Ce Conseil Supérieur de l’Éducation se tient dans un contexte d’accélération des annonces de réformes libérales tant dans l’Éducation nationale que dans la société sur fond de crise écologique et sociale.
Alors que les mobilisations pour les hausses salariales se poursuivent après la grève du 29 septembre, SUD éducation apporte son soutien ferme et entier aux salarié·es en grève dans les raffineries. Leur combat met au jour la colère de l’ensemble des travailleurs et des travailleuses, y compris de l’Éducation nationale. La réquisition des grévistes est une atteinte inacceptable au droit de grève, SUD éducation est prêt à s’engager dans une riposte à la hauteur des attaques.
Les personnels sont encore dans la crainte d’une future réforme des retraites. Pour eux, un report de l’âge de départ en retraite est inenvisageable et inacceptable. Ils savent que d’autres solutions sont possibles, à commencer par la taxation des profits des capitalistes.
SUD éducation se prépare à mettre toutes ses forces dans la bataille contre le report de l’âge de départ en retraite.
Sur les retraites, comme sur les salaires, les personnels de l’Éducation nationale prendront toute leur place dans la mobilisation interprofessionnelle pour mettre un coup d’arrêt à cette politique au service des plus riches qui nuit à l’intérêt général.
Il est utile de rappeler ici l’indignation des personnels face à la répression subie par les lycéen·nes qui se mobilisent. Le 10 octobre, les élèves du lycée Joliot Curie de Nanterre se sont mobilisés pour un retour de l’aide aux devoirs et en soutien à leur enseignant Kai Terada, victime de répression antisyndicale. Ils et elles ont subi une répression brutale et aveugle qui est inacceptable. 14 lycéens ont été placés en garde à vue, l’un d’eux avait 14 ans, un autre lycéen a été hospitalisé suite aux violences exercées par la police. . L’État doit garantir aux lycéen·es le droit de se mobiliser : il faut protéger notre jeunesse et entendre ses revendications.
De plus, la crise énergétique laisse présager un hiver inquiétant, le gouvernement refuse d’agir sur les plus riches et sur les entreprises polluantes dont les profits sont historiques. Au contraire, le plan de sobriété présenté par le gouvernement le 6 octobre montre que ce sont les populations et les services publics sur qui vont peser les mesures de sobriété.
Le champ de l’Éducation nationale n’est pas préservé de ces attaques libérales. Le budget prévu pour 2023 laisse craindre 500 nouvelles suppressions de postes dans le second degré et les annonces quant au devenir du lycée professionnel et du collège sont alarmantes. Le doublement des périodes de stage est un coup terrible pour la voie professionnelle, les élèves vont encore perdre des heures de cours, leur scolarité est sacrifiée. De même sous couvert d’autonomie des établissements, le ministère ouvre la porte à une situation d’inégalité entre les élèves sur le territoire avec des volumes horaires disciplinaires définis localement.
Le collège semble être également dans le viseur du ministère. Les personnels sont inquiets de voir les méthodes à l’oeuvre avec les réformes des lycées, de Parcours Sup, la loi Rilhac, appliquées au collège, c’est-à-dire celles d’un bouleversement brutal, sans concertation, de l’organisation scolaire pour des motifs idéologiques et libéraux. Les personnels sauront se mobiliser pour défendre le collège unique contre les dispositifs de pré-orientation des élèves et d’intrusion de l’entreprise dans le service public d’éducation.
Les concertations qui sont organisées ressemblent davantage à un coup de communication qu’à une véritable concertation. « Notre école, faisons-la ensemble » nous dites-vous, pourtant vous refusez toujours de reporter les épreuves de spécialité à la fin de l’année scolaire alors même que les professeur.es dénoncent unanimement les conséquences pédagogiques néfastes de cette organisation.
Vous réinventez avec ces pseudos concertations le projet d’établissement. Or, le projet d’établissement se borne trop souvent à la déclinaison sans moyens des priorités académiques. Les équipes qui participeront à la concertation devront se battre pour imposer leurs priorités et faire entendre leurs besoins. D’un côté, vous poursuivez les suppressions de postes et vous vous acharnez sur la mise à sac de l’éducation prioritaire et du lycée professionnel, de l’autre vous voulez que les personnels développent des projets en plus de toutes les missions qu’ils effectuent déjà.
Cette politique est inquiétante. D’abord elle participe à externaliser le traitement des difficultés hors de la classe alors qu’il faut impérativement améliorer les conditions du temps scolaire en baissant le nombre d’élèves par classe. Les personnels peuvent élaborer des projets novateurs, leurs effets seront malheureusement limités si les élèves sont trop nombreux en classe pour être aidés et accompagnés par les enseignant·es. De même, les projets ne vont pas résoudre les difficultés des milliers d’élèves en situation de handicap qui ne bénéficient pas d’aide ou pas à la hauteur de leurs besoins.
