peut s’avérer nécessaire comme solution palliative pour des jeunes en rupture scolaire, SUD éducation doit s’opposer à la soumission de l’ensemble d’une classe d’âge à ce type de formation directement soumise au patronat.
La tentative de généralisation de l’apprentissage(en l’intro- duisant massivement en LP) par l’intermédiaire des CFA publics ne correspond-elle pas à la volonté du patronat de contrôler et de donc formater à ses besoins l’ensemble de la formation professionnelle.
SUD éducation doit en conséquence soutenir la formation professionnelle sous statut scolaire, seule garante de la prise en compte de l’ensemble d’une classe d’âge en tant qu’individu et citoyen.
Contre le lycée des métiers
Le label « lycée des métiers » institué par Jean-Luc Mélenchon en 2001 est délivré aux établissements qui se conforment à un ensemble de critères :
offre de formation, construite autour d’un ensemble cohérent de métiers ;
accueil de publics de statuts différents : élèves en formation initiale, adultes en formation continue, apprentis et étudiants en BTS ;
offre de services de validation des acquis de l’expérience ;
existence de partenariats avec les milieux professionnels….
Selon le décret, ce label doit correspondre à une démarche de qualité. Où la constatons-nous ?
La finalité de cette réforme est limpide. Il s’agit de regrouper des moyens matériels et d’encadrement dans un même lieu afin d’assurer l’éventail des formations initiales et continues d’un même corps de métier, le but étant de les adapter aux besoins du bassin local d’emploi et d’engendrer une économie. Mais la rentabilité peut elle être un objectif quand notre mission est d’amener une classe d’âge à un niveau d’instruction satisfaisant pour en faire des individus libres et autonomes. Du coup, les autres filières de l’établissement seront très certainement menacées. Aussi, le lycée des métiers accroît la discrimination géographique dans l’offre des formations.
De plus, on ne peut pas s’empêcher de s’interroger sur le devenir des lycées non labellisés ou qui ne rempliront pas les conditions de labellisation. Le lycée des métiers ne peut donc qu’accentuer la concurrence entre établissements et institutionnaliser un système d’éducation à plusieurs vitesses.
Par ailleurs, en réunissant dans un même lieu d’enseignement formation initiale, formation continue et surtout apprentissage renforce l’idée que l’enseignement général et professionnel théorique dans l’obtention d’un diplôme professionnel n’est plus une priorité. En effet, le lycée des métiers sera davantage une structure dans laquelle on viendra faire valider des acquis professionnels (VAE), suivre une formation accélérée ou par alternance qu’un lieu d’éducation du citoyen, d’ouverture vers les cultures techniques et générales. Une telle dérive de l’enseignement professionnel est bien de répondre aux exigences du marché : former une main d’œuvre opérationnelle dans l’immédiat.
Le lycée professionnel n’a pas pour vocation à devenir le centre de formation des entreprises et encore moins leur bureau de recrutement.
Pour les raisons évoquées ci-dessus, la Fédération SUD éducation condamne la réforme des lycées des métiers. Mais parallèlement, nous défendons et revendiquons une formation professionnelle initiale valorisante qui permettra au jeune non seulement d’acquérir une qualification professionnelle mais encore la culture générale nécessaire à son épanouissement. Cette revendication s’inscrit dans notre volonté syndicale : une autre école dans une autre société.
Les réductions de moyens, dévaluation des diplômes en lycée professionnel
La Fédération SUD éducation dénonce le saccage du service public d’éducation.
C’est le cas des réformes successives appliquées en lycée professionnel et particulièrement celles en cours depuis 1985.
Ce système permettait aux élèves d’avoir des diplômes reconnus nationalement par des Conventions Collectives (acquis de 1968). Cela a beaucoup contribué à la promotion de jeunes notamment de ceux issus de la classe ouvrière.
En 1985, la réforme instituant les baccalauréats professionnels a transformé le fonctionnement du Lycée Professionnel :
les moyens ont été diminués fortement : horaires planchers en CAP, l’élève passe les épreuves avec un an et demi de formation contre trois ans antérieurement. Le niveau de formation ne peut être le même ;
l’examen national terminal est progressivement remplacé par les Contrôles en Cours de Formation avec des arguments plus ou moins fallacieux comme la responsabilisation des enseignants. Des conseillers pédagogiques ont sévi dans les lycées pour faire connaître les réformes successives quand ce n’étaient pas les inspecteurs ;
les programmes-progressions sont cassés. Les programmes ne peuvent plus être traités suite à la diminution du nombre d’heures. Des référentiels ont été institués dans les disciplines professionnelles, organisés en capacités, compétences et savoir-faire. Les enseignants sont censés amener les élèves à découvrir des méthodes d’apprentissage (utilisation des machines-outils, par exemple). Le ministre a baissé les coûts de formation. Le niveau d’exigences continue de baisser dans tous les enseignements.
En 2008, pour réduire le nombre des enseignants, la réforme des baccalauréats professionnels en 3 ans a été mise en place pour permettre de supprimer encore plus de moyens :
les élèves de lycée professionnel, souvent en difficulté, voient leur possibilité de réussite diminuer. Ils ’auront plus que trois ans au lieu de quatre pour accéder au baccalauréat professionnel ;
le ministère impose aux enseignants la création de leurs propres programmes locaux ou académiques pour rentrer dans un parcours de trois ans. Et cela sans avis des Commissions Professionnelles Consultatives qui voient leur rôle bafoué ;
les diplômes perdant ainsi toute leur valeur nationale, les nouveaux textes sont modifiés : les seuils d’accueil des diplômes vont disparaître des Conventions collectives. Le Smic devient la règle pour tous les jeunes diplômés ou non ;
le transfert des formations au privé aggrave la situation : le nombre de sections publiques fermées et le nombre de celles ouvertes dans l’enseignement privé montrent la direction prise. L’augmentation d’ouvertures de sections d’apprentissage en est le triste corollaire.
Loin d’avancer vers un enseignement polyculturel pour tous, les réformes successives du secondaire et particulièrement celle du lycée professionnel, contribuent à enfermer chaque élève dans sa voie, à le spécialiser dans un domaine réduit de son activité, calibré selon les besoins locaux du patronat.
La Fédération SUD éducation :
refuse cette marchandisation des biens et des services faisant de l’école une marchandise destinée à faire du profit ;
exige que les moyens supprimés soient restitués et que de nouveaux moyens soient attribués pour l’amélioration des conditions de travail des lycéens et des personnels ;
revendique des diplômes nationaux.
Enseignement professionnel, un élément à part entière de la formation pluri-culturelle
1) Un état des lieux peu favorable à l’image de l’enseignement professionnel
A) Qui dit enseignement professionnel, dit voie professionnelle de l’enseignement secondaire
Spontanément, lorsque l’on évoque l’enseignement professionnel on pense aux diplômes préparés dans les lycées professionnels (CAP, BEP, Bac Pro) mais pas à ceux préparés dans le post bac (BTS, DUT, Diplômes d’état…) et encore moins aux formations longues de l’enseignement supérieur pourtant professionnalisantes (écoles d’ingénieur, fac de médecine, IUFM pour n’en citer que quelques unes). Ce constat est le premier signe d’une forme de marginalisation de l’enseignement professionnel cantonné à une voie d’étude axée sur un contenu manuel, pratique et débouchant sur des qualifications de bas niveau pour les secteurs de l’industrie et des services. Cette perception dénaturée de la notion d’enseignement professionnel correspond pourtant à une réalité bien entretenue du système éducatif actuel intégrée à la fois par celles et ceux qui la vivent, et à la fois par celles et ceux qui y préparent. La voie professionnelle secondaire accueille en grande majorité des élèves dont les résultats ne leur ont pas ouvert les portes de l’enseignement général et technologique* et prépare ces élèves à un monde du travail où ils occuperont les tâches d’exécution les plus simples et les plus répétitives avec à la clé bas salaires, précarité, exploitation.
*le second cycle de l’enseignement secondaire propose trois voies d’études : la voie générale, la voie technologique et la voie professionnelle. La distinction entre l’appellation technologique et professionnelle – en elle même anachronique (n’y a‑t-il pas de la technologie dans tout enseignement professionnel ?) – contribue à la reproduction d’un modèle sociétal pyramidal basé sur la hiérarchie professionnelle.
B) La voie professionnelle du second degré : l’école du tri social dans toute sa splendeur
a) une voie de relégation
Des élèves en difficulté
Si actuellement plus d’un tiers des élèves sortant du collège se dirige vers la voie professionnelle, encore très majoritairement en lycée professionnel, cette orientation est bien souvent ressentie comme la conséquence de résultats scolaires insuf- fisants au collège. Effectivement, très rares sont les « bons élèves » qui choisissent la préparation d’un CAP, d’un BEP ou d’un Bac Pro, et même s’ils expriment goût ou intérêt pour tel ou tel de ces diplômes et des métiers qui en découlent, les équipes éducatives mettront en œuvre toute leur force de persuasion pour les convaincre de choisir une seconde générale et technologique.
Une orientation subie
D’autre part, pour une partie non négligeable de celles et ceux qui intègrent les formations professionnelles, cette orientation sera vécue comme subie plutôt que choisie.
Certaines spécialités professionnelles, perçues comme les plus prestigieuses ou plus simplement très demandées par les élèves de troisième, ne peuvent être obtenues qu’après d’importantes sélections.
Un monde du travail impitoyable.
Malgré des équipes de professeurs à l’écoute, malgré le réel intérêt de nombreux élèves pour les savoir-faire techniques qui leur sont transmis, ces jeunes sont rapidement confrontés aux dures réalités du monde du travail. Faible considération en terme de revenu et de conditions de travail, précarité, chômage, pénibilité, les ouvriers et les employés connaissent en effet un quotidien professionnel bien loin de l’idéal épanouissant de celui qui exerce un métier qui lui plaît.
b) une voie d’étude sous la coupe de la loi des patrons
remise en question du diplôme national
1991 est une date clé dans l’évolution récente de l’enseignement professionnel. Une loi est en effet votée qui permet aux branches professionnelles (fédérations patronales) de délivrer des diplômes : les CQP (certificat de qualification profes- sionnelle). Ces certificats valident des savoirs directement opérationnels et évacuent complètement les connaissances générales. Ils ne font l’objet d’aucune réglementation nationale et sont conçus pour répondre aux exigences particulières d’une entreprise en terme de maîtrise d’une technique ou d’un produit. C’est une première brèche ouverte dans le monopole de l’état pour la délivrance des diplômes professionnels durement acquis au début du vingtième siècle. C’est la remise en question de la standardisation des diplômes qui permet d’en accroître le domaine de validité. Une nouvelle étape sera franchie dans ce processus de démantèlement en
2001 avec l’adoption de la loi de modernisation sociale qui permet à tout salarié qui peut justifier de trois années d’expérience dans tout domaine d’activité d’être dispensé de la totalité de la formation et des épreuves d’examen pour obtenir un diplôme professionnel. La VAE (validation des acquis d’expérience) permet la certification sans formation. Ce faisant, elle met en cause l’existence de la formation même si elle permet de valider à bon droit dans l’état actuel des choses, les savoir-faire acquis pendant les années de travail professionnel.
alternance plutôt que formation initiale
Le développement et l’incitation à développer l’apprentissage (contrat de travail permettant de suivre une formation diplômante) et les contrats de professionnalisation se constatent au sein même de l’éducation nationale avec la création de CFA (centres de formation d’apprentis) académiques et d’UFA (unités de formation d’apprentis) dans les lycées professionnels publics. La voie professionnelle est de plus en plus délaissée par l’éducation nationale. Cette stratégie marque clairement la volonté d’utiliser l’école pour répondre à la demande récurrente du patronat de gérer la formation professionnelle par le biais de la formation en entreprise. Rentabilité à court terme, formatage, il s’agit bien de favoriser une formation à l’emploi aux dépens d’une formation à un métier ou à une famille de métiers.
2) Deux niveaux de revendication
A) Dans le système actuel, défendre un enseignement professionnel de qualité (dans le second degré) dans l’éducation nationale
a) Défendre une mission de formation à l’autonomie
Étudier
Le lycée professionnel est le seul lieu qui permet d’associer enseignement professionnel et enseignement général pour apporter aux lycéens autonomie et esprit critique dans la construction de leur carrière professionnelle. Savoir faire technique, ouverture d’esprit, connaissance objective du monde du travail doivent contribuer à former des jeunes prêts à affronter la vie active avec les outils pour en être les propres acteurs et non simplement des exécutants robotisés.
Sans cloison
La voie professionnelle ne doit pas être étanche. Des passerelles sont à développer, dans les deux sens, avec la voie générale et technologique. Cela passe par plus d’enseignement général dans les filières professionnelles, comme la philosophie par exemple.
Pour accéder à un monde du travail rééquilibré Défendre un enseignement professionnel de qualité c’est aussi et surtout militer pour la revalorisation sociale des emplois d’ouvrier, d’employé, de technicien. Défendre un enseignement professionnel de qualité c’est donc s’engager dans un mouvement syndical interprofessionnel qui lutte pour une meilleure répartition des richesses, pour la garantie des droits sociaux, pour la démocratisation de l’entreprise et contre l’aliénation au travail.
b) Refuser les dérives en cours
Non à la généralisation du Bac Pro en 3 ans
C’est à la suite d’une commande de l’UIMM (syndicat patronal de la branche de la métallurgie, adhérent du MEDEF) qu’est expérimenté à partir de 2000 le Bac Pro en 3 ans. En passe d’être systématisé aujourd’hui, le bac pro 3 ans s’accompagne de la suppression des BEP, des classes passerelles prévues vers le bac technologique et représente une menace à moyen terme sur ces mêmes bacs technologiques. Cette réduction du temps de formation est une attaque délibérée contre une voie d’étude qui veut se donner le temps, avec des méthodes adaptées, de réconcilier avec l’école des élèves marqués par l’échec scolaire et souvent en rupture avec l’institution scolaire.
Il est ici important de dire que nous refusons la généralisation du Bac Pro en 3 ans, mais non, dans certains cas, la possibilité de préparer un bac pro en trois ans ou en deux ans (classes passerelles après une seconde générale et technologique, changement de spécialités après une première formation professionnelle…).
Non à l’apprentissage
Apprendre un métier d’une autre manière, dans le cadre d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation au sein même d’une entreprise, peut attirer certains élèves qui y verront une manière de sortir d’une école qu’ils rejettent (et qui les rejette), de se former sur le terrain, de se donner plus de chance de trouver un emploi et enfin d’accéder à une rémunération financière (de 20% à 80% du SMIC selon le niveau de formation et l’âge). La réalité est bien autre. La formation par apprentissage dénature l’enseignement professionnel : moins de temps pour la formation générale et technologique et de fait une formation professionnelle moins polyvalente puisque limitée à la seule activité d’une entreprise. La formation par apprentissage, tout au moins à moyen terme, ne favorise pas l’accès à l’emploi. La formation par apprentissage n’est pas la solution pour remédier à l’échec scolaire, c’est l’école elle même qui doit apporter des réponses à ces problèmes. Enfin, dans la mesure où les bourses d’études seraient revalorisées et où les stages en entreprises en cours de formation initiale seraient rémunérés, la formation par apprentissage perdrait de son intérêt pour des jeunes en recherche de revenus propres.
