17 octobre 1961 : un massacre colonial à Paris

Ce 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d’Algériennes et d’Algériens se dirigent vers le centre de Paris depuis les bidonvilles qui leur servent d’habitats. Le FLN a appelé à une démonstration de masse pacifique pour protester contre le couvre-feu visant exclusivement les « Français musulmans algériens » de région parisienne depuis le 5 octobre. Le Préfet de police de Paris, Maurice Papon, sous l'autorité du premier ministre, Michel Debré, doit empêcher l’accès au cœur de la capitale et pour cela mater dans le sang la manifestation : les blessé·es et les mort·es se comptent par centaines. Des corps sont repêchés dans la Seine jusqu’à plusieurs jours après cette nuit de répression. 12 000 à 15 000 Algérien·nes sont raflé·es. Un millier d’Algérien·nes sont renvoyés « dans leur douar d’origine », livrés à l’armée française à leur arrivée.

Depuis les travaux de Jean-Luc Einaudi en 1991, la connaissance historique du 17 octobre 1961 a progressé. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un crime d’État impliquant les plus hautes sphères du pouvoir. Depuis 1961, les collectifs de militant·es anticoloniaux·ales  et antiracistes n’ont cessé de se battre pour rendre visible ce crime et contraindre l’État à reconnaître sa responsabilité. Cependant, la reconnaissance institutionnelle de ce massacre et de ses responsables n’est toujours pas au rendez-vous. En octobre 2021, à la suite du rapport sur les questions mémorielles concernant la colonisation et la guerre d'Algérie, l’État a organisé une commémoration officielle pour les soixante ans de ce massacre. Cependant, les actions politiques n’ont été que de courte durée. Aujourd'hui encore, l’État refuse de reconnaître le 17 octobre 1961 comme un crime d’État. Le 28 mars 2024, l’Assemblée nationale a voté un texte demandant au gouvernement l’instauration d’une journée de commémoration et la reconnaissance “du massacre commis sous l’autorité du préfet de l’époque, Maurice Papon”. Pourtant, cette année encore, l’exécutif refuse d’organiser une commémoration officielle. De plus, l’Etat s’oppose encore à l’ouverture des archives aux historien·nes, empêchant ainsi le travail de mémoire nécessaire à la reconnaissance de ce crime. SUD éducation affirme l’urgence de produire et transmettre des savoirs qui déconstruisent l’histoire coloniale de la France. 

Le 17 octobre 1961, comme d’autres massacres coloniaux, s’inscrit dans une longue histoire qui se perpétue aujourd’hui. Le sort réservé aux travailleurs et travailleuses sans-papiers et le vote de la loi immigration soulignent la continuité d’une politique raciste portée par l’Etat français. De plus, les violences et crimes policiers à l’encontre des populations racisées et notamment à l’encontre des enfants dans des quartiers populaires montrent que la police continue de tuer. Dans les colonies françaises, les pratiques se perpétuent : les  peuples de Martinique et de Kanaky subissent couvre-feu, état d’urgence et mesures martiales, et des militant·es indépendantes sont de nouveau déporté·es de force dans des prisons françaises. A ce jour, treize kanaks ont été tué·es des mains de l’ordre colonial. Au sein du nouveau gouvernement réactionnaire, la nomination d’un ministre de l’intérieur raciste défendant des positions coloniales et remettant en question l’Etat de droit nous rappelle l’urgence de nous mobiliser contre le racisme d’Etat. 

SUD éducation appelle à se joindre aux commémorations et aux rassemblements  du 17 octobre partout en France. 

SUD éducation revendique que : 

  • le 17 octobre 1961 soit reconnu comme massacre colonial et crime d’État car c’est une nécessité historique et politique ; 
  • des programmes scolaires qui déconstruisent l’histoire coloniale et raciste de la France et qui reconnaissent le 17 octobre 1961 comme un massacre colonial et un crime d’Etat  soient mis en place ; 
  • les archives de la Guerre d’Algérie et celles du 17 octobre 1961 soient ouvertes sans restrictions d’aucune sorte et leur accès facilité ;
  • des mesures de réparations, symboliques comme matérielles, soient prises en direction des victimes du 17 octobre 1961, de leurs familles et descendant·es.

Proposition de ressources pédagogiques : 
Fiche analyse :

17 octobre 1961, un massacre colonial à Paris – Fiche analyse de SUD éducation