Ensuite, on observe une mise en concurrence forte entre les écoles et les EPLE avec cette dynamique de projets : quels sont les critères de financement de certains projets au détriment d’autres? Actuellement, l’administration finance en priorité les projets qui répondent à ses directives. Ainsi les personnels doivent remplir des dossiers administratifs nombreux en montrant qu’ils connaissent la novlangue pédagogique du ministère. C’est encore une charge de travail inutile pour les personnels.
Les équipes sont confrontées les unes aux autres, soumises à l’exigence de répondre au mieux aux exigences de l’administration pour voir leur projet financé. Ce type de politique éducative a pour objectif de mettre au pas les personnels, de brimer leur liberté pédagogique et de les soumettre toujours davantage aux directives de leur hiérarchie.
Enfin un des grands dangers de ce projet est de conditionner la prise en charge d’enjeux contemporains fondamentaux au volontariat des équipes. Les luttes contre le dérèglement climatique mais aussi contre les inégalités et les discriminations ne sont pas optionnelles : elles doivent être intégrées au temps scolaire. Ce serait faire peser sur les personnels la responsabilité de participer ou non, bénévolement, à l’éducation des élèves à ces sujets majeurs. On est en-deçà des objectifs affichés d’une école plus juste socialement et plus écologique. De même, on sait que les personnels ne sont pas tous égaux devant l’extension de leur temps de travail, en particulier les personnels qui sont en situation de handicap ou qui assument des tâches domestiques. Le financement affiché par Macron avec la rémunération « au mérite » ou « au projet » aura pour effet de creuser les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes et entre les personnels handicapés et les autres.
Le projet du ministère, consacre une école à deux vitesses dans laquelle les personnels sont rendus responsables des inégalités entre les écoles et les établissements et des difficultés des élèves.
Un autre sujet majeur occupe la rentrée scolaire et une partie de ce Conseil Supérieur de l’Éducation, celui de l’école inclusive. Nous allons étudier un texte portant sur l’Institut National Supérieur de Formation et de la Recherche pour l’Éducation des Jeunes Handicapés et les Enseignements Adaptés.
En cette rentrée 2022, les personnels de l'Éducation nationale font le constat d’un manque de moyens criant pour accompagner les plus de 430000 élèves en situation de handicap scolarisé·s au sein du service public d’éducation. Entre le manque d’AESH, le manque de formation des personnels, le trop grand nombre d’élèves par classe et des bâtiments inaccessibles, l’école est loin d’être inclusive. Les petites adaptations prévues par le décret présenté sont loin d’être suffisantes : il faut d’urgence débloquer de véritables moyens pour former massivement tous les personnels qui le souhaitent pour mettre en oeuvre une école vraiment inclusive, et reconnaître le métier d’AESH en créant pour ces personnels un vrai statut de la Fonction publique.
Pour les AESH,, les conditions de travail sont très précaires avec un salaire largement en dessous du SMIC et qui n'est pas revalorisé, des temps incomplets imposés et non-considérés comme des temps pleins (24h devant élèves).
La mise en place des Pôles Inclusifs d'Accompagnement Localisés (PIAL) dégrade également les conditions de travail des AESH puisqu'ils et elles doivent suivre plusieurs élèves, parfois dans des écoles différentes, engendrant des frais de déplacement et une détérioriation de l'accompagnement des élèves. Les récents rapports de la médiatrice de l’Éducation nationale et de la Défenseure des droits pointaient la responsabilité des Pial dans les difficultés de l’école inclusive. Avec le Pial, ce ne sont pas les besoins des élèves qui définissent l’accompagnement, mais les moyens disponibles dans le Pial. Bien souvent les notifications MDPH ne sont même pas respectées.
Les enseignant·es de 1er et 2nd degré se heurtent à une absence de formation concernant les handicaps et les aides qu'ils et elles peuvent développer pour les élèves. De plus, une fois en poste, les enseignant·es se retrouvent face à l'absence de moyens pour accompagner ces élèves : nombre d'élèves par classe trop élevé pour pouvoir différencier correctement, temps extrêmement long pour que les notifications soient établies par la MDPH, attente pour qu'un·e AESH soit nommé·e, très peu de temps de concertation avec l'AESH, aucune information quant aux adaptations pédagogiques à mettre en oeuvre… Voilà la réalité de l’école inclusive.
Il faut que le ministère prenne acte qu’il n’y aura pas d’école inclusive tant qu’il n’y aura pas de moyens pour la mettre en oeuvre.
Enfin, nous remarquons à nouveau l’absence du Ministre à cette séance comme aux précédentes alors que celui-ci avait annoncé vouloir participer de manière assidue à nos travaux. Comme sur les augmentations salariales, les promesses ne suffisent pas, nous attendons des actes.