Non au lycée des métiers et au tout CCF (contrôle en cours de formation)
Le lycée des métiers est encore une fois un pont jeté entre l’enseignement professionnel et la formation d’entreprise. Autonomie accrue des établissements, spécialisation professionnelle à outrance, différents statuts pour les jeunes en formation (scolaire, apprenti), le lycée des métiers va à l’encontre d’un enseignement qui suscite les échanges, les passerelles, la mixité professionnelle et donc sociale, la coopération.
Le lycée des métiers et son corollaire le CCF est une menace pour les diplômes nationaux dont l’existence est pourtant fondamentale en terme de qualification professionnelle.
c) Revendiquer de véritables moyens
La voie professionnelle coûte cher mais c’est un élément clé du système éducatif. Il est important d’y consacrer les moyens nécessaires à la fois en direction des lycéens quant à leur vie quotidienne et en direction des établissements pour y développer un enseignement de qualité dans le cadre de l’éducation nationale.
Concernant les lycéens, il est nécessaire de revaloriser les bourses d’études en terme de montant et en terme de public concerné : plus de boursiers et des bourses plus élevées. Il est aussi déterminant de rémunérer les stages en entreprise (en gardant l’appellation stage plutôt que période de formation en entreprise plus vécue comme formation à l’entreprise).
Concernant l’enseignement, il est vital, non seulement de récupérer les postes supprimés, mais aussi d’en créer. L’enjeu est de permettre la mise en place d’une pédagogie adaptée pour accompagner au mieux des élèves en attente d’une autre scolarité que celle du collège.
B) Dans la perspective de l’école que nous voulons
a)Une autre école dans/pour une autre société
Il n’est pas question ici d’avancer des positions tranchées mais de lancer des pistes de réflexion, peut-être même proposer quelques cadrages, pour le grand chantier en cours dans notre organisation concernant la définition de l’école que nous voulons. Les questionnements autour de l’enseignement professionnel permettent d’ailleurs d’illustrer très concrètement les grands principes qui mènent notre réflexion sur ce sujet.
Une autre école, une autre société. Un projet d’école radicalement alternatif ne peut se concevoir en dehors d’un modèle de société radicalement différent du modèle capitaliste. Les constats développés dans ce texte montrent à quel point l’enseignement professionnel est au cœur de ce postulat. L’enseignement professionnel ne changera que lorsque le monde du travail changera. Néanmoins, et c’est bien entendu valable pour l’école en général, faire évoluer l’enseignement professionnel peut aussi contribuer à faire évoluer le monde du travail.
Un certain nombre de textes autour de la question « Quelle école ? » ont déjà été produits. Nous nous référerons ici à trois d’entre eux soumis au IVème congrès de notre Fédération et adopté par ce même congrès : Contre le tri social dans une école sécuritaire, Contre l’égalité des chances, pour l’égalité des droits et Une commission Quelle école. Ces textes balisent les fondements de l’école à laquelle nous aspirons. Sans aller jusqu’à un idéal qui serait peut-être une société où l’école n’a pas de raison d’être, nous savons quelle est l’école dont nous ne voulons pas et nous savons sur quels principes nous appuyer pour l’école dont nous voulons. Nous ne voulons pas d’une école libérale, sécuritaire et réactionnaire*, une école qui renforce les déterminismes sociaux, qui trie, sélectionne, une école qui formate, une école de la concurrence, des filières… Nous voulons une école égalitaire, solidaire qui développe la coopération. Nous voulons une école laïque, émancipatrice… qui forme des individus libres et autonomes, aptes à comprendre le monde qui les entoure, à agir pour le transformer. Nous voulons une école, lieu de formation et de socialisation des jeunes, organisés en groupes socialement, culturellement et scolairement hétérogènes, pour permettre à chacun l’apprentissage de la vie démocratique, de la prise de responsabilité, et la découverte des savoirs généraux, techno- logiques et professionnels. Dans cette perspective, l’école doit garantir à toutes et à tous le même droit à l’instruction, à l’éducation, à une formation polytechnique jusque 18 ans (culture polyvalente et polytechnique jusqu’à 18 ans, dans le texte Tri social…) avec une progression adaptée à chaque individu (une école unique ne saurait être uniforme…). Sans remettre en question la philosophie générale de ces principes, il nous apparaît important de pointer au moins une contra- diction (comment donner une limite d’âge, 18 ans, tout en reconnaissant les différences de chaque individu dans l’accès à la connaissance et la nécessité d’une école non uniforme ?) et une formulation qui prête à confusion (que représente une formation polytechnique ou même, bien qu’on se rapproche plus du type de formation revendiqué, une culture polyvalente et polytechnique ?).
* en italique, extraits des trois textes précités
b) Une formation pluriculturelle jusqu’à l’autonomie décisionnelle de l’élève
Les définitions des termes « technique », « technologique », « professionnel » montrent des points de rencontre si ce n’est de fortes similitudes. Néanmoins ils s’inscrivent tous les trois dans la notion de culture. C’est pourquoi l’expression pluriculturelle semble plus adaptée au projet d’école que nous défendons. Une formation pluriculturelle c’est une formation où se côtoient culture générale, culture technologique et culture professionnelle. On considèrera ici la culture technologique comme l’étude des techniques, dans le sens connaissance des applications d’une science, et la culture professionnelle comme d’une part l’exploration des secteurs d’activité et d’autre part la découverte des techniques liées à la pratique d’un métier ou d’une famille de métiers.
Pourquoi donner une limite en âge à cette formation pluri- culturelle ? Cet enseignement a vocation à apporter aux jeunes des savoirs qui leur permettront d’affiner leur formation en toute autonomie en fonction d’intérêts personnels mais aussi en perspective d’un rôle à jouer dans la société. Laissons donc une marge de manœuvre et permettons aux jeunes de prendre part à la décision de passer à un autre type de formation. Il est ici plus important de mesurer les capacités à assumer une autonomie décisionnelle que de dresser un bilan des acquis.
c) Un enseignement professionnel en aval d’une formation polyculturelle et en amont d’un modèle social sans hiérarchie des métiers
D’une culture professionnelle à un enseignement professionnel.
Après la formation pluriculturelle, il doit être possible de choisir de suivre un enseignement professionnel. Il sera alors question de l’étude approfondie des techniques liées à l’exercice d’un métier ou aux spécificités d’une famille de métiers. Cet enseignement ne sera en aucun cas cloisonnant. Il pourra être débuté à différents niveaux, immédiatement après la formation pluriculturelle ou après une formation générale approfondie, selon les intérêts de chacun mais selon aussi le niveau d’exigence de l’enseignement professionnel envisagé en terme de culture générale. Enfin, cet enseignement ne marquera pas forcément la fin d’un parcours de formation. Il pourra être suivi d’une nouvelle formation de culture générale ou d’un autre enseignement professionnel.
Le jeune en formation considéré comme un acteur d’une société sans division sociale du travail.
Enseignement professionnel et enseignement général, post formation pluriculturelle, doivent être considérés comme une étape de l’insertion sociale. À ce titre les jeunes qui suivent ces formations doivent bénéficier d’un revenu d’autonomie. C’est la première condition pour envisager une organisation sociale basée sur la solidarité, la coopération et l’égalité des droits. C’est aussi une étape importante dans la construction d’une société qui ne sera pas hiérarchisée par l’environnement socio-économique.
L’enseignement professionnel a toute sa place dans l’école que nous voulons
Si, à court terme, il est fondamental que l’enseignement professionnel reste dans le giron de l’éducation nationale c’est bien entendu pour éviter à toute une population scolaire d’être confrontée plus rapidement, sans les outils de défense nécessaires, à une société hyper hiérarchisée sous le contrôle de puissances financières qui bannissent toute solidarité. Mais pour toutes celles et tous ceux qui aspirent à une autre école, l’enseignement professionnel d’aujourd’hui et l’inventivité de ses personnels enseignants doivent aussi, au même titre que toutes les expériences de pédagogie alternative, être une source d’inspiration dans la recherche d’un autre regard sur l’élève et en particulier sur l’élève qui rencontre des difficultés dans sa scolarité.
Enfin, que ce soit sous un angle exploratoire dans le cadre d’une formation pluriculturelle, ou que ce soit dans le cadre de l’apprentissage de techniques liées à la pratique d’un métier, l’enseignement professionnel doit rester, dans notre projet d’une autre école, un élément à part entière et reconnu de la formation générale. C’est ainsi que ce projet pourra contribuer à la pérennisation d’une autre société.
Le lycée : passer de lamassification à la démocratisation. Quelle orientation syndicale ?
1. Une massification ou une démocratisation quantitative indéniable.
La période 1985/1995 est le moment historique où s’est effectué en France la massification du secondaire avec un taux de bachelier qui a plus que doublé, passant de 30 à 63% d’une classe d’âge. Depuis la loi de 1989, l’accès des enfants des milieux populaires dans les lycées généraux est devenu une réalité et leur accès à l’enseignement supérieur à été multiplié par 3,5 pour les ouvriers contre 2,2 pour toutes les CSP. Cette massification s’explique bien sûr par les besoins d’une économie qui a continué à se tertiariser mais aussi par l’utilisation du lycée par les gouvernements depuis Jospin pour freiner le chômage de masse en retardant l’entrée précoce des jeunes sur le marché du travail à la fin des années 80.
Officiellement la loi Fillon de 2005 en maintenant l’objectif de 80% au niveau du bac et en fixant l’objectif de 50% d’une classe d’âge avec un diplôme du supérieur entérine cette orientation, surtout depuis le recul sur l’apprentissage junior. Mais depuis 20 ans le système ne parvient plus à augmenter le pourcentage d’une classe d’âge au niveau du Bac, ce qui témoigne des limites du système actuel et des contradictions entre la politique affichée et celle réellement suivie. En effet il existe une grande disparité entre ces chiffres nationaux et réalités locales des quartiers populaires. Enfin la domination s’est retransposée au sein du lycée avec les trois voies et les filières de la voie générale qui accueillent en grande majorité des public aux origines sociales différentes.
Lors de la session 2007, 68% d’une tranche d’âge a atteint le niveau du baccalauréat et 63,6% d’une génération a obtenu le diplôme. Parmi les diplômés : 34,3% d’une génération ont obtenu un bac général, 16,7% un bac technologique,
12,6% un bac professionnel. Sur l’ensemble des diplômés,
54% ont obtenu le Bac général, 26% le Bac technologique et 20% le Bac professionnel.
2. L’échec d’une démocratisation qualitative
La démocratisation est en fait ségrégative dans le sens où l’accroissement des taux de scolarité par âge est associé à une augmentation des écarts sociaux d’accès aux filières considérées. Les chiffres du baccalauréat 2008 soulignent que près de la moitié des lauréats l’est d’un Bac techno- logique ou professionnel qui recrutent principalement dans les catégories du prolétariat actuel.
Cet aspect est renforcé dans les lycées des quartiers populaires par une ségrégation spatiale selon l’aire sociologique de recrutement des lycées. La suppression de la carte scolaire depuis la rentrée 2008 accentue encore cette tendance. Ainsi l’avenir dans le supérieur est plus difficile pour une majorité de ces nouveaux lycéens. Le recul de la proportion de fils d’ouvriers et d’employés dans les classes préparatoires aux grandes écoles en est aussi l’illustration.
Ces limites de la démocratisation comme à l’autre extrémité du système scolaire, les sorties du système sans qualification, sont utilisées pour s’attaquer au service public. Il faut les dénoncer car le système organise cet état de fait en adéquation avec une économie qui a aussi besoin d’un volant de main d’œuvre peu qualifiée et de chômeurs pour précariser une large partie des futurs salariés. C’est un aspect de la réforme du bac pro en 3 ans au lieu de 4 qui compromet l’obtention d’un diplôme par les élèves les plus fragiles comme du projet de réforme des lycées du gouvernement. Le gouvernement veut revenir sur l’enseignement secondaire pour tous mais ne peut le faire frontalement tant les familles sont attachées à la massification et à l’espoir d’une certaine « réussite » par l’École. Le choix semble depuis de nombreuses années de poursuivre une scolarisation de masse mais en changeant la qualité de l’enseignement.
Proposer aussi une autre politique c’est trouver les moyens de conserver des contenus exigeants pour tous, au contraire d’un élitisme « républicain » médiatisé qui ne touche qu’une frange limitée des classes populaires. (Bourse au mérite, partenariat exclusif avec des grandes écoles au détriment des universités, lycées expérimentaux Science PO…). La discrimination positive n’est pas l’égalité.
Le chômage serait dû à un soi-disant manque de l’institution scolaire. L’école n’est pas assez près des entreprises. Les stages en collège doivent être fait de préférence dans le privé. Face à cette apologie des bienfaits du « privé » il faut rappeler sans cesse que plus les élèves ont une qualification élevée, plus il leur est facile de trouver un travail.
Le Baccalauréat, en tant que premier diplôme universitaire, doit aussi faire l’objet d’un débat. Autant il semble important que celui-ci conserve sa valeur nationale, autant on ne peut nier le fait que selon l’endroit où on l’a passé il n’a pas complètement la même valeur. En effet, les étudiants provenant de classes socioprofessionnelles défavorisées ont plus de difficultés à poursuivre des études supérieures. Par ailleurs, l’intitulé « baccalauréat » ne revêt pas du tout les mêmes réalités en terme de poursuite d’études selon que cela soit un « bac pro » ou « général ».
3. Revendiquer et agir en faveur de la démocratisation du lycée
Il faut donc défendre la massification dans un cadre public en cela qu’elle donne un accès de masse aux savoirs, même de façon socialement ségrégative pour l’instant, et ce contrairement à d’autres modèles scolaires européens, encore plus discriminants. Il faut donc s’opposer à toutes les mesures ou réformes qui viseraient à limiter l’accès au lycée, comme l’apprentissage par exemple, ou qui permettraient de revenir sur les cadres de programmes et de diplômes nationaux sous couvert d’autonomie.
Il faut aussi politiquement, revendiquer une démocratisation mais sans pour autant fourvoyer les collègues car l’École, en l’état, doit d’abord répondre aux besoins de la société et du système économique capitaliste. Nous ne changerons jamais d’école sans changer la société. Dans une société inégalitaire, l’école doit faire en sorte que tous soient confrontés à la culture légitime. On aurait tort de penser que la seule question pédagogique permettrait de résoudre la question des inégalités sociales, comme ont pu le faire croire les sciences de l’éducation, qui ont imposé ce discours, relayé par certaines organisations syndicales dans les années 70.
Cela ne doit pas nous priver d’ouvrir des brèches sur les moyens, les contenus et les méthodes dans le système tant nous savons qu’il y a une relation dialectique entre l’idée d’une autre école et celle d’une autre société. Cela ne doit pas non plus nous empêcher de préciser les traits d’un futur lycée polyvalent et polytechnique qui est la perspective que SUD éducation s’est donnée pour l’École dans une autre société. (Clermont 2006).
Sur ces deux axes, il nous faut chercher une alliance avec les parents d’élèves et les lycéens qui ne peut pas se limiter à défendre l’existant mais qui doit pouvoir avancer d’autres mesures permettant une démocratisation du lycée .
