Le jeudi 2 septembre, en dévoilant son plan « Marseille en Grand » qui prévoit des investissements dans la santé, dans les transports et dans l'éducation, Emmanuel Macron a annoncé un statut dérogatoire spécial pour 50 écoles marseillaises dès la rentrée 2022 dans les quartiers populaires de la cité phocéenne. Dans ces écoles, les directeurs, directrices, choisiront les enseignant-e-s « autour d'un projet » et disposeront d'une large autonomie pour adapter les horaires, les rythmes scolaires avec la participation "d'acteurs extrascolaires".
En résumé dans ces écoles, censées permettre de mener des projets pédagogiques nouveaux, les enseignant-e-s ne seraient plus affecté-e-s en fonction d'un barème lors des mutations, mais seraient directement recruté-é-s par le directeur ou la directrice. Directeurs ou directrices qui auraient un vrai statut hiérarchique. Comme pour la loi Rilhac sur la direction d'école, Macron et son gouvernement veulent imposer par tous les biais, des chef-fes dans les écoles.
À l'en croire, les problèmes de l'école seraient donc avant tout liés à un mauvais recrutement des enseignant-e-s et pourraient être réglés d'un coup de baguette magique, grâce à un meilleur management et à un profilage des postes. Il lui aura peut-être échappé que rien n'empêche aujourd'hui des enseignant-e-s motivé-e-s de venir travailler dans le périmètre de l'éducation prioritaire et que le manque de stabilité dont pâtissent certaines écoles ne pourra certainement pas être comblé par une systématisation des entretiens de recrutement : ce n'est pas en donnant de nouvelles responsabilités à des directeurs et directrices déjà surchargées de tâches administratives qu'on arrivera à constituer des équipes enseignantes soudées, dynamiques et innovantes. Et ce n'est pas en détricotant la formation initiale des enseignant-e-s qu'on pourra nourrir des questionnements pédagogiques.
Ce que nous promet E. Macron c'est une école publique alignée sur les écoles privées où tout sera géré comme dans une entreprise, or cela n'est pas notre conception de l'école. Ce que veut Macron, c'est casser l'école publique. De plus, il ajoute que ces « écoles innovantes » pourraient être généralisées. C'est une porte ouverte à l'école libérale.
Quid de la rénovation des écoles ?
Macron promet une aide de l'état sous forme de la création d'une société qui sera présidée par le maire de Marseille mais qui restera sous le contrôle de l'Etat. Il conditionne l'aide de l'Etat à une mise au pas des personnels municipaux qu'il juge « trop grévistes et trop absents ». Toutes ces conditions pour une aide qui n'est pas chiffrée.
De quoi on besoin les écoles marseillaises ?
- D'investissements et d'un plan de rénovation sérieux. En effet, il n'est pas rare de constater dans plusieurs écoles marseillaises : un chauffage absent l'hiver, des trous dans le plancher, des fenêtres qui ferment mal, des murs lépreux, un manque de mobilier pour faire asseoir et travailler les enfants, des plafonds qui s'effondrent, des cafards, rats et punaises de lits... La liste est longue.
- De personnels municipaux pour assurer la sécurité des enfants pendant les temps de cantine, à Marseille le taux d'encadrement est l'un des plus faible de France (en maternelle : 1 personne responsable de 25 enfants (1 pour 12 à Lyon), en élémentaire : 1 personne responsable de 50 enfants (1 pour 24 à Lyon)) ; pour assurer l’hygiène des locaux .
- De professeur-e-s des écoles en nombre suffisant pour assurer des conditions d'apprentissages correctes pour les enfants, de création de postes de brigades pour assurer les remplacements, de création de postes de RASED.
Que propose E. Macron dans son plan « Marseille en grand » ?
Pour faire face à une situation catastrophique des écoles à Marseille, Macron répond management et mise en concurrence des personnels et des établissements. Réponse qui n'améliorera en rien les conditions d'enseignements des professeur-e-s et d'apprentissages des élèves dans les écoles de Marseille laissées à l'abandon depuis des années dans une totale indifférence.
Sur le bâti des écoles, Macron répond par la création d'une société qui sera en charge de la rénovation avec une aide financière non chiffrée mais conditionnée.
Les déclarations de Macron sont inadaptées à la situation des écoles marseillaises et ces propositions montrent bien son incompétence et son ignorance des réalités du terrain marseillais. En effet, les écoles marseillaises n'ont nul besoin de chef-fes qui recruteraient des enseignant-es motivé-es, elles ont besoin d'investissements en terme financiers et en terme de personnels municipaux et de l'Education Nationale.
Les déclarations de Macron et sa venue à Marseille n'améliorera en rien l'état catastrophique des établissements scolaires, elles ne servent qu'une politique libérale et une destruction déjà amorcée du service public d'éducation.
À rebours de cette idéologie du « manager providentiel », nous affirmons qu'une politique éducative ambitieuse doit reposer sur une limitation des effectifs par classe, un plan de construction et de rénovation du bâti scolaire, un recrutement massif de personnels, notamment pour reconstituer des réseaux d'aide, et une meilleure formation initiale et continue des enseignant-e-s, qui donne toute leur place aux pédagogies alternatives. Nous ne savons que trop à quoi ressemble l'école qu'Emmanuel Macron et son ministre Jean-Michel Blanquer appellent de leurs vœux : une école sous contrôle, sans liberté pédagogique et sans esprit critique. À Marseille comme ailleurs, nous revendiquons des moyens pour une école qui favorise la réussite et l'épanouissement de tou-te-s les élèves.