Vœu intersyndical réforme LP
La réforme des lycées professionnels que veut imposer le président E. Macron aux élèves et aux personnels de LP constitue un véritable danger pour l'avenir d’un tiers de la jeunesse lycéenne, pour nos métiers et pour la formation professionnelle initiale. L’augmentation de + 50 % de la durée des stages, la définition des cartes de formation réduites aux besoins immédiats et locaux des entreprises, les horaires décidées localement sous couvert d’ autonomie renforcée des établissements ou encore la mise en place d’une demi-journée avenir dès la 5ème seraient pour le ministère non négociables alors même qu'ils concentrent les éléments les plus dangereux de ce projet.
Cette conception de la voie professionnelle scolaire est à l'opposé de ce que nous portons. C'est pourquoi nos organisations FSU, CGT, FO, SUD éducation, SE-UNSA, SNALC, FCPE, Alternative et UNEF demandent au ministre l’abandon de ce projet.
Nos organisations considèrent que la formation professionnelle initiale sous statut scolaire doit être au contraire renforcée afin de prendre une réelle place positive dans le parcours scolaires des élèves et bénéficier d'un vaste plan d'investissement notamment par une augmentation du nombre de personnels, la mise en œuvre d' équipes pluri-professionnelles complètes, un vaste plan de pré-recrutement adossé à une formation solide et une véritable revalorisation salariale.
CSE du 13 octobre 2022 - Déclaration intersyndicale
Monsieur le Ministre,
Les organisations CGT, FSU, FO, SE-UNSA, SNALC, Sud Éducation, FCPE expriment leur étonnement devant votre absence d’expression vis-à-is des annonces sur la réforme de la voie professionnelle.
Les personnels des lycées professionnels découvrent au fil des interventions présidentielles les mesures phares d’une réforme qui s’impose sans concertation : augmentation de 50 % de la durée des stages, gratification des élèves, révision des cartes de formation et autonomie des établissements.
L’augmentation du temps de stage entraînera moins d’heures d'enseignement dans nos lycées. Sous couvert d’autonomie renforcée, des expérimentations pourront être menées permettant de ne pas respecter les grilles horaires disciplinaires nationales. Le français et les maths seraient à privilégier car considérés comme des « savoirs-fondamentaux ».
Que restera-t-il alors pour les autres enseignements généraux qui favorisent l’émancipation des élèves ? La volonté de renvoyer la ventilation du volume d'enseignement général au niveau local impliquerait une remise en cause du caractère national des diplômes professionnels. Nos organisations syndicales sont fermement attachées au principe d'égalité de notre école républicaine et revendiquent le maintien d'une grille horaire nationale pour toutes les filières professionnelles. Elles sont attachées à la dimension émancipatrice de la formation des jeunes à laquelle participent toutes les disciplines.
La diminution du temps scolaire et la disparition de certaines formations avec la restructuration des cartes de formation percuteront notamment les enseignant·es de matières professionnelles pour qui le président a déjà annoncé un vaste plan de reconversion.
Les fermetures et ouvertures de filières dans les établissements seraient décidées uniquement au prisme des besoins locaux de main-d’œuvre ce qui va considérablement réduire les choix de formation des élèves. Nous refusons que l’avenir professionnel de nos jeunes lycéen·nes soit conditionné à des métiers en tension pour la plupart en raison de leurs conditions salariales et de travail déplorables
Pour nos organisations, la carte des formations doit évoluer dans l'intérêt général du pays au prisme des grands enjeux écologiques, de la prise en charge du grand âge, de la nécessaire réindustrialisation, du numérique...
D'aucune façon, elle ne doit se restreindre à la seule mise en adéquation avec les besoins économiques immédiats et locaux des entreprises : chaque jeune, quel que soit le lieu géographique de son lycée professionnel, doit pouvoir trouver la formation de son choix.
Nombreuses sont les entreprises qui ne peuvent pas proposer à nos élèves l'intégralité des plateaux techniques et des activités développées dans leur filière professionnelle. Seuls les lycées professionnels forment à l’ensemble des savoirs et savoir-faire indispensables à l'obtention d’un diplôme et à une meilleure insertion professionnelle ou à des poursuites d’études réussies.
Ce projet veut imposer dès la classe de 5ème de collège un dispositif « avenir » consistant à dédier une demi-journée par semaine pour découvrir les métiers et les entreprises. Pour nos organisations, il faut renforcer les missions et le nombre de personnels d'orientation et préparer les collégien·nes à tous les parcours d’orientation sans exception.
Monsieur le Ministre, nos organisations CGT, FSU, FO, SE-UNSA, SNALC, Sud Éducation, FCPE attendent des réponses de votre part aux inquiétudes d’une profession déjà fatiguée et malmenée par la réforme de 2018.
La réforme des lycées professionnels que veut imposer le président E. Macron aux élèves et aux personnels de LP constitue un véritable danger pour l'avenir d’un tiers de la jeunesse lycéenne, pour nos métiers et pour la formation professionnelle initiale.
Nos organisations appellent à une grève d'ampleur le 18 octobre avec le soutien de la FCPE et à construire collectivement les suites de cette première étape de mobilisation jusqu’au retrait de ce projet de contre-réforme.