Nos revendications pour démocratiser le Lycée
1. L’organisation et les horaires au lycée.
Notre réflexion sur les horaires au lycée est indissociable de notre conception d’une l’École démocratique et égalitaire.
Pour cela nous revendiquons :
1 – 1 Le maintien d’horaires nationaux d’un volume suffisant pour permettre une transmission de savoirs sans lequel ne peut exister de réflexion critique ni d’acquisition de méthode ou d’autonomie.
1 – 2 Un meilleur équilibre des horaires des disciplines par niveau par séries et filières existantes avec moins de détermination précoce et avec la volonté de rapprocher les enseignements des trois lycées, sans concurrence entre ces filières.
1 – 3 Nous nous situons dans la perspective d’une suppression des trois voies de formation séparées (voie générale, voie technologique, voie professionnelle) qui justifient aujourd’hui l’orientation précoce.
1 – 4 Une concertation institutionnelle des équipes éducatives ce qui nécessite des heures de concertation reconnues dans leurs emplois du temps, et un travail en commun avec les COP.
1 – 5 Un équilibre entre la transmission des savoirs et des savoirs faire disciplinaires, la reconnaissance du rôle d’éducation des personnels enseignants intégré dans un temps de travail réduit. Cela passe par une différenciation entre l’horaire élève et l’horaire prof plus prononcée qu’elle ne l’est actuellement.
1 – 6 Constitution de petits groupes d’élèves dans le cadre du groupe-classe afin de permettre à leurs enseignants d’intervenir sur les contenus et les méthodes dans le cadre des enseignements : remédiation, apprentissages, expression orale pour un suivi plus individualisée des acquis de l’élève. Nous sommes bien sur totalement opposés au projet de suppressions de tous les 1/2 groupes dans la « seconde Darcos » initialement prévue en 2009.
1 – 7 La possibilité pour des équipes de dégager du temps disciplinaire pour la mise en place d’une pédagogie de projet sur la base du volontariat. Cela suppose au sein des services hebdomadaires de dégager une heure afin de permettre des réunions sur des demi-journées.
1 – 8 Une politique d’ouverture culturelle :
par des enseignements d’arts, de musique, de théâtre au lycée
par l’ouverture sur le monde des sciences et des arts et des techniques par des initiatives culturelles diversifiées et gratuites : intervenants culturels, sorties scolaires, voyages scolaires gratuits).
Les laisser à l’entière initiative des familles ne fait que renforcer la reproduction sociale.
1 – 9 Des horaires professeurs supérieurs au nombre de classes, surtout dans les lycées plus fragiles (ZEP, classés, …)
1 – 10 L’heure de vie de classe doit être inscrite à l’emploi du temps des enseignants et payée sur la base d’une heure de cours normale. Elle doit faire l’objet de stage de formation continue et s’exercer dans le cadre de la concertation des équipes.
1 – 11 Des passerelles rétablies et renforcées (contrairement à l’orientation prise par la réforme du bac pro en trois ans qui débouche sur la suppression des 1ères d’adaptation) entre les différentes voies et filières sur l’ensemble de la scolarité pour éviter la sortie sans diplôme due à une erreur d’orientation.
D’une façon générale nous revendiquons pour touTEs les lycéennEs la possibilité :
de s’approprier des connaissances disciplinaires sans lesquelles il n’y a ni culture, ni formation ;
de s’approprier des méthodes de travail personnel ou en équipe dans le but d’accéder à une autonomie qui permette de gérer le temps, le travail, les choix, et ce, de façon responsable ;
de mieux maîtriser son orientation en bénéficiant de l’accès gratuit à l’information et au conseil par le biais d’un service d’orientation public renforcé au contraire de la politique de liquidation actuelle ;
de nouveaux droits pour les lycéens : mise en place d’espace de parole et de décision réellement démocratiques pour favoriser l’autonomie et son corollaire, la responsabilité.
2 Quels moyens pour démocratiser le lycée ?
Il ne peut y avoir de démocratisation et même de maintien du niveau du système actuel sans l’arrêt et le rétablissement des milliers de postes supprimés dans le cadre de la RGPP. La mise en concurrence des établissements est incompatible avec cette démocratisation.
Si la question du rétablissement des postes est un préalable à toute reforme du lycée elle ne peut pas non plus en faire office, c’est pourquoi nous revendiquons :
2 – 1 Des effectifs par classe ou par groupe adaptés selon les besoins (un maximum de 25 élèves par classe en lycée général et technologique par exemple).
2 – 2 Une définition nationale des seuils de dédoublement pour les disciplines concernées.
2 – 3 Des groupes réduits permettant l’acquisition des méthodes et la remédiation.
2 – 4 Le rétablissement de passerelles, notamment avec les classes d’adaptation et les enseignements de remise à niveau…
2 – 5 Une évaluation de la réalité de la scolarisation des lycéens handicapés en milieu ordinaire et la mise en oeuvre d’une politique facilitant leur intégration (personnels formés, locaux et conditions d’études et d’examen adaptés). Un accent doit être porté également sur l’ouverture de classes spécialisées à hauteur des besoins.
2 – 6 Le lycée n’est pas gratuit pour les familles notamment des milieux populaires. Ainsi, par exemple, les manuels scolaires doivent être réellement gratuits dans tous les lycées. La prise en charge par les régions des livres scolaires est un mieux mais une péréquation nationale doit assurer la gratuité totale et s’appliquer selon des critères et des niveaux de prise en charge unifiés d’une académie à l’autre.
2 – 7 Il faut des droits nouveaux pour les lycéens. Notamment leur permettant de participer à part entière au fonctionnement des établissements. Pour cela, si le Conseil de Vie Lycéenne (CVL) peut être un point d’appui, son fonctionnement, sa composition, ses compétences doivent être modifiés profondément afin de permettre réellement une démocratisation du système éducatif. La mise à disposition de lieux d’échanges, d’activités propres aux lycéens à l’intérieur des EPLE est indispensable. Ce point doit absolument faire l’objet d’un débat commun avec la Fédération SUD Lycéen.
2 – 8 Nous rappelons le droit de tous à être scolarisés, sans restrictions liées notamment à la nationalité, à la situation régulière ou non des familles et de leurs enfants. C’est pourquoi, dans le cadre du Réseau Éducation Sans Frontières (RESF), SUD éducation lutte contre les expulsions des jeunes scolarisés issus de parents Sans-Papiers et revendique la régularisation de tous.
3 La voie générale
3 – 1 Le lycée d’enseignement général a pour mission de dispenser une formation générale qui complète et consolide celle du premier cycle du second degré et qui permette d’orienter les élèves vers l’enseignement supérieur par une détermination progressive dans le cadre de grands champs disciplinaires (littéraire, scientifique, économique, social…).
3 – 2 Contrairement au dernier projet de Réforme « Darcos », il ne doit y avoir aucune réduction de l’offre scolaire. De plus, nous nous prononçons pour le maintien des groupes classes et de la définition de service hebdomadaire des élèves et des profs.
3 – 3 La seconde est une classe charnière : elle doit assurer une meilleure prise en charge des élèves issus du collège, assumer réellement son caractère indifférencié tout en permettant aux élèves un parcours polyvalent pour les initier tous aux différentes disciplines existantes au lycée.
Nous proposons :
3 – 4 Le maintien d’un tronc commun avec des horaires nationaux devant permettre toutes les poursuites d’études après la seconde et des dédoublements de classe systématiques permettant d’associer contenu et travail sur les méthodes propres aux enseignements.
3 – 5 Des enseignements d’initiation semestriels sur l’ensemble des autres disciplines nouvelles au lycée, à raison par exemple de deux enseignements par semestre, soit quatre par an dont obligatoirement un enseignement artistique et des enseignements pris dans des « familles » différentes (sciences humaines, enseignements scientifiques, lan- gues…). Cela aurait d’ailleurs pour effet de limiter la » pré- orientation » en seconde par le biais d’options discriminantes.
3 – 6 Une initiation à la recherche interdisciplinaire, dans la perspective d’une poursuite de la démarche en 1ère. Cela permettra aux élèves de poursuivre le dépassement du cadre disciplinaire tout en favorisant un travail plus autonome et en équipe.
3.7 Une plage d’aide au travail hebdomadaire encadrée par des enseignants.
3 – 8 Un tutorat systématique avec un enseignant pour l’organisation du travail et la réflexion sur l’orientation en fin de seconde, en lien avec le travail réalisé avec le COP et l’équipe.
3 – 9 Le volume horaire élève doit rester globalement le même mais avec une réduction du temps de cours en classe entière au profit des séances en groupes réduits, du tutorat et des plages d’aide au travail pour ceux qui en ont besoin.
Tout ceci doit permettre de limiter au maximum les devoirs à la maison qui sont socialement plus discriminants.
3 – 10 Il est nécessaire de distinguer le nombre d’heures de cours auxquels chaque élève participe de sa présence sur l’établissement : la question n’est pas uniquement un problème de quantité horaire mais aussi de ce qu’on y fait. On peut imaginer que la plage du mercredi après-midi ou du samedi matin soit utilisée afin de faire des visites ou des ateliers. Pour l’élève cela ne revient pas à notre avis au même qu’un nombre d’heures de cours équivalent.
3 – 11 Il va de soi que ces propositions, pour ce qui est des personnels de l’éducation, seraient transposées en heure cours dans leur service. Il est donc indispensable de préciser nos revendications sur les missions et le temps de travail des enseignants du second degré au-delà de la revendication d’un temps de concertation des équipes inclus dans le temps de travail. Cela suppose de revoir dans le cadre de la réduction de la charge de travail des enseignants les obligations de service telles qu’elles sont définies actuellement dans les décrets de 1950.
Le cycle terminal.
Dans ce cycle terminal, nous proposons de poursuivre les dispositifs engagés en seconde.
3 – 12 Le travail interdisciplinaire sera poursuivi en 1ère dans le but de développer le travail dans une autonomie guidée qui s’appuiera désormais sur l’expérience de la seconde. L’objectif reste de développer un travail personnel des élèves, avec les présentations orales, sur un sujet choisi avec les enseignants. Cela doit aussi faciliter le passage en 1er cycle universitaire. Ce module sera inscrit à l’emploi du temps des professeurs et des élèves de la seconde à la terminale.
3 – 13 Le tutorat peut être proposé à tous les élèves de 1ère. De même l’aide au travail personnel sera proposé sur des plages horaires inclues à l’emploi du temps des élèves. Le dispositif peut être renforcé en terminale.
3 – 14 L’enseignement de la philosophie doit être défendu et renforcé. Il doit être mis en place dans les trois voies d’enseignement et une initiation dès la seconde doit être discutée.
3 – 15 Les attaques récurrentes du Ministère de l’Éducation nationale à l’encontre de la filière ES, et de la nature de l’enseignement des Sciences Économiques et Sociales, sont inacceptables. Nous devons soutenir un enseignement des Sciences Économiques et Sociales qui donnent aux élèves la possibilité d’avoir une lecture critique du monde et non celle de se plier à une prétendue réalité incontournable ce qui implique l’intégration de cet enseignement dans le tronc commun de tous les élèves.
3 – 16 Nous souhaitons, dans le système actuel, le maintien du bac comme examen national protégeant des inégalités régionales ou de toute autre forme de discrimination. Il doit rester le diplôme correspondant au premier grade universitaire. Dans le cadre du système actuel, les projets de bac à la carte ou modulaires de la réforme Darcos accentueraient encore les inégalités d’accès au supérieur en ouvrant la voie à la généralisation de la sélection et à la concurrence entre universités pour recruter leurs étudiants.
Cependant, nous pensons important de réfléchir à des modalités de formation et d’évaluation qui privilégient davantage l’autonomie de l’élève et la prise en charge de son propre apprentissage.
Mais les mesures proposées en 1 et 2 sont valables pour les lycées généraux, technologiques et professionnels et visent aussi à les rapprocher pour rester dans la perspective d’un enseignement secondaire polytechnique décidé au Congrès en 2006.
Le texte ne fait pas de propositions spécifiques sur le lycée professionnel et le lycée technologique car les collègues ayant participé à la rédaction ne considèrent pas connaître suffisamment le sujet pour faire des propositions pertinentes. Par ailleurs, les idées avancées ici gagneront à être affinées par les débats entre collègues et par la suite en y adjoignant des propositions chiffrées afin de pouvoir porter ces revendications auprès des collègues.
Quelle vie scolaire, pour quelle école, pour quelle société ?
Notre Fédération s’est donné un mot d’ordre : « Une autre Société, une autre École ». Elle entend œuvrer à l’avènement d’une École égalitaire et émancipatrice, partout et pour tous. Les adhérents qui agissent dans le secteur de la Vie scolaire ont inscrit leur intervention dans cette perspective. La Commission Vie scolaire s’est efforcée de proposer des analyses et une plate-forme revendicative liant la défense des personnels à la perspective d’une transformation radicale de la nature de l’École et des professions spécifiques de ce secteur. Le présent congrès offre l’opportunité de synthétiser ces acquis, de les diffuser largement et de tracer des perspectives.
La Vie scolaire est en état d’urgence : le dispositif d’aménagement et de réduction du temps de travail (ARTT) sans création de postes en 2001, la liquidation du statut de MI-SE et l’institutionnalisation de la précarité par la mise en place des assistants d’éducation en 2003 (contre-réformes qui ont occasionné deux luttes de grande envergure), les suppressions de postes, la baisse drastique du recrutement, le rapport Pochard et les menaces qu’il contient…on n’en finirait pas d’énumérer les attaques. Un projet global de déstabilisation précédant la destruction de nos métiers apparaît. Leur absolue dénaturation par une aspiration vers les personnels de direction constitue aussi une hypothèse.
Dans l’Éducation nationale, l’ensemble des professions doit faire face à cette offensive. Mais les fonctions éducatives, sociales, médicales et d’orientation sont, d’ores et déjà, très fragilisées. Rappelons aussi que toutes étaient concernées par le pré-projet de décentralisation. La tactique gouvernementale de démantèlement se fait par catégorie. La situation des personnels TOS, dont la décentralisation est effective depuis janvier, nous en fournit un exemple.
La Vie scolaire doit faire face à d’autres types d’attaques que nous avons dénoncées dans un texte intitulé Manager et punir (dont le résumé est en annexe).
D’une part les « Projets Vie scolaire », avatar de la conception managériale de l’École, visent à imposer une vision dramatiquement réductrice de l’acte éducatif : injonction de rentabilité, logique de diagnostic, de moyens mis en œuvre et de résultats immédiats quand on sait qu’éduquer est un travail de long terme. Les modifications dans ce sens du contenu du concours de recrutement des CPE confirment la permanence et la gravité de ces visées.
D’autre part les sommations sécuritaires se multiplient : la délation et la collaboration avec la police sont encouragées. La hiérarchie, tant centralement que localement, tente d’imposer le tout-répressif, l’ordre moral, la « tolérance zéro », la culpabilisation et le formatage. La très régressive « note Vie scolaire », que nous combattons, symbolise cette tendance. En parallèle, les conditions de travail se détériorent alors même que les problèmes éducatifs deviennent plus complexes. Dès lors, la surcharge, l’urgence, le stress, l’absence de possibilité de concertation, tendent à dégrader encore la qualité des pratiques professionnelles.
La récente création des « médiateurs de réussite scolaire », qui a provoqué une levée de boucliers générale parmi les personnels sociaux et d’éducation, est emblématique de ces évolutions. On enjoint aux établissements qui en seront dotés de réduire les taux d’absence de 30 à 50% (selon les situations) avec des personnels précaires, en difficulté sociale et sans qualification ! Les réponses à l’absentéisme doivent être « rapides et concrètes » et Darcos promeut des méthodes d’un simplisme affligeant. Enfin les rapports avec les collectivités locales sont encouragés… on en connaît les objectifs de contrôle social. Nous y voyons la préfiguration de l’avenir sombre des services d’éducation.
Pourtant la Vie scolaire constitue un important acquis de Service public. Une de ses fonctions, ne l’oublions pas, est de lutter dans le cadre de l’École contre les inégalités, les ruptures voire les apartheids scolaires qui touchent les enfants des travailleurs. Les personnels agissent principalement auprès des plus précaires, des plus défavorisés, des plus stigmatisés. Les CPE ont accumulé des connaissances et des savoir-faire aptes à limiter ces phénomènes si leur action était favorisée. On comprendra dès lors l’acharnement du Pouvoir à œuvrer à la disparition de ces métiers.
Il est donc essentiel que la Fédération SUD éducation s’engage encore plus résolument dans leur défense. Pour les personnels de surveillance, dans l’immédiat, ces contrats ne sont pas acceptables. Nous réclamons la titularisation sans condition de concours et de nationalité sur un statut unique de droit public d’État.
Mais cette défense ne saurait suffire, nous entendons agir à la transformation immédiate de la Vie scolaire dans un sens progressiste. Car nous sommes sans illusion sur l’École de classe, ses fonctions de tri social, de mise en condition, même, elle demeure néanmoins un lieu de tension entre deux objectifs contradictoires : soumettre et émanciper. De ce fait, nous ne nous contentons pas d’un humanisme consensuel et sans effet.
Issue des dispositifs disciplinaires, la fonction de CPE s’est transformée,
au cours des années soixante et soixante-dix dans un contexte de montée des luttes. C’est l’action des personnels eux-mêmes, par l’alliance de leurs pratiques innovantes et de leurs revendications, qui a permis cette évolution. L’inversion du rapport de force depuis la fin de cette période est l’origine principale de la régression que nous décrivons.
Nous entendons dissiper les graves illusions du moralisme et de l’autoritarisme, diffusées depuis plusieurs décennies par les officines idéologiques du capitalisme, qui affectent largement la pensée commune. L’apparition durant cette période du terme » citoyenneté » et sa promotion frénétique dans les textes officiels, mériterait ainsi un vrai retour critique. Il dissimule des stratégies de soumission sociale plus qu’il ne veut promouvoir un véritable apprentissage démocratique. Et il en va de même avec les « droits et devoirs ». Le grand détournement libéral du langage est ici à l’œuvre.
On ne niera pas la montée de tension dans les établissements, ni celle de l’incompréhension intergénérationnelle et de l’irrespect y compris entre les jeunes eux-mêmes. Mais c’est bien une décomposition du lien social qui est à l’œuvre. Sous les coups de boutoir d’un système économique injuste et incapable de générer autre chose que la lutte de tous contre chacun, c’est effectivement à une grave crise éducative que nous nous heurtons.
Pour autant l’artillerie lourde des Sarkozy, et consorts, est non seulement inutile, injuste et discriminatoire mais elle est aussi extrêmement dangereuse. Avatar de la criminalisation de la pauvreté, elle ne constitue en aucune façon une démarche de construction d’une École pacifiée. C’est l’absence de réponse économique et sociale, l’absence de considération, de reconnaissance pour une grande partie de la population en difficulté qui en constituent la véritable cause. Et non un déficit d’autorité ou un manque de « morale ». Si le sens de la règle et de la loi s’acquiert, il ne se décrète pas et en aucun cas, il ne se construit sans démarche pédagogique. Doit-on tout punir dans un cadre scolaire ? Peut-on apprendre sans commettre d’erreur ? Le droit à l’évolution, le droit de changer sont-ils respectés si aucun travail éducatif n’est possible : temps d’explicitation, de mise en perspective, de prise de conscience,… le temps du changement doit être offert aux élèves.
Il s’agit de mettre en œuvre une refondation de la relation éducative, fondée sur notre analyse de la société et de poser les bases, dans notre action syndicale et nos pratiques, d’une véritable alternative au moralisme et à son pendant naturel, le sécuritarisme.
Nous ne disposons d’aucune recette, mais des pistes peuvent être ouvertes, des hypothèses avancées, des expériences popularisées et valorisées, des acquis théoriques revisités.
Ainsi le domaine de l’animation qui, aux origines de la transformation du surveillant général en conseiller d’éducation, a constitué un axe essentiel et novateur, influencé par l’idée de coopération. Il ouvrait aux élèves la possibilité de construire des projets, d’acquérir de l’autonomie, une conscience d’appartenance. Ce domaine est aujourd’hui en voie de disparition, sacrifié à la dictature de l’urgence.
Le pivot principal pourrait cependant être une réaffirmation claire du caractère absolument politique de nos professions. Et, par là même, de l’impossibilité d’en faire l’économie dans nos revendications et dans les manières de les exercer. Ici et là, c’est bien cette dynamique qui peut guider notre action.
C’est une série de questions, qui sont autant de chantiers pour la réflexion et l’action de notre Fédération, que nous voulons poser.
Quel citoyen, certes mais dans le sens réel du terme, et surtout pour quelle société ? Comment éveiller les consciences et œuvrer à l’émancipation sans abuser d’une position d’autorité ? Comment éviter les concessions à l’idéologie dominante lorsqu’il s’agit cependant de maintenir des cadres éducatifs cohérents et efficaces auprès d’adolescents ? Comment y introduire une dimension critique ? Comment travailler à l’intérêt collectif, au bien commun, donner les outils intellectuels alors que l’on assiste à l’abandon des missions de Service public ? Comment, dans ces conditions, ne pas réduire les élèves à leurs actes les plus contestables ? Comment écouter et promouvoir leur parole et leurs expériences particulières ? Comment ne pas céder à l’utilitarisme et se contenter de les préparer à un métier ? Comment agir dans les contraintes d’une profession impossible à dissocier aujourd’hui de la notion de sanction ? Quels droits revendiquons- nous pour les élèves et auprès d’eux (car aujourd’hui on assiste au retour de cette aspiration portée par le mouvement lycéen).
Interrogations récurrentes montrant qu’aucune neutralité n’est donc envisageable en Vie scolaire. Dans le quotidien le plus banal de nos interventions auprès des élèves, les choix auxquels nous nous heurtons sont de caractère inévitablement politique.
Nos revendications d’une formation initiale et continue largement développée et autogérée ainsi que d’autonomie de la Vie scolaire veulent aussi traduire cette radicalité.
Il nous faut donc approfondir encore notre réflexion dans ce domaine, notamment par la collaboration entre les commissions « Vie scolaire » et « Quelle École ? ».
Face à une organisation de plus en plus hiérarchisée et pyramidale, nous proposons une direction collégiale rassemblant toutes les catégories de personnels, les élèves et les parents (au travers d’assemblées générales). Dans les écoles, la tendance actuelle amène la création d’un métier de personnel de direction (comme dans le secondaire) ; ces charges de direction devraient être assurées par des membres de l’établissement dans le cadre d’un mandat limité et contrôlé par toutes et tous. C’est une des conditions de la démocratie à l’école. Au delà de cette phase intermédiaire, nous devons tracer les perspectives d’une école publique autogérée qui sera le reflet d’une société alternative.
Ce texte n’a aucunement la prétention d’épuiser la question posée dans le titre mais se veut l’ébauche d’une réflexion collective au sein de la Fédération. Il entend aussi défendre les acquis éducatifs particuliers de professions spécifiques et populariser un projet émancipateur pour la Vie scolaire ce qui ne saurait être la tâche des seuls personnels qui y travaillent. Et il est nécessaire que les syndicats s’emparent véritablement de ces questions.
Ces objectifs ne peuvent être cependant atteints que par l’octroi de moyens de développement pour notre action dans ce secteur. Une augmentation du volume de décharge des mandatés Vie scolaire permettrait ainsi un travail d’élaboration et de construction plus efficace. Et ce d’autant plus que la situation que nous avons décrite laisse augurer de l’ouverture possible d’une période de luttes. En effet, en liaison avec un regain de combativité dans la jeunesse, on constate une volonté de résistance accrue chez les assistants d’éducation. Notons ainsi des succès encourageants pour notre syndicat lors des récentes élections aux commissions consultatives paritaires académiques de cette catégorie. À l’occasion des luttes de 2001 et 2003, SUD-éducation avait également rassemblé un nombre significatif de CPE sur ses positions, courant que malheureusement nous n’avons pas su capitaliser. Les prochaines occasions ne devront pas être manquées.
Annexe :
Résumé de MANAGER et PUNIR
Une série de dispositifs, de rapports, de déclarations politiques ou administratives ont constitué, ces dernières années, une offensive en règle contre les services de Vie scolaire.
Outre l’invasion de la précarité, la promotion de l’autoritarisme et la mise en place progressive des techniques du management en constituent les axes essentiels.
La profession de CPE s’en est trouvée déstabilisée sans avoir recours, pour autant, à des modifications statutaires.
Sous l’influence des thèses régressives, l’objectif est de transformer cette catégorie en simples organisateurs « des fonctions de surveillance, de suivi de l’absentéisme, d’apprentissage de la civilité et du respect de la règle ». La « perspective éducative » de la circulaire de 1982 disparaît des discours dominants. Mesure symbolique, la note Vie scolaire s’avère un recul majeur en ré-instituant une mesure chiffrée des comportements. La délation et la collaboration avec les services répressifs de l’État sont aussi encouragés.
En parallèle, sous l’impulsion de différentes officines et personnalités de la haute administration, une révolution culturelle libérale monte patiemment en puissance. Les « projets Vie scolaire » en sont la traduction dans nos secteurs.
Il s’agit d’un processus fondé sur le schéma diagnostic- projet-évaluation, en cohérence absolue avec la transformation prévue de la notation des personnels et faisant système avec elle. L’inspection recommande ainsi la création d’un « tableau de bord professionnel » qui permettra d’établir des « bilans et des diagnostics indiscutables » en contradiction avec la complexité de l’acte éducatif.
Nous y voyons des objectifs d’augmentation de la productivité et de soumission aux normes sécuritaires notamment. L’apparition de nouvelles pénibilités psychologiques en rapport avec l’« évaluation permanente », l’intensification du travail, l’accroissement des pressions de tous ordres sont aussi à prévoir. En cela, ces nouvelles organisations veulent enfin contribuer à faire éclater le système de valeurs éducatives et la forte structuration historique de notre milieu professionnel.
Quels modes d’action pour gagner vraiment ?
Des conditions pour une lutte victorieuse…
Le caractère régressif de la politique sociale et éducative du gouvernement est maintenant compris par beaucoup de personnels de l’éducation.
Pour stopper cette régression et amener des alternatives, la volonté de se battre est également largement partagée, comme le prouvent les mobilisations récentes, avec des taux de grève parfois historiques, la participation massive aux manifestations, les initiatives multiples de sensibilisation et d’alerte, le mouvement de désobéissance qui reçoit un large soutien, bien au-delà des personnes qui s’y engagent directement…
…mais une absence de stratégie gagnante
Il manque aujourd’hui une stratégie commune pour transformer le rejet de ces politiques et cette volonté de se battre en rapport de force permettant de faire plier ce gouvernement, qui n’a que faire de l’expression de notre désaccord : il est décidé à passer en force.
Faute de stratégie gagnante, c’est la résignation qui gagne du terrain, y compris chez celles et ceux qui sont le plus opposé-e‑s aux orientations actuelles.
Pour ne pas reproduire les impasses de ces dernières années, il faut qu’un débat ouvert et large soit mené parmi les personnels, à tous les niveaux, et pas uniquement à l’intérieur des syndicats ou de leurs instances.
En ce qui nous concerne, nous ne prétendons pas avoir de solution miracle. Nous essayons cependant en permanence de dire quels modes d’action sont à nos yeux susceptibles d’être réellement efficaces. Mais ce qui est remarquable, c’est l’absence de stratégie lisible de la plupart des organisations syndicales, en particulier de la part des organisations majoritaires.
Débattre sans tabou ni dogmatisme
Parce que nous n’acceptons pas cette absence de stratégie, qui mène tout droit à la résignation et à la défaite, nous souhaitons relancer ce débat, sans tabou, et sans dogmatisme. Pour nous, de toute façon, c’est à celles et ceux qui luttent de déterminer comment ils/elles veulent mener leur lutte.
À part les actions strictement corporatistes, c’est-à-dire quand la défense d’une catégorie de personnel joue contre les intérêts d’une autre, qui sont à l’opposé de notre conception du syndicalisme, nous refusons d’opposer une forme d’action à une autre : tout ce qui construit la lutte est bon à prendre.
Mais pour ne pas s’illusionner, il convient de distinguer les actions qui participent à la construction d’une mobilisation de celles qui peuvent permettre d’imposer des victoires sociales.
Faire connaître nos raisons de lutter et notre force
Les actions médiatiques, de sensibilisation, etc., sont bien entendu très utiles, parce qu’elles permettent de mettre le débat sur la place publique, d’expliquer nos revendications, de gagner à notre cause une partie plus grande de la population. Mais face à un gouvernement de combat, qui a décidé de passer en force, elles ne peuvent être qu’un élément permettant de construire la mobilisation et de gagner le soutien populaire : elles ne permettront pas, seules, des victoires réelles. Il en va de même des rassemblements et des manifestations, qui permettent de renforcer un mouvement, de démontrer notre force collective, mais qui ne suffisent pas à créer un rapport de force victorieux.
Désobéir, résister
Les actions de désobéissance possèdent les avantages que nous venons de décrire, mais ont encore d’autres vertus. Elles provoquent davantage le débat. Elles participent à la radicalisation de la mobilisation, en permettant d’agir en cohérence avec sa conscience. Elles désacralisent la légalité, au nom de laquelle l’inégalité est instituée en norme. Généralisées, elles peuvent même rendre une politique inapplicable, caduque. C’est pourquoi SUD, depuis long- temps, appelle à ces actions chaque fois que l’enjeu le justifie et soutient leur développement.
Cependant, ce mode d’action ne peut se substituer aux autres. S’il faut chercher sans cesse à inscrire cette pratique de désobéissance dans des cadres collectifs et construire une solidarité autour des désobeissantEs, elle renvoie toujours à des actes individuels, qui exposent les collègues à des choix et des situations difficiles. Il y a donc de vrais obstacles à sa généralisation massive. En outre, nous ne pensons pas que ce mode d’action puisse s’appliquer à tous les combats. Comment, par exemple, désobéir à des suppressions de postes, sinon en refusant de travailler dans ces conditions, ce qui s’appelle faire grève ? Comment désobéir au passage au Bac Pro en trois ans ? Comment désobéir à des fermetures d’options, de classes, d’écoles ? Comment désobéir pour une augmentation de salaire ? Etc.
La grève et le blocage, des armes incontournables des luttes des salariéEs
Le scepticisme quant à l’efficacité de la grève gagne du terrain chez les collègues. ChacunE se rend bien compte que les journées isolées de grève et de manifestation sont inefficaces si elles ne débouchent pas sur la construction d’un vrai rapport de force.
Comme c’est la seule « stratégie » proposée par les organisations syndicales majoritaires ces dernières années, on comprend les réticences… Pourtant, l’insistance du Président et de son gouvernement à déconsidérer la grève devrait nous faire réfléchir.
Il y a grève et grève…
Les grèves d’une journée, secteur professionnel par secteur professionnel (éducation, santé, Poste, transports, etc.) n’ont en elles-mêmes aucune efficacité : elles ne peuvent être prises que comme des éléments qui permettent de lancer une mobilisation, et non comme une stratégie de victoire.
La seule grève qui pèse vraiment, c’est la grève qui bloque, c’est la grève qui entrave le fonctionnement économique et/ou institutionnel.
Il faut construire la grève générale reconductible !
Il n’y aura véritablement de retournement majeur du rapport de force en faveur des salariéEs que par une grève générale reconductible, qui s’attaque aux profits du patronat et des actionnaires et au fonctionnement des institutions.
Aucun gouvernement ne peut résister longtemps à une grève générale : elle est l’arme principale des salariéEs, qui manifestent ainsi que ce sont bien eux et elles qui produisent les richesses que quelques-unEs s’accaparent. La simple crainte d’une grève générale amène les gouvernements à des reculs sectoriels, pour casser cette dynamique.
SUD et Solidaires font de la construction de la grève générale reconductible leur première priorité.
Mais une grève générale reconductible ne se déclenche pas d’un coup, ni au même rythme dans tous les secteurs professionnels. Si aucun secteur ne part dans un mouvement radical, il n’y a pas de grève générale.
Des victoires sectorielles sont possibles, mais il faut s’en donner les moyens
Par ailleurs, si notre priorité est la construction d’un mouvement interprofessionnel dans la durée, nous pensons que même en son absence, des victoires sont possibles, y compris dans l’éducation, à condition cependant de s’en donner les moyens.
Pour les personnels de l’Éducation nationale, 2003 est une année qui compte : une grève longue, des journées, des semaines de salaire perdues. Cette défaite a laissé des traces qui pèsent encore aujourd’hui. L’échec, ses conséquences, restent durs à avaler. Les raisons de la défaite de 2003 sont multiples : attitude pour le moins ambiguë de certaines organisations syndicales, absence de réelle généralisation interprofessionnelle du mouvement, participation à la grève reconductible trop partielle, trop fragmentée…
Mais, pour SUD, dans le secteur de l’Éducation nationale, le refus de toucher aux examens a été un facteur important de l’échec et de la situation dégradée dans laquelle nous nous trouvons depuis.
Pour un blocage collectif des centres d’examens
Nous savons que la grève des personnels de l’éducation n’impressionne pas beaucoup le gouvernement s’il sait à l’avance que tout rentrera dans l’ordre au moment où notre capacité de blocage pourrait devenir réelle et gênante pour le fonctionnement de la machine institutionnelle, c’est-à-dire au moment du passage des examens.
Le blocage des examens ne peut constituer un moyen de lutte en soi, mais il doit être affirmé comme une perspective dans le cadre d’une mobilisation radicale et de grande ampleur. Il ne peut être envisagé sans être en lien avec les lycéen-ne‑s et/ou les étudiantEs.
Le blocage collectif et organisé des centres d’examens (et d’abord du baccalauréat), nous parait une arme efficace que nous voulons mettre en débat le plus largement possible.
La question n’est pas de remettre en cause le baccalauréat. Il s’agit de bloquer des centres où il se passe, le temps que le gouvernement cède face à nos revendications. Nous pourrions nous engager à faire passer les examens (éventuellement sous d’autres formes) une fois la lutte terminée.
Il ne s’agirait pas d’appeler les seulEs correcteurTRICEs à faire la « grève des examens » : ce mode d’action fait reposer toute la responsabilité sur des individus isolés face aux pressions diverses : il est inefficace.
Ces blocages doivent être organisés et collectifs, ils doivent associer l’ensemble des personnels de l’éducation, mais également les usagerEs, les lycéenNEs, les étudiantEs, les parents d’élèves, et plus largement toutes celles et tous ceux qui soutiennent ce combat.
Ce genre d’action ne se fera pas à froid : il faudra que, dans les mois qui précèdent, la pression monte au niveau inter- professionnel comme dans le secteur de l’Éducation, à travers des actions de lutte qui passeront par des manifestations avec les usagerEs, des blocages divers, et des mouvements de grève, y compris reconductibles.
Construire la grève
Redisons-le : la lutte des classes ça existe ; une preuve parmi d’autres, début janvier, Sarkozy traite d’irresponsables les grévistes qui luttent pour l’emploi … et dans le même temps accorde une rallonge de 10 milliards d’euros aux banquiers, ceux-là même qui ont largement participé à la crise qu’ils veulent une nouvelle fois faire payer au monde du travail.
Depuis l’élection de Sarkozy à la présidence de la République, la politique de déréglementation sociale du travail s’est accélérée et avec elle le démantèlement des services publics.
Dans les entreprises : droit de grève, code du travail, contrat de travail avec licenciements facilités, remises en cause des
35 heures, suppressions massives d’emplois partout…
Contre nos droits sociaux et la fonction publique : assurance maladie, accès aux soins pour tous (franchises médicales, fermeture des hôpitaux), retraites… remise en cause de tous les services publics à travers la RGPP. Contre les libertés : test ADN, fichage dès 13 ans, flicage accru des chômeurs, expulsions massives des sans-papiers, pénalisation des plus jeunes, répression contre les militants, mise sous tutelle des médias…
Contre ces régressions, des luttes existent et il appartient à la Fédération SUD éducation et à ses syndicats de les renforcer et de travailler à leur convergence.
Uniquement dans les dernières semaines de 2008, on a vu de nombreuses grèves : Éducation nationale, SNCF, Poste, Audiovisuel, ANPE/ASSEDIC, INSEE, Caisses d’Épargne, Météo France, ONF, AFPA. Il y a aussi les grèves de travailleurs/ses Sans-Papiers qui se poursuivent en Ile-de- France et des mouvements locaux (commerce, industrie, nettoyage, etc …) pour l’emploi et les salaires se multiplient dans le secteur privé. Les mobilisations lycéennes de décembre
2008 ont arraché un premier recul à Darcos sur sa réforme des lycées.
Une responsabilité syndicale particulière
L’École, comme atelier de l’avenir du monde est sans cesse interrogée, plus particulièrement encore quand le présent et l’avenir inquiètent. Elle occupe donc une place particulière au sein du service public et se trouve en relation quotidienne avec une grande partie de la population. Son avenir ne peut donc pas concerner que ses seuls salariés.
Lorsque l’École publique est attaquée dans ses fondements – et c’est certainement aujourd’hui le cas – la responsabilité des syndicalistes est de participer à la constitution d’un large front de défense de la maternelle à l’Université et s’adressant à l’ensemble des personnels, des étudiants, des parents d’élèves, du mouvement associatif et des organisations syndicales. Cela passe par la multiplication d’initiatives de réunions locales pour rencontrer les personnels et les parents d’élèves et les étudiants.
Comme premier employeur du pays, l’Éducation nationale est au centre de la tourmente libérale et l’école publique est l’objet des attaques répétées de tous les réactionnaires : prévision de 80 000 suppressions de postes sur quatre ans, réforme rétrograde des programmes et mise en concurrence des écoles dans le premier degré, externalisation de la difficulté scolaire à tous les niveaux, suppression du BEP et réduction de la formation pour les élèves de Lycée professionnel, appauvrissement de l’enseignement et de la formation dans le cadre de la réforme des lycées, disparition de la formation professionnelle aux métiers de l’enseignement, fragilisation des statuts des personnels et pour tous de la maternelle à l’université : mise au pas, domination hiérarchique et division.
L’unité parce qu’on ne gagnera qu’ensemble. Patience
Face à cette entreprise de démolition, nous avons affirmé et écrit, notamment lors des élections professionnelles de décembre 2008, que sur la question de l’École, personne ne gagnera seul, pas même le syndicat majoritaire.
La question de l’unité reste donc déterminante pour le présent et l’avenir des luttes, comme l’ont montré les énormes manifestations du 29 janvier qui partout en France ont rassemblé les salariés de différents secteurs et de différentes organisations syndicales. « Ensemble, on est plus fort » reste une idée dominante pour nombre de salariés et nous ne connaissons pas de victoires déterminantes pour le mouvement syndical dans la division.
Une journée de grève et de manifestations ne sera jamais suffisante pour faire reculer le patronat et le gouvernement mais par son ampleur, une grève de 24h peut appeler la suite même s’il ne faut pas retomber dans la répétition des grèves de 24 heures, secteur professionnel par secteur professionnel, grèves qui lassent les plus motivés sans convaincre celles et ceux qui le sont moins. Il ne faudrait cependant pas croire qu’il y a un seul chemin et que seule la radicalité fait loi. Seuls ceux qui avancent font le chemin… et il est long.
Nous ne voulons pas nous complaire dans un syndicalisme de témoignage qui s’autoproclamerait détenteur de la vérité quand bien même les travailleurs continueraient de l’ignorer, ne partageraient pas ses mots d’ordre et ses revendications, ne s’approprieraient pas ses propositions d’actions. Il nous faut comprendre et analyser les évolutions de notre environnement économique, politique, social, culturel, écologique. Nous devons savoir distinguer les tendances lourdes de l’éphémère, les vagues de fond de l’écume de l’onde. Il nous faut comprendre et agir en conséquence, et décider d’une stratégie syndicale tenant compte des objectifs retenus et aussi de ce que nous sommes réellement, de nos forces et de nos capacités actuelles, encore très limitées par rapport à nos intentions.
Pour que l’idée de la grève générale interprofessionnelle devienne crédible pour un maximum de salariés, pour affronter ce gouvernement, sa politique et ses alliés, comme l’a défini le récent congrès de l’Union syndicale Solidaires, il est indispensable que chacun s’emploie à construire la grève là où il est, tout en favorisant les initiatives interprofessionnelles. Le travail des syndicats SUD éducation réside donc dans la construction patiente et résolue d’une grève de la maternelle à l’université, soutenue par la population et porteuse d’alter- natives pour les élèves, les étudiants et les personnels.
Une unité au service des luttes
Nous avons décidé à une très large majorité au Congrès fédéral de Clermont-Ferrand en 2006 de tenter de nous impliquer davantage dans les processus syndicaux unitaires locaux et plus encore nationaux dont nous étions tenus à l’écart depuis la création de la Fédération en 1998.
Trois ans plus tard, nous ne sommes plus dans la situation qui prévalait encore au moment du congrès de Clermont- Ferrand. Notre présence dans les luttes a certainement compté pour que peu à peu cesse cet ostracisme dont nous savions qu’il freinait notre intervention et notre développement. Ce constat ne suffit pas seul à valider une orientation mais acceptons là de voir un point positif.
Nous avons donc pu mettre en acte cette orientation fédérale et participer encore davantage à des collectifs syndicaux unitaires dans de nombreux départements et l’exercice n’est pas toujours d’une grande simplicité. La Fédération a également été présente dans plusieurs intersyndicales nationales fédérales ou de secteurs. Sommes-nous sortis de l’invisible ?
Certainement un peu. Aux dernières élections professionnelles enseignantes 28237 personnes ont voté pour une liste SUD éducation et certainement plus de 30 000 pour nos listes locales dont le nombre a augmenté surtout dans le premier degré. Tout cela constitue déjà un premier témoignage d’une activité syndicale plus visible et qui certainement augmente (pour rappel 24 855 voix en 2005, 22 857 en 2002). C’est aussi une possibilité pour SUD éducation de voir grossir ses syndicats.
À l’automne 2008, de nombreux syndicats SUD éducation se sont impliqués dans les deux actions nationales du
19 octobre (80 000 personnes à Paris) et la grève nationale du 20 novembre qui a fini par être inter catégorielle après avoir été annoncée comme ne concernant que le premier degré. Notre intervention fédérale dans les réunions unitaires (intersyndicales et Collectif « Un pays, une école, notre avenir ») et notre travail dans les intersyndicales et collectifs unitaires départementaux a contribué à faire de cette grève une véritable grève inter catégorielle. Cette grève a été très suivie. Nous avons participé à des AG souvent importantes. Des syndicats SUD éducation ont été impliqués dans quelques reconductions. Des grèves ont été organisées lors de déplacements de Sarkozy ou Darcos. Des campagnes de désobéissance se sont développées dans le premier degré dans de nombreux départements. Le refus des évaluations CM2 a démarré à un bon niveau. La mobilisation contre Base élève se structure et s’étend. La grève reconductible de décembre dans le premier degré à Paris a été importante. Les grèves lycéennes ont ensuite prolongé l’élan de l’activité syndicale dans plusieurs départements jusqu’à la fin de l’année 2009.
La grève du 29 janvier a rassemblé plus de 2 000 000 de manifestants avec de nombreux appels à la grève unitaire dans les secteurs professionnels, y compris dans les entreprises privées. Avec une grosse mobilisation dans l’Éducation nationale, la question scolaire a tenu toute sa place dans les slogans des manifestations interprofessionnelles (c’est un détail important). Nous devons aussi profiter de ces moments pour faire connaître notre vision de la question scolaire aux camarades des autres syndicats de Solidaires et prendre des initiatives en ce sens.
Dans cette période de contestation de la politique du pouvoir, la répression policière s’est accrue contre les militants et particulièrement contre les plus jeunes. Il ne faut pas laisser installer un climat de stigmatisation voire de criminalisation de l’activité syndicale. C’est aussi une des tâches du moment que d’organiser la défense des camarades et la contestation unitaire de cette politique sécuritaire.
Au moment où nous terminons la rédaction de ce texte la grève gagne dans les universités depuis une semaine et plus lentement dans les IUFM : contre la casse du statut des enseignants chercheurs, contre la réforme des concours, contre l’attaque sans précédent portée à la formation professionnelle des enseignants, contre la casse des statuts et le développement de l’emploi précaire.
L’appel à manifestations le 19 février « de la maternelle au Doctorat » de la coordination nationale des universités repris par l’intersyndicale du supérieur… C’est pas si souvent…
Une nouvelle journée nationale de grève unitaire inter- professionnelle le 19 mars, tardive mais unitaire, si personne ne se dégonfle d’ici là.
Pour gagner contre ce gouvernement, même sur la seule question scolaire, nous sommes d’accord pour penser (et la Fédération l’a écrit dans les professions de foi des dernières élections) que nous ne gagnerons pas seuls. Porter la grève reconductible à un niveau interprofessionnel ne peut pas se faire sans des secteurs eux-mêmes déjà mobilisés dans la grève. Nous l’avons vu avec l’éducation nationale en avance par rapport aux autres secteurs en 2003. Notons que cette avance dans la mobilisation pour les retraites s’appuyait sur les mobilisations contre la décentralisation des TOS, contre la suppression des MI/SE et la mise au chômage des Emplois jeunes. Il faut donc un milieu hyper mobilisé et dans la grève pour envisager la grève interprofessionnelle.
Le travail des syndicats SUD éducation réside donc dans la construction résolue d’une grève de la maternelle à l’université soutenue par la population et porteuse d’alternatives pour les élèves, les étudiants et les personnels car si nous savons que la grève n’est qu’un moyen, elle reste un moyen qui, à l’échelle nationale et dans la durée, peut faire reculer ce gouvernement si elle va au bout de sa logique de blocage du fonctionnement institutionnel et/ou économique. Ce qui suppose notamment de se préparer à aller jusqu’au blocage des centres d’examens.
Un fonctionnement national au service d’une orientation fédérale
Quand nous sommes la cinquième fédération de l’éducation et que nous voulons peser pour davantage de combativité dans les appels intersyndicaux, dans la formulation des revendications et pour l’appel explicite à une construction de la grève reconductible, il faut nécessairement être modeste surtout si notre fonctionnement collectif actuel ne nous permet pas d’être présents dans de bonnes conditions à chacune des réunions unitaires. Il est certainement préférable de concentrer notre activité sur l’augmentation de la mobilisation des collègues. Cependant pour faire entendre dans les réunions nationales les exemples des départements les plus mobilisés, il faut davantage de remontées des syndicats sur l’état réel des luttes locales. Il faut un fonctionnement qui permette une présence informée et régulière de la Fédération dans les réunions unitaires nationales. Ce travail de collecte des informations, d’échanges avec les syndicats de la Fédération, de préparation, de réunions et de comptes rendus demande du temps et la concertation d’une équipe. Nous avons besoin de davantage de coordination et de davantage
de camarades impliqués dans des tâches nationales pour construire le saut qualitatif dont notre fonctionnement fédéral a besoin. Cela doit nous mener à une réflexion approfondie sur notre fonctionnement syndical réel, sur les besoins de formation des militants, sur les demandes des syndicats à la Fédération, sur la construction de ceux-ci.
Un fonctionnement fédéral n’est pas la seule construction d’un appareil logique de prises de décisions c’est aussi la mise en place pratique d’une orientation définie en congrès. Et c’est peut être d’abord cela. Ce n’est pas à l’orientation de rentrer dans un fonctionnement mais bien à ce dernier de servir cette orientation, de la faire connaître, de la développer, d’échanger avec les adhérents et les syndicats et les aider dans leurs interventions syndicales.
Analyses et questions stratégiques
epuis le congrès fédéral de Clermont-Ferrand de 2006, le contexte économique, social, politique, institutionnel et idéologique s’est profondément modifié tant au plan national qu’au niveau international. Ces changements souvent brutaux ont bouleversé les conditions pratiques de notre intervention. Ils ne sauraient être sans conséquence sur nos positionnements.
La crise qui s’est développée depuis août 2007 signifie la fin d’une période ouverte dans le courant des années 70 et marquée par une offensive menée par les classes dirigeantes sur les terrains idéologique, économique, social et politique afin d’imposer une restauration des profits qu’une vingtaine d’années de régulation « keyneso-fordienne » avaient contribué à éroder. Prétextant l’impératif absolu de compétitivité, au cours des trente dernières années, les entreprises se sont lancées dans la poursuite systématique de gains de productivité et une diminution drastique du coût du travail. Pour parvenir à leurs fins, les patrons ont généralisé la flexibilité et étendu, autant qu’il était possible, la précarité des emplois. Dans le même temps, ils ont obtenu des gouvernements le démantèlement partiel des droits sociaux et en particulier du code du travail. Utilisant les salaires comme variable d’ajustement, ils ont restructuré les entreprises pour réduire la masse salariale et délocalisé les activités de main d’œuvre vers les pays de la périphérie afin de bénéficier de conditions d’exploitation optimale permises par les situations socio-économiques locales. Dans cette course à la rentabilité, les taux de rendement de 10 à 15% sont devenus la norme. Ces profits ont, en grande partie, contribué à alimenter une spirale spéculative dont le développement était rendu possible par la déréglementation des marchés de capitaux et la multiplication d’instruments de placement de plus en plus sophistiqués. La pérennisation du système exigeait que soit dépassée la contradiction entre une offre croissante de marchandises et une demande bridée par une progression limitée des revenus du travail. Il fallait pourtant continuer à entretenir le mirage d’une croissance sans limite et le prochain accès de tous au paradis de la consommation marchande. Puisque dans ce partage des gains de la valeur ajoutée les salariés étaient les grands perdants, la contradiction ne pouvait être surmontée qu’au prix d’un endettement massif des ménages les rendant vulnérables au moindre retournement de conjoncture. Lorsque celui-ci s’est produit dans le pays dominant, leur insolvabilité a précédé celle des institutions de crédit, provoquant l’une de ces crises de reproduction du capital qu’hier encore, les économistes « sérieux » ou les apologues du néolibéralisme décrétaient mortes et définitivement enterrées. S’est alors enclenchée une dynamique dépressive comme le capitalisme n’en avait pas connu depuis les années trente. C’est, dans ce contexte où une crise financière a servi de déclencheur à une crise classique de reproduction du capital que nous allons devoir déployer notre action syndicale.
Le rappel de ces quelques banalités n’est peut-être pas un exercice tout à fait inutile. Si nous entrons dans une phase nouvelle marquée par l’émergence d’autres conditions économiques, sociales, politiques et idéologiques, il est nécessaire de baliser les terrains d’affrontement et de prendre la mesure des enjeux auxquels nous allons être confrontés.
Le terrain économique d’abord. Il n’est pas d’exemple historique où l’on ne fasse payer la crise aux salariés. Ceux du secteur privé seront touchés en premier lieu, par la fermeture des sites de production et les licenciements. Ceux du secteur public le seront puisque l’alourdissement de la dette publique, provoqué par le financement des plans d’aide aux entreprises (sans contrepartie sous forme de prélèvements fiscaux sur les hauts revenus), devrait se traduire par une cure d’austérité. Déjà dans certains pays, on remet en cause les retraites payées aux fonctionnaires.
Le terrain social aussi. La progression de la paupérisation, le renforcement de la précarité du travail, la raréfaction des créations d’emploi et le chômage de masse vont être les caractères dominants de la période. Les expériences historiques précédentes montrent que les moments de crise représentent rarement une conjoncture propice au développement de mouvements de masse. Une telle situation encourage trop souvent les replis individualistes ou les régressions identitaires. On en voit déjà les premiers signes ; dans les pays anglo-saxons, des grèves sont lancées (et elles trouvent parfois l’appui de quelques syndicats) pour dénoncer la « concurrence » des travailleurs étrangers. Aux frustrations nées de l’écart croissant entre les promesses véhiculées par l’idéologie de la marchandise et les réalités vécues concrètement doivent s’ajouter les angoisses provoquées par les pertes d’emploi et la raréfaction des ressources monétaires.
Le terrain politique ensuite. Le durcissement des rapports sociaux et l’aggravation des tensions vont inciter les gouvernements à amplifier les politiques répressives qu’ils ont déjà largement engagées. Au nom de la lutte antiterroriste, les États (la France entre autres) ont organisé un dispositif législatif et réglementaire qui vise à étouffer toutes les formes de contestation. Ces tentatives de mise au pas du mouvement social se traduisent par une multiplication des opérations de basse police, des arrestations, des jugements qui cherchent à intimider tous ceux qui auraient des velléités de résister.
Le terrain idéologique enfin. La crise a peut-être contribué à délégitimer le discours néolibéral, elle ne l’a certainement pas fait taire. Aujourd’hui, même si les plus féroces défenseurs de la loi du marché ont prestement remballé leur marchandise, même si la fraction la plus pragmatique du patronat est prête à accepter la réintroduction de mesures keynésiennes, à appeler à de nouvelles régulations voire à consentir à la socialisation des pertes des institutions bancaires, ils ne sont pas prêts à renoncer à leurs projets. Exploitant autant que possible un rapport de forces qui leur est plutôt favorable, patronat et gouvernements vont tout faire pour pousser leur avantage, en invoquant les nécessaires sacrifices à consentir pour le bien-être des générations futures. Déjà les médias de la classe dominante ont trouvé la parade idéologique aux contestations du système : sus aux spéculateurs, moralisons les affaires, au vilain capitalisme financier opposons le vertueux capitalisme industriel créateur de richesses… L’avenir serait au « capitalisme moral », une vieille soupe qu’ils tentent aujourd’hui de resservir.
C’est dans ce paysage que nous allons devoir agir en tant que salariés et en tant que travailleurs de l’éducation. Beaucoup dépendra de la manière dont à un moment ou à un autre nous sortirons de la crise.
Allons-nous vers une sortie « classique » avec une reprise progressive de l’activité économique, dans un rapport de forces favorable à un patronat cherchant à reconstituer ses marges de profit par un renforcement de la flexibilité et de la précarité (en particulier dans le secteur public), par un grignotage des dernières miettes du droit social et (au nom du réalisme) la mise sous éteignoir des revendications ?
À l’issue d’une période où la poursuite du profit s’est faite au prix d’un pillage massif des ressources naturelles et par une croissance sans précédent de la socialisation de la pollution qui risque de mettre en jeu l’avenir de l’humanité, allons-nous vers une réorganisation brutale des rapports de production et un nouveau régime d’accumulation du capital ?
Dans ce cas peut-on écarter totalement l’hypothèse d’une sortie de crise comparable à celle que connurent certains pays dans les années trente : imposition d’un régime autoritaire, répression brutale des mobilisations sociales et instauration de stricts modes de contrôle de la population ? On imagine que face à de tels enjeux l’unité des travailleurs au niveau national (et au niveau international) soit une nécessité absolue.
Or, de ce point de vue, la situation n’est guère brillante. Depuis les années 80, prenant acte des transformations majeures intervenues dans la société (mondialisation et globalisation du capital, désindustrialisation partielle et tertiarisation des économies du centre, délocalisation de certaines activités vers la périphérie, destruction des collectifs de travail par la flexibilité…) les syndicats majoritaires ont fait le choix de se couler progressivement dans les institutions de la cogestion sociale. En France, le mouvement a été initié dès la fin des années 70 par une CFDT choisissant la politique de recentrage. Peu à peu, en essayant de surmonter leurs contradictions internes, FO et la CGT (cette dernière un peu plus laborieusement à cause de son histoire) sont en train de la rejoindre. Le projet se veut « moderne » et « réaliste ». Il s’agit de transformer les organisations syndicales en groupes de pression combinant, dans un même mouvement dialectique, lobbying et partenariat afin d’obtenir ainsi reconnaissance et participation à des négociations institutionnalisées. Dans un contexte général de désyndicalisation, cette nouvelle forme de syndicalisme n’a plus besoin d’adhérents, elle a tout juste à mesurer sa légitimité à l’aune des élections professionnelles.
Dans cette configuration, les mobilisations ne se construisent jamais dans une perspective d’affrontement, mais comme un petit capital que l’on gère avec prudence et parcimonie pour servir d’atout et maintenir la pression au moment des négociations. Celles-ci devant rester inscrites dans un cadre étroit, strictement délimité, où les discussions ne portent que sur les modalités d’application de « réformes » décidées par les gouvernements mais dont le principe ne sera jamais mis en débat. Dans cette partie où les rôles sont convenus, où la bienséance exige de ne jamais transgresser les bornes qui ont été fixées, gouvernements et patronat savent que quelle que soit l’ampleur d’une mobilisation, ces syndicats respectables ne choisiront jamais un affrontement direct qui risquerait de remettre en cause leurs quelques avantages (symboliques ou matériels) acquis.
Dans ces conditions, la situation de crise que nous vivons peut-elle provoquer une révision stratégique de ce syndicalisme-là ? Non. À bien des égards, il est trop tard. Pour les plus avancés sur la voie du « partenariat social » un aggiornamento aussi brutal signifierait la perte brutale des « dividendes » que promet une participation loyale à la cogestion sociale. Pour les autres, la crainte de l’isolement et de la marginalisation, la volonté de maintenir l’unité quelle qu’en soit le prix à payer, les inciteront à poursuivre leur dérive vers une intégration de plus en plus poussée, celle que, justement, réclament patronat et gouvernements. Est-ce là le signe d’une trahison des directions syndicales ? Même pas. Il s’agit plutôt d’un choix stratégique cohérent et pleinement assumé. Celui d’organisations qui considèrent que la lutte des classes s’est éteinte parce que, aujourd’hui, il n’y aurait plus de classes sociales à proprement parler et qui se résignent à ce que le capitalisme soit une sorte de « fin de l’histoire » dont il faudra s’accommoder. Pour ceux-là, l’avenir ne s’inscrit plus dans la perspective d’une transformation de la société mais il se dessine comme une sorte de partenariat permanent, « gagnant-gagnant » comme ils disent, dont l’objectif se limite à gommer les aspérités les plus rugueuses de l’organisation sociale.
Face aux attaques du patronat et des gouvernements, l’unité des travailleurs est un impératif absolu. Elle doit d’abord se construire à la base Nous devons être présents à l’intersyndicale sur nos revendications propres et savoir la quitter si ni nos revendications, ni nos objectifs ne sont pris en compte. Les questions qui restent essentielles à porter sont :
✴ lutte contre la répression et la défense des libertés ;
✴ lutte contre la précarité ;
✴ défense des droits sociaux et en particulier du droit de grève ;
✴ lutte contre les « réformes » néolibérales et pour la défense des services publics dans un cadre inter catégoriel favorisant la convergence des luttes.
La question de l’unité syndicale avec d’autres organisations syndicales se pose quotidiennement sur nos lieux de travail ; cette unité est souhaitable à chaque fois qu’elle est utile, mais notre action syndicale n’en dépend pas.
Palestine
Le sommeil de la raison engendre des monstres – Goya
La récente agression contre Gaza a mis en évidence l’urgence d’une solution au conflit. Même les observateurs les plus indulgents à l’égard de la politique expansionniste israélienne ont dû admettre que cette fois-ci, les bornes étaient dépassées en matière de massacres de civils et de crimes de guerre en tous genres, voire de crimes contre l’humanité.
Il est apparu clairement que l’objectif affiché, en finir avec le Hamas, cachait en réalité la volonté d’en finir… avec le peuple palestinien lui-même. Dans le style des « guerres indiennes » des États-Unis du XIXe siècle, ce qui se profile à l’horizon, si la communauté internationale ne s’y oppose pas, est d’abord d’éliminer le plus possible de Palestinien-ne‑s sous prétexte de lutte anti-terroriste, puis d’enfermer les survivants dans des sortes de « réserves » – les cantons – où ils pourraient crever à petit feu, et en silence.
Il faut arrêter au plus vite cette folle et meurtrière fuite en avant de l’État d’Israël. Aucun peuple ne peut fonder son légitime droit à l’existence sur l’extermination d’un autre peuple.
Israël, État colonial
La contradiction insurmontable qui a mené à l’offensive contre Gaza de fin 2008-début 2009 se trouve dans le projet sioniste lui-même : celui d’établir un « État juif », et non binational, sur un territoire qui n’était pas un désert, et dont le peuple autochtone refuse de renoncer à ses droits nationaux. Dès sa création, l’État d’Israël a procédé au nettoyage ethnique connu comme la Naqba, expulsant 800 000 Palestiniens, soit 80% des habitants du territoire qu’il s’attribuait à l’époque.
Cette expulsion massive de 1947 – 49 qui a été au départ de la création de l’État d’Israël a fait d’une grande partie du peuple palestinien un peuple de réfugiés. C’est notamment le cas d’une part importante de la population gazaouie d’aujourd’hui. Aucune solution définitive au conflit ne peut faire l’impasse sur le droit au retour sur leurs terres que réclament les réfugiés et leurs descendants.
La même politique s’est poursuivie jusqu’aujourd’hui. Le semblant de partage du territoire instauré par les accords d’Oslo avait pour l’État d’Israël la seule fin de ne pas intégrer la population palestinienne trop nombreuse de Cisjordanie et Gaza. Le double but était atteint : préserver un État sioniste pratiquement homogène, et empêcher la création d’un État palestinien viable au profit d’un protectorat sourcilleux sur les zones discontinues prétendues autonomes.
Cela rappelle l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, où les bantoustans étaient eux aussi présentés comme des zones « autonomes ». Le plan israélien consiste de fait à créer un pseudo-État palestinien tronqué, composé de quatre cantons sans aucun lien entre eux, trois en Cisjordanie et un à Gaza. En annexant les blocs importants de colonies délimités par le mur, Israël s’étend sur 85% du pays, laissant aux Palestiniens confinés dans des enclaves manquant de tout les 15% de leur terre qui leur restent. Avec une telle « solution à deux États », Israël contrôle les frontières, les déplacements internes et externes des Palestiniens, le « grand » Jérusalem, toutes les ressources en eau, l’espace aérien, les communications et même la politique étrangère de l’État palestinien. Un tel bantoustan n’aurait ni souveraineté véritable ni économie viable, mais devrait recevoir tous les réfugiés palestiniens, traumatisés et appauvris.
L’État d’Israël s’est formé comme un État colonial et il en garde toutes les caractéristiques.
En Israël comme ailleurs, il y a, cela va de soi, des exploiteurs et des exploités. Toutefois, on ne peut se contenter de s’en remettre aux exploités israéliens pour faire triompher la solution la plus juste au conflit. Le caractère colonial de l’État d’Israël fausse leur conscience au point de les jeter massivement dans les bras de leurs exploiteurs. On avait pu observer le même phénomène en Algérie à la fin de la colonisation : la grande majorité des exploités pieds-noirs avait versé du côté de l’OAS fasciste et défendait les intérêts des grands colons, leurs exploiteurs.
Il faut saluer l’immense courage des militants israéliens pacifistes, anticolonialistes et refuzniks, mais on est aussi obligé de constater leur isolement dans leur propre pays. Leurs seules forces ne suffiront pas à arrêter le massacre et à résoudre le conflit.
Israël, auxiliaire de l’impérialisme en particulier étasunien
La déclaration Balfour (1917) en faveur de l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif était déjà liée à la défense des intérêts de l’empire britannique : rechercher le soutien des banquiers britanniques et américains de confession juive, contrer la présence française au Liban et maîtriser les zones riches en pétrole en protégeant l’accès aux Indes (canal de Suez).
Même si la mémoire du génocide juif et des six millions de morts a installé progressivement l’idée que la constitution de l’État d’Israël et l’ensemble de ses décisions politiques ne sont que la conséquence logique et la seule réponse possible aux horreurs perpétrées par les Nazis, ce sont les Palestiniens, pourtant totalement étrangers aux événements tragiques de la deuxième Guerre Mondiale, qui en ont fait les frais.
Suite au plan de partage de la Palestine (1947) et à la déclaration du 14 mai 1948 qui marque l’annonce officielle de sa naissance, le nouvel État israélien a choisi son camp, celui de la coopération avec les États-Unis. En 1956, lorsque le dirigeant égyptien Nasser a nationalisé le Canal de Suez, Israël a été partie prenante de l’opération franco-britannique visant à reprendre le contrôle du Canal. Puis, Israël s’est adapté progressivement aux changements qui se sont opérés dans les rapports de force entre puissances impériales et a fait preuve de son allégeance à l’impérialisme devenu dominant : l’impérialisme étasunien. En juin 1967, l’armée israélienne a écrasé, lors de la Guerre des Six jours, les armées arabes et notamment celles de deux adversaires déclarés des États-Unis, l’Égypte et la Syrie.
Israël a ainsi porté un coup fatal au nationalisme arabe, qui ne s’est jamais relevé de cette défaite. Il a montré son rôle de précieux auxiliaire régional, s’assurant ainsi du soutien quasi-indéfectible des États-Unis, tout en conquérant, entre autres, la Cisjordanie et la Bande de Gaza, achevant de la sorte la conquête de l’ensemble de la Palestine. Aujourd’hui sa tâche est de neutraliser les deux facteurs qui inquiètent le plus les États-Unis dans la région : le peuple palestinien et la résistance libanaise, notamment le Hezbollah. Il est clair que l’Iran est désormais dans la ligne de mire.
L’échec d’Oslo et ses conséquences
On peut toujours regretter, et c’est notre cas, qu’une orga- nisation confessionnelle comme le Hamas représente aujourd’hui la quasi-majorité du peuple palestinien. Mais on est bien obligé de constater que c’est le résultat d’un vote (en 2006) dont tous les observateurs ont souligné la régularité et la loyauté. À moins de considérer, comme le font le gouvernement des États-Unis et l’Union européenne, que la démocratie, ça compte seulement quand on « vote bien », on ne peut que prendre acte de cette réalité.
Remarquons que la victoire électorale du Hamas a un sens politique, plus que religieux. La corruption généralisée dans l’Autorité palestinienne, dont bien des membres exhibent un luxe insolent face à la misère générale, n’y est pas pour rien. D’autre part, le programme politique défendu durant la campagne électorale n’a rien à voir avec le contenu de la Charte de 1988. Mais c’est sans doute l’échec de la politique de négociation qui a joué le rôle principal. À l’impasse des discussions sur les réfugiés et sur Al Qods-Jérusalem se sont ajoutées les pratiques autoritaires de l’Autorité palestinienne qui, après s’être opposée à la seconde Intifada, a tout fait pour saper, voire liquider, les structures auto-organisées. La gauche palestinienne laïque (FPLP, FDPLP…), qui n’a pas su se situer face à ce processus, s’est elle aussi trouvée broyée par cet échec.
Le Hamas, qui alliait le soutien matériel à la population (hôpitaux, écoles, aides financières directes) à une critique virulente du processus d’Oslo et à l’appel à une poursuite de la résistance est alors apparu comme « l’autre voie ».
L’intervention militaire israélienne dans la Bande de Gaza a encore renforcé la place du Hamas comme acteur principal de la résistance et a définitivement discrédité l’Autorité palestinienne et le Fatah.
La situation de la population
L’isolement de la Bande de Gaza et la fragmentation de la Cisjordanie en plusieurs dizaines d’entités territoriales séparées les unes des autres par des points de contrôle israéliens réduisent considérablement toute activité économique sociale et politique. Les difficultés de réunion et de déplacement rendaient déjà particulièrement difficile l’organisation d’actions coordonnées. Le blocus de la Bande de Gaza auquel il faut désormais ajouter la destruction des infrastructures, accroissent encore les disparités territoriales et pèsent lourdement sur les possibilités d’organiser une résistance unifiée sur l’ensemble des territoires palestiniens.
L’asphyxie économique conduit, bien évidemment, la quasi-totalité des habitants des territoires palestiniens à se préoccuper davantage de leur survie que de la lutte d’émancipation et encourage l’individualisme. Le maintien de structures collectives de solidarité et de secours est donc un enjeu majeur.
Les tâches pour aujourd’hui
Il y a urgence, on le disait au début, à reconnaître au peuple palestinien un pays où il puisse vivre dans la paix et la liberté de s’auto-gouverner.
Cela dit, l’État d’Israël fait tout pour rendre cette solution impossible.
Ses exactions à l’égard des Palestiniens ne sont pas des « débordements », mais une politique sciemment calculée qui, en accumulant la haine, vise à empêcher la coexistence pacifique des deux peuples. De nouveaux motifs de crainte apparaissent, par exemple, concernant le sort des Palestiniens vivant en Israël.
Quoi qu’il en soit, cela ne change guère les tâches urgentes qui sont les nôtres : peser pour que la communauté inter- nationale impose à Israël de laisser le peuple palestinien vivre en paix et s’auto-administrer sur les lambeaux de pays que lui ont laissé les accords d’Oslo, ce qui suppose bien entendu l’évacuation de toutes les colonies et le démantèlement du mur. Ce serait déjà un début. Il semble indispensable de calmer les esprits pour pouvoir envisager la solution à long terme. Il est évident qu’il n’y aura pas de sécurité pour le peuple israélien sans sécurité et reconnaissance des droits du peuple palestinien.
Nous devons lutter prioritairement pour le retrait total des troupes israéliennes du territoire de Gaza, la levée définitive de ce blocus, la réouverture de tous les points de passage entre la bande de Gaza et l’extérieur et le rétablissement de la continuité territoriale avec la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est.
Nous devons défendre l’idée de sanctions contre l’État israélien notamment la suspension des accords passés dans les domaines commerciaux, scientifiques, technologiques, militaires et sécuritaires.
Nous devons dans cette optique participer à la campagne BDS (boycott-désinvestissement-sanctions), lancée en 2005 par la société civile palestinienne (ONG et autres), et relayée par de nombreux syndicats anglo-saxons et nordiques.
Nous devons soutenir les initiatives réclamant des poursuites pour crimes de guerre ou crimes contre l’humanité.
Nous devons soutenir et faire connaître le combat du mouvement israélien pacifiste, anticolonialiste et refuznik.
Nous devons également soutenir, en Palestine même, toutes les initiatives de défense collectives : associations de femmes, coopératives agricoles, syndicats indépendants de l’Autorité Palestinienne, comités de familles de prisonniers, comités de village, centres culturels dans les camps de réfugiés, etc.
Nous devons continuer obstinément à organiser l’envoi de missions syndicales en Palestine et en Israël, malgré l’obstruction des autorités israéliennes qui ont expulsé l’an dernier une de nos camarades.
Motions d’actualité
CRA Vincennes
Le 22 Juin 2008, un incendie avait détruit le centre de rétention de Vincennes. La veille, un retenu tunisien y était mort dans des circonstances encore non élucidées. La marche silencieuse organisée par les retenus à la suite de ce décès avait été fortement réprimée, déclenchant une révolte collective au cours de laquelle le centre a brûlé.
Depuis l’incendie, l’État a multiplié les arrestations de retenus présents ce jour-là, dans le souci évident de faire des exemples et de dissuader les gestes de révolte. Huit personnes sont à ce jour poursuivies pour « destruction de biens par l’effet d’incendie et violence à agent de la force publique avec une incapacité totale de moins de cinq jours en réunion » et risquent jusqu’à dix ans de prison. Sept inculpés ont déjà passé près de huit mois en détention préventive, se voyant régulièrement refuser leurs demandes de mise en liberté. Depuis le mois de mars, quatre d’entre eux ont pu sortir de prison en attente du procès (l’un d’eux étant hospitalisé dans un état grave suite au coma provoqué par une agression dans sa cellule). Mais l’acharnement continue contre Ali Diallo, Mahamadou Dramé et Moïse Diakité qui restent incarcérés à Fleury, les appels déposés par leurs avocats étant systématiquement rejetés par le juge. Ils auront le mois prochain passé plus de dix mois emprisonnés. SUD éducation réclame leur libération et exprime à tous et à chacun son entière solidarité et son soutien.
Ce n’était ni la première ni la dernière révolte dans les centres de rétention, qu’il faut nommer pour ce qu’ils sont
: des prisons spéciales où sont enfermés hommes, femmes et enfants pour la seule raison qu’ils ne possèdent pas de papiers administratifs les autorisant à séjourner en France. Grèves de la faim, refus de comptage, départ de feu, tentatives de suicide ou d’évasion… les actes individuels ou collectifs de désespoir et de révolte dans les Centres de Rétention Administrative (CRA) sont de plus en plus fréquents ces derniers mois en France (Nantes, Mesnil-Amelot, Bordeaux, Toulouse…) comme dans le reste de l’Europe (Lampedusa en Italie, Steenokkerzeel en Belgique…) où sévit la même politique. Ces actes de révolte persisteront, non pas parce que ces retenus sont des criminels, des délinquants ou des pyromanes, mais parce qu’ils sont des êtres humains – pas des numéros d’étrangers – et parce que l’existence même de ces centres est révoltante.
La réponse de l’État français à l’incendie du 22 juin c’est l’acharnement judiciaire contre les inculpés et la reconstruction du 1er des trois centres de rétention sur les cendres de celui-là même qui a brûlé.
SUD éducation condamne la brutalité et le cynisme qui caractérisent la politique de l’immigration actuelle et réclame la libération immédiate des 3 inculpés encore en détention préventive, l’arrêt des poursuites contre chacun des huit inculpés pour l’incendie du 22 juin, leur régularisation et la fermeture des centres de rétention.
Réactivation d’une commission fédérale femmes
On assiste à un retour à des valeurs traditionnelles remettant en cause notamment les droits des femmes : certains droits durement acquis ne sont pas respectés (I.V.G.), arrêt du rattrapage salarial, retour d’un machisme décomplexé, plafond de verre pour les femmes pour l’accès aux postes clés qu’ils soient politiques ou économiques, retour en force d’une conception des femmes archaïque (ont-elles une âme ?)…
Notre syndicat s’affichant par ses statuts comme féministe, il nous semble nécessaire de réactiver une commission fédérale femmes avec un temps de décharge : le travail est immense et urgent. Ceci afin de produire une réflexion et des textes dans ce domaine. Cela permettrait aussi de participer à la commission femmes de Solidaires et à la marche mondiale des femmes de 2010 par exemple. Plusieurs pistes pourraient être envisagées :
reproduction du sexisme à l’école,
1. discrimination sexiste dans les manuels scolaires (cf. texte de la Haute Normandie).
2. attitudes sexistes dans la classe (prise de paroles, appréciations…).
3. orientation des élèves.
sexisme et syndicat,
sexisme et monde du travail,
… la liste n’est pas exhaustive.
Formation des enseignants
Réunie en congrès à Cherbourg le 7 mai 2009, la Fédération SUD éducation réaffirme son opposition au décret des ministres
Darcos et Pécresse sur la formation des enseignants. Ce décret organise un tri social par l’allongement à 5 ans (au lieu de
4) de la durée des études non rémunérées avant le recrutement (et la suppression d’une année salariée donnant lieu à cotisations sociales).
La politique des ministres généralise la précarité des personnels ! Les titulaires d’un master non reçus aux concours seront les premiers recrutés par l’Agence nationale des Remplacements.
SUD éducation exige le retrait des décrets.
Directrices-directeurs sanctionnéEs
Plusieurs directrices-directeurs sont menacéEs d’être démisEs de leurs fonctions de direction UNIQUEMENT parce qu’elles-ils refusent de ficher leurs élèves dans Base Élèves. Ces sanctions pour l’exemple seraient particulièrement graves et sûrement uniques au regard des reproches faits. La compétence de ces collègues n’est nullement remise en cause et réduire la fonction d’une directrice‑d’un directeur à la seule activité de renseigner BE1d, qui pose de nombreuses questions éthiques, n’est pas acceptable.
Le Congrès de la Fédération des syndicats SUD éducation ne saurait laisser sanctionner des collègues qui ne font qu’exercer leur vigilance de citoyens.
Le Congrès de la Fédération des syndicats SUD éducation entend s’opposer à cette injustice et leur apportera son soutien moral, juridique et financier (par le biais de la caisse de solidarité).
Soutien aux enseignantEs résistantEs
Depuis la rentrée 2008 des enseignantEs du primaire sont entréEs en résistance par la voie du refus d’obéissance aux multiples réformes visant au démantèlement du service public d’éducation.
À Marseille, à Toulouse, à Montpellier, à Paris, à Grenoble, à Créteil… les pressions de toutes sortes contre les enseignantEs résistantEs s’intensifient et les sanctions à leur encontre ne cessent de pleuvoir.
Les inspections académiques s’enferment dans une répression disproportionnée visant à faire entrer dans le rang les enseignantEs qui refusent de se rendre complices en appliquant les dispositifs qui remettent en cause le sens profond de leur mission.
SUD éducation demande la prise en compte des revendications suivantes :
arrêt des suppressions massives de postes et rétablissement des postes supprimés
rétablissement des postes RASED
maintien de la spécificité de l’école maternelle et retrait du projet de jardin d’éveil
maintien des IUFM
abandon définitif du projet des EPEP
retrait du projet de création d’une agence nationale du remplacement
retrait du fichier Base-élèves
abrogation du décret sur l’aide personnalisée
respect du rythme de vie des enfants
respect du droit syndical
retrait de la loi obligeant les enseignantEs du primaire à se déclarer préalablement grévistes ; retrait de la loi sur le service minimum d’accueil
C’est à dire le retrait de toutes les mesures qui sont la mise en application de l’AGCS et des accords de Bologne (1999).
Le congrès de la Fédération des syndicats SUD éducation exprime son soutien résolu au mouvement des enseignantEs résistantEs.
Le congrès de la Fédération des syndicats SUD éducation s’insurge contre la dérive sécuritaire et répressive du système éducatif et demande la levée de toute sanction à l’égard de ces enseignantEs.
Supérieur : poursuivre la lutte
Une lutte exemplaire
Le gouvernement est confronté à une contestation globale de tous ses projets touchant à l’enseignement supérieur et à la recherche de la part des personnels, syndiqués et non-syndiqués, des associations professionnelles, et d’un certain nombre d’organisations syndicales.
Le gouvernement a attaqué sur tous les fronts : enseignantEs-chercheurEs, bourses des étudiants, statut des doctorantEs, formation des enseignantEs, réforme des concours, suppressions de postes, primes au mérite modulables pour les BIATOSS, diminution des budgets, dislocation des organismes de recherche type CNRS,… Ces réformes s’inscrivent dans une logique libérale de gestion concurrentielle et anti-égalitaire du système éducatif et de marchandisation du savoir, de la maternelle à l’université. Au delà de l’éducation, la même logique est à l’œuvre dans toutes les fonctions publiques : hôpital, justice…
La lutte qui s’est développée depuis six mois est exemplaire par son caractère intercatégoriel unissant dès l’origine enseignantEs-chercheurEs, enseignantEs, chercheurEs et BIATOSS, avec les étudiantEs ; par son désir de s’étendre aux autres niveaux du monde éducatif (primaire et secondaire) et de faire le lien avec les parents d’élèves ; par la reconnaissance des coordinations nationales par les organisations syndicales, bien que certains syndicats aient accepté de négocier avec le gouvernement au mépris des décisions desdites coordinations.
D’autre part, cette lutte est passée de revendications sectorielles à des revendications unifiantes, puis à une approche plus politique conduisant rapidement les coordinations à demander l’abrogation de la loi dite « relative aux libertés et responsabilités des Universités » (LRU) qui date pourtant de plus d’un an (10 août 2007).
Des manœuvres du pouvoir
Face à l’ampleur de ce mouvement, le gouvernement a feint d’abord de reculer (effets d’annonces, réécritures trompeuses, pseudo moratoires) pour diviser le front uni de contestation et a finalement opposé une fin de non recevoir aux revendications telles qu’elles sont exprimées par le mouvement, en jouant sur le chantage de l’invalidation des examens.
Les médias, à la botte du pouvoir, ont filtré et déformé l’information. Ils ont présenté le mouvement comme une contestation catégorielle émanant des seulEs enseignantEs- chercheurEs supposéEs ne revendiquer que la suppression du décret portant réforme de leur statut ; puis dans un deuxième temps, ils ont évoqué le refus d’une réforme des concours présentée comme facteur de progrès ; actuellement, ils se font le relais des menaces ministérielles concernant la validation des examens.
Nous devons mettre en place des stratégies pour résister à ce type de chantage hiérarchique et médiatique.
Le pouvoir et ses relais, en particulier un certain nombre de présidentEs d’université, ont également recouru à des mascarades pénales pour condamner des étudiantEs et personnels mobilisés, ainsi qu’à de violentes interventions policières pour tenter de mettre fin par la force à un mouvement actif et profond qu’ils veulent ignorer.
Nous dénonçons cette violence institutionnelle qui criminalise les mouvements revendicatifs dans chaque secteur de la société.
Nous nous battons pour :
le rejet pur et simple de l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) et des accords de Bologne dans le cadre desquels se déroule l’ensemble des réformes actuelles,
l’abrogation de la LRU et ses conséquences : décret sur le statut des enseignantEs-chercheurEs, contrat doctoral unique, principes de dotation budgétaires (système SYMPA)…, du pacte pour la recherche, et l’ouverture de négociations pour une autre loi,
l’abrogation de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et de la loi de Révision générale des politiques publiques (RGPP),
le retrait de la réforme dite de « mastérisation des concours d’enseignement ». Cette réforme signifie pour les étudiantEs futurEs enseignantEs un allongement coûteux des études (facteur de sélection sociale et de discrimination), la disparition de la formation rémunérée, et la perte du statut de fonctionnaire d’État pour les futurEs enseignantEs des premier et second degrés. Nous nous prononçons pour un recrutement national au niveau d’études actuel, avec la reconnaissance au niveau master des deux années de prépa- ration et de stage,
l’abrogation du décret sur l’annualisation du temps de travail des personnels BIATOSS, de même que nous refusons l’annualisation du temps de travail des personnels TOS décentralisés dans les collèges et les lycées ; la suppression de l’Aménagement de la réduction du temps de travail (ARTT),
l’arrêt du démantèlement des organismes publics de recherche, dont le rôle d’opérateur de recherche doit être fermement défendu,
le rétablissement des postes supprimés en 2009 et la mise en place d’un plan pluriannuel de création d’emplois statutaires concernant l’ensemble de la communauté universitaire, ainsi que la résorption de la précarité,
l’augmentation générale des salaires des personnels non enseignants, la fin des primes au mérite et leur intégration dans le salaire,
le refus de l’évaluation individualisée de tous les personnels,
l’instauration d’un salaire minimum étudiant, l’arrêt du démantèlement du CROUS, le refus de l’augmentation prévisible des frais d’inscription, conformément aux reven- dications des étudiantEs
le retrait de l’accord Kouchner/Vatican qui ouvre la voie à la délivrance de diplômes universitaires par le privé (en particulier confessionnel)
un service public d’État d’enseignement supérieur et de recherche. Nous reconnaissons les coordinations nationales issues des coordinations locales et des assemblées générales de personnels et d’étudiantEs, ainsi que leurs revendications actuelles.
En conséquence, nous appelons l’ensemble des personnels à se joindre au blocage des bâtiments universitaires et à toutes les manifestations et actions proposées par les Coordinations nationales de l’Éducation, Coordinations nationales des Universités et différentes AG locales.
Nous appelons l’ensemble des personnels à trouver les différentes modalités de validation du semestre permettant à toutes et tous de passer dans le diplôme et/ou l’année supérieure et de continuer et d’amplifier la lutte.
Nous appelons à renforcer l’unité, afin de porter à l’intérieur de nos champs de lutte et de syndicalisation un projet alternatif et démocratique indissociable d’un statut de fonctionnaire d’État protégeant tous les personnels.
Pour mener à bien ce combat, voué à s’inscrire dans le long terme, la convergence des luttes est nécessaire, non seulement au sein du système éducatif national, mais encore avec les luttes appelées à se développer dans les secteurs public et privé, ainsi qu’au plan international, où la mondialisation ultralibérale génère des processus identiques. Ces luttes doivent se mener dans la perspective de la construction de la grève générale, avec les organisations syndicales, au sein des assemblées générales de personnels, syndiqués comme non syndiqués, dans les coordinations et collectifs nationaux et locaux, dans chaque secteur comme au niveau inter- professionnel public-privé.
Remise en cause du droit de grève
La Fédération des syndicats SUD éducation réaffirme son opposition aux atteintes aux droit de grève que constituent l’obligation de négociations préalables (13 jours de délai imposé), la déclaration obligatoire d’intention de grève (48h à l’avance) et l’instauration du Service Minimun d’Accueil (SMA).
Cette remise en cause du droit de grève de tous les enseignants du premier degré préfigure de fait une généralisation à tous les personnels de l’éducation.
La Fédération des syndicats SUD éducation, lors de son congrès de Cherbourg, décide du lancement d’une campagne d’information de l’ensemble des personnels en vue d’aboutir à une mobilisation forte : il s’agit d’exiger le retrait pur et simple du dispositif SMA et de ses corolaires, la déclaration d’intention de faire grève et l’obligation de négociations préalables.
Les syndicats sont invités à mutualiser les informations concernant la mise en œuvre de cette procédure par leur administration locale, les répressions contre les personnels et les ripostes syndicales envisagées.
À l’heure actuelle, les personnels du premier degré ne sont plus couverts par les préavis déposés régulièrement par la
Fédération. Ils n’ont plus le droit de se mettre en grève sur le champ dans le cadre de ce dispositif. Quelles réponses donnons-nous au niveau fédéral et local ?
Notre Fédération doit débattre de cette question lors du prochain CF sur la base de propositions faites par des syndicats.
Immigration Sans-papiers
La politique de la France en matière de migrations est en parfait accord avec celle décidée au niveau de l’Europe, qui se transforme en une véritable forteresse et met en œuvre des moyens démesurés pour empêcher l’accès à son territoire et expulser les sans-papiers. Le caractère essentiellement sécuritaire du traitement des flux migratoires entraîne des milliers de morts, et les choix économiques mis en œuvre maintiennent le continent africain en marge du développement. Les accords bilatéraux entre la France et les pays traditionnellement fournisseurs de main d’œuvre les placent dans l’obligation de réprimer eux-mêmes les flux migratoires en direction de la France en échange de maigres subsides. Les camps de rétention, où sont entassés les migrants, se multiplient aux portes de l’Europe (Mauritanie, Lybie, etc.)
Voulue par Sarkozy, mise en place par le gouvernement Fillon et menée salement, hier par Hortefeux « sans état d’âme », aujourd’hui par Besson également « sans état d’âme », c’est de la xénophobie d’État. Une politique indigne qui, en stigmatisant l’étranger, incite au racisme et au communautarisme.
En France, comme dans toute l’Europe, des femmes, des hommes et des enfants vivent dans la peur quotidienne d’être arrêtés, puis enfermés dans un centre de rétention avant d’être expulsés, simplement pour un défaut de papier.
Les luttes, dans les entreprises, des travailleurs sans-papiers, qui se sont multipliées depuis un an ont donné à la fois un nouvel éclairage et un nouveau souffle dans le combat pour la régularisation des sans-papiers.
Aux valeurs humanistes de l’application des Droits de l’Homme se sont ajoutées les valeurs de solidarité ouvrière, de lutte de classe : il s’agit bien de défendre l’égalité des droits de tous les travailleurs. Loin de s’opposer, ces deux conceptions sont complémentaires.
Le projet du gouvernement est de faire basculer l’immigration familiale vers une immigration professionnelle. Cette politique de « l’immigration choisie » bouleverse les stratégies des luttes pour la régularisation. L’empilement des circulaires ministérielles, au gré de l’actualité, permet à l’administration des décisions d’une opacité et d’un arbitraire débridé.
Le gouvernement n’ignore pas que les sans-papiers travaillent pour survivre. Ils sont des milliers dans la restauration, l’hôtellerie, l’agriculture, le bâtiment, l’aide à la personne, le gardiennage… Leurs conditions d’exploitation tirent l’ensemble des salaires et des droits sociaux de ces secteurs vers le bas. Les autorisations de travail sont soumises au bon vouloir du préfet sur la base d’une liste des métiers très réduite et qui dépend de l’origine du demandeur. Travailleurs illégaux, dans une totale dépendance vis à vis de leurs patrons, ils sont confrontés à la précarité, la surexploitation et le non-droit. La politique du gouvernement s’inscrit dans une perspective utilitariste. N’est acceptable que l’étranger perçu comme rentable pour l ’économie française. Cette logique s’inscrit dans la logique libérale qui tend à imposer flexibilité et précarité à l’ensemble du salariat.
Laisser perdurer les inégalités entre travailleurs, c’est affaiblir l’ensemble du monde du travail.
Pour imposer sa politique xénophobe, le gouvernement tente d’enrôler les agents des services publics (Inspection du travail, Assedic, ANPE, Sécurité sociale, travailleurs sociaux, Éducation nationale, La Poste.…) dans le contrôle policier des étrangers.
Nous nous engageons collectivement à faire de la lutte des travailleurs sans-papiers pour leur régularisation l’une de nos priorités, afin d’y jouer un rôle moteur, d’intervenir dans un sens anti-utilitariste et pour l’égalité au travail.
Dans l’unité, il faut mettre notre syndicalisme au service du renforcement de ces luttes dans chaque département :
Les syndicats SUD éducation se donneront les moyens de renforcer les équipes locales investies sur cet enjeu, en dégageant du temps et des militants, par le biais de décharges syndicales par exemple.
SUD éducation favorisera la création de permanences interprofessionnelles « travailleurs sans-papiers » partout où cela est possible avec les syndicats Solidaires locaux, avec d’autres organisations syndicales, en lien avec les associations de défense des immigrés, les Collectifs de sans-papiers, les réseaux locaux.
les syndicats SUD éducation inciteront et participeront à une coordination horizontale entre les RESF locaux, les associations de défense des sans-papiers et les organisations syndicales investies dans ce domaine pour établir une réelle collaboration, échanger informations et stratégies, et faire front commun face aux préfectures et aux ministères.
Le soutien à la lutte des sans-papiers est la garantie d’un renforcement de la capacité de lutte de l’ensemble des travailleurs.
Nous exigeons :
La liberté de circulation et d’installation,
La régularisation de tous les sans-papiers,
L’arrêt immédiat des expulsions,
La libération de toutes les personnes emprisonnées pour défaut de papiers,
La fermeture des centres de rétention,
Un véritable droit d’asile,
L’abolition de la double peine,
Le respect de l’état de droit et la fin des mesures répressives d’exception en France Outre-mer,
La suppression du délit de solidarité à l’encontre des per- sonnes et organisation solidaires des sans-papiers.